Terrence Malick

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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AtCloseRange
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par AtCloseRange »

cinephage a écrit :Digressions injustifiées sur la nature, ici, là, encore ici...
Je suis beaucoup plus contrasté que toi sur le cinéma de Malick que je trouve par moments très beau (la première heure de La Ligne Rouge ou la fascination visuelle qu'exerce Days of Heaven) mais c'est vrai que ce côté documentaire animalier chez lui ne me convainc pas vraiment.
Wagner
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par Wagner »

Il n'y a pas chez Malick des digressions sur la nature d'un côté et des plans admirablement composés de l'autre, il y a juste des plans de nature qui sont signifiants par eux-mêmes.
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par cinephage »

Wagner a écrit :Il n'y a pas chez Malick des digressions sur la nature d'un côté et des plans admirablement composés de l'autre, il y a juste des plans de nature qui sont signifiants par eux-mêmes.
Certes, ils sont signifiants par eux-même, mais cette signification ne s'inscrit pas, ou mal à mes yeux, dans le schéma global du film. D'où l'effet de digression qui me gêne (plus par son accumulation et son systématisme que sur tel ou tel plan animalier, d'ailleurs). La superbe composition du film participe également de cette gêne : je n'attends pas d'un film qu'il ne soit qu'un livre d'images, même belles. Cette beauté ne me semble pas toujours servir le film, ce serait plutôt le contraire (le récit prétexte à un défilé de belles images).
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Demi-Lune
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par Demi-Lune »

cinephage a écrit :Digressions injustifiées sur la nature, ici, là, encore ici... Un esthétisme certes réussi, mais qui ne sert ni ne dessert son film : quel que soit son sujet, Mallick le filme de la même façon, sans s'y intéresser.
Une voix off planante qui mélange des digressions poétiques (qui me paraissent bien vaines, décidément, à chaque film), des commentaires détachés et oscillant entre le monologue pontifiant et la vaticination pesante, vraiment, je n'arrive pas à me laisser emporter.
Tu te sentiras peut-être moins seul si je te dis que je suis tout autant gêné que toi par ces éléments, et que je n'arrive décidément pas à m'entousiasmer pour l'oeuvre entière de Malick. J'ai un sentiment pour le moins paradoxal : d'un côté, je peux tout à fait être impressionné par le travail pictural d'un Days of Heaven et voir en ce film une authentique oeuvre d'art, et dans le même temps être profondément ennuyé par ce même film. Pour moi, si Malick est un immense formaliste (et Days of Heaven son travail peut-être le plus accompli en la matière), sa propension à recycler inlassablement les mêmes idées philosophiques naïves de film en film, et à se désintéresser totalement d'une quelconque histoire à raconter au profit d'un style contemplatif lourd et d'un rythme languissant qui font l'essence de son cinéma, m'agace vraiment. Rien à faire, son cinéma, qui me semble surtout sensitif, ne me transporte jamais (tout l'inverse d'un Lynch, par exemple). Ses histoires ne débouchent vers rien... particulièrement dans Les Moissons du Ciel. Dans Les Moissons du Ciel, la voix-off de la gamine, par exemple (qui fait office, pourtant, d'unique fil narratif parce qu'il n'y a pratiquement aucune histoire à raconter), à qui Malick fait dire des choses pseudo poétiques mais surtout très vides, m'a été insupportable de prétention. Et autant Malick peut composer des plans de toute beauté sans artifices, autant ses digressions interminables sur des épis de blé qui bougent lentement au gré du vent, ou ses innombrables macro fascinés sur les animaux, me laissent vraiment de marbre, et me donnent de lui l'image - peut-être erronée - d'un réalisateur très sûr de son talent. Ses deux premiers films, qui en souffrent cruellement à mes yeux, ont au moins l'avantage d'être de courte durée ; mais avec Le Nouveau Monde, cela devenait carrément impossible. Et parfois, je dois me retenir violemment pour ne pas qualifier son cinéma d'auteurisant.
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Flol
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par Flol »

Demi-Lune a écrit :Et parfois, je dois me retenir violemment pour ne pas qualifier son cinéma d'auteurisant.
Et...c'est mal ?
Wagner
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par Wagner »

Les plans de blé ne sont pas là pour faire joli, ils racontent l'histoire des personnages, c'est la même chose. Days of Heaven est d'ailleurs plus explicite que jamais sur ce point avec l'invasion des sauterelles.

la Ligne rouge n'est qu'un film de guerre supplémentaire où des soldats apeurés découvrent la beauté du monde au moment de le quitter.

Le Nouveau monde parle de l'espoir d'un Anglais de trouver le paradis perdu sur le nouveau continent.

Je ne vois pas en quoi les incursions de la nature sont gratuites au regard de cette thématique.
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par cinephage »

Wagner a écrit :Je ne vois pas en quoi les incursions de la nature sont gratuites au regard de cette thématique.
La popularité de Mallick chez de nombreux cinéphiles indiquent que je peine à voir une chose évidente pour beaucoup. Mais pour moi, en omettant de montrer la moindre interaction entre la nature et ceux qui s'y trouvent, Mallick n'établit pas le lien entre eux. Pour moi, les soldats de la Ligne Rouge ne découvrent rien. C'est Mallick cinéaste et cinéphage spectateur qui s'émerveillent de la beauté de la nature, pas les soldats.

Et pour Days of Heaven, si les sauterelles jouent un rôle, ce n'est pas le cas des oies, outardes et autres cervidés qu'on voit longuement dans le film.

C'est du ressenti, mais ces éléments sont trop détachés les uns des autres pour moi. La voix off n'a que très peu de liens avec le film, les personnages ont peu de liens avec le cadre naturel dans lequel ils évoluent. J'y vois la branlette de l'auteur, pas l'émerveillement du personnage.

Enfin, bref, je pense avoir explicité mon ressenti, j'ai bien conscience que c'est un point de vue minoritaire, mais c'était ma seconde tentative avec Mallick, il n'y en aura pas de troisième avant un bon moment...
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par Wagner »

cinephage a écrit :C'est Mallick cinéaste et cinéphage spectateur qui s'émerveillent de la beauté de la nature, pas les soldats.
...
c'est pourtant clairement le cas, la mise en scène ne laisse aucun doute à ce sujet à de nombreuses reprises: Malick décrit le ressenti des soldats et scrute leurs réactions comme d'autres l'ont fait avant lui (cf Cornel Wilde)

Pour les plans d'animaux en surnombre dans Days of heaven, j'avoue que ça m'a plus gêné dans Badlands alors que dans son deuxième film ils s'intrègrent avec davantage d'harmonie dans une vision d'ensemble.

Les plans d'animaux en surnombre, c'est un péché mignon qui peut gêner sans détruire la vision de nombreux autres films; cf Walkabout, Night of the Hunter et cie
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par cinephage »

Justement, dans Night of the Hunter, les animaux sont convoqués à un moment précis, ce qui correspond à un point du récit. La fuite des enfants prend un aspect de récit initiatique, de fuite au cours du temps, mais aussi de confrontation aux peurs enfantines (la séparation des parents, primordiale, mais aussi de la nuit, des animaux nocturnes...). Le crapaud, le hibou, jouent un rôle particulier.
Enfin, là-dessus, tu en sais beaucoup plus que moi, mais je n'ai pas eu d'impression d'animaux posés au hasard, au gré de la fantaisie de Laughton, pour faire joli (même si ces plans sont de toute beauté).

Ces animaux ne viennent pas toutes les dix minutes, comme ceux de Mallick, sur un mode presque aléatoire, garnir le film d'un panorama animalier en guise de signature.

Le recours à l'animal, ou même au plan de coupe, d'atmosphère, n'a rien de rédhibitoire, lorsque son emploi parait justifié, jouer un rôle précis, dans la structure du film, du récit. Là, je n'ai aucunement cette impression... Animaux et panoramas sont interchangeables (on nous montre un canard, puis un héron, puis une pintade, mais toutes sortes d'animaux pouvaient aussi apparaitre, sans que le film en soit modifié) dans l'agrément d'un récit inutilement étiré et de peu d'intérêt.
Certes le récit n'est pas tout, mais comme je l'ai précisé, la poésie de Mallick ne m'atteint guère... Il ne reste pas grand chose, du coup.
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par homerwell »

cinephage a écrit : Ces animaux ne viennent pas toutes les dix minutes, comme ceux de Mallick, sur un mode presque aléatoire, garnir le film d'un panorama animalier en guise de signature.

Le recours à l'animal, ou même au plan de coupe, d'atmosphère, n'a rien de rédhibitoire, lorsque son emploi parait justifié, jouer un rôle précis, dans la structure du film, du récit. Là, je n'ai aucunement cette impression... Animaux et panoramas sont interchangeables (on nous montre un canard, puis un héron, puis une pintade, mais toutes sortes d'animaux pouvaient aussi apparaitre, sans que le film en soit modifié) dans l'agrément d'un récit inutilement étiré et de peu d'intérêt.
Certes le récit n'est pas tout, mais comme je l'ai précisé, la poésie de Mallick ne m'atteint guère... Il ne reste pas grand chose, du coup.
:)
J'aime beaucoup les films de Mallick, tous, je les revoie régulièrement avec un engouement sans cesse accru.
Je n'ai pas le même ressenti à propos des plans d'animaux. Je ne les prend ni comme une signature, ni comme de la poésie. Cela me fait plus penser à une ponctuation, des petits intermèdes plus ou moins réguliers qui sont autant de respirations. De cette manière, le récit est aéré, les petites digressions sont comme de réinitialisations de la rétine, avant d'aller plus loin dans l'histoire. Je n'y vois rien non plus de philosophique.
Cette façon me fait penser à un autre cinéaste, pourtant éloigné, c'est Ozu. Sa réalisation est ponctuée de plans fixes et toujours parfaitement cadrés avec des cheminées industrielles, du linges qui sèche au vent, des enseignes lumineuses, des façades d'immeubles... sans que cela ne serve nécessairement le récit. C'est comme des points virgules !
Et curieusement, j'ai l'impression de plonger encore plus profondément dans le film.
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par cinephage »

Je comprends, et je pensais d'ailleurs à Ozu aussi en répondant précedemment.
Pour moi, il y a justement un monde de différence entre la modestie des inserts qui placent ses récits dans le quotidien d'une ville anonyme, qui replacent le drame individuel dans l'indifférence qui les entoure, par des plans justement assez banals, et la grandiloquence des inserts de Mallick : chez l'un c'est effectivement une respiration, une ponctuation. Mais l'autre ponctue avec des caractères en gras et en taille énorme : si les virgules sont plus grosses que les mots qu'elles espacent, peut-on encore dire qu'elles servent à ponctuer ou faire respirer le texte ?

Cela dit, je pense avoir suffisamment étayé mon impression, et préfère lire des avis plus enthousiastes comme le tien ou celui de wagner. On a à mes yeux toujours de meilleures raisons d'aimer les films que de ne pas les aimer.
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Re: Notez les films naphtas - Février 2010

Message par O'Malley »

Pour en revenir brièvement à Malick, j'ai l'impression que Terrence Malick épouse dans tous ses films le point de vue de la Nature: le sujet malickien c'est l'Homme, ses combats, ses contradictions, sa folie, ses passions, vue par la Nature ( donc d'une manière objective) avec laquelle il fait néanmoins corps (il s'agit d'un cinéma panthéiste malgré tout sauf peut-être La ligne rouge qui semble opérer une rupture entre l'humanité et son environnement). Et finalement la voix-off, même si elle émane d'un protagoniste de chaque film, n'est-elle pas le porte-voix de ce regard apaisé, virginal, "naturel"...
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AtCloseRange
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Re: Terrence Malick

Message par AtCloseRange »

Pour les fans de Malick, il existe un documentaire italien sur Malick:
Rosy Fingered Dawn
http://www.imdb.com/title/tt0332741/

Plutôt un fil sur ses films que sur Malick lui-même d'après ce que j'ai lu.
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Re: Terrence Malick

Message par Pete Dayton »

Le grand Jack Fisk revient sur sa carrière en tant que production designer (superviseur artistique), et plus particulièrement sur sa collaboration avec Terrence Malick pour Badlands et Days of Heaven. Très intéressant. Pour rappel, outre les cinq films de Malick, il a officié entre autres sur Phantom of the Paradise, Carrie, The Straight Story, Mulholland Drive et There Will Be Blood... Belle carrière. :o
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Re: Terrence Malick

Message par AtCloseRange »

Pete Dayton a écrit :Le grand Jack Fisk revient sur sa carrière en tant que production designer (superviseur artistique), et plus particulièrement sur sa collaboration avec Terrence Malick pour Badlands et Days of Heaven. Très intéressant. Pour rappel, outre les cinq films de Malick, il a officié entre autres sur Phantom of the Paradise, Carrie, The Straight Story, Mulholland Drive et There Will Be Blood... Belle carrière. :o
Euh, quelqu'un a une loupe?

Sinon, pour les infos people: c'est aussi le mari de Sissy Spacek (elle a d'ailleurs travaillé avec lui en tant que "set dresser" sur "Phantom...").
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