Avec la sortie des prochains DVD chez Carlotta, ça peut utile...
En attendant, je me suis plaisir à la cinémathèque avec la Rétro sur Kawashita
La cérémonie. ( 1971 )
Une charge assez incroyable sur le Japon des années 60-70 où les traditions archaïques et dépassées n’ont d’égales que la passivité et la lâcheté de la génération de l’après guerre.
Oshima se lance dans une satire où les valeurs familiales sont détruites à grand coup de scènes pesantes que composent une narration uniquement centrées sur les cérémonies, histoire d’en rajouter une couche sur une société coincée dans des rituels absurdes et hypocrites ( mariage, enterrements, fiançaille ). Les moments de malaise sont légion et évitent au film d’être ennuyeux alors que la mise en scène est lente et exigeante. Cela dit, l’humour n’est pas exclut à plusieurs reprises et on rit même franchement à plusieurs moments. Celui du mariage avec l’épouse fantomatique ( et la nuit de noce qui suit ) est particulièrement féroce en bifurquant dans la parabole décalée où se croise la politique, la mort, le sexe et la famille.
En tout cas, Oshima n’a pas peur de transformer ses compatriotes en aliénés qui ne connaissent que l’inceste, le mensonge, les apparences, le suicide ou la manipulation. Un portrait peu reluisant qui subit parfois quelques lourdeurs de style ( la musique en fait clairement trop ) ou d’interprétation qui peut manquer de nuance.
Mais ça reste un œuvre essentielle dont l’esthétisme virtuose ( quel scope ! quelles couleurs ! quel sens de l’espace ) participe au climat fascinant et dérangeant de ce film d’Oshima qui n'est pas, tout de fois, son film le plus accessible.
Le petit garçon ( 1969 )
Pour une raison particulière le film m'a fait penser à une œuvre de transition bien que je connaisse pas encore ses première réalisations. Mais on sent que le film a le cul entre 2 chaises. Oshima est partagé entre ses aspirations formelles passées et une volonté d'être plus posé, plus mature, plus tendre aussi.
L'histoire part donc d'une fait divers : un père et sa deuxième femme utilisant leur garçon de 10 pour des arnaques où il simule des accidents de voitures.
Les personnages sont bien écrit, assez fouillés et principalement le jeune héros complexe et intriguant. De ce coté là, l'acteur est excellent et apporte toute les nuances nécessaires et difficiles pour faire vivre le personnage ( les autres acteurs sont très bien aussi au passage ).
Oshima continue de dresser en tout cas une nouvelle fois le portrait de la famille japonaise en marge et particulièrement ici de la réussite économique de l'époque. Le ton est plus léger ( et donc subtil ) que l'accoutumée mais il y a toujours une certaine violence dans les propos surtout encore une fois contre l'hypocrisie et la lâcheté des adultes. Le réalisateur reprend d'ailleurs une scène clé du
Chant du Missouri de Minnelli pour traduire le dégout de l'enfant envers les grandes personnes.
Seulement comme je le disais la mise en scène et le point de vue de Oshima est trop hésitante et le film laisse au final trop indifférent sans vraiment ennuyer mais sans passionner non plus tandis que certains effets de stylisation de l'image ne m'ont pas paru tout le temps justifié ( des passages en noir et blanc principalement ).
Une demi réussite donc.
L'obsédé en plein jour ( 1966 )
La grosse claque !!!
Une monstruosité formelle jamais avare en audaces et expérimentations qui stupéfient encore aujourd'hui. Mais à l'inverse d'un Godard qui ne sait rarement que faire de ses nombreuses idées, Oshima parvient parfaitement à les intégrer au récit.
Et justement l'histoire est là aussi d'une grande violence psychologique qui évolue de plus en plus vers une ambiguïté morale qui donne lieu à une tension palpable dans les relations entre les personnages féminins digne des meilleurs Bergman.
Il y aurait beaucoup à dire sur ce film à commencer par ses procédés filmiques et sa narration qui prennent à malin plaisir à brouiller les pistes alors qu'on pensait commencer à comprendre le fonctionnement de sa réalisation. L'utilisation virtuose, par exemple, de la lumière ( soit très sombre soit complètement surexposée ) se contredit régulièrement avec pour résultat de laisser encore plus le spectateur dans une impasse qui le pousse à revoir les limites entre le blanc et le noir, bien et le mal, la vérité ou le mensonge. Tout le discours final dans le train avec la caméra tremblante et panotante ( ça existe comme mot ? ) entre les visages, les sources de lumières extérieurs et le noir des banquettes est d'une force exemplaire.
C'est en grand film déstabilisant dont la richesse n'en finit plus d'étonner y compris après le visionnage quand on essaye de décortiquer le film. Je pense notamment aux flash-backs introduits par certains personnages mais qui sont en fait raconté par d'autre.
Celà n'exclut pas quelque fausse note avec un symbolisme un peu forcé ( dont une idée reprise à
M le maudit ), une interprétation inégale et surtout un contexte sociale et politique à peine esquisser alors qu'il y avait un gros potentiel.
Ça ne reste que quelques réserves car encore une fois, le film est une véritable bombe plastique, narrative et morale.
Si le reste de sa première période est de ce niveau, ça risque d'être de grands moments de cinéma.