Alain Resnais (1922-2014)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Le prisonnier
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Message par Le prisonnier »

Gounou a écrit :
Le prisonnier a écrit :Je trouve que la science-fiction dans ce film n'est qu'un prétexte scénaristique pour pouvoir proposer une narration éclatée. Et ça gêne beaucoup l'amateur du genre que je suis !
Prétexte ou pas, tu t'attendais vraiment à un film de S-F ?
Il est cité dans le bouquin de Michel Chion: Les films de science-fiction...
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Re: Re:

Message par Gounou »

Le prisonnier a écrit :
Gounou a écrit : Prétexte ou pas, tu t'attendais vraiment à un film de S-F ?
Il est cité dans le bouquin de Michel Chion: Les films de science-fiction...
Ben après, voilà... ça me rappelle certains critiques déçus de ne pas trouver en 2046 de Wong Kar Wai un "vrai film de science-fiction" ! De certains artistes, je n'attends pas qu'il se plient à des codes... mais plutôt qu'ils plient les codes à eux :wink:
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Watkinssien
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Re: Alain Resnais

Message par Watkinssien »

Tancrède a écrit :hier, j'ai vu Muriel, je crois n'avoir jamais vu de film plus opaque, plus alambiqué, plus guindé, plus désincarné.
à moins d'avoir une prédilection pour l'amphigouri, je ne comprends pas comment on peut aimer ce film.
Certes, c'est un film exigeant !

Moi, j'adore ce film par son refus de la facilité. Et par son évocation hallucinante sur la thématique de la mémoire, sujet capital dans l'oeuvre de Resnais.
Mais également, c'est un film qui me fascine par son montage totalement maîtrisé, allié à une mise en scène en puzzle, quasiment kaléidoscopique. Cette stylisation extrêmement déroutante reste pourtant un moyen cohérent pour appréhender les soubresauts du souvenir.

De plus, le film est un véritable tour de force, puisqu'il ravive les souvenirs sans qu'il n'y ait aucun flash-back, alors que l'intrigue chronologique est complètement éclatée par de brutales mais percutantes ellipses, que la gestion de l'espace est balayée par une exploration d'angles de prises de vue à la fois chaotiques et millimétrés.

Ce film est une "difficile splendeur" où l'interprétation du spectateur est reine, tout en appréciant pour ma part la complexité cinématographique de l'ensemble.
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Re: Alain Resnais

Message par Tancrède »

ok d'accord.
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Watkinssien
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Re: Alain Resnais

Message par Watkinssien »

Tancrède a écrit :ok d'accord.

Je ne sais pas comment le prendre : est-ce que tu comprends pourquoi j'ai aimé ou est-ce que tu penses que je dis n'importe quoi ?

:)
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Re: Alain Resnais

Message par Tancrède »

Watkinssien a écrit :
Tancrède a écrit :ok d'accord.

Je ne sais pas comment le prendre : est-ce que tu comprends pourquoi j'ai aimé ou est-ce que tu penses que je dis n'importe quoi ?

:)
je comprends et on est d'accord sur la nature du film en fait puisque ce sont exactement les raisons qui font que moi, je ne l'aime pas.
julien
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Re: Alain Resnais

Message par julien »

Dans la forme Resnais c'est souvent passionnant par contre dans le fond... L'histoire, les dialogues et les sentiments qui animent les personnages... c'est souvent casse burne et un peu trop "collet monté"
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Message par Boubakar »

Mélo (1986)

Alain Resnais ne cherche pas à cacher un certain homme au théâtre et à ses artifices (le film commence et se finit par un lever/fin de rideau) : les décors quasiment tous fait de tocs, ni le fait que le tournage ait dû se faire entièrement en studio apporte une certaine élégance.
Ayant vu un seul film de Resnais auparavant, Hiroshima mon amour, j'avoue ne pas savoir à quoi m'attendre, d'autant que les première secondes, le diner entre les trois personnes, m'a un peu "stupéfait".
Le film a une grande qualité, qui sont ses dialogues fabuleux, on les écoute comme on boirait du petit lait tellement c'est un régal à entendre. Et on a droit à un trio de comédiens grandioses, surtout Dussolier, avec un très long monologue sur l'amour. On sent que c'est très écrit, mais ça passe tout seul, malgré ce côté artificiel qui peut s'en dégager.
Et le film a un certain humour, surtout du côté de Sabine Azéma, qui est vraiment irrésistible ("Tu veux faire une culbute ? Alors, je fais une culbute !" Et la voilà en train de se rouler par terre :lol: ), ainsi que les pensées d'André Dussolier, qui a l'air bêta.

Reste que je ne suis pas trop fan de l'apparition de Fanny Ardant, certes décisive dans le dernier acte, mais je ne suis pas fan de son phrasé, c'est trop pour moi. :oops:
Malgré ça, c'est un très bon, et très beau film, avec une écriture qui le rend tout à fait plaisant.
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Re: Alain Resnais

Message par Alligator »

Stavisky... (Alain Resnais, 1974) :

http://alligatographe.blogspot.com/2010 ... visky.html

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La photographie très baveuse de Sacha Vierny n'entame pas trop le plaisir de suivre ce film, plaisir qui reste tout de même plutôt modéré. C'est le sujet même du film qui manque personnellement d'intérêt. Le parcours de cet escroc de la finance est assez édifiant certes. Mais disons que ces mondes là ne me fascinent guère. Et ce ne sont pas les aventures plus contemporaines de Bernard Tapie par exemple qui modifieront quoique ce soit à ce constat.

L'affaire Stavisky n'est pas uniquement une affaire de gros sous mais a servi également de prétexte ou de lien plus ou moins direct avec les débats politiques français de l'entre-deux-guerres où l'anti-parlementarisme propre à la IIIème république venait se nourrir de toutes les histoires crapoteuses des politiciens et hommes d'affaire corrompus. J'imagine qu'Alain Resnais a conçu ce film comme un prétexte à tracer des éléments caractéristiques de l'époque politique et sociale, la trajectoire de Stavisky devenant une sorte d'illustration de tous les maux de cette société malade de cette première guerre mondiale mal digérée.

J'en suis encore là de ma réflexion car le film n'est pas d'une lisibilité tout à fait éclairante. Rien d'évident avec tous ces vas-et-viens incessants entre le passé, le présent et le futur. La construction narrative se complexifie encore avec les allées et venues entre l'histoire de Stavisky et le séjour de Trotsky en exil dans le sud de la France. Loin de moi l'idée de rejeter la responsabilité d'une éventuelle mauvaise compréhension sur les méandres du scénario car au final tout cela parait lisible mais disons tout de même que le puzzle met un peu de temps à se reconstituer. Ce n'est pas facile, même pour un historien. J'imagine que pour ceux qui ne connaissent pas la période, le film peut paraitre abscons.

Au delà de ces considérations, peut-être qu'une légère déception s'est manifestée après avoir découvert ce générique très impressionnant où de grands noms se côtoient, pas uniquement dans la distribution des rôles. De Jorge Semprun au scénario, jusqu'à Jurgenson au montage, Vierny à la photographie, Alexandre Mnouchkine à la production, Resnais ne semble rien se refuser.

Le trombinoscope en impose également.
Jean-Paul Belmondo va entrer dans sa période Bébel. Il n'est pas loin du sommet de sa popularité et d'ailleurs certaines scènes laissent apparaitre les gimmicks de sa gestuelle exubérante, un peu vulgaire. Cela sert considérablement le personnage, un va-nu-pied qui a eu l'occasion de goûter au luxe, au pouvoir de l'argent et qui n'a pas l'intention de retirer sa main du pot de confiture, en dépit des fantômes de culpabilité qui le hantent parfois. Stavisky est un homme du peuple. C'est dingue ce que sa personnalité a de commun avec celle de Bernard Tapie, son parcours, son appétit, sa puissance et ses faiblesses, cette fascination pour la manipulation des apparences. Un rôle qui allait comme un gant à ce Belmondo démonstratif, fier vainqueur du box office.

A ses côtés j'ai noté la présence spectrale et quelque peu lugubre de François Périer, rêche et sévère. J'ai pu apprécier la diction toujours aussi incroyable de Michel Lonsdale ou le charme inquiétant et naturel à la fois de Claude Rich. Et quel plaisir de retrouver Charles Boyer, quelle voix, quelle prestance, quelle classe cet homme! Il me faudrait en énumérer beaucoup d'autres. Le film regorge de plus ou moins grandes participations remarquables.

Pourtant la sauce ne prend pas, en ce qui me concerne du moins. Le ballet de figures et le parcours de Stavisky ne suscitent qu'un peu de curiosité mais j'ai eu un mal fou à m'imprégner de cette histoire. Dommage.
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Re: Alain Resnais

Message par Amarcord »

Watkinssien a écrit :
Tancrède a écrit :hier, j'ai vu Muriel, je crois n'avoir jamais vu de film plus opaque, plus alambiqué, plus guindé, plus désincarné.
à moins d'avoir une prédilection pour l'amphigouri, je ne comprends pas comment on peut aimer ce film.
Certes, c'est un film exigeant !

Moi, j'adore ce film par son refus de la facilité. Et par son évocation hallucinante sur la thématique de la mémoire, sujet capital dans l'oeuvre de Resnais.
Mais également, c'est un film qui me fascine par son montage totalement maîtrisé, allié à une mise en scène en puzzle, quasiment kaléidoscopique. Cette stylisation extrêmement déroutante reste pourtant un moyen cohérent pour appréhender les soubresauts du souvenir.

De plus, le film est un véritable tour de force, puisqu'il ravive les souvenirs sans qu'il n'y ait aucun flash-back, alors que l'intrigue chronologique est complètement éclatée par de brutales mais percutantes ellipses, que la gestion de l'espace est balayée par une exploration d'angles de prises de vue à la fois chaotiques et millimétrés.

Ce film est une "difficile splendeur" où l'interprétation du spectateur est reine, tout en appréciant pour ma part la complexité cinématographique de l'ensemble.
Et puis... Delphine Seyrig !!! Quelle actrice passionnante ! Quelle voix ! Quelle classe ! Une autre qu'elle aurait fichu le film complètement en l'air !
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Re: Re:

Message par Federico »

Le prisonnier a écrit :
Miss Nobody a écrit :Je t’aime, je t’aime
Film étrange et méconnu où Renais flirte avec la science-fiction, « Je t’aime, je t’aime » mérite pourtant amplement qu’on s’y attarde. Une expérience curieuse cherchant à contrôler le temps sert de prétexte à un voyage dans la mémoire d’un homme-cobaye, détruit par une histoire d’amour singulière, à la fois glauque et passionnée, qui le conduira deux fois à la mort. Dans une atmosphère cauchemardesque d’une autre époque et d’une autre dimension, emprunte d’une mélancolie peut être un peu trop pesante, Claude Rich se perd dans un inconscient labyrinthique, dans un passé boueux qu’il est à présent condamné à revivre. A l’image de son amour souffreteux, de ses phrases sombres et spirituelles, de sa mise en scène éclatée, « Je t’aime, je t’aime » est une œuvre déstabilisante, intellectuelle, à la fois belle et profondément tragique.
Je trouve que la science-fiction dans ce film n'est qu'un prétexte scénaristique pour pouvoir proposer une narration éclatée. Et ça gêne beaucoup l'amateur du genre que je suis ! Le film n'a pas besoin de sa longue introduction, de tout ce décorum pseudo-scientifique, complètement inutiles. D'ailleurs d'autres cinéastes (je pense bien sûr à Lynch) arrivent très bien à faire des films labyrinthiques sans justification scénaristique.
Je n'ai pas accroché au film (je pense que j'ai un problème avec le cinéma de Resnais), que je trouve distant et vain, à l'image de ces dialogues bien trop écrits. Je ne retiens que la magnifique musique de Penderecki, et cette incroyable lettre surréaliste que lit le personnage de Claude Rich (lettre dont j'aimerai bien trouver le texte...)
J'ai également de plus en plus de mal avec le cinéma de Resnais, y compris avec des oeuvres que j'avais plutôt aimées par le passé. Mais Je t'aime, je t'aime, malgré ses défauts est très émouvant. Une des rares incursions du cinéma cartésien français dans la SF, même si il s'agit avant tout d'une oeuvre poétique et mélancolique (à rapprocher, même si je mets ce dernier bien plus haut, de l'atmosphère du Solaris de Tarkovski). Un film qui doit aussi beaucoup au scénario de Jacques Sternberg. L'éditeur Eric Losfeld en avait publié le découpage en 1969, accompagné de nombreuses photos, superbe bouquin épuisé depuis des lustres mais qu'on doit pouvoir encore dégotter d'occas'.

Quant au texte de la lettre pataphysique et oulipienne, le voici :

Cher monsieur,
Nous avons bien reçu votre honorée du 24 courant et nous adraptons d’y druiser filistre. Nous sommes enclaptés de trécoindre que vous n’avez jamais surflenger le doulet pustrule que nous vous avons galopté le 12 de ce pystre. Etant donné les amistrèzes, nous allons sans galare vous trifler un autre flyndre et nous articlusons que vous le lomifrez cette tyre dans les ostres les plus grafs.
Avec tous nos ramyres les plus clestrés, nous vous creptons d’ensilencer nos estancyles ptérofuges.


Inutile de préciser que lue par Claude Rich, c'est un régal total. A part lui, seul l'autre grand Claude (Piéplu) aurait pu réussir à prononcer de telles phrases absconses avec le sérieux d'un clerc de notaire allumé.

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Dernière modification par Federico le 12 sept. 10, 23:56, modifié 1 fois.
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Re: Alain Resnais

Message par Amarcord »

Une question qui me vient soudain... Que fait Resnais ici, dans le topic des classiques "naphta" (en compagnie de ces chers disparus), alors qu'il est toujours en vie et, surtout, toujours en activité ? Quelqu'un a la réponse ?
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Re: Alain Resnais

Message par Miss Nobody »

Amarcord a écrit :Une question qui me vient soudain... Que fait Resnais ici, dans le topic des classiques "naphta" (en compagnie de ces chers disparus), alors qu'il est toujours en vie et, surtout, toujours en activité ? Quelqu'un a la réponse ?
Un certains nombres de ses films étant antérieurs à 1980, Alain Resnais est considéré comme un réalisateur de classiques ici-bas. :idea:
Ce qui n'empêche pas à ses films les plus récents de franchir la barrière...
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Re: Alain Resnais

Message par Amarcord »

Miss Nobody a écrit :
Amarcord a écrit :Une question qui me vient soudain... Que fait Resnais ici, dans le topic des classiques "naphta" (en compagnie de ces chers disparus), alors qu'il est toujours en vie et, surtout, toujours en activité ? Quelqu'un a la réponse ?
Un certains nombres de ses films étant antérieurs à 1980, Alain Resnais est considéré comme un réalisateur de classiques ici-bas. :idea:
Ce qui n'empêche pas à ses films les plus récents de franchir la barrière...
Ah bon ? Pas sûr que cette explication tienne la route : en effet, Chabrol, qui a démarré grosso modo en même temps que Resnais (et à qui on peut donc appliquer exactement la même remarque que tu fais pour Resnais - à savoir, qu'un certain nombre de ses films sont également antérieurs à 1980, ce qui peut légitimement faire de lui un réalisateur de classiques - aujourd'hui plus que jamais d'ailleurs...) figure (indépendamment de son récent décès), quant à lui, dans les classiques d'aujourd'hui... Je prends l'exemple de Chabrol, parce que c'est justement en voulant voir ce qui se disait, suite à son décès, que j'ai remarqué cette "inégalité" de traitement entre les deux... Rien de bien méchant, mais j'avoue que ça m'a intrigué, et je me suis demandé s'il y avait une raison objective à cela...
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Re: Alain Resnais

Message par Strum »

Amarcord a écrit :j'ai remarqué cette "inégalité" de traitement entre les deux... Rien de bien méchant, mais j'avoue que ça m'a intrigué, et je me suis demandé s'il y avait une raison objective à cela...
Mais de quoi parles-tu ? :mrgreen:
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