Akira Kurosawa (1910-1998)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Anorya
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Anorya »

Quasiment un immense film qui touche au chef d'oeuvre pour moi. :D
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Demi-Lune
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Demi-Lune »

Anorya a écrit :Quasiment un immense film qui touche au chef d'oeuvre pour moi. :D
Et encore, on avait dû batailler sévère pour faire approcher ta note du maximum ! :mrgreen:
Anorya
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Anorya »

Demi-Lune a écrit :
Anorya a écrit :Quasiment un immense film qui touche au chef d'oeuvre pour moi. :D
Et encore, on avait dû batailler sévère pour faire approcher ta note du maximum ! :mrgreen:
Oui mais le film vieillit très bien, lentement avec le recul. Et ça, c'est la marque des grands films. :D :wink:
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Strum
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Strum »

Alligator a écrit :Un peu long, ce film entend laisser monter la tension. Le lien avec "Le paradis et l'enfer" est évident. Kurosawa cherche à filmer sur les corps cette montée de tension, à ce que le suspense soit incarné. Et il y arrive pas mal en effet. Cependant, une vingtaine de minutes en moins aurait donner un autre souffle à la course poursuite
Au cinéma, à l'instar des coureurs en athlétisme, il y a des films au souffle court et des films au souffle long. Avec vingt minutes en moins, Chien Enragé serait devenu un film de sprinter au souffle court, peut-être plus intense sur le moment (sans garantie), mais ayant perdu de sa force documentaire sur le Japon de l'après-guerre et de sa valeur métaphysique. En l'état, Chien Enragé est un film au souffle long : toujours vigoureux au regard, marqué du sceau de l'Histoire du Japon, mais en même temps intemporel comme s'il avait été tourné hier. Un chef-d'oeuvre et un de mes Kurosawa préférés. On parle aussi du film ici (notamment k-chan et moi-même) : http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... &p=1142224
bruce randylan
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par bruce randylan »

je profite de la rétrospective à la cinémathèque pour me refaire sur grand écran une bonne partie de ses films que j'avais découvert en DVD/VHS il y a de ça près de 10 ans ( voire plus pour certain )... Et aussi découvrir la petite dizaine que je n'avais pas encore trouvée/regardée.

L'ange ivre
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ce film important dans la carrière de Kurosawa ( 1er tournage avec Toshiro Mifune ; 1er film vraiment personnel ) fut l'un des premiers que j'ai découvert il y a douzaine d'année en même temps Rashomon et Chien Enragé.
Autant ces deux films là furent ( et demeurent ) des révélations éblouissantes, autant cet Ange Ivre ne n'avait pas du tout laissé un souvenir impérissable.
Je lui ai donc redonné volontiers une chance d'autant que plusieurs ici le considèrent comme l'un de ses chef d'oeuvres. Et bien, je dois avouer que ce re-visionnage me laisse une nouvelle fois perplexe. :cry:

Il lui manque de l'émotion, de la profondeur et disons-le de la maturité : la relation entre Shimura et Mifune ne fonctionne qu'à moitié à mes yeux à cause d'un rythme en dent de scie, de sous-intrigues pas vraiment obligées ( l'assistante de Shimura dont l'ancien amant sort de prison ), d'une certaine rigueur dans sa direction d'acteur et d'un dosage harmonieux entre ses deux personnages principaux. On sent surtout que Mifune - dans son 1er vrai rôle - vampirise trop le film et que du coup la réalisation de Kurosawa lui échappe des mains. L'acteur en fait du coup un peu trop à plusieurs moments. Mais il est aussi fantastique le reste du temps et son tempérament inspire à son directeur quelques fulgurances stupéfiantes comme un passage dans une boite de nuit endiablée ( avec une chanson dont les paroles sont signées Kurosawa ), la scène du cauchemar sur la plage et un impressionnant combat, sec et brutal, dans un couloir qui se finit au milieu de peinture blanche.

C'est donc dommage que Shimura passe doucement au second plan car il livrait là l'un de ses meilleurs rôles et il demeure finalement sous exploité.

Sinon, la mise en scène de Kurosawa est tout de même très marquante entre le film noir, le néoréalisme et le drame psychologique. Il en ressort une vraie atmosphère poisseuse et sale ( fantastique décor que cet étang pollué ), une utilisation du son très moderne (avec ce que diffuse les hauts-parleurs ou la musique utilisé de manière décalée) ou sa capacité à rendre palpable la moiteur ambiante. Sans parler du noir et blanc qui en impose ( ce plan large du "bassin" de nuit avec ce guitariste dans le fond du plan )

L'ange ivre est donc un bon film mais, rien à faire, je m'en sens extérieur.
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par julien »

bruce randylan a écrit :L'ange ivre est donc un bon film mais, rien à faire, je m'en sens extérieur.
Ah tiens la formule me plait bien. je la ressortirai dans mes avis. "C'est un bon film mais rien à faire je m'en sens extérieur". :D Ca me fait aussi la même impression avec le cinéma de Welles. C'est impeccablement découpé, le travail sur le cadre et la profondeur de champ sont souvent admirables mais qu'est ce qu'est-ce qu'on se fait ch.
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Watkinssien
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Watkinssien »

julien a écrit :
bruce randylan a écrit :L'ange ivre est donc un bon film mais, rien à faire, je m'en sens extérieur.
Ah tiens la formule me plait bien. je la ressortirai dans mes avis. "C'est un bon film mais rien à faire je m'en sens extérieur". :D Ca me fait aussi la même impression avec le cinéma de Welles. C'est impeccablement découpé, le travail sur le cadre et la profondeur de champ sont souvent admirables mais qu'est ce qu'est-ce qu'on se fait ch.
qu'on se fait chavirer, chahuter, chambouler, c'est bien ça ?
:mrgreen: :wink:
:evil:
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par bruce randylan »

Charmer ? 8)


Duel Silencieux (1949)
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Comme la plupart des films de cette période post-guerre et pré-1950, voilà un drame ambitieux au sujet peu commun mais dont on sent un certain manque d'implication personnelle ou de maturité dans le traitement pour en faire un immense film. Celà dit à la décharge de Kurosawa, le gouvernement américain censura le scénario et vit modifier la fin.

Le film souffre donc de ne jamais décoller vraiment. On s'attend à ce que la situation évolue mais tout ne se déroule que dans le dernier quart pour LA scène qui arrive enfin : celle où Mifune laisse exprimer toute sa rage et sa frustration. Une scène délicate mais qui fonctionne admirablement pour le jeu de Mifune et la mise en scène qui capte en un seul plan-séquence les nombreuses émotions qui se bousculent dans la tête de son personnage.

C'est vraiment à ce moment que le film parvient vraiment à émouvoir et toucher son public. Il y a avait bien quelques jolis moments entre Mifune et sa fiancée, entre Mifune et son père ou encore dans l'évolution du personnage de l'infirmière qui tombe amoureuse de lui... mais ces moments - aussi brillants soient-ils - n'arrivent pas à dépasser le stade des belles images et du mélodrame (bien écrit). Il manque une puissance interne et une violence des sentiments pour transfigurer ce cadre un sage et convenu qui paralysent le film. Certains seconds rôles manquent aussi de profondeur comme le père trop absent ou le personnage de l'infirmière dont le traitement est un peu trop grossier.

Fort heureusement la mise en scène n'est pas dénué de qualité (l'ouverture est fabuleuse) et visuellement c'est bien soignée (photo, caméra, cadrage...) mais comme je disais on ne sent pas Kurosawa tout le temps concerné par sa mise en scène qui n'est pas parfois que "seulement" appliqué.

En revanche le thème central du film a admirablement bien vieilli avec un dilemme morale qui pourrait tout à fait être contemporain (on pense bien-sûr au sida) en s'attardant autant sur les états d'âmes du médecin, l'incompréhension de la future épouse, l'inconscience d'autres malades, le sujet tabou que la syphilis représente pour la "société respectable". Pour ça le film est très riche et très bien construit sans trop de facilité ni de cliché. En filigrane, Kurosawa dresse également un étonnant constat désillusionné de l'héroïsme : Mifune n'est pas un chirurgien hors-paire par altruisme ou générosité. Il l'est avant tout pour oublier sa maladie et sa frustration tant sexuelle qu'affective.
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par bruce randylan »

Scandal (1950)
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Très bonne découverte celui-là. :)
Son scénario qui critiquait (déjà) les travers de la presse à sensation m'avait longtemps fait croire à un drame virulent. Et bien non ! C'est une comédie dramatique humaniste qui se rapproche beaucoup des films américains à la Capra.

La première partie est une comédie enlevée et drôle où un peintre (Toshiro Mifune) et une chanteuse (Shirley Yamaguchi), qui se croisent par hasard à la montagne, se retrouvent à la une d'un torchon à scandale qui leur prête une liaison. Bien sûr le peintre ne l'entend pas de cette oreille et envisage de porter plainte.

Les acteurs y sont très amusant en auto-parodiant leurs styles : Mifune en personnage naïf grande gueule et Shimura en avocat looser et déconnecté du monde (avec un gimmick verbal bien exploité).
La peinture des médias n'est pas très poussée et demeure superficielle mais elle permet de livrer une certaine fraicheur à ses péripéties. La charge n'en demeure pas moins pertinente et lucide dans sa volonté de montrer comment on peut manipuler la réalité. Puis, brusquement le film vire dans le drame sur la rédemption quand le personnage de Shimura se laisse corrompre par le clan adverse.

La aussi, l'écriture n'est pas des plus subtiles avec la fille paralysée de celui-ci qui donne un interminable chant de noël que poussent Mifune et Yamaguchi. Heureusement Kurosawa rattrape ce virage mélodramatique par un sens de l'ironie grinçant et touchant quand Mifune et Shimura complétement bourrés se retrouvent dans un bar sordide et qu'ils entreprennent là aussi une chansonnette - repris en chœur par les poivrots du comptoir. L'art de la mise en scène et la direction d'acteur fontt de cette scène un joli moment de tendresse caustique qui atténue la candeur jusque là ambiante.

La dernière partie confirme en tout cas pleinement l'influence américaine puisqu'on est en plein film à procès avec ses répercutions morales et sa croyance absolue dans les institutions et les valeurs positives. Sauf qu'il n'y rien de démonstratif ou de lénifiant car le drame est centré sur les états d'âmes de Shimura dont la psychologie est le véritable suspense de ce film. On retrouve dans ce personnage tout l'humanisme de Kurosawa ainsi que sa volonté de toujours livrer un scénario audacieux à la structure imprévisible et surprenante.
Le résultat est peu maladroit parfois dans son changement de "héros" mais le cinéaste ne perd rien de son talent qui est éclatant à plusieurs reprises surtout dans les moments les moins évidents comme ce chant de Noël dont le sens du cadre, du travelling et du recadrage est époustouflant. Même chose pour son art de la composition, du hors-champ, des décors ou de la photographie. Quand aux acteurs, ils sont tous formidable mais ça, c'est une lapalissade.

Scandal
est ainsi un faux film mineur qui sous ses airs légers demeure un film profond et très personnel d'un réalisateur qui s'offre une petite parenthèse sans oublier tout ce qui fait son génie.
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par hansolo »

julien a écrit : Ca me fait aussi la même impression avec le cinéma de Welles. C'est impeccablement découpé, le travail sur le cadre et la profondeur de champ sont souvent admirables mais qu'est ce qu'est-ce qu'on se fait ch.
?
Ne me dis pas que tu t'es fais ch. à la premiere vision de Citizen Kane ou de La splendeur ... :?:

bruce randylan a écrit : Duel Silencieux (1949)
Ayant particulierement apprécié L'ange ivre & Barberousse ta description me donne vraiment envie de découvrir ce film!
Il est dispo avec sous-titres français?
- What do you do if the envelope is too big for the slot?
- Well, if you fold 'em, they fire you. I usually throw 'em out.

Le grand saut - Joel & Ethan Coen (1994)
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par bruce randylan »

Non, uniquement aux USA en sous-titres anglais.

Une VHS française était sorti à l'époque, tu peux peut-être la trouver dans certaine médiathèque ou boutiques d'occas'
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par k-chan »

Bruce, si ça ne t'embête pas, pourrais-tu ajouter tes trois textes dans ce topic, histoire de l'enrichir un peu :

:arrow: Kurosawa et le monde contemporain.

Ca serait sympa, merci ! :)
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par k-chan »

bruce randylan a écrit :Une VHS française était sorti à l'époque, tu peux peut-être la trouver dans certaine médiathèque ou boutiques d'occas'
La vhs doit être difficile à trouver. J'en avais une copie, et j'avais commencé à retranscrire les sous-titres, mais malheureusement, après avoir laisser la vhs dans le magnétoscope débranché, la bande est restée coincé lorsque j'ai voulu poursuivre le boulot, dernièrement. J'ai arraché la bande. :?
Je peux peut-être encore me procurer la cassette d'origine.
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par hansolo »

bruce randylan a écrit :Non, uniquement aux USA en sous-titres anglais.

Une VHS française était sorti à l'époque, tu peux peut-être la trouver dans certaine médiathèque ou boutiques d'occas'
Merci!
je pense que je vais me procurer la version US.
Un site interessant pour ce faire?
- What do you do if the envelope is too big for the slot?
- Well, if you fold 'em, they fire you. I usually throw 'em out.

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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par k-chan »

Une belle photo de Toshiro Mifune, Machiko Kyo, Masayuki Mori et Akira Kurosawa, au studio Daiei, durant l'époque de Rashômon (1950) :

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