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Publié : 19 oct. 05, 17:18
par Alcatel
AlexRow a écrit :[La Grande illusion (Jean Renoir, 1937). Crépuscule ou aurore de l'Europe moderne ? C'est aujourd'hui un fait admis que la guerre de 14 mit un terme à la vielle société aristocratique européenne - et qu'elle fut aussi le creuset de la nation en ce qu'elle permit une rencontre des Français de toutes les régions, de toutes les classes sociales. Cette rencontre fut parfois rude et tint plus du choc des cultures que du Melting Pot ; l'arrogance des officiers et les inégalités flagrantes face aux conditions de vie et de combat ont été les causes de nombreuses ruptures, mutineries. Mais ce n'est pas le sujet choisi par Renoir qui préfère se centrer sur la vie de prisonniers dans un camp de guerre. Sa vision est presque utopique et semble marquée par une aspiration à une union nationale ; c'est que le contexte est grave : l'Allemagne se fait plus menaçante et la France plus partagée que jamais après l'échec presque consommé du Front populaire. Pourtant, la Grande illusion n'est pas qu'un film de circonstance. Son message social est universel. La barrière entre les classes n'est pas infranchissable et la compréhension mutuelle est possible. Son propos n'est jamais simpliste bien qu'il ne se départisse jamais d'une certaine candeur. C'est un film de Foi, Foi en l'homme et en certaines de ses valeurs : sens de l'honneur, du devoir, de la patrie, de l'humain. C'est aussi un film d'espoir, mais d'un espoir faible, presque ténu. La guerre est déjà aux portes de la France et visiblement l'auteur en est conscient. Un monument de l'histoire du cinéma et même de l'histoire tout court.

Excellent :P
Tu me donnes envie de le revoir ! ;)

J'ai adoré la fin (SPOILER quand l'officier français se sacrifie pour permettre l'évasion de ses hommes)

Publié : 20 oct. 05, 08:46
par Jack Sullivan
AlexRow a écrit :La Grande illusion (Jean Renoir, 1937). (...) C'est un film de Foi, Foi en l'homme et en certaines de ses valeurs : sens de l'honneur, du devoir, de la patrie, de l'humain. (...)
Complètement d'accord: on y voit les derniers représentants d'une certaine chevalerie (Fresnay, von Stroheim), d'une certaine idée de la dignité de l'homme aussi, se retrouver au beau milieu d'un monde dont toutes les valeurs ont basculé cul par-dessus tête... Ils se raccrochent l'un à l'autre par nostalgie, tout en prenant conscience que, en tant que symboles obsolètes, ils seront bientôt balayés, car les temps à venir appartiennent à d'autres hommes (tels le personnage de Gabin).

Publié : 20 oct. 05, 11:14
par Max Schreck
Jack Sullivan a écrit :Complètement d'accord: on y voit les derniers représentants d'une certaine chevalerie (Fresnay, von Stroheim), d'une certaine idée de la dignité de l'homme aussi, se retrouver au beau milieu d'un monde dont toutes les valeurs ont basculé cul par-dessus tête... Ils se raccrochent l'un à l'autre par nostalgie, tout en prenant conscience que, en tant que symboles obsolètes, ils seront bientôt balayés, car les temps à venir appartiennent à d'autres hommes (tels le personnage de Gabin).
Film magnifique et d'une richesse infinie, où l'on montre bien que la guerre laisse certaines choses intactes comme la notion de classe (même dans des camps opposés von Stroheim et Fresnay se comprennent), tout en exprimant l'espoir d'une entente entre différentes classes (le semblant d'amitié entre Fresnay et Gabin). Fresnay se sacrifie ainsi, fidèle aux principes de sa classe, comme l'honneur Et au milieu de tout ça, Renoir parvient à mélanger l'humour au drame avec un brio qui me bouleverse tellement je trouve ça beau (superbe scène du spectacle de travesti). La bande des prisonniers, qu'on retrouvera en grande partie dans La Règle du jeu, Carette, Dalio, Gaston Modot, leurs bons mots, leurs espoirs...

Immense.

Publié : 7 nov. 05, 23:13
par George Bailey
Découvert Elena et les hommes et grosse déception : un mélange de marivaudage, de comédie tout en distillant une morale un peu appuyé (c'est le sexe qui gouverne le monde) : un film que je trouve raté car Renoir n'arrive pas à transmettre son message et l'enchainement des scènes semblent laborieuses.
J'ai vu la version anglaise, ceci explique peut-être cela.

Publié : 7 nov. 05, 23:55
par Nestor Almendros
moi aussi j'ai vu un Renoir: BOUDU SAUVE DES EAUX

C'est assez sympathique. Michel Simon est le centre du film, celui par qui les ennuis arrivent. Avec ses côtés innocent (presque enfant) et éléphant dans un magasin de porcelaine, il est assez extraordinaire.
Le film lance quelques piques contre la bourgeoisie, l'argent, et la société formatée à l'utilisation de l'argent. Ca reste quand même assez léger, sous-entendu. L'important c'est le show Michel Simon...

J'ai beaucoup de mal à voir des films antérieurs à 1940 en général. A cause surtout de la mauvaise qualité des masters. Heureusement les techniques de restauration ont évolué, comme le prouve ce master chez René Château. Pas exempt de défauts (quelques poussières subsistent), ce transfert reste néanmoins presque excellent: l'image est stabilisée, les contrastes sont bien gérés, la définition, elle, est un peu molle. Mais en comparaison de l'image que j'avais vu il y a quelques années il n'y a pas photo.

Autre chose: c'est un film Pathé, comme LES MISERABLES de Raymond Bernard. Quelquechose me dit qu'il pourrait bien sortir un jour chez René Chateau...

Publié : 8 nov. 05, 10:42
par Sergius Karamzin
J'aime beaucoup Elena et les hommes, une sorte de théâtre de marionnettes, version rococo de la "Règle du jeu" mâtiné de My Fair lady...

Publié : 8 nov. 05, 17:19
par L'Gé
Sergius Karamzin a écrit :J'aime beaucoup Elena et les hommes, une sorte de théâtre de marionnettes, version rococo de la "Règle du jeu" mâtiné de My Fair lady...
Renoir a beaucoup joué sur le concept de "le monde = petit théatre".
"La chienne" débute et finit avec le rideau (qu'on devine rouge).
"Le carosse d'or", "Elena et les hommes" et "Le petit théatre de Renoir", ses 3 derniers films l'illustre parfaitement.

Mais, aussi, dans "La grande Illusion" ou "La Règle du jeu", il ne manque jamais l'occasion de faire figurer une séquence où le théatre, souvent grotesque, joue un grand rôle.

Renoir était un désespéré gai.
Tout est vain, grotesque et tragique.
Mais, en même temps...
Tout est léger, élégant et comique.

Publié : 5 déc. 05, 21:14
par Jack Griffin
Déjeuner sur l'herbe (Jean renoir)

Assez déçu bien que le film reste agréable à l'oeil grâce à la suite de tableaux (colorés) qu'il nous offre. Le discours est quand même lourd, déjà vu chez le cinéaste, et la caractérisation des personnages plutôt grossiere.
A peine divertissant.

Publié : 6 déc. 05, 09:49
par Sergius Karamzin
Jack Griffin a écrit :Déjeuner sur l'herbe (Jean renoir)

Assez déçu bien que le film reste agréable à l'oeil grâce à la suite de tableaux (colorés) qu'il nous offre. Le discours est quand même lourd, déjà vu chez le cinéaste, et la caractérisation des personnages plutôt grossiere.
A peine divertissant.
Je trouve le film parfaitement surprenant. Je ne vois pas où ce discours a déjà été vu chez Renoir, ni même chez aucun autre cinéaste. C'est un ode à la Nature, un mouvement de méfiance vis-à-vis de la notion de Progrès. Et un film terriblement attachant.

Publié : 7 déc. 05, 14:51
par Majordome
Sergius Karamzin a écrit :
Jack Griffin a écrit :Déjeuner sur l'herbe (Jean renoir)

Assez déçu bien que le film reste agréable à l'oeil grâce à la suite de tableaux (colorés) qu'il nous offre. Le discours est quand même lourd, déjà vu chez le cinéaste, et la caractérisation des personnages plutôt grossiere.
A peine divertissant.
Je trouve le film parfaitement surprenant. Je ne vois pas où ce discours a déjà été vu chez Renoir, ni même chez aucun autre cinéaste. C'est un ode à la Nature, un mouvement de méfiance vis-à-vis de la notion de Progrès. Et un film terriblement attachant.
Un film totalement atypique dans la carrière du cinéaste et dans le cinéma français de l'époque... et l'on ressent çà encore aujourd'hui.

Publié : 22 déc. 05, 11:56
par Nestor Almendros
LA MARSEILLAISE de Jean Renoir

La révolution française vue par le peuple. C'est en gros le thème du film qui suit un groupe de marseillais à l'accent chantant, en route vers Paris. Les dialogues sont bien écrits, parfois un peu trop littéraires et surjoués. Même si je n'ai pas été absolument captivé par le film, il garde un certain charme pas désagréable et montre un point de vue historique pas inintéressant. On parle encore ici des différences de classes sociales, ce que l'on retrouvera dans LA REGLE DU JEU, me semble-t-il (il me tarde un peu de le redécouvrir).

Master très inégal mais comme les copies du film ont été perdues le travail reste quand même globalement très correct. La restauration a été faite sur la pelllicule principalement: stabilité de l'image... Les poussières et tâches subsistent car il n'y pas eu de restauration numérique poussée. En revanche le télécinéma gère correctement les contrastes. Le son par contre sature très vite (surtout pendant les chants). Bonus intéressants.

Publié : 2 mars 06, 00:06
par martiball
Le carrosse d'or Jean Renoir

Très très déçu. Le technicolor est superbe, la musique de Vivaldi colle parfaitement à l'action, les scènes de comedia dell'arte sont très intéressantes mais l'intrigue est vraiment banale et la mise en scène façon théatre filmé ennuyeuse.
Je sais que c'est un des films préférés de Truffaut et qu'il est généralement considéré comme un chef-d'oeuvre alors ai-je manqué quelque chose? Donnez moi votre avis svp.

A part ça j'ai aussi vu Le déjeuner sur l'herbe que j'ai trouvé tout simplement mauvais.
Suis-je un monstre, un insensible ou un benêt?

Publié : 2 mars 06, 11:22
par Max Schreck
martiball a écrit :Le carrosse d'or Jean Renoir

Très très déçu. Le technicolor est superbe, la musique de Vivaldi colle parfaitement à l'action, les scènes de comedia dell'arte sont très intéressantes mais l'intrigue est vraiment banale et la mise en scène façon théatre filmé ennuyeuse.
Je sais que c'est un des films préférés de Truffaut et qu'il est généralement considéré comme un chef-d'oeuvre alors ai-je manqué quelque chose? Donnez moi votre avis svp.
Je te conseillerai de le revoir d'ici quelques temps. En ce qui me concerne, j'étais également sorti sans enthousiasme de ma première vision. Ce n'est qu'en le revoyant plus tard, que j'ai été charmé par sa richesse thématique et visuelle. On se rend alors compte que la mise en scène est loin d'être plate, Renoir poussant même assez loin son goût pour la mise en abîme (tant dans la forme que dans le fond). Le film peut être également apprécié comme un hommage à la gloire de la Magnani, ici réellement resplendissante. Bon, ce n'est certainement pas mon Renoir préféré, mais je le trouve néanmoins très beau.

Bref, laisse mûrir et redonne lui une chance. Je ne garantis rien, mais comme c'est comme ça que ça s'est passé pour moi, peut-être que tu vivras la même chose ? :wink:

Publié : 9 avr. 06, 15:23
par Zelda Zonk
Vivre libre (J. Renoir - 1943) : Mal-aimé dans la filmo du grand cinéaste, ce film recèle tout de même de belles qualités à mon sens. Je comprends l'accueil déplorable qu'il reçut à l'époque (la plaie était encore trop vive à sa sortie en France, en 1946) pour sa peinture quelque peu simplificatrice de la résistance et son propos souvent trop appuyé (limite propagande parfois).
Reste une interprétation remarquable de Charles Laughton (pléonasme certes, pour un acteur que je place parmi les plus grands du 7e art, opinion partagée par Billy Wilder par exemple, qui a pourtant vu passer du bon monde !) et de George Sanders. Le plaidoyer de Laughton à la fin du film est un des plus beaux, des mieux écrits, des mieux interprétés et des plus émouvants qu'il m'ait été donné de voir, dans un domaine (les scènes de tribunal, de procès) où l'on a d'ordinaire souvent vite fait de s'ennuyer. Et cela tient autant à la qualité de l'acteur qu'au texte, très puissant.
La toute dernière scène, les adieux de Laughton à ses élèves, est également très forte.
Côté mise en scène, sans atteindre la beauté plastique des chefs-d'oeuvre du maître, on trouve de belles choses, notamment quelques plans particulièrement bien travaillés (cadrage, lumière).
Bref, plutôt une bonne surprise, et une oeuvre forte et humaniste quoi qu'il en soit.

Publié : 24 avr. 06, 19:33
par Best
L'Etang tragique (Jean Renoir)

Une vraie belle découverte. Moi qui n'est pas encore vu beaucoup de films de Renoir, je dois avouer qu'entre La grande illusion et L'étang tragique, je tiens deux films tels que je les affectionnent. Concernant ce dernier, voilà un film qui dégage une humanité palpable et dispose de personnages que l'on nous rend rapidement très attachants. Des hommes et des femmes auquels viennent s'opposer quelques brebis galeuses appartenants à la même petite communauté et qui donnent à l'histoire un interêt prononcé. Entre accalmies parfaitement gérées et séquences à l'énergie débordante, on se laisse transporter par ce film débordant de tendresse mais n'oscultant pas pour autant son aspect dramatique. Une oeuvre intelligente mais aussi un brin naive et teintée de nostalgie, ce qui au final lui donne tout son charme.

Si vous voulez partager 1h30 durant une histoire simple et touchante et apprécier la superbe photo offerte par le film (les passages dans le marais sont magnifiques), laissez vous tenter par cet Etang tragique des plus réussi.