LéoL a écrit :Bon j'en sors.
C'est pas fameux. Comme Jericho j'ai trouvé les frères Coen en mode "pantouflard", c'est fait à la va vite, pour s'amuser probablement, après l'accompli No Country for old men.
Je sors de la salle, et suis totalement enchanté par ce film des Coen, une comédie qui n'en est pas une. Je suis surpris de cette critique d'un mode "pantouflard", que je retrouve dans beaucoup d'avis. A mon sens, le quiproquo est du même ordre que celui de l'époque du Hudsucker Proxy, quoique sur un mode différent.
Car ce film est drole, c'est certain, il s'agit d'une comédie, et les comédiens s'en donnent à coeur joie (le personnage de Brad Pitt m'a fait rire tout du long, parmi d'autres). Mais, et la superbe musique de Carter Burwell, peut-être rarement aussi présente dans un film des Coen, est bien là pour nous le rappeler, le sujet du film relève autant de la tragédie que du comique. Et si l'on choisit d'en rire, c'est pour éviter d'avoir à en pleurer.
Car, au delà du propos anecdotique de ces couples qui découchent, se font et se défont sur des malentendus ou des pulsions égoistes, c'est une société qui ne sait plus où elle va que nous décrivent les Coen. S'attachant ici à "l'intelligence", c'est-à-dire au service du renseignement, il nous dépeint une société qui ne sait plus ce qu'elle fait, qui ne se comprend plus elle-même, mais met tout en place pour se protéger (de qui ? de quoi ?? Voila bien l'enjeu du film). Tout le monde se suit ou se fait suivre, à la recherche d'une faute de l'autre. Mais, lorsque celle-ci se produit, ce qui arrive systématiquement, personne ne sait quoi en faire. Les séances de débriefing avec J.K. Simmons sont hilarante, mais aussi préoccupantes, au fond.
LéoL a écrit :Aller pour rassurer les fans, les (pures) comédies des frères Coen ne m'ont jamais convaincu.
C'est peut-être la raison pour laquelle ce vrai-faux film d'espionnage, qui commence et finit sur une vision via satellite du monde, est moins immédiatement lisible qu'un No country. Reste que la mise en scène n'est pas en "contrôle automatique", que le découpage est souvent brillant, certains mouvements de caméra sont virtuoses, le jeu sur les situations, la profondeur de champs surprennent souvent, et restituent à cette comédie une perfection de forme que je suis enchanté de retrouver dans une comédie des Coen. On pense souvent à Fargo, mais il y a un surcroit de tristesse, de désespoir, qui m'a plus touché ici.
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- Après tout, ce systême d'omnisurveillance ne parvient pas à empêcher les disfonctionnements, ni à comprendre ce qui se passe. En revanche, à la fin de l'histoire, ce sont les citoyens lambda qui paient le prix fort (les personnages de Pitt, Jenkins, Malkovich).
Une belle réussite que ce film, à mes yeux. J'espère qu'il sera apprécié à sa juste valeur pour sa sortie en France.
8/10
J'ajouterais juste une chose, pour évoquer la reflexion qu'un fan du forum, à savoir ed, porte sur leur oeuvre. Selon lui (pour simplifier, le gaillard s'est déja exprimé de façon claire et détaillée sur la question), les films des Coen sont avant tout un discours sur l'Amérique, qui s'attachent chacun à en décortiquer un aspect.
Burn after reading me semble parfaitement coller avec cette vision du cinéma des frangins.