Comme je l'ai déjà dit, je reviens régulièrement et avec plaisir vers le cinéma de Rohmer. Cette fois-ci, c'est dans des circonstances bien tristes mais c'est en même temps l'occasion de voir diffusés sur le hertzien des oeuvres malheureusement plus rares, d'habitude. C'est désolant d'attendre les décès pour que passent des films pourtant réputés. En tout cas, pour une fois, ça nous change des sempiternels "contes des quatres saisons" qu'on commence à connaitre par coeur

. J'ai donc redécouvert trois films pas vus depuis très longtemps qui, s'ils ne m'ont pas "contenté" de façon égale, reflètent complètement le travail et l'esprit de ce réalisateur hors norme dont je me lasserai pas de découvrir les films.
J'ai commencé avec
MA NUIT CHEZ MAUD (1969) diffusé sur France 3. On retrouve déjà les caractéristiques de l'oeuvre Rohmerienne par une importante base dialoguée et très écrite et par une observation fine des comportement humains pour ce qui a trait aux jeux de l'amour et à la séduction. Je suis un peu moins emballé par les références philosophiques (à Pascal) et religieuses qui me touchent moins (et qui me sont plus obscures, j'avoue). Néanmoins, je m'amuse encore du personnage de Trintignant au profil de catho à la vie déterminée, préprogrammée, dont la volonté va peu à peu se fissurer devant les avances plus ou moins directes d'une Françoise Fabian au charme classieux dévastateur (quelle femme magnifique

).
Ce fut ensuite
LES NUITS DE LA PLEINE LUNE (1984) diffusé sur Arte, qui se laisse suivre assez agréablement (sans réelle passion de ma part, je pense) et qui est surtout l'occasion pour moi de parler de cette comédienne si particulière, Pascale Ogier. C'est, je crois, sa seule participation chez Rohmer et elle crève l'écran avec un certain charme et une présence (et un jeu) tout en délicatesse et en fragilité: elle m'a vraiment rappelé Marie Rivière sur ces points précis, notamment le jeu assez identique. Pascale Ogier est morte deux mois après la sortie des NUITS DE LA PLEINE LUNE, on peut penser que Rohmer a trouvé en Marie Rivière une sorte de remplaçante. Du film, je retiendrai aussi Fabrice Luchini en meilleur ami complètement intéressé.
J'ai terminé hier avec la meilleure surprise:
L'AMOUR L'APRES-MIDI (1972) diffusé sur TV5. J'y ai trouvé tout Rohmer mais sans lourdeur, avec une grande simplicité apparente et une observation psychologique très fine, toujours dans un style très littéraire avec des dialogues pourtant très écrits mais sonnent vrais et justes. L'un des meilleurs passages du film, pour moi, se situe à la fin du prologue, pendant l'un de ces monologues captivants, quand le héros parle de ses rapports furtifs et platoniques avec les femmes croisées dans les rues de Paris. Un texte magnifique, une pensée originale, un très beau moment. Le film m'a aussi beaucoup intéressé dans ses descriptions de l'amour sous différentes formes et dans ces pensées exprimées sur les rapports personnels et quotidiens de l'homme par rapport à la femme. Au-delà d'une certaine remise en cause du mariage, les aventures du héros (formidable Bernard Verley, j'adore son phrasé) font se succéder diverses confrontations à caractère plus ou moins sexuel. De la séduction consentente et inavouée (avec ses secrétaires) aux pulsions qu'il faut contrôler et aux jeux de l'amour (platoniques) si agréable à expérimenter, le film se révèle passionnant dans ces suspenses amoureux. On remarque, de nouveau, des comédiens inhabituels et pourtant si marquants. Ici, je pense à Zouzou (qui joue Chloé) et cette attitude assez différente de ce que Rohmer pourra proposer plus tard. Car, au contraire de la douceur d'une Pascale Ogier/Marie Rivière, Zouzou fait preuve d'une certaine froideur, d'un déterminisme implacable et, également, d'un charme certain. Je repense au débat de Moati où il était question de l'érotisme permanent chez Rohmer. Je l'ai souvent retrouvé dans ce film: l'entourage féminin permanent du héros, les tensions sexuelles de plus en plus fortes et les rapprochement physiques dans le cadre, par exemple, ou les gestes de plus en plus tactiles. Très belle surprise.
Pour les parisiens qui ont du temps (ce qui n'est désormais plus trop mon cas pour l'instant) le Reflet Médicis propose quelques Rohmer réputés mais invisibles sur le hertzien depuis longtemps, comme L'AMI DE MON AMIE ou LA FEMME DE L'AVIATEUR. J'en ai encore beaucoup à découvrir. Vivement.