Bonjour.
Je mets çà ici:
Petites appréciations à chaud et très personnelles des films que j’ai pu voir lors de la rétro Shinji Aoyama au Jeu de Paume (par ordre de visionnage, avec notation sur 5) :
Helpless (1996) 1,5
Bon ben çà commence mal. C’est le second film d’Aoyama qui devait alors se chercher un peu (edit, avec le recul : ben en fait nan, il s’était déjà trouvé). C’est ultra poseur, les scènes n’en finissent pas d’être étirées sans que se dégage la moindre empathie. Mon intérêt s’est essentiellement porté sur ce personnage de yakuza manchot, violent et suicidaire. Çà n’est quand même pas très satisfaisant.
Wild Life(1997) 2
C’est déjà mieux en terme de réalisation. La mise en scène évite la pose, gagne en rythme et propose de très jolies choses. Malheureusement, j’ai trouvé le récit assez confus, la narration, volontairement éclatée, fonctionnant par ellipse dès le départ. Et, c’est sans doute une conséquence, les personnages manquent au final terriblement de corps, de présence.
Bien foutu niveau réalisation, mais narration artificiellement embrouillée et gros manque d’émotion.
Carte blanche à Aoyama :
Journal érotique d’une infirmière (Chûsei Sone – 1976) 1,5
C’est probablement le premier vrai pinku eiga que je vois.
Donc ben dans le fond y’a de bonnes choses (c’est finalement un récit assez cruel), la mise en scène est vraiment soignée, mais le problème ce sont ces scènes de sexe, programmées toutes les 10 minutes, qui ne font pas forcément avancer le schmilblick et qui n’ont d’autre finalité que ce qu’elles représentent. Enfin, en même temps, j’étais prévenu (à replacer dans la logique des studios de l’époque).
A noter, les effets de la censure avec ces pastilles noires qui cachent les parties honteuses, çà a son effet comique (d’ailleurs à la fin ce sont carrément de grandes barres noires, ils devaient sûrement être à cours de pastilles).
Shady Grove (1998) 1
Argh ! Retour de la pose (ces longueurs qui n’expriment rien), d’où beaucoup de prétention, Aoyama s’entêtant à garder son plus grand sérieux pour illustrer les situations les plus galvaudées (ici une énième histoire de rupture amoureuse même pas transcendée, couplée au thème déjà vieillot de l’incommunicabilité dans nos sociétés technologiques). Un peu (beaucoup) de légèreté et de spontanéité n’auraient pas nui à l’ouvrage.
At the edge of chaos (1998) 4
Film documentaire sur Chris Cutler. C’était vachement bien, surtout la demi-heure de concert.
Crickets (2006) 1
J’ai rien compris. Enfin si quand même un peu, en lisant le résumé de la plaquette. C’est l’histoire d’une femme qui se coupe volontairement de tout contact social pour s’occuper d’un vieil aveugle qui mange comme un cochon. Elle rencontre ensuite un jeune homme dans un bar qui la fait douter de son ostracisme obstiné. Puis, on nous raconte comment les colons portugais se sont fait massacrer par le pouvoir violemment antichrétien de l’époque (avec visite d’une grotte). Pendant ce temps, le vieil aveugle prend des bains de lune et mange toujours aussi salement. D’ailleurs, il se paume. A la fin, on voit un clown qui jongle.
Le sens (et les sensations) de ce film m’échappe…
le Petit chaperon rouge (2008) 1,5
Court-métrage pas transcendant sur un certain esprit révolutionnaire, avec hommage à Jean Vigo (pour la péniche) et Godard (pour les bâtons de dynamite). Bof.
Desert moon (2001) 1
Bon, comment dire, je sais pas… démotivé en fait. Blabla pose irritante blabla discours naïf qui enfonce des portes ouvertes blabla sérieux obstiné blabla… Mais, bon sang, Aoyama, quoi, Eurêka aka le plus beau film du monde, dorbel de derme.
Le pire c’est qu’Aoyama sait cadrer, fabriquer des plans. Le problème c’est que ce travail formel ne révèle rien, le fond ou le discours étant généralement tellement ras des pâquerettes (comme ici ou dans Shady Grove) ou abscons (Crickets) que l’effort apparait complètement vain.
To the alley : the films Kenji Nakagami left out (2000) 2 (?)
Proposition intéressante, mais pas forcément aboutie, de faire revivre un paysage, par la juxtaposition d’images tournées par Nakagami avant la destruction de son quartier et celles, du même lieu, contemporaines d’Aoyama. Ce type d’exercice est plutôt du genre à m’intéresser (retracer la géographie d’un espace), mais ici, j’ai eu du mal à saisir l’intention d’ensemble. Çà n’évoque finalement pas grand-chose et l’impact émotionnel reste très limité lorsque comme moi on ne connaît pas la vie de l’auteur. Et ce n’est pas ces longues séquences où Aoyama filme un type lisant du Nakagami, pour lequel je me garderais bien d’émettre une quelconque dépréciation étant inculte de ses écrits (d’autant plus que j’ai eu du mal avec les sous-titres anglais, très littéraires), qui me feront revenir sur mon opinion générale, au contraire.
Days in the shade (2003) 2 (?)
Dans ce film inspiré des nouvelles écrites dans les années 1930 par Shûsei Tokuda, Shûsei retourne dans sa ville natale de Kanazawa. Cet écrivain y retrouve ses amies d’enfance Okinu et Ohiro, et s’installe dans leur maison de geisha. Les affaires ne marchent pas très bien, mais Okinu garde son calme et travaille dur. Shûsei l’aime, mais il quittera la ville sans lui avouer ses sentiments.
Çà, c’est censé être le résumé, qui se trouve finalement être le développement complet du récit sur 43 minutes. En fait je ne sais pas trop quoi en penser. Encore une fois je ne connais pas l’auteur et ce moyen-métrage n’aide pas franchement à se sentir concerné. On peut admirer la mise en scène, le jeu des acteurs, les anachronismes volontaires (l’écrivain se déplace en PT Cruiser), mais voilà, euh… bon…
Sad vacation (2007) 3
Oh! un bon film!
Aoyama convoque ici certains de ses personnages d’Helpless (Asano Tadanobu) et d’Eurêka (Aoi Miyazaki) pour clôturer sa trilogie sur Kyûshû.
Bonnes surprises : pas de velléités poseuses, pas de grands discours au sérieux ampoulé, de beaux moments d’émotion.
Mais, et oui quand même, tout n’est pas parfait : le film est un peu trop bavard à mon goût, l’ensemble manque d’ampleur visuelle (on reste trop souvent dans l’espace cloisonné de l’entreprise)et de développement du récit (sur 2h15, il y avait moyen de déployer un peu plus les histoires secondaires), la narration manque encore une fois de structure, Aoi Miyazaki ne sert pas à grand-chose, la fin est un peu expédiée,… Bon, bon, allez, si, c’est malgré tout un bon film.
Carte blanche à Aoyama :
la Rivière du retour (Tatsumi Kumashiro - 1983) 2
Exercice de style plutôt intéressant sur la vie d’un poète raté qui tente de se rendre célèbre en commettant plusieurs double suicide en compagnie de jeunes femmes. C’est très bien filmé, très coloré, très hystérique, très portrait en dérision finalement. Mais bon, c’est aussi très long (2h15, le récit tourne vite en rond) et très -trop- hystérique, ces femmes qui crient, gémissent et pleurent toutes les 10 minutes, çà devient vite saoulant (d’ailleurs, j’ai l’impression qu’elles ne font que çà pendant tout le film).
Carte blanche à Aoyama :
Sexe et furie (Norifumi Suzuki - 1973) 3
Mélange réjouissant de tout plein de genres parodiés par Suzuki, qui explore le film de sabre et le pinku en passant par le mélo kitch pur jus, tout çà dans une esthétique très 70’. Çà ne se prend pas au sérieux et çà fait du bien.
Carte blanche à Aoyama :
Kôchiyama sôshun (Sadao Yamanaka - 1936) ?
Ce film a un intérêt patrimonial certain : c’est l’un des trois qui subsistent de l’œuvre de Yamanaka, avec le Pot d’un million de ryo et Pauvres humains et ballons de papier. Mais bon, çà n’a pas éveillé en moi des foudres d’enthousiasme, l’état de la copie y étant pour partie. Je passe.
Jésus dans les décombres (2000) 1
Bouyaaa, ok…
Donc, on a droit à 50 minutes de lecture filmée d’une nouvelle de Jun Ishikawa avec comme ambition de recréer à l’image en temps réel les décors et les actions décrites dans le bouquin. En gros, Aoyama refuse l ‘adaptation, et propose à la place un exercice interprétatif, fabriquant son film au fur et à mesure de la lecture du livre, comme on suivrait un mode d’emploi. Bon, admettons que je ne sois pas rétif à ce genre de procédé (et je le suis), admettons qu’Aoyama ait voulu aller à l’essentiel et faire ressentir son rapport direct au livre, admettons… Donc : on a un gamin qui court dans une usine désaffectée (le Tokyo d’après-guerre) et qui de temps à autre montre sa bouille en gros plan (c’est lui le Jésus des décombres), une jeune femme en tenue légère qui se coupe les ongles, des pantomimes, des images du saint-suaire, un gars qui traine une croix, d’autres croix qui tombent du ciel, le narrateur qui se met à crier le texte dans un micro pour figurer une bagarre, etc… De la bonne grosse symbolique illustrative puisque finalement il ne reste plus que çà à faire, l’émotion étant déjà présente dans le texte. De mon point de vue, c’est formellement sans intérêt.
Song of Ajima (2002) 3,5
C’est marrant, mais j’ai l’impression que dès qu’Aoyama touche à la musique (ici le portrait de la chanteuse Tomoko Uehara), son travail devient plus riche, plus sincère, plus touchant, plus tout en fait. C’était déjà mon sentiment avec At the edge of chaos et Eli, Eli… mais çà se confirme encore ici.
Exemple : il filme la chanteuse en plan fixe en train de se maquiller avant de rejoindre la scène, et ben çà fonctionne. Y’a pas de discours à tenir, pas d’hyperbole elliptique au symbolisme allégorique, c’est juste ce que c’est, et c’est beau.
Carte blanche à Aoyama :
l’Enfer (Nobuo Nakagawa - 1960) 2,5
Un peu vieillot par moment, pas mal de temps mort en première partie, liés à une mise en scène au cordeau, mais une représentation de l’Enfer très graphique et parfois vraiment impressionnante.
An obsession (1997) 2
Bon, c’était pas trop mal. Mais je ne sais pas si mon indulgence est lié à mon état de fatigue durant le visionnage ou si l’emprunt de la toile de fond à Chien enragé de Kurosawa m’a permis de rester curieux du déroulement du film. Encore des longueurs (terrible çà, les longueurs, quand on est fatigué), encore ce sérieux asséné, mais moindres, dilués, dans un film qui cherche malgré tout à exprimer une certaine torpeur d’incompréhension (j’ai pensé à Cure de l’autre Kurosawa), et où surnagent de beaux moments de mise en scène (l’une des dernières séquences sur le terrain de base-ball notamment).
Lakeside murder case (2004) 2
Au début, rien de bien passionnant: Aoyama s’éternise sur une histoire d’adultère et de couple en crise déjà vue mille fois. Puis survient le meurtre du titre: le film gagne en vigueur, se focalise sur l’action (cacher le corps, remplacer la victime dans son emploi du temps pour ne pas éveiller les soupçons,…). Pour la suite, je me suis dit, ouais chouette on va avoir droit à un huit-clos où tout le monde soupçonne tout le monde, où chacun y va de sa petite mesquinerie pour dissimuler son forfait, façon partie live de Cluedo. C’est pas nouveau, mais çà a le mérite d’être sympathique à suivre. Mais voilà, s’il y a bien quelques aspirations à faire évoluer le récit dans ce sens, çà ne dure pas bien longtemps, et puis surtout il y a l’épilogue avec son bon gros discours bien appuyé. Aoyama y va à fond, y croit dur comme fer à l’originalité de son propos. C’est naïf et au final très ridicule.
Like a desperado under the eaves (2003) 0
N’importe quoi. Aoyama filme en DV des canards qui barbotent et un type en train de bouffer. Le reste du temps, çà discute de trucs totalement inintéressants.
40 minutes d’ennui.
Marre, en fait.
Çà tombe bien, la rétro est finie pour moi.
Loupés :
- AA, long documentaire de plus de 7 heures sur Aquirax Aida.
- la Forêt sans nom.
- Wish you were here, très court-métrage de 7 minutes en intro de Eli, Eli…
Déjà vus :
- Eurêka.
- Eli, Eli, lema sabachthani ?
Manquait à cette rétro les deux long-métrages Deux Voyoux et EM Embalming
Conclusion : Ben çà fout les boules un peu quand même. A part Sad vacation et ses docs musicaux, Aoyama n’aura jamais réussi à faire dépasser mon appréciation de ses films au delà du moyen/bof. Grosse désillusion sur sa capacité à me faire à nouveau ressentir, ne serait-ce que ponctuellement, les sensations que j’ai pu avoir avec Eurêka et Eli, Eli… .
