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Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:17
par Addis-Abeba
Jeremy Fox a écrit : 12 janv. 24, 12:08
tenia a écrit : 12 janv. 24, 12:04 Je ne pense pas non plus un instant que tout se vaut, loin de là. Ce que je dis juste, c'est qu'un paquet de gens s'en foutent, tant de La prisonnière du désert que d'Avengers 8. C'est un passe-temps pour eux, comme on écouterait la radio en voiture.
Donc la question n'est pas de croire que tout se vaudrait (je crois que personne n'a rien dit dans ce sens d'ailleurs), mais plutôt de sortir de notre vision de passionnés et se mettre à la place de personnes qui n'ont pas du tout les mêmes centres d'intérêts que nous.
Voilà.
Non beaucoup plus de gens s'en foutent de La prisonnière du désert que d'Avengers 8, mais oui ca n'a rien d'illogique.
Après la différence se fait peut-être plus sur le fait que l'on s'intéressait d'avantage à ce qu'il y avait avant nous, que cette nouvelle génération.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:21
par Spongebob
Addis-Abeba a écrit : 12 janv. 24, 12:17
Jeremy Fox a écrit : 12 janv. 24, 12:08

Voilà.
Non beaucoup plus de gens s'en foutent de La prisonnière du désert que d'Avengers 8, mais oui ca n'a rien d'illogique.
Après la différence se fait peut-être plus sur le fait que l'on s'intéressait d'avantage à ce qu'il y avait avant nous, que cette nouvelle génération.
Certainement lié au fait qu'on a connu un temps où des classiques étaient diffusés à 20h50 sur des grandes chaînes hertziennes, qui elle-même se comptaient sur les doigts de la main.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:28
par Sybille
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50
Le Grand Remplacement au cinéma ? Mais sérieux, tu crois vraiment à ça ? Les avancées technologiques de restauration vont justement permettre ces découvertes. Vous vous sentez tellement menacés et diminués dans votre passion ? Ces craintes sont complètement irrationnelles. Le cinéma que défend Thoret existera toujours et les archives aussi.
Oh moi je ne crois à rien, j'attends de voir, sans vision alarmiste du tout.

Ceci dit, pour que que tel cinéma, enfin les films, et les archives existent, faut que y ait une volonté quelque part. Alors non, ça n'existera pas "toujours", juste parce que ça a toujours été là. N'importe quoi est susceptible de disparaître.
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50Le problème que j'évoque, c'est que sous toutes les circonvolutions de la prose de Thoret, je ne vois que du mépris pour les gens s'intéressant à ces oeuvres populaires et jugées idiotes. Et que c'est la faute des médias, du capitalisme et du formatage si ces films sont produits et disposés plus largement au public. Il ne tient absolument pas compte du déterminisme social, des inégalités entre les êtres humains et tout un tas d'autres concepts sociologiques inhérents à ces choses là. Et que plus globalement, cette forme de cinéma ne menace aucunement celle que lui chérit.
Qu'est-ce qui est le plus méprisant entre - certes, peut-être éprouver un peu de condescendance à l'égard de ceux qui regardent tel genre de films, ou se dire que ce n'est pas de leur faute, c'est le "déterminisme social et les inégalités" qui régissent les êtres humains. Ces "personnes-là" sont prédestinées à ne s'intéresser qu'aux oeuvres populaires de toute façon parce que c'est comme ça d'après la sociologie. Au moins, des passionnés, en particulier quand c'est leur métier comme Thoret essaient de nous extirper de nos déterminismes et de nous faire découvrir ce vers quoi on ne serait pas naturellment allé.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:38
par Nestor Almendros
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50
Sybille a écrit : 12 janv. 24, 11:43 De façon pragmatique, ce qui peut possiblement inquièter, c'est que si une majorité grandissante de personnes ne voient plus aucun intérêt à découvrir/voir les films de John Ford (ou autres), alors petit à petit, ces films deviendront indisponibles.
Le Grand Remplacement au cinéma ? Mais sérieux, tu crois vraiment à ça ? Les avancées technologiques de restauration vont justement permettre ces découvertes. Vous vous sentez tellement menacés et diminués dans votre passion ? Ces craintes sont complètement irrationnelles. Le cinéma que défend Thoret existera toujours et les archives aussi.
El Dadal a écrit : 12 janv. 24, 11:39 Je ne vois pas trop ce qu'il y a de choquant à ce qu'un critique défende la forme de prédilection de son art chéri. Il a bien raison de démonter cette tendance actuelle prédominante de subjectivité à outrance, du "tout se vaut". Bien sûr qu'il existe des échelles de valeur, encore heureux. La base du combat critique, ce n'est pas de renvoyer la balle au centre à tout bout de champ, ça c'est une forme de confort et de paresse, aussi appelé nivellement par le bas.
C'est pas du tout ce dont j'ai parlé, en ce qui me concerne. Je partage clairement le fait que le tout se vaut est faux. Le problème que j'évoque, c'est que sous toutes les circonvolutions de la prose de Thoret, je ne vois que du mépris pour les gens s'intéressant à ces oeuvres populaires et jugées idiotes. Et que c'est la faute des médias, du capitalisme et du formatage si ces films sont produits et disposés plus largement au public. Il ne tient absolument pas compte du déterminisme social, des inégalités entre les êtres humains et tout un tas d'autres concepts sociologiques inhérents à ces choses là. Et que plus globalement, cette forme de cinéma ne menace aucunement celle que lui chérit.
J'ai du mal à croire qu'une cinématographie qui n'est plus vue puisse continuer à exister. C'est tout le travail des défricheurs (éditeurs, distributeurs) qui remettent sans cesse en avant des oeuvres devant les yeux des nouvelles générations, pour ne pas que cela soit oublié. Avec notre ancienneté de cinéphile, certains en ont peut-être marre de revoir encore des Ozu sur le devant de la scène, ou ne comprenaient pas pourquoi Brion rediffusait éternellement les mêmes films dans son Cinéma de Minuit. Mais justement parce qu'il s'intéresse aux nouveaux venus qui, comme nous il y a des années, sont contents de pouvoir découvrir des classiques.

Je pense depuis longtemps que l'abandon des catalogues par les majors américaines vont accentuer une perte de culture de toute la population et qu'à force de ne penser la rentabilité que sur le film frais, ils se tirent une balle dans le pied.

Donc non, comme l'a dit Sybille, si on ne montre pas, cela s'oublie. C'est déjà le cas avec les films en n&b américains des années 40-50, par exemple, qui se vendent moins qu'avant.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:38
par tenia
Sybille a écrit : Au moins, des passionnés, en particulier quand c'est leur métier comme Thoret essaient de nous extirper de nos déterminismes et de nous faire découvrir ce vers quoi on ne serait pas naturellment allé.
Faudrait-il déjà que le grand public s'intéresse à Thoret.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 12:39
par El Dadal
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50 Et que plus globalement, cette forme de cinéma ne menace aucunement celle que lui chérit.
Dans le sens où le cinéma qu'il chérit est un cinéma passé et du passé, effectivement, il n'est pas menacé, il n'existe plus (ou c'est tout comme)...
Mais là où je ne peux être d'accord avec toi, c'est sur cette forme de déterminisme social d'un public venant se satisfaire d'un produit confectionné selon un tas de critères imposés (ceux-là même sur lesquels se basent les comités décisionnaires chez les majors pour greenlighter les projets qui viendront donc remplir certaines cases prédéfinies et qui fonctionnent tant qu'elles captent le zeitgeist) comme d'un fait inéluctable. Le moment que Thoret affectionne particulièrement dans l'histoire du cinéma a vu la convergence de l'art et du commerce, de l'apex artistique et du goût populaire. Il évoque une bulle temporelle pendant laquelle la rencontre de l'exigence artistique et du plaisir populaire était possible. Exemple bateau, Le parrain fut un succès planétaire, rendu possible par la présence de toutes les strates sociales en salles. Ce succès serait aujourd'hui impossible, justement parce que la compartimentalisation est à l'œuvre, dès la mise en route d'un projet, et qu'elle se retrouve encore plus en dehors des salles. Une forme dominante chasse l'autre, et il n'y a pas de place selon le modèle économique actuel pour autre chose. Ce constat rend le discours de Thoret assez triste, mais c'est bien parce qu'il n'est pas dupe. Des tas de films excellents sortent encore chaque année, lui-même le reconnaît, mais ils n'appartiennent plus à cette catégorie. Après, pour ce qui est de l'offre et de la demande, qui de la poule et de l'œuf...

Quant au point sur le nivellement par le bas, à ce moment de l'entretien, il me semble que Thoret l'évoquait au sujet de l'appareil critique actuel, et c'était donc aussi mon cas. Le "tout se vaut", le petit avis péremptoire, mais sous d'autres formes et diktats promotionnels que par le passé, c'est ça qui était en jeu. Certes, sur YouTube par exemple, j'ai bien quelques contre-exemples en tête (Every Frame a Painting, Cinéma & Politique) mais ça reste pauvre comparé à l'âge d'or de la presse papier, de la lecture et du temps long (et quasiment jamais en lien avec l'actualité, où c'est une hécatombe).

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:01
par murphy
Spongebob a écrit : 12 janv. 24, 12:21
Addis-Abeba a écrit : 12 janv. 24, 12:17

Non beaucoup plus de gens s'en foutent de La prisonnière du désert que d'Avengers 8, mais oui ca n'a rien d'illogique.
Après la différence se fait peut-être plus sur le fait que l'on s'intéressait d'avantage à ce qu'il y avait avant nous, que cette nouvelle génération.
Certainement lié au fait qu'on a connu un temps où des classiques étaient diffusés à 20h50 sur des grandes chaînes hertziennes, qui elle-même se comptaient sur les doigts de la main.
Au collège-lycée, j'étais quasiment le seul à enregistrer des films du Cinéma de Minuit (et je ne me suis jamais considéré pour autant comme cinéphile). Même la Dernière Séance était loin d'être populaire, c'était des westerns pour Papa. Quasi tout le monde traînait au vidéo-club, louait le dernier blockbuster et ça faisait le week-end.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:04
par nunu
Addis-Abeba a écrit : 12 janv. 24, 12:17
Jeremy Fox a écrit : 12 janv. 24, 12:08

Voilà.
Non beaucoup plus de gens s'en foutent de La prisonnière du désert que d'Avengers 8, mais oui ca n'a rien d'illogique.
Après la différence se fait peut-être plus sur le fait que l'on s'intéressait d'avantage à ce qu'il y avait avant nous, que cette nouvelle génération.
Moi je vois surtout ça comme le fait que si les jeunes d'aujourd'hui ne s'interesse pas a John Ford au bout d'un moment il n'y aura plus personne pour s'y nteresser. Parce que si les gens de ma génération (j'ai 40 ans) s'y sont interessé c'est aussi parce qu'il y a eu des passeurs,des gens qui s'y sont interessé et qui ont passé le flambeau. mais bientot il n'y aura plus de flambeau a passer. Si ça se trouve dans 50 ans plus personne ne se souviendra de John Ford. je vois au boulot quand je propose un film des années 80 ou 90 a des gamins il n'en veulent pas parce que c'est vieux. Je galère a leur faire regarder des Terminator ou des Blade Runner alors que c'est des fans de SF. Alors John Ford vous pensez bien.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:15
par tenia
El Dadal a écrit : 12 janv. 24, 12:39Exemple bateau, Le parrain fut un succès planétaire, rendu possible par la présence de toutes les strates sociales en salles. Ce succès serait aujourd'hui impossible, justement parce que la compartimentalisation est à l'œuvre, dès la mise en route d'un projet, et qu'elle se retrouve encore plus en dehors des salles.
Il me semble que cette année vient précisément prouver le contraire avec Oppenheimer. On pourrait légitimement considérer aussi que "toutes les strates sociales" se sont retrouvées en salles pour Avatar 2 (et potentiellement Top Gun 2), et il y a sûrement d'autres cas trouvables sur les années précédentes encore (The Martian en 2015 ? Dawn of the Planet of the Apes et American Sniper en 2014 ? Les Indestructibles 2 ?).
El Dadal a écrit : 12 janv. 24, 12:39Quant au point sur le nivellement par le bas, à ce moment de l'entretien, il me semble que Thoret l'évoquait au sujet de l'appareil critique actuel, et c'était donc aussi mon cas. Le "tout se vaut", le petit avis péremptoire, mais sous d'autres formes et diktats promotionnels que par le passé, c'est ça qui était en jeu.
Dans ce contexte, effectivement. Il y a surtout, je trouve, une surexploitation mercantile d'avis pétés de gens tenant au final de personnes lambdas paraissant souvent plus ravies par l'avant-première proposée (et/ou les goodies qui vont avec) que par le film en question mais c'est pas grave, elles seront "corporate". Je pense que c'est un des gros travers d'il y a quelques années, où la démocratisation d'internet est venue avec la démocratisation des avis qu'on pouvait y laisser, et Amazon, Allociné, IMDB et cie ont donné l'impression que même Michel245785 pouvait avoir un avis intéressant à publier et à lire (alors que non).
En parallèle, on trouve des Kevin Smith qui explique à chaque nouveau Marvel qu'ils ont encore plus pleuré devant Avengers 8 que devant le 7 que devant le 6 qu'à l'enterrement de leur grand mère, ce qui n'aide pas grand monde à la longue.

Reste que là encore : de toute manière, qui lit encore des critiques de nos jours, et à partir de quel moment, si changement il y a eu, on en est arrivés là ?
Parce que sinon, ces passionnés ne font de toute façon que parler à d'autres passionnés, donc ça ne change rien, cela ne touchera toujours pas plus le grand public, c'est du vase close.
Nestor Almendros a écrit : 12 janv. 24, 12:38Donc non, comme l'a dit Sybille, si on ne montre pas, cela s'oublie. C'est déjà le cas avec les films en n&b américains des années 40-50, par exemple, qui se vendent moins qu'avant.
J'ai tendance à penser en terme d'échelle : moins qu'avant, très probablement, mais quel écart entre un film US en N&B des 40s-50s de nos jours face au blockbuster du moment, vs la même comparaison y a, disons, 15 ans ?
Addis-Abeba a écrit : 12 janv. 24, 12:17Non beaucoup plus de gens s'en foutent de La prisonnière du désert que d'Avengers 8, mais oui ca n'a rien d'illogique.
Ce que je veux dire par là, c'est qu'Avengers 8 ou La prisonnière du désert, ce sera regardé un soir car ça passe à la télé et hop, une semaine plus tard, le souvenir en sera réduit à une expression simple.
Addis-Abeba a écrit : 12 janv. 24, 12:17Après la différence se fait peut-être plus sur le fait que l'on s'intéressait d'avantage à ce qu'il y avait avant nous, que cette nouvelle génération.
Non, déjà avant, le grand public était méga majoritaire, les passionnés minoritaires.
J'ai 36 ans, et je suis plus passionné que tout mon entourage, générations précédentes incluses. C'est juste une question de centres d'intérêt, pas de générations.
Et par ailleurs, pendant qu'on s'intéresse et qu'on regarde ces films là, on ne s'intéresse pas et ne regarde pas d'autres films que les autres personnes peuvent regarder. A nouveau, on a tous nos trous dans la raquette.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:21
par innaperfekt_
Sybille a écrit : 12 janv. 24, 12:28 Qu'est-ce qui est le plus méprisant entre - certes, peut-être éprouver un peu de condescendance à l'égard de ceux qui regardent tel genre de films, ou se dire que ce n'est pas de leur faute, c'est le "déterminisme social et les inégalités" qui régissent les êtres humains. Ces "personnes-là" sont prédestinées à ne s'intéresser qu'aux oeuvres populaires de toute façon parce que c'est comme ça d'après la sociologie. Au moins, des passionnés, en particulier quand c'est leur métier comme Thoret essaient de nous extirper de nos déterminismes et de nous faire découvrir ce vers quoi on ne serait pas naturellment allé.
Je ne dirais pas prédestinés mais c'est un facteur de réalité que tu ne peux pas oublier comme ça et je ne le trouve pas condescendant. Quant à la mission de Thoret de ce côté, je le reconnais aisément et il est très bon là-dedans. Mais qu'il reste là-dessus, qu'il continue à simplement parler de cinéma et qu'il nous épargne son idéologie passéiste et sa haine de l'actualité.
Nestor Almendros a écrit : 12 janv. 24, 12:38 Donc non, comme l'a dit Sybille, si on ne montre pas, cela s'oublie. C'est déjà le cas avec les films en n&b américains des années 40-50, par exemple, qui se vendent moins qu'avant.
Tu parles justement en terme de ventes. Tu bases l'intérêt et la mise en avant de ces vieux films sur une base commerçante. Alors que l'accessibilité pirate à tous ces films est infini. C'est ça, dans notre ère, qui est justement formidable. Combien de cinéphiles de 20 ans sont, tranquillement, dans leur coins, entrain de découvrir Ford, Wellman et le cinéma HK en piratant gentiment tous ces films, sans que Thoret et ses potes ne soient au courant ? Énormément, j'en suis sur. Et des passionnés, vieux ou jeunes, voulant faire encore de la restauration, y en aura toujours. Regardez tous ces éditeurs de BR actuels. Comment on peut s'en inquiéter ?
nunu a écrit : 12 janv. 24, 13:04 Moi je vois surtout ça comme le fait que si les jeunes d'aujourd'hui ne s'interesse pas a John Ford au bout d'un moment il n'y aura plus personne pour s'y nteresser. Parce que si les gens de ma génération (j'ai 40 ans) s'y sont interessé c'est aussi parce qu'il y a eu des passeurs,des gens qui s'y sont interessé et qui ont passé le flambeau. mais bientot il n'y aura plus de flambeau a passer. Si ça se trouve dans 50 ans plus personne ne se souviendra de John Ford. je vois au boulot quand je propose un film des années 80 ou 90 a des gamins il n'en veulent pas parce que c'est vieux. Je galère a leur faire regarder des Terminator ou des Blade Runner alors que c'est des fans de SF. Alors John Ford vous pensez bien.
Mais c'est complètement faux ! Qui ici fréquente vraiment régulièrement, tous ces jeunes, dont vous et Thoret parlaient ?
J'ai deux potes de 23 et 26 ans qui adorent John Ford et contredisent complètement ton propos.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:25
par Addis-Abeba
murphy a écrit : 12 janv. 24, 13:01
Spongebob a écrit : 12 janv. 24, 12:21
Certainement lié au fait qu'on a connu un temps où des classiques étaient diffusés à 20h50 sur des grandes chaînes hertziennes, qui elle-même se comptaient sur les doigts de la main.
Au collège-lycée, j'étais quasiment le seul à enregistrer des films du Cinéma de Minuit (et je ne me suis jamais considéré pour autant comme cinéphile). Même la Dernière Séance était loin d'être populaire, c'était des westerns pour Papa. Quasi tout le monde traînait au vidéo-club, louait le dernier blockbuster et ça faisait le week-end.

Je ne me souviens plus, je sais que je me suis forgé tout seul, même si le fait de regarder la dernière séance avec mon père a du me donner le gout des vieux films, mais lui ne regardé pratiquement que des westerns 8)

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:34
par innaperfekt_
El Dadal a écrit : 12 janv. 24, 12:39
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50 Et que plus globalement, cette forme de cinéma ne menace aucunement celle que lui chérit.
Dans le sens où le cinéma qu'il chérit est un cinéma passé et du passé, effectivement, il n'est pas menacé, il n'existe plus (ou c'est tout comme)...
Mais là où je ne peux être d'accord avec toi, c'est sur cette forme de déterminisme social d'un public venant se satisfaire d'un produit confectionné selon un tas de critères imposés (ceux-là même sur lesquels se basent les comités décisionnaires chez les majors pour greenlighter les projets qui viendront donc remplir certaines cases prédéfinies et qui fonctionnent tant qu'elles captent le zeitgeist) comme d'un fait inéluctable. Le moment que Thoret affectionne particulièrement dans l'histoire du cinéma a vu la convergence de l'art et du commerce, de l'apex artistique et du goût populaire. Il évoque une bulle temporelle pendant laquelle la rencontre de l'exigence artistique et du plaisir populaire était possible. Exemple bateau, Le parrain fut un succès planétaire, rendu possible par la présence de toutes les strates sociales en salles. Ce succès serait aujourd'hui impossible, justement parce que la compartimentalisation est à l'œuvre, dès la mise en route d'un projet, et qu'elle se retrouve encore plus en dehors des salles. Une forme dominante chasse l'autre, et il n'y a pas de place selon le modèle économique actuel pour autre chose. Ce constat rend le discours de Thoret assez triste, mais c'est bien parce qu'il n'est pas dupe. Des tas de films excellents sortent encore chaque année, lui-même le reconnaît, mais ils n'appartiennent plus à cette catégorie. Après, pour ce qui est de l'offre et de la demande, qui de la poule et de l'œuf...
Selon notre brave Jean-Baptiste, mais le point de vue de plein de gens doit être différent. Je suis quasi sûr que pour beaucoup de jeunes, des films comme Avatar, The Batman, Oppenheimer voire même Barbie sont la rencontre d'une exigence artistique et d'un plaisir populaire. Ça n'est juste pas le cas pour Thoret et c'est ça qu'il ne peut pas supporter et qu'il le tourne vers le mépris.

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 13:39
par cinephage
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 11:50
El Dadal a écrit : 12 janv. 24, 11:39 Je ne vois pas trop ce qu'il y a de choquant à ce qu'un critique défende la forme de prédilection de son art chéri. Il a bien raison de démonter cette tendance actuelle prédominante de subjectivité à outrance, du "tout se vaut". Bien sûr qu'il existe des échelles de valeur, encore heureux. La base du combat critique, ce n'est pas de renvoyer la balle au centre à tout bout de champ, ça c'est une forme de confort et de paresse, aussi appelé nivellement par le bas.
C'est pas du tout ce dont j'ai parlé, en ce qui me concerne. Je partage clairement le fait que le tout se vaut est faux. Le problème que j'évoque, c'est que sous toutes les circonvolutions de la prose de Thoret, je ne vois que du mépris pour les gens s'intéressant à ces oeuvres populaires et jugées idiotes. Et que c'est la faute des médias, du capitalisme et du formatage si ces films sont produits et disposés plus largement au public. Il ne tient absolument pas compte du déterminisme social, des inégalités entre les êtres humains et tout un tas d'autres concepts sociologiques inhérents à ces choses là. Et que plus globalement, cette forme de cinéma ne menace aucunement celle que lui chérit.
Dans ta réaction, tu sembles mettre de coté le rôle du critique. Par définition, il est celui qui doit s'efforcer de trier le bon grain de l'ivraie, jouer le passeur, tirer les tendance, analyser les styles et les références ou l'héritage d'une oeuvre. Sous cet angle, je comprends assez la position de Thoret. C'est son rôle de mettre en avant certaines oeuvres.
Après, il y a plusieurs soucis ici, liés à la confusion, dans le cinéma autour du rôle du critique.

- Le critique doit connaître l'histoire du cinéma, mais il n'est pas historien, et ne saurait imaginer que le public le soit. Or beaucoup de critiques sont aussi professeurs en fac, ce qui résulte en une confusion des rôles et des missions du critique.

- Le critique doit dissocier l’œuvre importante de celle qu'il aime. Définir une théorie du gout, construire un appareillage critique, pourquoi pas ? Mais s'il est inapplicable à l'essentiel des œuvres produites aujourd'hui, il est inopérant et à la limite de l'absurde. C'est un autre des écueils dans lequel tombent beaucoup de critiques. Faute d'intérêt pour les œuvres les plus courantes, ils donnent parfois l'impression de vivre dans un autre monde, de voir des œuvres qu'ils sont les seuls à voir (et à apprécier), creusant l'écart entre LA Critique et le public. Le critique se retrouve marginalisée et y perd sa crédibilité à n'évoquer que ces films rares ou peu vus/visibles.

- Enfin, il y a critique et critique. Tout discours sur le cinéma n'a pas vocation à être critique, n'en déplaise à la généralisation du terme qui a pu autrefois faire ricaner certains membres de ce forum (cf Monique Pantel). Internet a démultiplié les discours autour du cinéma, des discours plus ou moins autodidactes, plus ou moins inspirés, pas forcément produits par des critiques disposant des outils intellectuels propre à l'analyse filmique ou à l'explicitation d'un œuvre. Cet démultiplication des discours marginalise celui du critique, qui devient une voix parmi d'autres, et il en ressort une perte d'écoute. Alors que le critique est censé critiquer, il est entendu comme producteur de gout, parce que son discours se noie parmi d'autres. Son savoir perd de son sens, de sa portée, on n'en retient que des détails (il n'aime pas les Marvel) ou des caricatures (effet de distorsion bien connu des réseaux sociaux).
Bref, on vit une sale période pour la critique de cinéma, et je comprends assez la position de Thoret, qui n'a pas besoin d'être amateur de tous les cinéma de tous les genres pour être un bon critique (et qui est plus un historien du cinéma qu'un critique, à vrai dire).

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 14:00
par tenia
innaperfekt_ a écrit : 12 janv. 24, 13:21le cinéma HK
A priori, rien qu'en restant sur les ventes, au vu de ce sur quoi se sont rués les éditeurs vidéo anglo-saxons depuis quelques années, il y a actuellement des brouettes de films HK (60s, 70s, 80s, 90s) qui se vendent comme rarement auparavant. Comment on prend cela en compte face aux films US 40s/50s en N&B qui se vendraient moins ? Moi je vois surtout ça comme un rappel de la multiplicité des centres d'intérêt de chacun, y compris parmi les plus cinéphiles, d'où le besoin (comme je l'écrivais au début) de bien définir l'échantillon considéré quand on parle évolution des mœurs.
(et je ne parle même pas de questionner si Thoret s'y connait en Joseph Kuo et en Wong Jing)

Re: Jean-Baptiste Thoret

Publié : 12 janv. 24, 14:23
par El Dadal
Merci cinéphage, ton message vient parfaitement compléter ma pensée sur cette partie du sujet.

Quant aux comparaisons entre Le parrain et les succès d'aujourd'hui, vous n'êtes pas très sérieux je trouve. C'est justement le relativisme dont on parlait et dont il faudrait un peu revenir.
Il faut remettre les œuvres dans leur contexte (Coppola inconnu du grand public, casting de nouvelles têtes, Brando has been... L'adaptation d'un gros succès littéraire comme seule véritable concession aux modes de l'époque, tout le reste n'est qu'immense prise de risque)... Nolan a, lui, enchaîné parmi les plus gros blockbusters de ces vingt dernières années, il a un casting AAA etc... Seul son sujet plus complexe le met à part des autres films cités. Thoret fait d'ailleurs une remarque très intéressante sur le choix des sujets, quand il évoque Tarantino, qui selon lui voit son heure arriver car il a perdu la connexion avec son temps, et quand le public n'a plus la référence. Quand certain(e)s vont voir Once Upon a Time... in Hollywood sans avoir la moindre référence contextuelle, oui, ça peut poser problème, et donc accentue le facteur risque pris en compte par les studios dans la mise en œuvre d'autres films du même acabit. Le travail critique devient crucial dans ces moments-là (et si le nom de Thoret ne dira rien à beaucoup, c'est justement le fait d'avoir utilisé sa plume - ou celle d'autres critiques de son accabit - à Charlie ou Libé qui permet à certains lecteurs d'aller au-délà, et d'apprécier un film autrement qu'au niveau superficiel du divertissement).
Pour les autres Top Gun 2 etc... Suites, remakes, franchises. Les paramètres de mise en œuvre sont radicalement différents, la prise de risque calibrée au minimum.

PS : 1972 en box office avec une diversification que l'on n'est pas prêts de retrouver en haut de la pyramide.
FR
1. Orange mécanique Stanley Kubrick 6 193 896 entrées
2. Les Fous du stade Claude Zidi 5 744 270 entrées
3. Le Dernier Tango à Paris Bernardo Bertolucci 5 150 995 entrées
4. Il était une fois la révolution Sergio Leone 4 723 338 entrées
5. Les Charlots font l'Espagne Jean Girault 4 162 897 entrées
6. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil Jean Yanne 4 076 678 entrées
7. Le Parrain Francis Ford Coppola 4 016 877 entrées
8. L'Aventure c'est l'aventure Claude Lelouch 3 815 477 entrées
9. Le Grand Blond avec une chaussure noire Yves Robert 3 471 266 entrées
10. On continue à l'appeler Trinita Enzo Barboni 3 038 838 entrées
US
1 The Godfather $86,300,000
2 The Poseidon Adventure $42,000,000
3 What's Up, Doc? $28,000,000
4 Deliverance $22,500,000
5 Jeremiah Johnson $21,900,000
6 Cabaret $20,250,000
7 Deep Throat $20,000,000
8 The Getaway $18,000,000
9 Lady Sings the Blues $9,666,000
10 Everything You Always Wanted to Know About Sex $8,828,000
Et notez que dans tout ça, je ne juge pas de la qualité intrinsèque des films.