Sugarfoot - Swirl of Glory (1951) de Edwin L. marin
WARNER
Avec Randolph Scott, Raymond Massey, S.Z. Sakall, Robert Warwick, Arthur Hunnicutt, Adele Jergens, Hank Worden
Scénario : Russell S. Hughes
Musique : Ray Hendorf & Sammy Cahn
Photographie : Wilfrid M. Cline
Une production de Saul Elkins pour la Warner
Sortie USA : 11 février 1951
En ce début d'année 1951, la Warner ne m'aura malheureusement pas fait mentir (par rapport à ce que je disais lorsque j'ai abordé
Dallas de Stuart Heisler), poursuivant sur sa lancée peu glorieuse, celle de produire et de distribuer les plus mauvais westerns de l'époque. Si ceux de l'année précédente étaient pour la plupart médiocres (faisons une exception pour
La Révolte des Dieux rouges - Rocky Mountain de William Keighley qui, même s'il ne m'a pas fait grande impression, contenait des éléments assez originaux pour pouvoir plaire à certains),
Sugarfoot atteint des tréfonds dans la nullité ; en quelque sorte l'équivalent des westerns de Richard Thorpe pour la MGM dans les années 40. Et évidemment, ce n'est bénéfique pour personne, pas plus pour les acteurs que pour les spectateurs. Bénéficiant d'un budget de série B,
Sugarfoot fait bien plus penser à de la série Z.


La Guerre Civile ayant pris fin, Jackson Redan (Randolph Scott) et Jacob Stint (Raymond Massey) rejoignent un convoi de pionniers se dirigeant vers l'Ouest. Ils espèrent y faire fortune et pouvoir recommencer leur vie, tous leurs biens s'étant volatilisés durant le conflit. Autant Jackson, ancien aristocrate, est engoncé dans ses principes d'honneur et de droiture, autant son compagnon de voyage est un homme cynique et sans scrupules. Ils arrivent enfin à Prescott en Arizona, décident de s'y établir tout en espérant ne plus se côtoyer. Jackson trouve du travail auprès de Don Miguel Wormser (S.Z. Sakall), un commerçant qui lui demande de l'aide pour aller négocier de la marchandise dans une ville voisine, La Paz. La route pour s'y rendre étant dangereuse (indiens, hors-la-loi...), Jackson se fait accompagner par un prospecteur du nom de Fly-up-the-creek Jones (Arthur Hunnicutt). De retour à Prescott, Jackson se voit dans l'obligation de se battre en duel avec Jacob Stint ; en effet, s'étant fait dérober une coquette somme juste avant de se rendre à La Paz, il apprend que Jacob était son voleur. Mais Jackson est blessé ; il est soigné par la jolie entraîneuse du saloon, Reva Cairns (Adele Jergens) à laquelle il n'est pas insensible...


Et déjà là, rien qu'à essayer de vous raconter le début de cette histoire totalement inintéressante, je commence à fatiguer et tout simplement à ne pas arriver à aller plus loin. En effet, passé la moitié du film, on finit par tellement se fiche de ce qui se déroule devant nos yeux qu'on décroche sans plus n'y rien comprendre. Le scénariste Russell S. Hughes fera mieux par la suite (dès son travail suivant d'ailleurs avec Andre De Toth) mais rien ne pouvait le laisser penser à la vision de ce
Sugarfoot au script totalement idiot. Et on se rend compte de la médiocrité du film dès son prologue ; la voix off présente le personnage de Raymond Massey en nous disant d'un ton grave et inquiétant qu'il s'agit d'un homme cynique et sans scrupules. On s'en serait à peine douté car que fait l'acteur pendant ce temps ? Il roule des yeux, tord sa bouche et grimace presque aussi exagérément que le fera Jerry Lewis plus tard. Dès cet instant, on est un peu gêné pour le comédien qui était autrement plus convaincant dans le personnage halluciné de John Brown dans
La Piste de Santa Fe (Santa Fe Trail) de Michael Curtiz. Son jeu n’était déjà pas d’une exemplaire sobriété mais son personnage était au moins haut en couleur. Ici, il se ridiculise d’entrée ; mais peut-être aussi que si son jeu caricatural est autant visible c’est par contraste à la fadeur extrême de tous ses partenaires y compris Randolph Scott qui a rarement été aussi terne et peu convainquant (probablement peu convaincu par son personnage d’homme de l’Ouest dandy surnommé Sugarfoot pour l’élégance de ses costumes). On sait qu’il porte la chemise comme personne et ici aussi encore ; mais à part ça, il ne se révèle pas meilleur que S.Z. Sakall et Arthur Hunnicutt, étonnamment amorphes alors qu’habituellement réputés pour apporter une touche de cocasserie ou de truculence, ou que l’actrice principale, Adele Jergens, sortie d’on ne sait où mais dont on comprend facilement qu’elle n’ait pas fait une grande carrière ; le personnage de godiche chantante qu’elle a eu à interpréter n’a pas du aider non plus mais n’excuse pas un tel manque de talent dramatique. Patricia Neal a bien fait de refuser le rôle qui lui était au départ dévolu même si nous y aurions certainement gagné au change.


Rare indigence au niveau du scénario et de l’interprétation ; malheureusement il en va de même pour la mise en scène. Edwin L. Marin nous avait fait passer quelques moments plaisants avec de précédents westerns tels
L’Amazone aux Yeux Verts (Tall in the Saddle) avec John Wayne ou, déjà avec Randolph Scott, le mouvementé
Abilene Town. Ca commençait à se gâter avec
Colt 45 mais ce n’était encore rien en comparaison de ce navet dont même les séquences d’action sont honteusement bâclées. Bref, que reste t-il en sa faveur : sa courte durée, véritable bénédiction pour le westernophile qui demande désormais autre chose que ces films ultra conventionnels, dépourvus de tout intérêt et tournés à la va vite sans aucune once de talent de la part de l’équipe technique (même Max Steiner n’est plus l’ombre que de lui-même avec sa partition aux ses effets appuyés, sans ampleur ni imagination ; et malheureusement ça fait un moment que ça dure). Quant en plus de tout ça, on se retrouve avec un héros engoncé dans ses principes moralisateurs qu’il nous ressasse jusqu’à plus soif, on se dit qu’il est temps d’arrêter les frais et de passer au film suivant. Mais ceux qui auront été amusé par le personnage de Sugarfoot doivent néanmoins savoir qu’une série a été mise en chantier en 1957 avec Will Hutchins dans le rôle titre au côté d’Arthur Hunnicutt à nouveau présent.