Moi j'ai justement l'impression que c'est le point faible du film... Je sais qu'il est assez apprécié ici, mais personnellement je l'ai toujours trouvé un peu fade dans ses rôles comiques. Si cela peut passer dans Ninotchka, ce n'est malheureusement pas le cas ici où son manque de timing fait cruellement défaut et fait que bon nombre des gags tombent un peu à plat. Douglas n'est malheureusement pas Cary Grant ou William Powell qui auraient donné plus de vitalité à cette comédie (notamment dans les scènes de quiproquo). Dommage car effectivement sur le papier l'histoire avait tout pour plaire, mais à la sortie, il m'est resté un goût de trop peu...Julien Léonard a écrit : La présence de Melvyn Douglas, toujours aussi parfait, pouvait lui donner un vrai réceptacle d'énergie. Les coups pendables de l'acteur, ainsi que ses nombreuses chutes de skis provoquent le rire, et l'homme s'y entend pour former avec Garbo un couple formidable.
George Cukor (1899-1983)
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Re: George Cukor (1899-1983)

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Re: George Cukor (1899-1983)
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Je n'ai pas trouvé le film si inintéressant sur le fond, il y a même de réelles qualités quant à la peinture de ce personnage charismatique en diable mais pourtant si criticable, mais je m'y suis parfois un peu ennuyé. Il y a de vraies longueurs et l'on n'arrive que rarement à ne pas sentir le matériau théatral dont le film s'inspire. On reste trop calqué sur la structure de la pièce (une époque, une scène en huis clos), certains dialogues sont aussi un peu trop explicatifs et maniérés. D'une façon générale d'ailleurs la démonstration est un peu insistante et lourde. C'est encore une fois dommage parce que la mise en scène de Cukor sait parfois se faire originale (l'arrivée au collège et ce plan à 360°, ou les nombreux plans-séquence). Non, le plaisir vient une fois n'est pas coutûme, de son casting. Et pour une fois Deborah Kerr ne m'aura pas spécialement séduit ici. Je dirais même que la performance de son rôle (déchéance alcoolique) a bien du mal, aujourd'hui, à ne pas paraître factice et presque surjoué (et certainement surmaquillée). Non le vrai intérêt du film, c'est Spencer Tracy, grand acteur qui prouve encore une fois son immense talent, captivant les foules par une énergie et un bagout inépuisables, modulant son jeu pour garder en permanence une humanité indispensable à l'empathie d'un personnage qui se dévoile peu à peu sous un jour négatif.
Je n'ai pas trouvé le film si inintéressant sur le fond, il y a même de réelles qualités quant à la peinture de ce personnage charismatique en diable mais pourtant si criticable, mais je m'y suis parfois un peu ennuyé. Il y a de vraies longueurs et l'on n'arrive que rarement à ne pas sentir le matériau théatral dont le film s'inspire. On reste trop calqué sur la structure de la pièce (une époque, une scène en huis clos), certains dialogues sont aussi un peu trop explicatifs et maniérés. D'une façon générale d'ailleurs la démonstration est un peu insistante et lourde. C'est encore une fois dommage parce que la mise en scène de Cukor sait parfois se faire originale (l'arrivée au collège et ce plan à 360°, ou les nombreux plans-séquence). Non, le plaisir vient une fois n'est pas coutûme, de son casting. Et pour une fois Deborah Kerr ne m'aura pas spécialement séduit ici. Je dirais même que la performance de son rôle (déchéance alcoolique) a bien du mal, aujourd'hui, à ne pas paraître factice et presque surjoué (et certainement surmaquillée). Non le vrai intérêt du film, c'est Spencer Tracy, grand acteur qui prouve encore une fois son immense talent, captivant les foules par une énergie et un bagout inépuisables, modulant son jeu pour garder en permanence une humanité indispensable à l'empathie d'un personnage qui se dévoile peu à peu sous un jour négatif.
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Re: George Cukor (1899-1983)
What Price Hollywood ? (1932) de George Cukor avec Constance Bennett, Lowell Sherman, Neil Hamilton et Gregory Ratoff
Mary Evans (C. Bennett), une jeune serveuse, devient une star de cinéma grâce au réalisateur Max Carey (L. Sherman). Mais ce dernier sombre dans l'alcool...
En 1932, David O. Selznick est producteur à la RKO. C'est lui qui a l'idée de monter un film pour montrer l'envers du décor hollywoodien. L'histoire originale d'Adela Rogers St. John, qui sert de base au scénario, est inspirée de la vie de Colleen Moore qui fut lancée par le producteur John McCormick, dont elle devint plus tard l'épouse. La carrière de celui-ci fut détruite par son alcoolisme. Mais, au fil des réécritures du scénario qui va passer entre les mains de plusieurs scénaristes, d'autres personnages célèbres vont servir de modèle tel Marshall Neilan, un réalisateur très talentueux du muet qui fut lui aussi détruit par l'alcool. Au final, le scénario nous offre une vision, par moment un peu édulcorée, de la trajectoire d'une jeune femme ambitieuse qui va réussir à devenir une star à force de persévérance. Le producteur joué par Gregory Ratoff est un bon bougre paternaliste qui massacre l'anglais. Constance Bennett joue finalement un rôle qui lui ressemble. En 1932, elle est au sommet de sa popularité et elle gagne un salaire mirobolant. Elle va épouser un marquis, ancien mari de Gloria Swanson avant de se désintéresser du cinéma, contrairement à sa soeur Joan qui continuera à y travailler jusqu'au bout. Elle épouse dans le film un fils à papa, joué par Neil Hamilton, un beau clin d'oeil. Mais, c'est finalement le personnage du réalisateur Max Carey joué par le comédien et réalisateur Lowell Sherman qui retient l'attention. Hanté par ses démons, il perdra pied à Hollywood, noyant son désespoir dans l'alcool. Puis, il se suicidera. C'est d'ailleurs cette séquence du suicide qui retient l'attention. Selznick avait embauché le monteur Slavko Vorkapich pour réaliser cette séquence avec Cukor. Avec une succession de surimpressions, il revoit son passé et ce qu'il est maintenant. Le montage se fait plus frénétique alors qu'il sort un révolver pour mettre fin à ses jours. Cette séquence superbement orchestrée fait regretter que le reste du film ne soit pas plus au niveau de celle-ci. Les rapports entre Max et Mary sont filiaux et ne sont jamais ambigus. De même que le producteur bonasse paraît quand même bien trop sympathique. J'avais vu ce film il y a plusieurs années, mais je ne m'en souvenais guère. Cette revision m'a par certains côtés bien déçu. Nous sommes loin des visions nettement plus corrosives telles que Bombshell (1933, V. Fleming) ou de Stand-In (1937, T. Garnett) qui sont pourtant des comédies. Ce n'est guère étonnant que Selznick ait voulu revenir sur le sujet une deuxième fois en 1937 avec A Star is Born (1937, W.A. Wellman) qui est nettement meilleur et où les personnages ont plus d'étoffe. Ce film de Cukor est cependant digne d'intérêt.
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Re: George Cukor (1899-1983)
Haute Société, Our Betters (1933)

George Cukor signe ici l'adaptation d'un roman ou d'une nouvelle de Somerset Maugham. Mais le film date singulièrement, aucune histoire, juste une chronique de la vie futile de la haute société qui vit au rythme des infidélités des différents protagonistes, du qu'en-dira-t'on, des mariages de convenance. Il y a l'opposition entre l'américaine qui voudrait se marier par amour et qui veut se marier pour être comme sa soeur, une baronne voire plus et la vieille anglaise qui vit avec son gigolo, mais ne l'épousera que pour qu'il lui reste fidèle "sexuellement" parlant, le laissant libre de vivre à côté.
Constance Bennett est très belle et parfaite dans ce rôle de noble "débauchée". Les autres acteurs sont excellents, mais le film est bavard, il ne se passe rien, on sent une espèce d'inspiration théâtrale dans certaines scènes. Seul moment un peu meilleur, le duel entre Constance Bennett et Violet Kemble Cooper qui montre que Cukor allait se spécialiser dans ces portraits de femmes avec une certaine finesse. Mais Our Betters appartient à ces films d'ambiance sans grand intérêt, bien mis en scène, bien interprété, où le temps passe vite, mais où rien ne ressort réellement. Décevant !

George Cukor signe ici l'adaptation d'un roman ou d'une nouvelle de Somerset Maugham. Mais le film date singulièrement, aucune histoire, juste une chronique de la vie futile de la haute société qui vit au rythme des infidélités des différents protagonistes, du qu'en-dira-t'on, des mariages de convenance. Il y a l'opposition entre l'américaine qui voudrait se marier par amour et qui veut se marier pour être comme sa soeur, une baronne voire plus et la vieille anglaise qui vit avec son gigolo, mais ne l'épousera que pour qu'il lui reste fidèle "sexuellement" parlant, le laissant libre de vivre à côté.
Constance Bennett est très belle et parfaite dans ce rôle de noble "débauchée". Les autres acteurs sont excellents, mais le film est bavard, il ne se passe rien, on sent une espèce d'inspiration théâtrale dans certaines scènes. Seul moment un peu meilleur, le duel entre Constance Bennett et Violet Kemble Cooper qui montre que Cukor allait se spécialiser dans ces portraits de femmes avec une certaine finesse. Mais Our Betters appartient à ces films d'ambiance sans grand intérêt, bien mis en scène, bien interprété, où le temps passe vite, mais où rien ne ressort réellement. Décevant !
Dernière modification par Cathy le 26 févr. 12, 10:49, modifié 1 fois.
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Re: George Cukor (1899-1983)
Je m'apprête à le regarder !Cathy a écrit :Haute Société, Our Betters (1933)
George Cukor signe ici l'adaptation d'un roman ou d'une nouvelle de Somerset Maugham. Mais le film date singulièrement, aucune histoire, juste une chronique de la vie futile de la haute société qui vit au rythme des infidélités des différents protagonistes, du qu'en-dira-t'on, des mariages de convenance. Il y a l'opposition entre l'américaine qui voudrait se marier par amour et qui veut se marier pour être comme sa soeur, une baronne voire plus. Constance Bennett est très belle et parfaite dans ce rôle de noble "débauchée". Les autres acteurs sont excellents, mais le film est bavard, il ne se passe rien, on sent une espèce d'inspiration théâtrale dans certaines scènes. Seul moment un peu meilleur, le duel entre Constance Bennett et Violet Kemble Cooper qui montre que Cukor allait se spécialiser dans ces portraits de femmes avec une certaine finesse. Mais Our Betters appartient à ces films d'ambiance sans grand intérêt, bien mis en scène, bien interprété, où le temps passe vite, mais où rien ne ressort réellement. Décevant !

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Re: George Cukor (1899-1983)
Bon alors moi, si ça peut te rassurer, j'ai nettement plus aimé
Cela dit j'entends très bien les réserves de Cathy. Un critique a qualifié l'oeuvre de "comédie neo restauration", je crois qu'il y a un peu de ça. Comme l'a expliqué Cathy il ne se passe à peu près rien dans le film. C'est un exercice purement mondain, reposant uniquement sur des échanges acides et des manigances perfides pour arriver à ses fins. Qui plus est la plupart des personnages sont franchement antipathiques, y compris d'ailleurs l'héroïne, bel exemple de la manière dont la société peut corrompre une jeune femme a priori idéaliste.
Bref .. il faut vraiment aimer le genre (je ne vois pas énormément de films comparables, même si on peut parfois songer aux Invités de 8 heures ... ah et puis aussi il y a quelque chose d'"Avril Enchanté" aussi, à la réflexion, ce qui est assez cohérent au vu des goûts de Cathy, si je me rappelle bien
). Je pense que c'est plutôt l'adaptation d'une pièce, d'ailleurs ça se sent relativement (une grande partie de l'action se passe en 24 heures en un lieu clos).
Si j'osais (bon allez, j'ose) j'ajouterais que c'est un film très "queer" (ce qui ne doit pas dispenser les hétéros des deux sexes de le regarder ! A ce titre c'est justement intéressant). L'accent est mis sur le côté glamour et mondain, les situations sont plutôt scabreuses et surtout commentées avec le cynisme attendu (le personnage pathétique de la vieille duchesse prête à toutes les humiliations pour garder son gigolo est l'objet de tous les ridicules, mais le moment où il devient presque tragique est étonnant), les garçons sont surtout des objets de désirs (ce sont les femmes qui manipulent et qui décident). Il y a dans Haute-Société quelques unes des allusion les plus claires que j'ai vues dans le cinéma des années 30 à l'homosexualité (il se promène, au mileu de ces ladies qui se chamaillent un célibataire aussi cancanier et snob qu'elles. Il est explicitement dit qu'il ne courtise les dames "qu'en public" ... pour ne rien dire du danseur mondain maquillé à outrance qui intervient comme deus ex machina).
Enfin j'ajoute que c'est un témoignage plutôt intriguant d'un phénomène qui semble assez répandu pour avoir suscité une littérature : l'union des lords anglais avec les héritières américaines.
Bref ... encore une fois j'ai beaucoup aimé le film, que j'ai trouvé en plus très beau à regarder (avec des plans superbes sur Constance Bennett, magnifique, par exemple, en robe de mariée et en pleurs), mais il ne fera certainement pas l'unanimité, risquant, en particulier je pense, de susciter un certain ennui pour ceux qui ne rentrerait pas dans ce jeu singulier.

Bref .. il faut vraiment aimer le genre (je ne vois pas énormément de films comparables, même si on peut parfois songer aux Invités de 8 heures ... ah et puis aussi il y a quelque chose d'"Avril Enchanté" aussi, à la réflexion, ce qui est assez cohérent au vu des goûts de Cathy, si je me rappelle bien

Si j'osais (bon allez, j'ose) j'ajouterais que c'est un film très "queer" (ce qui ne doit pas dispenser les hétéros des deux sexes de le regarder ! A ce titre c'est justement intéressant). L'accent est mis sur le côté glamour et mondain, les situations sont plutôt scabreuses et surtout commentées avec le cynisme attendu (le personnage pathétique de la vieille duchesse prête à toutes les humiliations pour garder son gigolo est l'objet de tous les ridicules, mais le moment où il devient presque tragique est étonnant), les garçons sont surtout des objets de désirs (ce sont les femmes qui manipulent et qui décident). Il y a dans Haute-Société quelques unes des allusion les plus claires que j'ai vues dans le cinéma des années 30 à l'homosexualité (il se promène, au mileu de ces ladies qui se chamaillent un célibataire aussi cancanier et snob qu'elles. Il est explicitement dit qu'il ne courtise les dames "qu'en public" ... pour ne rien dire du danseur mondain maquillé à outrance qui intervient comme deus ex machina).
Enfin j'ajoute que c'est un témoignage plutôt intriguant d'un phénomène qui semble assez répandu pour avoir suscité une littérature : l'union des lords anglais avec les héritières américaines.
Bref ... encore une fois j'ai beaucoup aimé le film, que j'ai trouvé en plus très beau à regarder (avec des plans superbes sur Constance Bennett, magnifique, par exemple, en robe de mariée et en pleurs), mais il ne fera certainement pas l'unanimité, risquant, en particulier je pense, de susciter un certain ennui pour ceux qui ne rentrerait pas dans ce jeu singulier.
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Re: George Cukor (1899-1983)
J'ai pensé en le voyant à Avril enchanté
! Sinon c'est vrai que j'ai été surprise par le côté très "gay-friendly" avec ce danseur ouvertement homosexuel qui vient sauver la baronne en dansant un tango. J'ai surtout trouvé la première partie très longue, le film devenant piquant avec la "faute" de cette américaine et de Pepi, le gigolo. J'y ai vu une chronique sur "la Haute", mais c'est vrai qu'il ne s'y passe pas grand chose, et que Cukor a réalisé d'autres films bien plus marquants à cette époque-là, à commencer par What price Hollywood ! Par contre pour une fois je n'ai pas eu de problème d'empathie envers ces personnages pas forcément sympathiques
!


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Re: George Cukor (1899-1983)
Hantise (1944)

Quelques années plus tôt, Paula s'est enfuie de Londres après l'assassinat non élucidé de sa tante Alice. Établie depuis dix ans en Italie, elle y rencontre un pianiste, Gregory, qu'elle épouse. Par amour pour son mari, elle se laisse convaincre de revenir habiter dans la maison où sa tante a été étranglée. Mais le bonheur ne dure pas. À peine installé à Londres, Gregory commence à se montrer de plus en plus distant avec sa femme et l'accuse de perdre la tête. Peu à peu, Paula se laisse convaincre de douter de sa propre santé mentale.
George Cukor réalisait avec ce Gaslight un des sommets du thriller psychologique et gothique, registre où on ne l'attendait pas forcément. On peut en dire autant de son interprète principale Ingrid Bergman déroutante ici dans une prestation fragile et vulnérable à la Joan Fontaine. D'ailleurs l'ensemble lorgne fortement sur le Rebecca d'Hitchcock avec en toile fond une thématique voisine sur le souvenir d'un être disparu et l'influence sur des personnages amené à vivre en des lieux marqués de sa personnalité. Hantise est cependant bien moins mystérieux et ambigu dans sa teneur possiblement fantastique, et comprend bien vite que l'intérêt n'est pas forcément dans la résolution qui malgré quelques se surprise est plutôt attendue. Le mari à l'amour pressent se muant en véritable tyran joué par Charles Boyer est rapidement démasqué par le spectateur, tout comme l'objectif possiblement pécuniaire dont la véritable nature se révèlera en conclusion.


L'intérêt ne repose donc pas sur le mystère à résoudre (la touche policière étant finalement assez routinière) mais clairement dans le traitement narratif de George Cukor. L'ouverture dans une ruelle londonienne au soir d'un meurtre pose l'ambiance avec sa place inquiétante plongée dans la brume, les bâtisses victoriennes sombres et imposantes derrière celle-ci et les silhouettes se perdant dans le décor. Cette introduction magistrale et toute en atmosphère nous fait apparaître un Ingrid Bergman hébétée par l'horreur à laquelle elle vient d'assister et laisse deviner quasi sans dialogue la fragilité mentale de Paula. Tous ses aspects se trouvent exacerbés lorsqu'on revient en ces lieux quelques années plus tard. Seulement tout ce qui suggérait un possible virage fantastique se trouve progressivement escamoté lorsqu'on devine la manipulation d'un Charles Boyer d'une ignominie absolument prodigieuse auréolant son charme et bagout naturel d'une aura terriblement inquiétante.


Cukor met sa mise en scène au service de cette cruauté mentale et de l'illustration de l'esprit à la dérive d'Ingrid Bergman. Tous les artifices se déploient donc entre les champs contre champs jouant entre le regard inquisiteur et pénétrant de Boyer et celui apeuré de Bergman ou le jeu sur les arrière-plans (la silhouette de Boyer au début de la scène du tableau disparu) et le hors champs (l'ombre de Boyer se dessinant lorsque Bergman pense avoir perdu sa broche) accentuant la paranoïa et le sentiment d'être constamment observé. Le jeu sur la photo traduit également la dérive de Bergman avec cette fameuse lampe à gaz à la lumière aussi vacillante que l'esprit de son héroïne perturbée et Cukor traduit avec un brio cruel ce sentiment d'oppression, notamment lorsque les bruits étranges entendus par Bergman se muent en magma sonore accompagné d'un mouvement de caméra en plongée sur celle-ci apeurée sur son lit. Lors de la conclusion, les yeux de Charles Boyer brilleront un court instant d'un éclat avide et scintillant lorsqu'on aura connu le but de ses manigances. Le travail de Joseph Ruttenberg est impressionnant de bout en bout.

Ingrid Bergman est absolument extraordinaire de fragilité et suscite une empathie parfaite son trouble avec un travail impressionnant sur la gestuelle de plus en plus incertaine, le regard vide et une allure recroquevillée constante. La prise de conscience finale lors de l'ultime face à face avec Boyer n'en est que plus intense et l'actrice récoltera un premier Oscar bien mérité (récompensant aussi sa détermination face à O'Selnick qui ne souhaitait pas la prêter sous prétexte qu'elle figurerais après Boyer au générique). On saluera aussi une Angela Lansbury déjà formidable pour son premier rôle au cinéma en domestique effrontée et qu'on devine dépravée. Malgré un très bon Joseph Cottten, l'aspect purement policier et enquête n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant et le film perd de son attrait dans la dernière partie quand vient l'heure des explications avec un suspense final ne fonctionnant pas complètement. L'important n'était par l'arrivée mais bien le voyage inconfortable proposé par Cukor dans cet univers? 4,5/6

Quelques années plus tôt, Paula s'est enfuie de Londres après l'assassinat non élucidé de sa tante Alice. Établie depuis dix ans en Italie, elle y rencontre un pianiste, Gregory, qu'elle épouse. Par amour pour son mari, elle se laisse convaincre de revenir habiter dans la maison où sa tante a été étranglée. Mais le bonheur ne dure pas. À peine installé à Londres, Gregory commence à se montrer de plus en plus distant avec sa femme et l'accuse de perdre la tête. Peu à peu, Paula se laisse convaincre de douter de sa propre santé mentale.
George Cukor réalisait avec ce Gaslight un des sommets du thriller psychologique et gothique, registre où on ne l'attendait pas forcément. On peut en dire autant de son interprète principale Ingrid Bergman déroutante ici dans une prestation fragile et vulnérable à la Joan Fontaine. D'ailleurs l'ensemble lorgne fortement sur le Rebecca d'Hitchcock avec en toile fond une thématique voisine sur le souvenir d'un être disparu et l'influence sur des personnages amené à vivre en des lieux marqués de sa personnalité. Hantise est cependant bien moins mystérieux et ambigu dans sa teneur possiblement fantastique, et comprend bien vite que l'intérêt n'est pas forcément dans la résolution qui malgré quelques se surprise est plutôt attendue. Le mari à l'amour pressent se muant en véritable tyran joué par Charles Boyer est rapidement démasqué par le spectateur, tout comme l'objectif possiblement pécuniaire dont la véritable nature se révèlera en conclusion.


L'intérêt ne repose donc pas sur le mystère à résoudre (la touche policière étant finalement assez routinière) mais clairement dans le traitement narratif de George Cukor. L'ouverture dans une ruelle londonienne au soir d'un meurtre pose l'ambiance avec sa place inquiétante plongée dans la brume, les bâtisses victoriennes sombres et imposantes derrière celle-ci et les silhouettes se perdant dans le décor. Cette introduction magistrale et toute en atmosphère nous fait apparaître un Ingrid Bergman hébétée par l'horreur à laquelle elle vient d'assister et laisse deviner quasi sans dialogue la fragilité mentale de Paula. Tous ses aspects se trouvent exacerbés lorsqu'on revient en ces lieux quelques années plus tard. Seulement tout ce qui suggérait un possible virage fantastique se trouve progressivement escamoté lorsqu'on devine la manipulation d'un Charles Boyer d'une ignominie absolument prodigieuse auréolant son charme et bagout naturel d'une aura terriblement inquiétante.


Cukor met sa mise en scène au service de cette cruauté mentale et de l'illustration de l'esprit à la dérive d'Ingrid Bergman. Tous les artifices se déploient donc entre les champs contre champs jouant entre le regard inquisiteur et pénétrant de Boyer et celui apeuré de Bergman ou le jeu sur les arrière-plans (la silhouette de Boyer au début de la scène du tableau disparu) et le hors champs (l'ombre de Boyer se dessinant lorsque Bergman pense avoir perdu sa broche) accentuant la paranoïa et le sentiment d'être constamment observé. Le jeu sur la photo traduit également la dérive de Bergman avec cette fameuse lampe à gaz à la lumière aussi vacillante que l'esprit de son héroïne perturbée et Cukor traduit avec un brio cruel ce sentiment d'oppression, notamment lorsque les bruits étranges entendus par Bergman se muent en magma sonore accompagné d'un mouvement de caméra en plongée sur celle-ci apeurée sur son lit. Lors de la conclusion, les yeux de Charles Boyer brilleront un court instant d'un éclat avide et scintillant lorsqu'on aura connu le but de ses manigances. Le travail de Joseph Ruttenberg est impressionnant de bout en bout.

Ingrid Bergman est absolument extraordinaire de fragilité et suscite une empathie parfaite son trouble avec un travail impressionnant sur la gestuelle de plus en plus incertaine, le regard vide et une allure recroquevillée constante. La prise de conscience finale lors de l'ultime face à face avec Boyer n'en est que plus intense et l'actrice récoltera un premier Oscar bien mérité (récompensant aussi sa détermination face à O'Selnick qui ne souhaitait pas la prêter sous prétexte qu'elle figurerais après Boyer au générique). On saluera aussi une Angela Lansbury déjà formidable pour son premier rôle au cinéma en domestique effrontée et qu'on devine dépravée. Malgré un très bon Joseph Cottten, l'aspect purement policier et enquête n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant et le film perd de son attrait dans la dernière partie quand vient l'heure des explications avec un suspense final ne fonctionnant pas complètement. L'important n'était par l'arrivée mais bien le voyage inconfortable proposé par Cukor dans cet univers? 4,5/6
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Re: George Cukor (1899-1983)
Vraiment tres bon ce film en effet. 


Top 20 actuel
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Mes dvd
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Re: George Cukor (1899-1983)
Sylvia Scarlett (1935)

A Marseille, la jeune Sylvia est endeuillée par la disparition de sa mère. Revenant de l’enterrement de son épouse, Henry Scarlett avoue à sa fille qu’il doit fuir le pays sur le champ car il va bientôt être accusé de malversations financières par son employeur. Pour ne pas éveiller les soupçons des autorités, Sylvia se coupe les cheveux et entreprend de se faire passer pour un garçon, prénommé Sylvester, afin d’accompagner son père en Angleterre. Sur le bateau ferry qui les emmène, ils font la connaissance de Jimmy Monkley, un escroc séduisant et manipulateur.
Sylvia Scarlett est un film riche de grandes promesses futures. Katharine Hepburn y poursuivait son irrésistible ascension hollywoodienne dans son emploi du moment de jeune fille rebelle. Elle y retrouvait pour la troisième déjà George Cukor, celui qui la révéla dans Héritage puis la première version des Quatre filles du docteur March et serait son réalisateur fétiche. Le film était aussi et surtout celui de la première du duo qu'elle formerait avec Cary Grant avec des réussites comme L'Impossible Monsieur bébé ou pour rester chez Cukor Indiscrétions et le merveilleux Vacances.
Toutes ces promesses se retrouvent de manière très décousue dans ce Sylvia Scarlett qui fonctionne par à coup. Prises séparément, toute les scènes font preuve d'esprit et d'inventivité mais l'ensemble peine à maintenir l'intérêt sur la continuité d'une intrigue qui part un peu dans tous les sens. On démarre donc dans le pur mélo avec une jeune héroïne endeuillée par la perte de sa mère et contrainte de se travestir pour fuir les dettes de son père. Ce dernier élément amène alors le ton vers la comédie et le quiproquo, notamment par la rencontre et l'association avec l'arnaqueur charmeur incarné par Cary Grant. L'ensemble du film suit cette voie, alternant dans un constant déséquilibre comédie enlevée et loufoque pour drame appuyé. Sans être raté, Sylvia Scarlett est donc très inégal et on en retirera satisfaction que par la réussite de certains moments ainsi que la performance des acteurs. L'épisode où nos joyeux drille tentent de monter des arnaques en tout genre à Londres est assez irrésistible, entre Katharine Hepburn en faisant des tonnes pour apitoyer les passants sur ses malheurs (et l'hilarante manière dont elle se trahit) et la longue séquence de duperie dans la demeure de Buckingham.

L'alchimie entre Katharine Hepburn et Cary Grant (bien que les scènes communes ne soient pas si nombreuses) fait déjà des étincelles avec les attitudes désinvolte de ce dernier qui agace et gêne celle qui n'assume pas encore sa féminité, l'argument du travestissement en étant le symbole visible. C'est sans doute là qu'il faut chercher le principal atout du film. Katharine Hepburn joue parfaitement de son physique androgyne en alternant look queer et attitude de garçon manqué avec la candeur de la jeune fille en fleur timide et mal à l'aise. C'est dans la première solution que son personnage est le plus naturel alors qu'en jeune fille nature elle est délicieusement empruntée et d'autant plus attachante. La première lecture serait donc la recherche et l'affirmation de la féminité de notre héroïne alors que l'autre plus sous-jacente serait une sorte de réflexion sur l'homosexualité. Ce n'est pas forcément très appuyé mais pas innocent Cukor étant lui-même homosexuel et le film y devra beaucoup sa réhabilitation future lorsqu'il sera récupéré plus tard par la communauté gay pour cet aspect précurseur.

Le marivaudage amoureux un peu poussif du film ne tient ainsi que par la touchante maladresse de Katharine Hepburn (vraiment craquante dans sa première apparition en robe) et ses tentatives de séduction du gentleman anglais Brian Aherne. Même si très à l'aise, on ne peut que regretter qu'il n'ait pas laissé sa place à Cary Grant (dont on se souvient bien plus malgré son rôle en retrait) ce qui aurait amené le piquant nécessaire à la romance. Là on retient bien plus l'ultime éclat de rire jubilatoire de Cary Grant que la réunion du couple et les personnages secondaires sont trop peu exploité (Nathalie Paley intéressante et quasiment dans son propre rôle en noble russe ruinée séductrice, elle deviendra une grande amie de Katharine Hepburn suite au film) pour donner la profondeur attendue. Un petit Cukor donc, pas désagréable mais inabouti... 3,5/6


A Marseille, la jeune Sylvia est endeuillée par la disparition de sa mère. Revenant de l’enterrement de son épouse, Henry Scarlett avoue à sa fille qu’il doit fuir le pays sur le champ car il va bientôt être accusé de malversations financières par son employeur. Pour ne pas éveiller les soupçons des autorités, Sylvia se coupe les cheveux et entreprend de se faire passer pour un garçon, prénommé Sylvester, afin d’accompagner son père en Angleterre. Sur le bateau ferry qui les emmène, ils font la connaissance de Jimmy Monkley, un escroc séduisant et manipulateur.
Sylvia Scarlett est un film riche de grandes promesses futures. Katharine Hepburn y poursuivait son irrésistible ascension hollywoodienne dans son emploi du moment de jeune fille rebelle. Elle y retrouvait pour la troisième déjà George Cukor, celui qui la révéla dans Héritage puis la première version des Quatre filles du docteur March et serait son réalisateur fétiche. Le film était aussi et surtout celui de la première du duo qu'elle formerait avec Cary Grant avec des réussites comme L'Impossible Monsieur bébé ou pour rester chez Cukor Indiscrétions et le merveilleux Vacances.
Toutes ces promesses se retrouvent de manière très décousue dans ce Sylvia Scarlett qui fonctionne par à coup. Prises séparément, toute les scènes font preuve d'esprit et d'inventivité mais l'ensemble peine à maintenir l'intérêt sur la continuité d'une intrigue qui part un peu dans tous les sens. On démarre donc dans le pur mélo avec une jeune héroïne endeuillée par la perte de sa mère et contrainte de se travestir pour fuir les dettes de son père. Ce dernier élément amène alors le ton vers la comédie et le quiproquo, notamment par la rencontre et l'association avec l'arnaqueur charmeur incarné par Cary Grant. L'ensemble du film suit cette voie, alternant dans un constant déséquilibre comédie enlevée et loufoque pour drame appuyé. Sans être raté, Sylvia Scarlett est donc très inégal et on en retirera satisfaction que par la réussite de certains moments ainsi que la performance des acteurs. L'épisode où nos joyeux drille tentent de monter des arnaques en tout genre à Londres est assez irrésistible, entre Katharine Hepburn en faisant des tonnes pour apitoyer les passants sur ses malheurs (et l'hilarante manière dont elle se trahit) et la longue séquence de duperie dans la demeure de Buckingham.

L'alchimie entre Katharine Hepburn et Cary Grant (bien que les scènes communes ne soient pas si nombreuses) fait déjà des étincelles avec les attitudes désinvolte de ce dernier qui agace et gêne celle qui n'assume pas encore sa féminité, l'argument du travestissement en étant le symbole visible. C'est sans doute là qu'il faut chercher le principal atout du film. Katharine Hepburn joue parfaitement de son physique androgyne en alternant look queer et attitude de garçon manqué avec la candeur de la jeune fille en fleur timide et mal à l'aise. C'est dans la première solution que son personnage est le plus naturel alors qu'en jeune fille nature elle est délicieusement empruntée et d'autant plus attachante. La première lecture serait donc la recherche et l'affirmation de la féminité de notre héroïne alors que l'autre plus sous-jacente serait une sorte de réflexion sur l'homosexualité. Ce n'est pas forcément très appuyé mais pas innocent Cukor étant lui-même homosexuel et le film y devra beaucoup sa réhabilitation future lorsqu'il sera récupéré plus tard par la communauté gay pour cet aspect précurseur.

Le marivaudage amoureux un peu poussif du film ne tient ainsi que par la touchante maladresse de Katharine Hepburn (vraiment craquante dans sa première apparition en robe) et ses tentatives de séduction du gentleman anglais Brian Aherne. Même si très à l'aise, on ne peut que regretter qu'il n'ait pas laissé sa place à Cary Grant (dont on se souvient bien plus malgré son rôle en retrait) ce qui aurait amené le piquant nécessaire à la romance. Là on retient bien plus l'ultime éclat de rire jubilatoire de Cary Grant que la réunion du couple et les personnages secondaires sont trop peu exploité (Nathalie Paley intéressante et quasiment dans son propre rôle en noble russe ruinée séductrice, elle deviendra une grande amie de Katharine Hepburn suite au film) pour donner la profondeur attendue. Un petit Cukor donc, pas désagréable mais inabouti... 3,5/6

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Re: George Cukor (1899-1983)
Le Roman de Marguerite Gautier (1936)

Dans le Paris mondain de 1847, les rencontres galantes ont lieu au théâtre, au bal et dans les cercles de jeux où la discrétion est de mise... et le jeu c'est l'amour. Marguerite Gautier est une de ces jolies courtisanes qui vivent sur le terrain dangereux de la renommée, l'esprit aiguisé par le champagne, mais les yeux souvent brouillés par les larmes...
La quintessence du mélo hollywoodien, tout simplement que ce Roman de Marguerite Gautier. George Cukor réalisait la seconde grande adaptation hollywoodienne du roman d'Alexandre Dumas fils après celle muette de 1921 avec Alla Nazimova et Rudolph Valentino. Toute la production respire la flamboyance et le prestige de la MGM avec la somptueuse reconstitution du Paris de 1847 où se distingue les costumes d'Adrian et la direction artistique de Cedric Gibbons magnifiquement mis en valeur par George Cukor. Au casting, une star au firmament avec Greta Garbo au faîte de sa gloire et l'étoile montante avec le beau jeune premier Robert Taylor.


Cukor saura idéalement alterner dans le ton du film la modestie inspirée de l'amour sincère d'Armand (Robert Taylor) et l'emphase mélodramatique amenée par les déchirements intérieurs que doit affronter Marguerite Gautier (Greta Garbo). Lui est un modeste jeune homme dont la carrière dans le monde reste à faire quand elle est une des plus jolies et aguerries des courtisanes parisiennes, dépensière et les plus beaux partis à ses pieds. Cukor oppose par tous les artifices possibles ces deux caractères qui n'auraient jamais dû se lier pour mieux les rapprocher. Quand la passion dévouée et sans arrière-pensée se lit dans la bonté des traits juvéniles de Robert Taylor, Greta Garbo habitué à la représentation constante pour obtenir des faveurs diverses offre un grand numéro de charme, tout en poses et minauderies. La mise en scène également se montre très inégale entre la star et son prétendant, signalée dès la première rencontre au théâtre où il la cherche des yeux levant la tête vers les balcons où elle l'observe amusée à travers ses jumelles.


Armand fidèle à lui-même est toujours filmé avec sobriété dans toute sa droiture entre les gros plan sur son visage amoureux et bienveillant, son allure rassurante et protectrice dans les plan d'ensemble où il fait face à Garbo (notamment lors de sa première crise de tuberculose durant la fête lorsqu'il la rejoint). Marguerite condamnée à endosser différents rôles et soumettre les hommes à ses caprices est-elle toujours saisie dans une frivolité et un détachement de façade où Cukor saisit par intermittences un regard las de Garbo peut-être pas aussi à l'aise qu'elle l'affirme dans cette existence frivole de séduction, fêtes et sorties au théâtre. Enfin, c'est le déroulement du récit qui dessine le fossé séparant les personnages avec ces multiples rendez-vous manqués où Marguerite séduite puis réellement attirée se dérobe à chaque fois pour préférer la compagnie plus lucrative du Baron de Varville (Henry Daniell).


Ces codes peuvent exploser lorsque Marguerite est poussée dans ses retranchements par la fougue d'Armand qui préfère partir plutôt que supporter de la voir se jouer de lui. Greta Garbo est absolument sublime dans la profondeur qu'elle apporte à ses émotions où le détachement dissimule toujours le malaise. La scène où elle s'esclaffe avec le Baron alors qu'elle est minée par Robert Taylor sonnant à sa porte et qu'elle ne peut rejoindre est un grand moment, la pose lascive se mariant bien mal avec son regard désespéré. Ce n'est que lorsqu'elle aura enfin renoncé à son monde d'apparence que Cukor déploie enfin l'imagerie romantique la plus éblouissante qui soit durant les longues séquences rurales où l'épure du cadre (en opposition au luxe surchargé des scène parisienne), la photo immaculée de William H. Daniels et Karl Freund et l'abandon du couple magnifiant leur physiques avantageux offre un moment aussi beau qu'éphémère. L'avenir tout tracé d'Armand et le passé sulfureux de Marguerite formerons bientôt un obstacle insurmontable où les parti pris du début ressurgissent et prennent un tour plus dramatique. Greta Garbo est à nouveau extraordinaire durant cette scène où elle repousse Armand à contre cœur et Robert Taylor d'amant éperdu laisse magnifiquement transparaitre sa détresse et son incompréhension.


Diverses péripéties (dont une belle scène de duel matinal) montreront que pour lui l'oubli est impossible et que pour elle un retour à son ancienne vie est désormais impossible. Ils comprendront enfin que tous les sacrifices et ambitions ne peuvent les séparer durant un moment intense qui sera pourtant aussi leur dernier le temps d'un final déchirant d'émotion. Cukor atteint là des sommets de d'intensité mélodramatique porté par des acteurs habités. Un superbe film qui constitue peut être la meilleure version du roman de Dumas fils (qui trouve des déclinaisons jusqu'au récent Moulin Rouge) et que la si exigeante Garbo considérait comme la plus belle performance de sa carrière. On n’est pas tout à fait d'accord avec elle (il y a en a tellement d'autres) mais comme on la comprend. 6/6



Dans le Paris mondain de 1847, les rencontres galantes ont lieu au théâtre, au bal et dans les cercles de jeux où la discrétion est de mise... et le jeu c'est l'amour. Marguerite Gautier est une de ces jolies courtisanes qui vivent sur le terrain dangereux de la renommée, l'esprit aiguisé par le champagne, mais les yeux souvent brouillés par les larmes...
La quintessence du mélo hollywoodien, tout simplement que ce Roman de Marguerite Gautier. George Cukor réalisait la seconde grande adaptation hollywoodienne du roman d'Alexandre Dumas fils après celle muette de 1921 avec Alla Nazimova et Rudolph Valentino. Toute la production respire la flamboyance et le prestige de la MGM avec la somptueuse reconstitution du Paris de 1847 où se distingue les costumes d'Adrian et la direction artistique de Cedric Gibbons magnifiquement mis en valeur par George Cukor. Au casting, une star au firmament avec Greta Garbo au faîte de sa gloire et l'étoile montante avec le beau jeune premier Robert Taylor.


Cukor saura idéalement alterner dans le ton du film la modestie inspirée de l'amour sincère d'Armand (Robert Taylor) et l'emphase mélodramatique amenée par les déchirements intérieurs que doit affronter Marguerite Gautier (Greta Garbo). Lui est un modeste jeune homme dont la carrière dans le monde reste à faire quand elle est une des plus jolies et aguerries des courtisanes parisiennes, dépensière et les plus beaux partis à ses pieds. Cukor oppose par tous les artifices possibles ces deux caractères qui n'auraient jamais dû se lier pour mieux les rapprocher. Quand la passion dévouée et sans arrière-pensée se lit dans la bonté des traits juvéniles de Robert Taylor, Greta Garbo habitué à la représentation constante pour obtenir des faveurs diverses offre un grand numéro de charme, tout en poses et minauderies. La mise en scène également se montre très inégale entre la star et son prétendant, signalée dès la première rencontre au théâtre où il la cherche des yeux levant la tête vers les balcons où elle l'observe amusée à travers ses jumelles.


Armand fidèle à lui-même est toujours filmé avec sobriété dans toute sa droiture entre les gros plan sur son visage amoureux et bienveillant, son allure rassurante et protectrice dans les plan d'ensemble où il fait face à Garbo (notamment lors de sa première crise de tuberculose durant la fête lorsqu'il la rejoint). Marguerite condamnée à endosser différents rôles et soumettre les hommes à ses caprices est-elle toujours saisie dans une frivolité et un détachement de façade où Cukor saisit par intermittences un regard las de Garbo peut-être pas aussi à l'aise qu'elle l'affirme dans cette existence frivole de séduction, fêtes et sorties au théâtre. Enfin, c'est le déroulement du récit qui dessine le fossé séparant les personnages avec ces multiples rendez-vous manqués où Marguerite séduite puis réellement attirée se dérobe à chaque fois pour préférer la compagnie plus lucrative du Baron de Varville (Henry Daniell).


Ces codes peuvent exploser lorsque Marguerite est poussée dans ses retranchements par la fougue d'Armand qui préfère partir plutôt que supporter de la voir se jouer de lui. Greta Garbo est absolument sublime dans la profondeur qu'elle apporte à ses émotions où le détachement dissimule toujours le malaise. La scène où elle s'esclaffe avec le Baron alors qu'elle est minée par Robert Taylor sonnant à sa porte et qu'elle ne peut rejoindre est un grand moment, la pose lascive se mariant bien mal avec son regard désespéré. Ce n'est que lorsqu'elle aura enfin renoncé à son monde d'apparence que Cukor déploie enfin l'imagerie romantique la plus éblouissante qui soit durant les longues séquences rurales où l'épure du cadre (en opposition au luxe surchargé des scène parisienne), la photo immaculée de William H. Daniels et Karl Freund et l'abandon du couple magnifiant leur physiques avantageux offre un moment aussi beau qu'éphémère. L'avenir tout tracé d'Armand et le passé sulfureux de Marguerite formerons bientôt un obstacle insurmontable où les parti pris du début ressurgissent et prennent un tour plus dramatique. Greta Garbo est à nouveau extraordinaire durant cette scène où elle repousse Armand à contre cœur et Robert Taylor d'amant éperdu laisse magnifiquement transparaitre sa détresse et son incompréhension.


Diverses péripéties (dont une belle scène de duel matinal) montreront que pour lui l'oubli est impossible et que pour elle un retour à son ancienne vie est désormais impossible. Ils comprendront enfin que tous les sacrifices et ambitions ne peuvent les séparer durant un moment intense qui sera pourtant aussi leur dernier le temps d'un final déchirant d'émotion. Cukor atteint là des sommets de d'intensité mélodramatique porté par des acteurs habités. Un superbe film qui constitue peut être la meilleure version du roman de Dumas fils (qui trouve des déclinaisons jusqu'au récent Moulin Rouge) et que la si exigeante Garbo considérait comme la plus belle performance de sa carrière. On n’est pas tout à fait d'accord avec elle (il y a en a tellement d'autres) mais comme on la comprend. 6/6


Dernière modification par Profondo Rosso le 10 avr. 12, 08:21, modifié 2 fois.
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Re: George Cukor (1899-1983)

La seule non, mais la plus belle de sa carrière, oui. Simplement le plus bel écrin que la MGM puisse offrir à son joyau...Profondo Rosso a écrit :et que la si exigeante Garbo considérait comme la seule performance valable de sa carrière. On n’est pas tout à fait d'accord avec elle (il y a en a tellement d'autres) mais on la comprend.
C'est tout ?Profondo Rosso a écrit :6/6

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Re: George Cukor (1899-1983)
Hé hé j'ai rectifié, devant le biographe officiel de La Divine, je ne peux que m'incliner
. 8/6 c'est compliqué quand même en tout cas le rôle où elle m'a le plus touché avec le non moins somptueux Marie Walewska qui m'avait bien soufflé aussi.

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Re: George Cukor (1899-1983)
Allez hop, Camile prévu pour cette semaine. Ce sera une redécouverte puisque ma dernière vision doit remonter à plus de 20 ans 

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Re: George Cukor (1899-1983)
Il faut que tu jettes un oeil à Love alors car elle y est aussi très touchante (et une photo de Daniels...une photo à te mettre sur le culProfondo Rosso a écrit :...en tout cas le rôle où elle m'a le plus touché avec le non moins somptueux Marie Walewska qui m'avait bien soufflé aussi.


Un futur film du mois devant A farewell to armsJeremy Fox a écrit :Allez hop, Camile prévu pour cette semaine. Ce sera une redécouverte puisque ma dernière vision doit remonter à plus de 20 ans
