Les Westerns 2ème partie

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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André Jurieux
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par André Jurieux »

Colqhoun a écrit :Red River | Howard Hawks
Superbe découverte avec ce grand western épique à base de boeufs qu'on transporte d'un coin à l'autre du pays.

Sorte de révoltés du bounty dans les grandes prairies, on y suit cette bande de cowboys qui verront éclater une lutte intestine entre le boss (Wayne) et son fils adoptif (Clift). De la bonne bagarre familiale doublé d'une grande aventure. Je retiendrais notamment la fuite du troupeau en pleine nuit et de la course-poursuite qui s'engage. Hyper impressionnante et furieuse, cette scène est peut-être LE morceau de bravoure du film. Mais tout le reste fourmille d'idées, de personnages bien écrits (on fait la part belle aux seconds couteaux ici) et d'un final étonnant. J'ai par contre eu un peu de peine avec la musique de Tiomkin, compositeur que j'ai toujours trouvé un peu lourdingue (et le fait, ici, de tout faire tourner autour d'un seul thème peut devenir fatigant).

En soit c'est peut-être le seul véritable grief que j'aurais à l'encontre du film. Pour le reste, je suis conquis. Et Wayne ne m'a même pas gonflé. Peut-être est-ce son personnage de grand salopard qui a aidé. Je ne sais pas, mais dans tous les cas, c'est passé comme une lettre à la poste.
Wayne la dedans est selon moi exceptionnel. Un de ses plus grands rôles ou plutôt un de ceux dans lequel il montre qu'il était capable de jouer sur des registres bien plus étendues que ce qu'on lui demandait ordinairement. J'en vois encore au moins un autre dont on pourrait dire la
même chose, c'est LE REVEIL DE LA SORCIÈRE ROUGE dans lequel il est également exceptionnel. Malheureusement, on entend encore souvent que Wayne, jouait seulement de sa présence et son physique.

Par contre plus que la musique, le seul véritable grief que je porterais contre ce film, c'est ce final qui contredit tout le reste. Je ne sais plus si ce final a été imposé à Hawks mais c'est en contresens du film. Admettons que l'on passe sur le contresens...Mais de plus ce final brusque en éclat
de rires est très mal amené.

Pour ce défaut pour moi majeur, ce pourtant très grand film de Hawks , ne figure pas dans mon top western.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Tiomkin est un compositeur très inégal capable du pire comme du meilleur (Alamo). Celle qu'il a écrite pour Red River fait partie selon moi de ses amples et belles réussites. Quant au final, il va certes à l'encontre du ton de l'ensemble mais il me ravi personnellement.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

N'ayant jamais vraiment confiance en ma mémoire, je viens d'ailleurs d'aller vérifier pour savoir si je ne contredisais pas ma critique et finalement non.

Autre complice du réalisateur qui lui écrira encore 4 autres scores, Dimitri Tiomkin à la musique qui compose pour l’occasion des thèmes inoubliables dont celui du générique, qui servira une nouvelle fois pour la célèbre chanson ‘My rifle, my poney and me’ dans Rio Bravo, et surtout, un thème d’amour plein d’élan qui fait s’envoler les plus belles scènes à un niveau de lyrisme rarement atteint dans le genre.


A la fin, devant l’infantilisme des deux héros, Joanne Dru éclate de rage et évite ainsi l’irréparable en leur révélant la véritable nature des sentiments qui les unissent, tout au moins une estime réciproque si ce n’est un amour filial ou paternel. Conspuée par Borden Chase qui faisait mourir Dunson, cette ultime scène a été entièrement voulue et réécrite par Hawks lui-même qui refusait de voir succomber l’un de ses héros afin que les spectateurs sortent heureux de la salle : mission accomplie, le sourire béat qui vient éclairer notre visage lors de l’apparition à l’écran de ‘the end’ en est la preuve.
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Colqhoun
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Colqhoun »

Jeremy Fox a écrit :Autre complice du réalisateur qui lui écrira encore 4 autres scores, Dimitri Tiomkin à la musique qui compose pour l’occasion des thèmes inoubliables
Pour le coup ici je trouve le thème inoubliable parce que râbaché jusqu'à plus soif. Enfin, en soit il y intègre suffisamment de variations pour que ça ne devienne pas exaspérant, mais j'ai quand même eu beaucoup de peine avec cette composition.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Colqhoun a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Autre complice du réalisateur qui lui écrira encore 4 autres scores, Dimitri Tiomkin à la musique qui compose pour l’occasion des thèmes inoubliables
Pour le coup ici je trouve le thème inoubliable parce que râbaché jusqu'à plus soif. Enfin, en soit il y intègre suffisamment de variations pour que ça ne devienne pas exaspérant, mais j'ai quand même eu beaucoup de peine avec cette composition.
C'est un peu le grand défaut de Tiomkin de rabacher le même thème jusqu'à plus soif ; et c'est pour cette raison que la moitié de ses scores m'exaspère souvent aussi
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Colqhoun
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Colqhoun »

High Noon | Fred Zinneman
J'ai enfin vu le fameux Le Train sifflera trois fois. Et quelle découverte. Sur son récit hyper resserré et quasiment en temps réel, on suit Cooper qui cherche des gens prêts à lui prêter main forte pour stopper un criminel qu'il avait envoyé en taule quelques années auparavant. Il se retrouvera bien malgré lui seul à affronter le brigand et sa bande.

La réalisation est redoutable d'efficacité, les plans enferment Cooper dans cette ville qui pourrait devenir son tombeau, l'échéance s'approche et peu à peu le shérif se retrouve seul à déambuler dans une ville que l'on croirait fantôme.

J'ai aussi pu lire ça et là que le film semblait être une parabole de la chasse aux communistes qui avait lieu à l'époque. Et pour le coup le film se permet de tirer à boulets rouges sur les personnes qui auraient participer. C'est d'une virulence non feinte d'un bout à l'autre.

Mais en l'état j'ai surtout été enchanté par le travail de réalisation millimétrée, ces plans parfaitement réfléchis, qui s'emboîtent comme une mécanique parfaitement huilée. Et même la musique de Tiomkin est appréciable et utilisée avec modération. En définitive, il n'y a peut être que le personnage de la mexicaine que j'ai trouvé pas spécialement indispensable dans le récit, mais je peux imaginer qu'elle trouve sa place dans le sous-texte du film.

Bref, je continue mes découvertes en western et pour l'instant, je vais de surprise en surprise (bon en même temps je m'attaque aux gros titres) et ça ne peut que me réjouir.
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par hellrick »

LE BOURREAU DU NEVADA

Une histoire très simple mais relativement originale d'homme de loi qui recherche un criminel dont il ne connait pas le visage...il demande l'aide d'une ex du recherché qui hésite à l'identifier pour toucher la forte prime qui lui permettrait de fuir sa vie misérable.

C'est pas mal mais les relations de Robert Taylor avec la demoiselle ne paraissent pas très crédibles et sont assez caricaturales amha. Il y a peu d'action (limitée aux dernières minutes) et l'essentiel est donc un drame ponctué de quelques moments drôles avec un personnage de vieille puritaine là aussi très caricaturale.
Ca se regarde mais sans plus
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Chip »

Le post de Colqhoun, m'amène à dire que j'ai pu revoir (en salle et en vo) hier soir , grâce à un ciné club clermontois HIGH NOON, film que je n'avais pas revu sur grand écran depuis 1964, je n'en dirai rien, sauf que la copie était superbe, tout à été dit sur ce chef-doeuvre , et depuis bien longtemps. L'oscar pour Cooper est mérité, la réputation du film également et Lee Van Cleef y trouve son meilleur rôle :)
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Chip a écrit :Le post de Colqhoun, m'amène à dire que j'ai pu revoir (en salle et en vo) hier soir , grâce à un ciné club clermontois HIGH NOON, film que je n'avais pas revu sur grand écran depuis 1964, je n'en dirai rien, sauf que la copie était superbe, tout à été dit sur ce chef-doeuvre , et depuis bien longtemps. L'oscar pour Cooper est mérité, la réputation du film également et Lee Van Cleef y trouve son meilleur rôle :)
Au moins mon 5ème essai et ... rien n'y fait ! Un classique que je n'aime pas du tout :(
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Chip »

Moi aussi, il y a des classiques que je n'apprécie guère voire qui m'ennuient, d'autres que j'ai aimés et que je n'aime plus. Ce nest pas le cas du film de Zinnemann vu hier soir et qui a été applaudi par la cinquantaine de spectateurs présents. Peut-être préfèreras-tu " The silver star"(1955) qui démarque un tantinet " High noon", tout comme " Joe Dakota" avait quelques points communs avec " bad day at Black rock", deux films de Richard H. Bartlett que j'adore.
" the silver star " existe en dvd all zone chez VCI entertainment, sans s/t.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Chip a écrit : " the silver star " existe en dvd all zone chez VCI entertainment, sans s/t.
Malheureusement ; comptons sur Sidonis :wink:
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Pat Wheeler »

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Après avoir abondamment puisé dans le western (classique, italien, post-moderne ou ce que vous voulez), il est agréable de pouvoir encore tomber sur de petites merveilles de cet acabit ! Les 5 Hors-La-Loi est un excellent western, humain et prenant, que l'on doit à Vincent McEveety, réalisateur habitué à œuvrer pour le petit écran (il a tourné des épisodes de Bonanza, Gunsmoke, Perry Mason, Star Trek, Dallas et Columbo entre autres). Jimmy Stewart et Henry Fonda, deux des meilleurs acteurs qui soient, sont comme à leur habitude magistraux et il y a beaucoup d'intelligence et de solidité dans le scénario de Calvin Clements Sr. malgré les inévitables lieux communs. Pas de grandes chevauchées et peu de fusillades (on retiendra une belle séquence de règlement de comptes finale) mais une violence latente tout du long (les comparses à Fonda sont de sacrées ordures) qui donne au film une vraie intensité dramatique. Très bonne surprise.
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Jeremy Fox
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Pat Wheeler a écrit :Image

Après avoir abondamment puisé dans le western (classique, italien, post-moderne ou ce que vous voulez), il est agréable de pouvoir encore tomber sur de petites merveilles de cet acabit ! Les 5 Hors-La-Loi est un excellent western, humain et prenant, que l'on doit à Vincent McEveety, réalisateur habitué à œuvrer pour le petit écran (il a tourné des épisodes de Bonanza, Gunsmoke, Perry Mason, Star Trek, Dallas et Columbo entre autres). Jimmy Stewart et Henry Fonda, deux des meilleurs acteurs qui soient, sont comme à leur habitude magistraux et il y a beaucoup d'intelligence et de solidité dans le scénario de Calvin Clements Sr. malgré les inévitables lieux communs. Pas de grandes chevauchées et peu de fusillades (on retiendra une belle séquence de règlement de comptes finale) mais une violence latente tout du long (les comparses à Fonda sont de sacrées ordures) qui donne au film une vraie intensité dramatique. Très bonne surprise.

Pas mieux : l'un des meilleurs westerns des années 60
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Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Pat Wheeler »

Jeremy Fox a écrit :Pas mieux : l'un des meilleurs westerns des années 60
Très clairement !
Le frère du réalisateur, Bernard McEveety, était lui aussi un pilier des séries TV dans les 60's et a tourné un ou deux westerns pour le cinéma. J'ai vu l'un deux, Marqué au Fer Rouge (Ride Beyond Vengeance en VO), avec Chuck Connors dans le rôle principal: ça se laisse regarder mais c'est bien quelques cran en-dessous de ce très bon Firecreek. :)
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La Brigade des Cowboys (William Hale, 1967)

Message par pak »

La Brigade des cowboys (Journey to Shiloh) de William Hale, 1967. Avec James Caan, Michael Sarrazin, Brenda Scott, Don Stroud, Paul Petersen, Michael Burns, Jan-Michael Vincent, Harrison Ford, John Doucette, Noah Beery Jr... Scénario de Gene L. Coon, d'après Heck Allen (roman Journey to Shiloh, 1960, paru sous le pseudo Will Henry) - Musique : David Gates - Production : Howard Christie / Universal Pictures - Sortie USA : 06/01/1968 - 1ère sortie France : 10/04/1968.
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1862, guerre de Sécession. Sept jeunes Texans font route vers Richmond afin de se joindre aux forces sudistes. Leur enthousiasme est à l'image de leur jeunesse, mais sera froidement et cruellement douché...


Un western américain de la fin des années 1960 très peu connu, dont le début déroute assez, puisqu'il nous invite à suivre une bande de sept jeunes cowboys issus d'un milieu manifestement modeste, partis de leur bled paumé pour aller s'engager dans l'armée sudiste et participer, du moins le croient-ils, à la victoire de l'armée confédérée. La bonne humeur est alors de mise malgré une forte tête, avec un leader assez charismatique, et l'ambiance plutôt bucolique. Mais c'est surtout la vision de l'esclavagisme qui déroute dans l'introduction. Lorsque nos joyeux lurons se rendent dans la propriété d'une riche famille sudiste, ils rencontrent leur premier esclave, un domestique costumé en valet de pied à l'européenne (une partie des familles riches des états du sud était alors assez influencée par l'Europe de par leurs relations économiques, notamment la France et l'Angleterre) qui affirme, fier comme un paon, que son maitre le traite correctement, bref, qu'il est bien content de son sort. On craint alors pour la suite, de voir un western de plus pas tellement critique sur l'esclavagisme, aspect de la guerre de Sécession régulièrement laissé de côté dans les westerns, alors que ce fut l'un des éléments déclencheurs du conflit, on se souvient du plaidoyer sudiste de la superproduction Autant en emporte le vent (Victor Fleming, 1939), ou encore de la description chevaleresque des confédérés dans La Piste de Santa Fe (Michael Curtiz, 1940).
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Ce ne sont pas les sept mercenaires...
Heureusement, le ton va graduellement se durcir, et ce film va montrer dans la suite de son récit un visage nettement plus critique. En fait, plus modestement et discrètement que des films comme Soldat bleu (Ralph Nelson, 1970), La Brigade des cowboys s'inscrit dans la contestation inhérente à la fin des années 1960, aggravée aux USA par une guerre du Vietnam qui fait plus que s'enliser, puisqu'en février 1968, un mois après la sortie du film aux USA, l'offensive du Têt détruit les dernières illusions américaines d'une résolution rapide du conflit. D'ailleurs, le réalisateur William Hale déclara quelques mois après l'exploitation salles du film qu'il avait souhaité établir un parallèle entre ses jeunes héros et les non moins jeunes américains faisant la guerre au Vietnam sans bien comprendre pourquoi. La découverte des réalités guerrières, de la souffrance, de la mort, l'apprentissage brutal des désillusions, c'est bien de cela dont il est question, une réalité historique (que l'on peut rapprocher au départ des futurs poilus pour le front la fleur au fusil durant l'été 1914), et aussi un thème assez éculé du film de guerre, demandant un certain talent pour éviter la redite ou au moins l'ennui, talent que n'a pas, malgré sa bonne volonté, William Hale.

Pourtant, le contexte historique était bien choisi. Car sous le titre français bien banal qui ne veut rien dire, La Brigade des cowboys (ça aurait pu être tout aussi bien La Section des cowboys ou La Cavalerie des cowboys, en plus, nos sept jeunes ne combattront même pas tous ensembles), se cache un titre original qui certes, n'évoque rien aux français mis à part de rares aficionados de la période, mais qui parle par contre encore à beaucoup d'américains. En effet, Journey to Shiloh (Voyage à Shiloh) est une allusion quasi ironique à la bataille de Shiloh qui se déroula les 6 et 7 avril 1862, ce qui nous situe une année après le début des hostilités. Durant les douze premiers mois du conflit, il y a bien eu quelques batailles importantes, mais si celle de Shiloh a marqué, c'est par l'ampleur inédite des pertes subies. C'est bien simple, jamais l'Amérique, alors encore jeune il est vrai, n'avait connu telle hécatombe. En deux jours, la bataille fera plus de morts et de blessés que l'ensemble des pertes subies par les deux camps depuis le début de la guerre. C'est même deux fois plus que le bilan total des 18 mois de campagne contre le Mexique (13/05/1846 - 02/02/1848). Une hécatombe qui va choquer l'opinion publique, d'autant que les deux bords s'estiment victorieux dans un premier temps. Une victoire à la Pyrrhus... Qui d'ailleurs faillit mettre un terme à la carrière du général Ulysses S. Grant, commandant les forces de l'Union à Shiloh, futur vainqueur du général confédéré Lee (et par ce fait, de la guerre de Sécession) et bientôt dix-huitième président des États-Unis (de mars 1869 à mars 1877), et ne devant son maintien qu'au support indéfectible du président Lincoln lui-même. Après Shiloh, pourtant, huit autres batailles feront encore plus de victimes jusqu'à l'armistice...

On le voit, le contexte historique est chargé et la tentative de parallèle avec la guerre de Vietnam tentante. En 1968, les pertes américaines vont croissantes, d'ailleurs en novembre 1967, le Pentagone avait annoncé que depuis le début de l'année 1961, environ 15 000 soldats américains avaient été tués, tandis que près de 110 000 furent blessés. Le message est donc clair : comme à Shiloh, les pertes atteintes sont effroyables, mais cela risque de fortement augmenter. Presque prémonitoire, puisque l'offensive du Têt déjà citée va vite augmenter ce taux d'attrition. Et comme nos joyeux drilles de Shiloh débarqués de leur bled, un bon nombre de biffins au Vietnam combattent pour leur pays, mais sans bien trop savoir pourquoi hormis le fait que le type en face ne vit pas selon les mêmes règles. Tout cela est en filigrane dans le film de Hale, mais sans réelle force et de manière trop simpliste.
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En fait, avec la distance du temps, on peut faire nous-mêmes un parallèle entre ce long-métrage et Voyage au bout de l'enfer de Michael Cimino sorti dix ans plus tard. On suit les derniers jours d'une bande de potes qui se connaissent depuis l'enfance avant leur incorporation dans l'armée, puis leur plongée brutale dans la réalité sanglante de la guerre, la fin de leurs illusions, voire de leurs vies, et les rescapés en porteront à jamais les séquelles. Mais là où Cimino installe une dimension tragiquement magnifique, Hale reste au niveau des banalités presque niaises. Cimino parvient à parler de la guerre en limitant les scènes guerrières, Hale donne dans l'illustration parfois proche de l'image d’Épinal avec des scènes de batailles sans personnalité. Enfin, Cimino s'éloigne dans un premier temps de son sujet en filmant un mariage et une partie de chasse, laissant le spectateur connaître les personnages, leurs doutes, leurs espoirs, Hale reste dans le western et ses figures imposées, avec les inévitables chevauchées dans de grandes espaces, campements au coin du feu, bagarre de saloon, bal du Sud et partie de poker, comme s'il fallait remplir un cahier des charges avant d'aborder le vif du sujet.

Vif du sujet abordé avec tant de maladresses que la force du propos s'en trouve considérablement amoindrie. En effet, on ne comprend pas le parti pris du réalisateur de disperser et lâcher son petit groupe dès lors que l'on aborde directement la guerre. Ce faisant, il tue le potentiel dramatique de son récit, et diminue l'impact émotionnel que le sort du groupe aurait dû provoquer. La plupart vont mourir hors champ (on aura même droit à un « untel a reçu une balle dans la tête » lors d'une conversation, sans plus), et on se désintéresse alors au sort de ces jeunes que l'auteur nous avait péniblement présenté (seuls deux d'entre eux sont réellement esquissés, les autres étant transparents car mal écrits, et parmi ces deux, l'un va disparaître prématurément de l'histoire). En fait une seule scène est réellement réussie, lorsque dans la nuit servant d'intermède à la bataille, un soldat de l'Union blessé va réciter un sermon dans une église remplie de soldats confédérés déserteurs s'y cachant, car l'un d'entre eux est à l'agonie. Une réelle émotion se dégage de ce moment dans la pénombre, une poignée de minutes durant laquelle le réalisateur atteint son but, émouvoir tout en dénonçant, montrant que la guerre n'est pas que médailles et défilés. C'est lors de cette courte scène que les quelques pistes narratives parsemées ici et là prennent leur sens (comme lorsqu'un des jeunes avoue qu'il a beaucoup à apprendre, sous-entendu qu'il n'est jamais sorti de son trou, qu'un autre affirme qu'ils ne savent pas vraiment pourquoi ils vont se battre, ou qu'ils réalisent sous l'uniforme que rien ne se passe comme ils l'avaient imaginé ou rêvé).

J'aimerai pouvoir dire que l'histoire d'amour qui se dessine entre le personnage de James Caan et la prostituée est réussie, mais, en plus du hors-sujet, elle est assez mièvre et improbable. Le gentil cowboy un peu plouc prend la défense de la demoiselle de petite vertu, celle-ci éblouie par tant d'esprit chevaleresque l'invite dans son lit. Il n'en faut pas plus pour que notre gaillard soit amoureux et la donzelle semble s'accrocher à lui comme une désespérée. Le lendemain, ce sont les adieux et le départ au front, avec la promesse du retour pour l'un, et la promesse de l'attente pour l'autre. Fermez le ban et sortez les mouchoirs. Bref, la guimauve n'est pas loin...
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Tiens, je t'offre mon collier gland en souvenir de moi...
Finalement, l'intérêt principal est son interprétation. Non pas qu'elle soit exceptionnelle, mais parce qu'elle est composée de jeunes acteurs qui faisaient leurs premiers pas au cinéma ou du moins qui en étaient à leurs débuts. James Caan, alors sûrement le moins inconnu de la bande, après plusieurs apparitions dans des épisodes de séries télés commençait, à 28 ans, à se faire un nom, notamment grâce à sa participation en 1966 au film El Dorado d'Howard Hawks dans le rôle de Mississipi entre John Wayne et Robert Mitchum. Jan-Michael Vincent, qui commence à imposer sa belle gueule et que l'on reverra par la suite dans Le Flingueur (Michael Winner, 1972) et La Chevauchée sauvage (Richard Brooks, 1975) avant qu'il ne flingue sa carrière en la noyant dans l'alcool pour finir par tourner des séries Z dans les années 1990. Michael Sarrazin, alors en pleine ascension, qui connaitra le succès et la reconnaissance avec On achève bien les chevaux (Sydney pollack, 1969) et Le clan des irréductibles (Paul Newman, 1970), et que l'on reverra dans Juge et Hors-la-loi (John Huston, 1972) avant que sa carrière marque le pas dans les années 1980 et s'oriente vers la télévision. Le costaud Don Stroud qui va enchainer de suite après ce film avec Un shérif à New-york (Don Siegel, 1968) aux côtés de Clint Eastwood, qu'il retrouvera dans Joe Kidd (John Sturges, 1972) et deviendra un second rôle récurrent des séries TV des années 1970-80 (il sera le sergent Varrick dans Madame Columbo ou le capitaine Chambers dans Mike Hammer), tournant dans tout et n'importe quoi. Paul Petersen, lui, a commencé très jeune (11 ans chez Disney Parade) et n'a pas marqué les esprits malgré une carrière régulière, surtout à la télévision. Michael Burns encore moins bien qu'il ait le C.V. le plus long du groupe au moment du tournage, ayant lui aussi débuté jeune (à 12 ans) et enchainé les rôles dans diverses séries dont La Grande caravane durant cinq ans, avant de stopper sa carrière en 1977 à 30 ans et devenir professeur d'histoire jusqu'à sa retraite en 2002. Mais le débutant le plus connu est bien-sûr Harrison Ford, assez transparent il faut dire, et qui va continuer à jouer les utilités jusqu'à ce qu'il croise un certain George Lucas qui lui donnera un rôle dans American graffiti (1973) et qui se souviendra de lui en 1977 pour une autre guerre, qui se déroulera dans les étoiles, on connait la suite... Citons aussi Noah Berry Jr. dans le rôle d'un sergent à grande gueule mais paternaliste, un peu téléphoné il est vrai, mais au moins apporte-t-il sa gouaille et un peu de vie à un film qui en manque cruellement.
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Oh le beau pistolet en plastique qui se tord à l'impact...
C'est le troisième et dernier film du réalisateur. Après avoir signé une petite série B policière (Lonnie en 1963, inédit en France), William Hale entre dans le western avec Le Shérif aux poings nus en 1967 (quoique ce n'est pas tout à fait exact puisqu'il a réalisé avant son second opus des épisodes d'une série nommée Cheyenne avec Clint Walker ainsi que deux de la série Le Virginien). Il est intéressant de noter que déjà, dans ce western, il aborde la guerre de sécession et un antimilitarisme de bon aloi, avec son shérif vétéran de la guerre marqué par la mort d'un de ses soldats qu'il a tué involontairement, et qui fait vœu de ne plus utiliser d'armes. Une démarche donc assez similaire à son dernier film, où la guerre est de nouveau en point de mire de l'auteur. Qui sait si l'on ne tenait pas là un réalisateur entamant une œuvre sur la guerre et la violence des hommes, ainsi que les conséquences de celles-ci sur les corps et les âmes ? Mais on ne le saura jamais puisque l'échec critique et public de La Brigade des cowboys sonnera le glas de sa carrière cinématographique et il ne travaillera plus que pour la télévision, enchainant séries et téléfilms jusqu'à sa retraite.

Il faut dire que malgré les bonnes intentions de Hale, son film ne dépasse pas l'anecdotique en dépit des évènements décrits et la bataille finale (gâchée par l'utilisation récurrente de stock-shots d'un autre film semble-t-il, ou alors c'est très mal monté et gavé de fautes de raccords lumière). En fait il ne trouve pas son ton, au carrefour de l'esprit familial des années 1950 et de la contestation de la fin des années 1960, comme s'il avait voulu ménager la chèvre et le chou, amoindrissant la portée dramatique du film pour un résultat finalement bien fade. Et la fin confine au ridicule, notamment la scène de la grange noyée dans une espèce de brume / fumée rendant les images illisibles et c'est incompréhensible que cette séquence ait été gardée au montage et pas tournée de nouveau. Le type même de film dont les bonnes idées sont gâchées par une mise en scène plate : on n'ose imaginer ce qu'aurait fait un Sam Peckinpah à la même époque avec un tel matériau...


Étoiles : * * . Note : 10/20
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Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

http://www.notrecinema.com/
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