Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Music Man
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

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MONTMARTRE SUR SEINE de Georges LACOMBES – France- 1941
Avec Edith PIAF, Jean Louis BARRAULT, Henri VIDAL, SYLVIE

Jean-Louis est amoureux d’Edith qui ne s’en rend même pas compte. Elle n’a d’yeux que pour Henri qui n’aime que Juliette …


Cela pourrait être le thème d’une chanson, mais cette banale intrigue s’étire sur tout le long du film. C’est d’ailleurs le principal défaut du film : le scénario n’a aucun intérêt.
Edith Piaf n’est pas une mauvaise comédienne, mais son jeu n’a pas la même magie que sa voix. Les ritournelles qui ponctuent le film ne sont pas désagréables, mais dieu que les paroles (signées Piaf) sont basiques pour ne pas être plus méchant : l’amour avait dans ses yeux tant d’amour, tant d’amour, amour…..Un très beau blues, sublimé par Piaf, et probablement un des morceaux les plus jazz de son répertoire.
La célèbre chanteuse est très bien entourée notamment par JL Barrault et Paul Meurisse (son amant du moment dans la vie), et du coup le film est tout à fait supportable, mais oubliable.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

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MADAME ET SON FLIRT de Jean de MARGUENAT – France -1945
Avec ANDREX, Giselle PASCAL, Robert DHERY

Lasse de l’indifférence de son mari, une coquette bourgeoise décide de prendre un amant pour le rendre jaloux. Mais son voyage sentimental ne va pas se dérouler comme prévu.


Le (mauvais) sort me fait encore tomber sur du théâtre de boulevard filmé sans imagination. Le grain de folie censé habiter les personnages a fini par m’agacer et j’avais hâte que ce vaudeville touche à sa fin. Denise Grey, en fofolle excentrique claque ses répliques comme si elle voulait être entendue par les spectateurs du dernier rang (elle ressemble ici curieusement à Annie Cordy aussi bien physiquement que par son jeu peu subtil).
Les chansons d’Andrex sont aussi stupides que les plus mauvaises de Maurice Chevalier. Giselle Pascal possède une voix éthérée et un charme lumineux qui évoquent fort la Danièle Darrieux des films de Decoin ,surtout quand elle fredonne un oiseau chante…On se demande ce qu’elle aurait pu donner sous la direction d’un bon réalisateur.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Music Man »

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UNE FEMME PAR JOUR de JEAN BOYER -1948
Avec Jacques PILLS, Danielle GODET, Denise GREY

En jouant au casino, un grand séducteur remporte la mise face à un riche émir désargenté. Comme il ne peut le payer, il lui confie ses 7 épouses en gage : une femme pour chaque jour de la semaine…

Finalement, ce petit film cocasse m’a agréablement surpris. Contrairement à beaucoup de films de chanteurs, très mauvais dans l’ensemble, cette comédie se laisse voir. A certains moments, Jean Boyer semble s’inspirer de la vieille tradition de l’opérette des années 20 (séquence où les 7 femmes de l’émir se présentent). Le film est assez culotté pour l’époque et bourré de sous-entendus coquins.
Enfin, Jacques Pills (qui fut le mari de Piaf et de Lucienne Boyer) avait une jolie voix grave et c’est un plaisir que de l’entendre chanter d’autant plus que les refrains sont agréables. Danielle Godet est ravissante.
Jean Michel
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Jean Michel »

sympa ces critiques, je connais pas ces films mais intéressant à lire!
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Music Man »

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MENACE DE MORT de Raymond LEBOURSIER - 1949
Avec Colette DARFEUIL, Pierre RENOIR, DALIO

Un chef d’orchestre s’éprend de la maîtresse d’un homme fortuné. Il s’avère que ce dernier l’a trahi autrefois et livré à la gestapo. Pour se venger, il prépare son assassinat.

Alléché par la distribution et les fameux seconds rôles qui faisaient toute la gloire du cinéma français d’alors (Pierre Larquey, J Fusier-Gyr, P Carton…), j’ai tenté de découvrir ce film hélas coulé par une réalisation vraiment très médiocre. Le film est d’une grande lenteur, les scènes dramatiques soulignées d’effets sonores, les événements et réactions des personnages sont détaillés en long et en large au cas où le public ne saisirait pas une trame pourtant sans aucune originalité. Tout ça se termine de façon très banale….
On appréciera la présence de Dalio, à l’aise dans son rôle de coquin qui fait chanter le tueur pour avoir des « soussous » comme il dit!
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Music Man »

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LE DERNIER DES SIX de Georges LACOMBES-1941
Avec Pierre FRESNAY, Michèle ALFA, Suzy DELAIR, Jean CHEVRIER

Six amis se répartissent une certaine somme d'argent et décident de se séparer pendant cinq ans pour ensuite se retrouver et partager la fortune amassée.

J’ai découvert ce film vers l’age de 15 ans lors d’une diffusion à la télé et je remercie Ann Harding qui m’a permis de le revoir.
J’ai finalement été beaucoup moins séduit par l’intrigue que lors du premier visionnage. Peut être tout simplement parce qu’aguerri par les innombrables feuilletons télés et films policiers vus depuis, le suspense de ce genre de « who done it » ne me captive plus.
En fait, j’ai surtout été complètement charmé par la verve , l’abattage et le charisme du couple formé par Pierre Fresnay et Suzy Delair, absolument remarquables. Un vrai régal.
Si l’on reconnaît la patte de Clouzot, auteur du scénario, je préfère tout de même le formidable « Assassin habite au 21 » avec le même couple vedette , dans les mêmes rôles.
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La belle meunière (1948)

Message par pak »

2. La belle meunière de Marcel Pagnol (1948) co-réalisé avec Max de Rieux pour la version couleur :

Avec Tino Rossi, Jacqueline Pagnol, Raoul Marco, Lilia Vetti, Raphaël Patorni, Suzanne Desprès, Alexandre Fabry... Scénario et dialogues : Marcel Pagnol, d'après les lieder de Franz Schubert – Musique de Tony Aubin (et Franz Schubert pour les lieder) – Genre : film musical – Production française – Date de sortie : 24/11/1948
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Mon avis :

Schubert, déprimé par une lettre de Goethe très critique sur sa dernière composition, abandonne Vienne et s'exile dans les montagnes pour se ressourcer. Il y rencontre une jolie fille dont le père, meunier, lui propose le gite, et il tente de la séduire avec ses chansons.

Ce film est inhabituel à plus d'un titre. Le principal étant le procédé couleur utilisé par le réalisateur, sorte de technique expérimentale au début du film couleur en France. Ce procédé, appelé Rouxcolor, sensé concurrencer les autres brevets Xcolors tels que l'Agfacolor, le Kodacolor ou le Technicolor, et qui eut une existence éphémère à cause d'une instabilité chronique, rendant entre autres les projections difficiles. Les images survivantes, comme ce film, ont eu du mal à traverser les épreuves du temps. Elles sont très dégradées et assez instables au point qu'on a parfois l'impression de regarder un film en relief sans les lunettes adéquates. Film inhabituel aussi parce que se détachant nettement des thèmes habituels des films de l'auteur, sorte de biographie romancée et musicale d'un célèbre musicien qui ne fonctionne pas du tout.

A cela doit s'ajouter un choix d'acteur assez discutable. Rappelons-nous Schubert, grand compositeur autrichien, mais syphilitique et décédé prématurément à 31 ans : rien à voir avec Tino Rossi, 41 balais au moment du tournage, empâté et bedonnant, qui avait déjà montré ses talents d'acteur plus que limités dans quelques bluettes sans intérêts comme Marinella (Pierre Caron, 1936) par exemple, montrant qu'il est bien plus chanteur d'opérettes (d'ailleurs il n'arrête pas de chanter dans le film de Pagnol). Face à lui, Jacqueline Pagnol est bien mignonne, mais à force de rires et de minauderies, elle passe pour une ravissante idiote qui en plus semble dire son texte comme une récitation.

On reconnaît tout de même la patte de l'auteur via ses personnages simples (ici le père meunier), la truculence de certains dialogues, et la Nature, omniprésente, qui fait peut-être de Marcel Pagnol l'un des premiers réalisateurs écologiques bien avant la mode du vert...

Désuet, kitch, suranné, guimauve, pour ne pas dire niais... Pas vraiment une réussite de la part d'un cinéaste bien plus inspiré la décennie précédente, qui signe là son plus mauvais film.

Étoiles : * . Note : 7/20


Autour du film :

1. C'est l'un des premiers films français tournés en couleurs naturelles (c'est-à-dire non colorisé), en fait sûrement le second, le premier étant Le mariage de Ramuntcho de Max de Vaucorbeil (1946), Jour de fête de Jacques Tati (1947) fermant ce tiercé historique (même si ce dernier fut exploité en noir et blanc à cause de problèmes techniques qui empêchèrent le tirage couleur des images).

2. La belle meunière (Die schöne Müllerin) est une véritable création de Franz Schubert, écrite par le compositeur après une période d'incertitudes. C'est une adaptation de 25 poèmes de Wilhelm Müller narrant l'histoire d'un jeune homme hébergé par un meunier et qui s'éprend de la fille de celui-ci, elle même ayant le béguin pour un chasseur. Désespéré, le voyageur se suicide. Le film est nettement moins dramatique, mixant un épisode plus ou moins fictif de la vie du compositeur et ses lieder.

3. Une première version du film a été tournée en noir et blanc, puis Marcel Pagnol découvre le procédé Rouxcolor et est séduit. Il décide alors de refaire le film avec celui-ci. Le procédé Rouxcolor se base sur la synthèse additive des couleurs sur un support noir et blanc grâce à un ensemble de filtres. Si vous n''avez rien compris, c'est normal, j'explique très mal les trucs techniques, d'ailleurs je n'ai rien compris à mon avant-dernière phrase !

4. Devant la dégradation du film, les Archives Françaises du Film ont transféré celui-ci sur une pellicule Eastmancolor en 1985.

5. La plus grande partie du film a été tourné dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, à côté de la commune La Colle-sur-Loup, située dans le département des Alpes-Maritimes, et plus précisément au moulin de La Colle-sur-Loup, aujourd'hui inaccessible car appartenant à une propriété privée et noyé dans la végétation.

Le moulin en 1951 : Image
Le moulin en 2009 : Image

(désolé pour la qualité des photos qui suivent, mais il est très difficile de trouver des documents sur ce film)

Image Image Image Image

Tino qui pousse la chansonnette (et l'occasion de se rendre compte de l'état déplorable de la pellicule) :
Dernière modification par pak le 21 août 11, 13:38, modifié 5 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par riqueuniee »

Si le sujet en vaut bien d'autres (ça pourrait être celui d'une opérette),le film est passablement ridicule (disons kitsch,pour être sympa).On ne profite même pas vraiment de la musique de Schubert,réarrangée pour l'occasion (et Tino Rossi n'a rien d'un chanteur classique).Le meilleur? Quelques personnages secondaires,et quelques dialogues (on est chez Pagnol,quand même).
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Ann Harding
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Ann Harding »

Les petites du Quai aux Fleurs (1944, Marc Allégret) avec Odette Joyeux, André Lefaur, Bernard Blier, Louis Jourdan, Danièle Delorme et Gérard Philipe

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M. Grimaud (A. Lefaur) tient une librarie sur le quai aux fleurs à Paris. Il a fort à faire, tout seul, avec ses quatre filles adolescentes ; en particulier, la petite Rosine (O. Joyeux) qui n'a pas reparu de la nuit. Elle est amoureuse de Francis (L. Jourdan), le fiancé de sa soeur Edith...

Cette charmante comédie marque les débuts à l'écran de Danièle Delorme et de Gérard Philipe. Mais, au-delà de ce fait, le film a été écrit par Marcel Achard et Jean Aurenche qui réussissent à apporter suffisamment de saveur à leur intrigue et leurs dialogues pour enchanter le spectateur durant 90 min. André Lefaur est un vieux papa délicieusement bougon qui passe une partie de sa journée à pêcher dans la Seine près de son magasin. Odette Joyeux a un rôle assez proche de ceux qu'elle a joués chez C. Autant-Lara à cette époque-là, celui d'une jeune adolescente amoureuse qui est prête à faire des folies. Bernard Blier a un rôle inhabituel d'amoureux transi qui se sacrifie pour celle qu'il aime. Il faut d'ailleurs saluer la performance de ce formidable acteur de second plan qui a enrichi tant de films par sa présence. Un tout jeune et filiforme Gérard Philipe fait la cour à une des filles Grimaud avec une certaine timidité. Quant à Danièle Delorme, elle est également charmante en adolescente délurée. Certainement pas un chef d'oeuvre, mais une comédie qui tient très bien la route.



Madame Sans-Gêne (1941, Roger Richebé) avec Arletty, Maurice Escande et Albert Dieudonné

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Catherine (Arletty), une blanchisseuse, est devenue la Maréchal Lefebvre. Elle a conservé son franc parler et des manières qui déplaisent aux soeurs de l'Empereur...

Le rôle de Madame Sans-Gêne semble avoir été écrit pour Arletty. Mais la pièce de Victorien Sardou a fait l'objet de nombreuses adaptations cinématographiques dont une avec Gloria Swanson sous la direction de Léonce Perret en 1925, malheureusement perdue. Ici, nous sommes vraiment dans le théâtre filmé; mais on avale la pilule d'autant mieux que les acteurs font un numéro tout à fait convaincant. Arletty brille de tous ses feux avec son langage plein d'éloquence et de verdeur. Il est aussi très amusant de retrouver un Albert Dieudonné rondouillard et vieilli en Napoléon, quinze ans après sa performance dans le film de Gance. Avec une petite dose supplémentaire de folie, le film aurait pu gagner en fantaisie. Mais, il offre néanmoins une bouffée de bonne humeur bien venue.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Federico »

pak a écrit :2. La belle meunière de Marcel Pagnol (1948) co-réalisé avec Max de Rieux pour la version couleur :

Avec Tino Rossi, Jacqueline Pagnol, Raoul Marco, Lilia Vetti, Raphaël Patorni, Suzanne Desprès, Alexandre Fabry... Scénario et dialogues : Marcel Pagnol, d'après les lieder de Franz Schubert – Musique de Tony Aubin (et Franz Schubert pour les lieder) – Genre : film musical – Production française – Date de sortie : 24/11/1948
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Vu il y a longtemps mais avec un souvenir affligé. Tino Rossi en Schubert :shock: ...
Imaginez que Joann Sfar ait choisi Patrick Fiori ou Bruel pour incarner Gainsbourg...
Seule raison de revoir ce chromo poussiéreux : la beauté lumineuse de Jacqueline Pagnol.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Federico »

Music Man a écrit :Image
LE DERNIER DES SIX de Georges LACOMBES-1941
Avec Pierre FRESNAY, Michèle ALFA, Suzy DELAIR, Jean CHEVRIER

Six amis se répartissent une certaine somme d'argent et décident de se séparer pendant cinq ans pour ensuite se retrouver et partager la fortune amassée.

J’ai découvert ce film vers l’age de 15 ans lors d’une diffusion à la télé et je remercie Ann Harding qui m’a permis de le revoir.
J’ai finalement été beaucoup moins séduit par l’intrigue que lors du premier visionnage. Peut être tout simplement parce qu’aguerri par les innombrables feuilletons télés et films policiers vus depuis, le suspense de ce genre de « who done it » ne me captive plus.
En fait, j’ai surtout été complètement charmé par la verve , l’abattage et le charisme du couple formé par Pierre Fresnay et Suzy Delair, absolument remarquables. Un vrai régal.
Si l’on reconnaît la patte de Clouzot, auteur du scénario, je préfère tout de même le formidable « Assassin habite au 21 » avec le même couple vedette , dans les mêmes rôles.
Celui-là par contre est très sympa même si je suis d'accord sur le fait que L'assassin habite au 21 est un bon ton au-dessus. Les aventures de Wenceslas Vorobeïtchik (120 points en mot compte triple) sont un régal. Il y a un certain charme fantaisiste anglo-saxon (ou de Hitchcock période anglaise en version light) mâtiné d'aventures de Tintin.
Ceci dit, j'ai toujours eu du mal avec Suzy Delair que je trouve vite insupportable avec sa voix et ses gesticulations de souris prise dans une trappe. Heureusement qu'il y a la classe de Fresnay qui tempère.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par julien »

Federico a écrit :Vu il y a longtemps mais avec un souvenir affligé. Tino Rossi en Schubert :shock: ...
Et pourquoi pas ? :D



En Chopin il était pas mal en tout cas.
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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par Federico »

julien a écrit :
Federico a écrit :Vu il y a longtemps mais avec un souvenir affligé. Tino Rossi en Schubert :shock: ...
Et pourquoi pas ? :D



En Chopin il était pas mal en tout cas.
Ouai ben, même avec un zeste de citron, c'est pas ma cup of tea :wink: .

Tant qu'à faire, je préfère Harry Baur en Beethoven.

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Re: Le cinéma français des années 40 (1940-49)

Message par riqueuniee »

@Federico Si ces films ont un petit air anglo-saxon,c'est aussi parce que les romans adaptés se passaient en Angleterre.ils ont été transposés en France pour des raisons évidentes (outre que ce sont des productions françaises,les deux films ont été réalisés pendant l'Occupation).
Le film de Clouzot est en effet nettement supérieur.Il doit beaucoup aux dialogues de Jeanson et à ses interprètes.Comme dans la plupart des films des années 30/40,les seconds rôles sont un régal.
En ce qui concerne Tino Rossi interprétant du Chopin,c'est non merci.Ca correspond à une mode de l'époque : coller des paroles sur une mélodie classique archi-connue (ici un prélude pour piano de Chopin).
En ce qui concerne le film de Gance sur Beethoven,je ne suis pas trop preneuse non plus.Un bon film biographique de cette période ,c'est la Symphonie fantastique avec JL Barrault.Un film biographique sur Berlioz plutôt bien fichu.En plus,les parties musicales sont très convaincantes,notamment l'intepétation du Requiem aux Invalides,telle que prévue par Berlioz.
On peut aussi revoir la Malibran de Guitry,biopgraphie d'une célèbre cantatrice de l'époque romantique.Le rôle titre et les autres rôles de chanteurs sont tenus par des chanteurs lyriques,convaincants aussi en comédiens.Et le film contient des références étonnantes (vu qu'il date de 1943) à Lafayette et aux Américains,ainsi qu'au caractère international de cette artiste,"espagnole vivant en France,mariée à un Belge,ayant vécu aux USA et décédée en Angleterre"...
Les morceaux (de sopéras célèbres,tous italiens)sont en plus interprétés en italien,et non en traduction française,comme c'était souvent le cas dans les annéeq 40.
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Le ciel est à vous (1943)

Message par pak »

3. Le ciel est à vous de Jean Grémillon (1943) :

Avec Madeleine Renaud, Charles Vanel, Jean Debucourt, Léonce Corne, Raymonde Vernay, Anne Vendenne, Michel François, Raoul Franco... Scénario d'Albert Valentin – Adaptation et dialogues de Charles Spaak – Musique de Roland Manuel – Genre : aventure – Production française – Date de sortie : 02/02/1944
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Mon avis :

Pierre et Thérèse, un couple marié, éprouvent une passion commune pour l'aviation. Ils délaissent vies familiale et professionnelle pour se consacrer aux courses aéronautiques, elle au pilotage, lui à la mécanique.

Un film emblématique de la période trouble durant laquelle il fut tourné. Revu aujourd'hui, il est fascinant à analyser. Déjà parce que vichystes comme résistants ont revendiqué les valeurs défendues par le film, tout en occultant ce qui n'entrait pas vraiment dans leur ligne de pensée. D'un côté les collaborationnistes saluaient cette famille modèle (couple marié avec deux enfants studieux et belle-mère à charge) retroussant ses manches pour travailler à la gloire du pays et respectant les valeurs en vigueur tout en étant constructif, de l'autre les gaullistes saluaient cet appel à l'évasion et au refus des conventions de l'ordre établi. Au milieu, les communistes ne pouvaient que relever l'ardeur de ce couple en bleu de travail à travailler de ses mains sans apports financiers, compensant par sa passion et sa sueur un manque de moyens chronique. Bref, tout le monde s'y retrouvait, à condition de ne voir que ce qu'on avait envie d'y voir... Il y a sûrement un peu de tout cela dans ce film, même s'il est difficile de deviner les pensées de l'auteur.

Pourtant, à y regarder de plus près, Grémillon parsème son film de signes plus ou moins forts (la censure veillait, d'autant que le tournage était surveillé, histoire qu'il ne vienne pas à l'idée de quelqu'un de s'envoler vers d'autres cieux avec un des appareils) pour que l'on penche vers l'appel à la résistance.

D'entrée, le plan du troupeau de moutons croisant un groupe d'enfants défilant au pas d'un curé jette un certain trouble car en quelques secondes tout est déjà dit : la France est un troupeau de moutons mené par son berger (sous-entendu Pétain) qui n'admet qu'une autre foi, celle envers le Seigneur, et son avenir, ce sont les enfants qu'il faut faire et élever pour le bien futur du pays. D'ailleurs, le schéma qui se dessine autour du couple rappelle étrangement la situation d'alors : l'épouse passionnée incarne l'esprit de résistance, le mari inquiet et hésitant la majorité silencieuse courbant l'échine sans prendre parti, la belle-mère la sévérité héritée de Vichy ne tolérant aucun détour de la morale obéissante, quant au village, grondant et menaçant, c'est la représentation des armes du parti dans un niveau croissant de répression : réprobation bienveillante, puis délation, pour finir par la violence.

Autre signe, mais là il faut s'y connaître un peu en aviation, le petit avion que pilote Thérèse est un Caudron Aiglon (de conception française) et elle va battre le concurrent favori, le Messerchmitt 108 (de conception allemande).

Grémillon maquille tout ceci dans une apparente servilité, car tous les ingrédients vichystes y sont dès le début : France rurale et besogneuse, éducation religieuse, enfants, respect de l'ordre (au début, la famille se fait exproprier dans la bonne humeur... ). De plus il utilise l'argument de l'histoire vraie (un peu arrangée il est vrai) puisque le scénario s'inspire en partie de la vie d'une pilote, Andrée Dupeyron.

Mais au-delà de ces arguments (et peut-être aussi ces arguties) politiques plus ou moins sous-jacents, il ne faudrait pas oublier l'aspect artistique de l'œuvre. Car Grémillon s'attache à décrire des gens simples et attachants, maladroits aussi (voir comment ils délaissent petit à petit leurs enfants, notamment la passion pour la musique de leur fille : encore un aspect qui ne va pas vraiment dans le sens de Vichy... ), dans leur passion encombrante.

Car il parle là de passion, comme dans ses films les plus connus comme Gueule d'amour (1937) ou Remorques (1939). Sauf qu'ici elle est double : celle pour un besoin presque physique de quitter le plancher des vaches pour des sensations inédites et fortes, et celle d'un amour au quotidien d'un homme qui abandonne tout pour voir sa femme s'épanouir, même sans lui, deux passions qui convergent vers une seule finalement, celle d'un couple qui a but commun, peut-être pas pour les mêmes raisons, mais suffisamment complémentaires pour qu'ils y trouvent leur secret du bonheur.

Un film exalté et exaltant, l'un des plus beaux tourné sous l'occupation, porté par les prestations de Madeleine Renaud et Charles Vanel.

Étoiles : * * * *. Note : 16/20.


Autour du film :

1. Le personnage de Thérèse est inspiré d'Andrée Dupeyron. Cette aviatrice avait créé l'évènement en mai 1938 en battant avec son Caudron le record féminin de vol en ligne droite entre Oran (Algérie) et Tel El Ahan (Irak), ce qui donne une distance de 4360 Km. A l'époque, avec les moyens de navigation et de transmission existants, et sans ravitaillement en vol, c'était un véritable exploit. Comme dans le film, elle était l'épouse d'un garagiste.
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2. Une autre aviatrice française célèbre est citée dans le film, c'est Elisabeth Lion, surnommée « La Lionne » qui battit le 14 mai 1938 le record de distance féminine, qu'elle ne garda que 2 jours puisque Andrée Dupeyron fit mieux. Le Caudron utilisé dans le film est l'appareil avec lequel Elisabeth établit son record. Elle passa son brevet de pilote à 30 ans, en 1934. Elle enchaine ensuite les compétitions : première au classement féminin des 12 heures d'Anger en juillet 1936, gagne la coupe Hélène Boucher (autre grande aviatrice française) lors de la course Paris-Cannes le mois d'après, obtient le record féminin d'altitude en décembre 1937, et elle en pulvérise deux autres du même genre ce mois-ci, et elle multiplie ainsi les tentatives. Le 29/12/1938, elle est élevée au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur. En 1945, Charles Tillon, ministre de l'air, décide de créer un corps de pilotes militaires féminin : elle fait partie des 5 pilotes sélectionnées, ce qui en fait l'un des toutes premières pilotes féminins de l'armée de l'air. Hélas l'expérience tourne court faute de budget, et on perd la trace de l'aviatrice. Elle décède le 09/01/1988.
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3. Le ciel est a vous fut un succès populaire à sa sortie, le dernier de Jean Grémillon, qui ne tournera plus que trois longs-métrages, dont L'étrange Madame X (1951). 1944 fut une année plus que mouvementée pour la France (débarquements de Normandie et de Provence, libération de Paris... ), aussi les chiffres du box-office de cette année ne sont hélas pas disponibles, du moins sur les sites du net spécialisés.

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Dernière modification par pak le 9 avr. 11, 13:20, modifié 1 fois.
Le cinéma : "Il est probable que cette marotte disparaîtra dans les prochaines années."

Extrait d'un article paru dans The Independent (1910)

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