Je viens de découvrir ce film qui m'intriguait depuis un moment. Je confirme ce qui a été déjà dit plus haut : le ton est très froid mais bon, en même temps, on n'a pas franchement affaire à une bande de rigolos.
La forme est plus celle d'un téléfilm que d'un film de cinéma. David Miller sert sans flamber (nous sommes aux antipodes d'Oliver Stone et même du
I, comme Icare de Verneuil) le scénario de son vieil ami Dalton Trumbo basé sur la théorie d'un complot d'ultra-conservateurs qu'on devine gros bonnets militaro-industriels, sudistes et foncièrement racistes et anti-communistes (très inquiets à l'idée d'accords de désarmements entre JFK et l'URSS, du retrait progressif des troupes en Asie du Sud-Est, de la montée en puissance des minorités non-WASP etc.). Complot dont l'issue consistera à user d'un trio de snipers dont on suit l'entraînement dans le désert...
...et d'un bouc émissaire nommé Lee Harvey Oswald, choisi pour son CV pour le moins ambigu. Bien entendu, ce même "leurre" devra être lui-même rapidement liquidé avant des investigations trop poussées et pour ça, on fera appel à un petit truand local nommé Jack Ruby (qui mourra lui-même trois ans plus tard d'un cancer - et à moitié fou - ...dans le même hôpital où JFK fut déclaré mort).
Le film mêle plutôt pas trop mal séquences de fiction et stock-shots (dans le cas présent, le terme n'a jamais autant été approprié

) mais l'ensemble reste assez brut quand ce n'est pas plutôt sommaire ou peu subtil (cf les séquences où le faux Oswald fait sa petite campagne de provocations en laissant chaque fois bien retenir son nom ou le déchiffrage du message crypté lançant l'opération à l'aide... d'une Bible). Le sujet par contre continue d'être intrigant et troublant... à l'image de la conclusion finale reportant l'incroyable et statistiquement ahurissant hasard (même dans un pays familier de ces cas de figure) des morts brutales et rapidement advenues des principaux témoins dans les trois années suivant les faits.
Le film est sorti sur les écrans américains presque 10 ans jour pour jour après le drame de Dallas, alors que le pays était en plein scandale du Watergate. Un carton rappelle une déclaration (censurée) du président Johnson à la télévision en 1970 où il aurait lui-même émis des soupçons en faveur d'un tel complot. Étant donné que la vérité n'est toujours pas établie 50 ans après la mort de JFK, ça risque de durer encore un moment. Et tous les dix ans, cela permet aussi de sortir des dizaines de bouquins et quelques films sur le sujet.
A l'origine du film, un projet lancé (puis abandonné) par... Donald Sutherland.
Bien entendu, la plupart des acteurs impliqués dans ce film à charge en ont approuvé le scénario (ou tout du moins sa probabilité). Tel Will Geer (un ancien blacklisté des années 50, comme Trumbo) et Burt Lancaster, qui avait déjà participé à de fameux films "paranoïaques" et dérangeants dans le rôle du "grand méchant" comme
7 jours en mai et le refera plus tard avec
The Osterman weekend. Il y reforme son duo de canailles avec un Robert Ryan très usé par la maladie, dont ce fut hélas l'ultime apparition et qui décèdera quelques mois avant la sortie du film de Miller.
A vrai dire, si il est sympa de revoir ensemble ces deux grandes figures, on sent aussi qu'elles servent de caution ou disons d'éléments attractifs pour l'affiche
* car, parmi les commanditaires, c'est plus Will Geer qui retient l'attention en vieux pétromilliardaire, moustache et crinière blanches à la Mark Twain, d'abord dubitatif mais qui donnera finalement le feu vert à l'opération après avoir vu à la télévision la déclaration de Kennedy d'octobre 1963 promettant de retirer les troupes du Vietnam avant fin 1965.
- Spoiler (cliquez pour afficher)
- Promesse qu'il n'aurait probablement pas pu tenir dans ces délais quand on voit l'exemple récent d'Obama avec les troupes US en Afghanistan...
A noter la présence, dans le rôle du coordinateur des snipers, du tout récemment disparu Ed Lauter.
(*) Si je peux me permettre de plaisanter sur un sujet sérieux, j'ai eu un peu de mal à conserver le mien en voyant la séquence où Lancaster, habillé en Américain moyen (chemise à carreaux et casquette de pompiste) vient incognito livrer ses instructions à Ed Lauter à la terrasse d'un restauroute... car j'avais déjà vue cette séquence mais dans sa version détournée par Hazanavicius pour son hilarante Classe américaine.
Attention ce flim n'est pas un flim sur le complotimse. merci de votre compréhension