Stanley Kubrick (1928-1999)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Jeremy Fox a écrit :
O'Malley a écrit : quasiment? :cry: :lol:
A part sur "cinéaste de la violence" malgré que tu m'a presque convaincu ;-)
Ben moi c le "un artiste est par essence progressiste" que je ne comprends pas bien :? Mais alors vraiment pas du tout :(

Sinon je suis tout à fait d'accord.
O'Malley
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Message par O'Malley »

Jeremy Fox a écrit :
Beule a écrit : :roll:
Pauvre George une fois de plus rabaissé parmi les tâcherons :mrgreen:
Oops : j'avais pas fait gaffe à Sidney

O'malley :evil: :lol: Sidney est un GRAND
je ne ds pas le contraire: George Sidney est un grand réalisateur mais n'est pas un maître du cinéma tel que Welles, Resnais ou Fellini qui oeuvrent pour la perfection...
ce que je voulais dire ce qu'il n'arive déjà pas à la cheville de ces réals, alors pense pour Kubrick...
David Locke
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Message par David Locke »

O'Malley a écrit : Kubrick n'a réalisé hormis deux ou trois exceptions que des chefs d'oeuvres, ou en tout cas que des grands films, qui ont marqué l'enssentiel des genres hollywoodiens (dommage qu'il ne se soit pas frotté au western) avec un sens plastique et intellectuel très fort... je considère que bcp de ses films comme (presque) parfait, ce qui est pas le cas de l'essentiel de la filmo des réals que j'admire : Huston, Kazan, Hitchcock, Hawks et autres...
Deux remarques :
- Que Kubrick n'ai réalisé que des chefs-d'oeuvre, permets-moi d'en douter (c'est tout ce que je demande...).
- Kubrick a bien failli faire un western, mais Marlon Brando l'a viré du tournage de ce qui est devenu La Vengeance aux deux Visages.
O'Malley a écrit :Qt à ce que dit David Locke, je ne crois pas qu'un artiste doit être par essence progressiste (on nierai alors pas mal de grands réals hollywodiens du monde de l'art); dans ce cas là aussi, pas mal de grands auteurs de littérature tel que Balzac ou Céline seraient répudier du monde de l'art... et tiens, en pensant à ces auteurs, je ne les trouve pas si éloigné d'une condition humaine dépeinte par Kubrick...
A mon sens, il y a un monde entre Balzac et Céline d'un côté, et Kubrick de l'autre, car ce qu'exprime Kubrick est relativement uni-dimensionnel.

Ainsi, on pourrait montrer à quel point les figures de son cinéma sont soit parfaitement claires (l'os projeté en l'air dans 2001 devient un vaisseau spatial pour illustrer que c'est la soif de destruction qui est à l'origine du progrès humain), soit totalement indéchiffrables (l'obélisque, toujours dans 2001), alors que Balzac et Céline sont capables d'une richesse inouïe, et surtout de faire évoluer leur art vers des limites qui leur sont étrangères (l'écriture de Céline qui devient musique...).

Il est certain que Kubrick fait tendre son cinéma vers la métaphysique, mais comme elle en est également la source, il tourne en rond. Ses films sont des démonstrations en boucle fermée : une idée métaphysique (ex : "l'homme est un loup pour l'homme") trouve des équivalents cinématographiques qui ne servent à rien d'autre qu'à démontrer l'idée qui en est à l'origine (vous aurez reconnus Orange Mécanique dans son entier).

Sinon, du point de vue général, je n'attache aucun intérêt à la notion de progrès ou de progressisme en art. Je préfère parler d'un humanisme radical, qui est pour moi la source de l'art.

En effet, il y a peu d'intérêt pour un cinéaste (ou tout autre artiste) à traiter l'homme comme un pantin corvéable à merci.
C'est que l'homme (et son regard sur la nature) est la source à laquelle le cinéaste doit puiser pour trouver des idées cinématographiques qui pourront faire tendre le film vers la métaphysique (un parcours que l'on trouve chez Malick par exemple) ou autre chose.

Or Kubrick n'a confiance que dans son cerveau et il préfère traiter l'humanité avec sarcasme. Son personnage idéal est soit incapable de penser (Barry Lyndon), soit bloqué sur une idée unique (Jack Nicholson dans Shining).

C'est vraiment dommage qu'un homme au talent aussi immense que Kubrick ai choisi de travailler en circuit fermé, ce qui rend ses films bien peu profitables à ceux qui les reçoivent...

Il suffit pour se convaincre de cette idée de voir le traitement qu'on fiat Kubrick et Kurosawa du danger nucléaire.
Le premier fantasme la destruction planétaire par l'emballement de la machine de guerre des Etats-Unis, le second nous confronte à des personnes qui, ayant déjà subi une attaque de ce type, vivent dans la peur de l'anéantissement.

Le premier nous fait froid dans le dos, le second nous aide à fourbir les armes (psychologiques mais aussi matérielles) pour sortir du problème.
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O'Malley
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Message par O'Malley »

Philip Marlowe a écrit :
Jeremy Fox a écrit : A part sur "cinéaste de la violence" malgré que tu m'ais presque convaincu ;-)
Ben moi c le "un artiste est par essence progressiste" que je ne comprends pas bien :? Mais alors vraiment pas du tout :(

Sinon je suis tout à fait d'accord.
David locke soutient qu'un artiste soit s'engager dans la libération de l'homme des entraves de la société et des autres hommes pour qu'il soit véritablement un artiste... ce n'est pas mon avis: un artiste est avant tout un homme qui fait réflechir les hommes sur leur condition, sur leur vie, lue individualité par le biais d'un art... dans cette optique,un artiste doit avoir une vision (qui peut s'exprimer à travers un style), même si celle ci ne plait pas à tout le monde.... c'est le cas de Kubrick qui ne fais pas ici l'unanimité...
David Locke
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Message par David Locke »

O'Malley a écrit :David locke soutient qu'un artiste soit s'engager dans la libération de l'homme des entraves de la société et des autres hommes pour qu'il soit véritablement un artiste...
Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.
Je pense qu'un artiste est par essence un homme libre et que son travail a, ne serait-ce que par l'exemple (la vie et l'oeuvre d'un artiste étant indissociables), tendance à libérer les autres hommes.
O'Malley a écrit :Ce n'est pas mon avis: un artiste est avant tout un homme qui fait réflechir les hommes sur leur condition, sur leur vie, lue individualité par le biais d'un art... dans cette optique,un artiste doit avoir une vision (qui peut s'exprimer à travers un style), même si celle ci ne plait pas à tout le monde.... c'est le cas de Kubrick qui ne fais pas ici l'unanimité...
Je trouve la vision de Kubrick singulièrement étroite et pompeuse, voire même totalitaire dans le sens où l'alternative est sans cesse déchiquetée par la pensée systémique de son cinéma.
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Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

O'Malley a écrit :
Philip Marlowe a écrit : Ben moi c le "un artiste est par essence progressiste" que je ne comprends pas bien :? Mais alors vraiment pas du tout :(

Sinon je suis tout à fait d'accord.
David locke soutient qu'un artiste soit s'engager dans la libération de l'homme des entraves de la société et des autres hommes pour qu'il soit véritablement un artiste... ce n'est pas mon avis: un artiste est avant tout un homme qui fait réflechir les hommes sur leur condition, sur leur vie, lue individualité par le biais d'un art... dans cette optique,un artiste doit avoir une vision (qui peut s'exprimer à travers un style), même si celle ci ne plait pas à tout le monde.... c'est le cas de Kubrick qui ne fais pas ici l'unanimité...
Là je suis d'accord :wink:
Balzac et Céline sont capables d'une richesse inouïe, et surtout de faire évoluer leur art vers des limites qui leur sont étrangères (l'écriture de Céline qui devient musique...).

Il est certain que Kubrick fait tendre son cinéma vers la métaphysique, mais comme elle en est également la source, il tourne en rond.
Sauf que contrairement à la musique, la métaphysique n'est pas un art. Et quand tu parles de phrases qui deviennent musique chez Céline, je peux très bien parler de cinéma qui devient peinture et musique chez Kubrick.
soit totalement indéchiffrables (l'obélisque, toujours dans 2001), alors que Balzac et Céline sont capables d'une richesse inouïe,
Mais la force d'une oeuvre d'art ne vient elle pas du mystère, de l'émotion, de l'impression qu'elle peut dégager. Le monolithe de 2001 a stimulé les émotions et l'imagination des spéctateurs comme aucun "objet de cinéma" n'a pu le faire.

Sinon je ne trouve pas Barry Lyndon méprisant. Au contraire j'ai trouvé que son regard était celui d'un sage, qui regardait avec tristesse le destin et les actes de ses personnages, qui malgré leurs défauts, sont tous humains.
C'est vraiment dommage qu'un homme au talent aussi immense que Kubrick ai choisi de travailler en circuit fermé, ce qui rend ses films bien peu profitables à ceux qui les reçoivent...
Peu d'autres films m'ont été aussi profitables.
Il suffit pour se convaincre de cette idée de voir le traitement qu'on fiat Kubrick et Kurosawa du danger nucléaire.
Le premier fantasme la destruction planétaire par l'emballement de la machine de guerre des Etats-Unis, le second nous confronte à des personnes qui, ayant déjà subi une attaque de ce type, vivent dans la peur de l'anéantissement.

Le premier nous fait froid dans le dos, le second nous aide à fourbir les armes (psychologiques mais aussi matérielles) pour sortir du problème.
Il est normal que d'aussi grands artistes aient une vision et une conception bien différente du monde.
Kubrick fait des constats et invite le spectateur à s'interroger.
Je connais pas assez bien l'oeuvre de Kurosawa pour comparer.
Il est certain que Kubrick fait tendre son cinéma vers la métaphysique, mais comme elle en est également la source, il tourne en rond. Ses films sont des démonstrations en boucle fermée : une idée métaphysique (ex : "l'homme est un loup pour l'homme") trouve des équivalents cinématographiques qui ne servent à rien d'autre qu'à démontrer l'idée qui en est à l'origine (vous aurez reconnus Orange Mécanique dans son entier).
Honnêtement, pas du tout. Et pourtant je suis pas fan de ce film là.

Mais il est normal après tout qu'un artiste ayant une vision du monde aussi marquée ne fasse pas l'unanimité, et c'est ce qui fait sa force.
Kurtz

Message par Kurtz »

en fait, David, reprocherais tu à Kubrick d'être pessimiste ?
Jordan White
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Message par Jordan White »

J'apporte ma petite pierre à l'édifice. En ce qui concerne Kubrick donc, je suis et je reste admiratif devant l'oeuvre en général, et certains films me touchent en particulier, parmi lesquels Lolita et surtout Barry Lyndon.
Il fait partie des deux ou trois réalisateurs qui à chaque réalisation m'ont constamment surpris, ont su renouveler, réinventer leur propre cinéma. Et celui de Kubrick est l'un des plus ecclectique qu'il m'ait été donné de voir, il a abordé à peu tous les genres et à chaque fois y a laissé son empreinte. J'ai compris - c'est en lisant le livre de Michel Ciment et un autre ouvrage que j'avais sur la question - que chez Kubrick il y avait une recherche d'une structure, d'une architecture de la mise en scène qui trouve son aboutissement dans la construction et le découpage des plans corollaires à des scénarios complexes et à un souci constant de conteur. Cela vaut pour à peu près tous les films qu'il a pu tourner, dans lesquels on sent une précision chirurgicale de tous les instants - qui moi me scie- sur la façon de poser la caméra, de choisir le bon angle. Ce qui fait de lui un technicien exceptionnel, hors du commun. En sus, il a réussi à imposer une patte, un style reconnaissable entre tous. Je pense que cela vient en grande partie de son éducation esthétique et en particulier de la photographie, qui apprend les bases du cadrage. Je n'ai pas vu ses clichés pour Look mais ils doivent être déjà très bons, voire géniaux.

C'est ce perfectionnisme, cette recherche de la perfection qui personnellement me fascine, parce qu'elle reprend la maxime " Cent fois se remettre à l'ouvrage " de l'Art Poétique. Un travail long, harassant ( je me rappelle de l'opérateur steadycam qui monte une cinquante de fois les escaliers de Shining parce que Kubrick n'est pas satisfait des plans). Tant que le plan ne lui satisfait pas, il recommençait, encore et encore, sans relâche. Bien sûr pour les détracteurs, c'est une des raisons surement de ce désamour voire de l'agacement vis à vis de Kubrick. La perfection et l'harassement contre la spontanéité et la "prise sur le vif".
Un film comme 2001 est traversé par des plans hypnotiques qui ont demandé des répétitions folles. Mais le résultat à l'écran est admirable et pourtant il m'a fallu du temps pour apprécier et ensuite adorer ce film, qui m'était apparu tout sauf accessible la première fois.
L'aboutissement, le premier du moins, de Kubrick est atteint à mes yeux avec Barry Lyndon, qui est une oeuvre d'une telle richesse, qu'elle est inusable, lorgnant du côté de l'intemporalité. J'aime, je crois, tous les plans de ce film, qui me fait penser aux tableaux de Maîtres, des tableaux vivants s'animant sous mes yeux. Une telle richesse, une telle force visuelle, un tel pari ( un film en costume de trois heures passionnant de bout en bout) en font une oeuvre qui va au-delà du cinéma, qui se situe au niveau de la plus grande littérature mondiale, de la plus grande musique classique. Je pense que pour le coup il tutoie Mozart ou Proust.
Il y a cependant des films que je revois avec moins de plaisir, comme Full Metal Jacket que j'aime beaucoup pour sa première partie, mais beaucoup moins dans sa deuxième. Et Orange Mécanique a quand même assez vieilli même s'il reste virtuose et profondément original sur la forme comme sur le fond.
Je ne crois pas ou plus trop à cette image d'Epinal d'un homme froid, rustre, autoritaire et sans humour. C'est l'image qu'on a trop facilement véhiculé de lui cela. Je ne faisais pas partie de ses proches pour témoigner bien entendu, mais dans l'état actuel des choses, sa filmographie reste le plus important. Et elle est si riche, qu'elle peut être vu et revue encore pendant des décennies et des décennies.
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francis moury
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BARRY LINDON comme objet pur

Message par francis moury »

Je comprends bien que BARRY LINDON soit aux yeux d'un fervent de Kubrick son film préféré et le choix de Jordan est logique.
C'est un bel objet à la perfection plastique évidente.
Cela dit, "Cent fois sur le métier remettez votre ouvrage, polissez-le sans cesse et le repolissez" - cette maxime de Boileau dans son Art Poétique était celle de bien des réalisateurs : on m'a raconté que René Clément avait passé plusieurs heures à disposer une orange sur un étalage parce que sa place initiale ne lui convenait pas en fonction de l'effet recherché sur tel plan ... de quel film ? Je ne m'en souviens plus mais l'anecdote est véridique. Je vous en dirais un jour la source après l'avoir vérifié auprès de celui qui me l'a racontée.
Mais cet objet pur voulu comme tel, cher Jordan, on peut en trouver des équivalents cinématographiques dans des films d'époque tels que LES DUELLISTES de Scott ou UNE VIE d'Alexandre Astruc ou TESS D'UBERVILLE, et tant d'autres... le souci de restituer l'époque décrite, sa psychologie, ses moeurs, ses couleurs et sa durée propre est un souci documentaire normal dans le cadre de la fiction. Et par-dessus doit venir l'histoire, la manière dont on la narre, le sens qu'on prétend lui donner.
Rebondissons donc sur une nouvelle question : quel est le sens - pour Kubrick mais d'abord à nos yeux - de BARRY LINDON ?
Je me réjouis de lire les intéressantes contributions que ce forum aura suscité et de lire celles qu'il suscitera encore, certainement...
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francis moury
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coquille supra

Message par francis moury »

Pardon pour la coquille supra dans le titre : heure tardive !
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Solal
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Message par Solal »

David Locke a écrit : Ainsi, on pourrait montrer à quel point les figures de son cinéma sont soit parfaitement claires (l'os projeté en l'air dans 2001 devient un vaisseau spatial pour illustrer que c'est la soif de destruction qui est à l'origine du progrès humain), soit totalement indéchiffrables (l'obélisque, toujours dans 2001), alors que Balzac et Céline sont capables d'une richesse inouïe, et surtout de faire évoluer leur art vers des limites qui leur sont étrangères (l'écriture de Céline qui devient musique...).
oui c'est une belle illustration de la nature de l'ambiguïté chez Kubrick : ce dernier oscille entre hermétisme et didactisme mais est incapable d'une véritable complexité. L'opacité du sens (la "fin ouverte" chère à ses zélateurs) n'a alors effectivement rien de cette asignifiance toute deleuzienne que tu célèbres chez ces écrivains. Encore une fois, je vois là la limite de son cinéma, une façon de paraître plus complexe qu'il ne l'est véritablement.
Jordan White a écrit :Ce qui fait de lui un technicien exceptionnel, hors du commun. En sus, il a réussi à imposer une patte, un style reconnaissable entre tous. Je pense que cela vient en grande partie de son éducation esthétique et en particulier de la photographie, qui apprend les bases du cadrage. Je n'ai pas vu ses clichés pour Look mais ils doivent être déjà très bons, voire géniaux.
C'est discutable. Son sens du cadrage me paraît bien moins affûté que celui d'un Welles, plus programmatique qu'effectif. Et je rejoins assez Francis Moury lorsqu'il évoque "cette absence apparente de différence ontologique d'une image de publicité de 1988 (approx) et d'un film de Kubrick de la même année". Le talent de Kubrick tient en partie à des qualités publicitaires : principe d'efficacité (l'intensité - scénique, dramatique ou visuelle - ne vaut pas en tant que telle mais comme partie d'un tout, rouage d'une mécanique destinée à englober, ligoter le spectateur), gommage des aspérités et métaphore signifiante (à la façon des logos commerciaux, un motif visuel = un concept).
francis moury a écrit :Je comprends bien que BARRY LINDON soit aux yeux d'un fervent de Kubrick son film préféré et le choix de Jordan est logique.
Chez ses semi-détracteurs également : de tous ses films, c'est encore celui-ci qui me séduit le plus.
francis moury a écrit :Rebondissons donc sur une nouvelle question : quel est le sens - pour Kubrick mais d'abord à nos yeux - de BARRY LINDON ?
Vaste programme. :D

Ce qui me trouble positivement : la temporalité qu'il instaure. Il parvient à reproduire un peu l'atmosphère des nouvelles de Kleist - qui aurait pu être son modèle littéraire. Car si, sur le plan formel, Barry Lindon apparaît comme son fillm le plus maîtrisé, et où s'exprime avec la plus grande clarté sa vision historique fataliste, c'est paradoxalement le seul où le réel n'est pas subordonné à la démonstration, à l'imperturbable mécanique mise en branle, puisque des trouées, des espaces d'indétermination sont aménagés dans la durée du plan et dans son hétérogénéité (les panoramiques où différents tableux coexistent). Cela me fait penser à cette fable de Walter Benjamin (dans ses thèses sur l'histoire) qui évoque un automate, joueur d'échec capable de parer tous les coups de ses adversaires, dirigé en réalité par un nain bossu caché sous la table. Le déterminisme de Barry Lindon est du même ordre, habité voire même secrètement orchestré par le mystère.
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Je n'ai pas le temps d'écrire un long message et je reviendrai donc ultérieurement. :wink:
Simplement, je constate un glissement sémantique malheureux qui ferait presque de Stanley Kubrick un quasi fasciste (on n'est passé d'une mise en forme totalitaire à un cinéaste totalitaire). Je ne cache pas que j'en suis profondément outré.
Je constate aussi que les avdersaires du cinéaste se font plus nombreux. Bravo donc à David Locke pour avoir tout compris de 2001 qui donc est un film clair et creux tournant en circuit fermé... (alors que c'est justement tout le contraire pour ce film). :wink:
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Zelda Zonk
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Message par Zelda Zonk »

Roy Neary a écrit :Je n'ai pas le temps d'écrire un long message et je reviendrai donc ultérieurement. :wink:
Simplement, je constate un glissement sémantique malheureux qui ferait presque de Stanley Kubrick un quasi fasciste (on n'est passé d'une mise en forme totalitaire à un cinéaste totalitaire). Je ne cache pas que j'en suis profondément outré.
Je constate aussi que les avdersaires du cinéaste se font plus nombreux. Bravo donc à David Locke pour avoir tout compris de 2001 qui donc est un film clair et creux tournant en circuit fermé... (alors que c'est justement tout le contraire pour ce film). :wink:
+1
J'avoue que ce glissement ne m'encourage pas à participer au débat. Dommage, c'était intéressant au début.
Si c'est le fait que Kubrick soit un cinéaste "de droite" qui vous gêne, et que cela transparaisse assez nettement dans ses films, autant le dire franco. Mais de là à remettre en cause son talent pour autant, c'est un peu excessif non ? :?
O'Malley
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Message par O'Malley »

Memento a écrit :
Roy Neary a écrit :Je n'ai pas le temps d'écrire un long message et je reviendrai donc ultérieurement. :wink:
Simplement, je constate un glissement sémantique malheureux qui ferait presque de Stanley Kubrick un quasi fasciste (on n'est passé d'une mise en forme totalitaire à un cinéaste totalitaire). Je ne cache pas que j'en suis profondément outré.
Je constate aussi que les avdersaires du cinéaste se font plus nombreux. Bravo donc à David Locke pour avoir tout compris de 2001 qui donc est un film clair et creux tournant en circuit fermé... (alors que c'est justement tout le contraire pour ce film). :wink:
+1
J'avoue que ce glissement ne m'encourage pas à participer au débat. Dommage, c'était intéressant au début.
Si c'est le fait que Kubrick soit un cinéaste "de droite" qui vous gêne, et que cela transparaisse assez nettement dans ses films, autant le dire franco. Mais de là à remettre en cause son talent pour autant, c'est un peu excessif non ? :?
Considerer Kubrick comme un quasi-fasciste est aussi une grande aberration... Kubrick ne prône jamais le culte du chef, ni même détenir une vérité... de plus, pour lui, le collectif signifie aliènation donc un tel propos n'a pas de sens...Regardez Orange mécanique qui est un réquisitoire contre la vioence exercée par l'Etat...
Jordan White
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Message par Jordan White »

Un cinéaste de "droite" ?
Et Patrice Leconte un cinéaste de gauche alors ? Quel est le sens de ses étiquettes qui n'ont rien à voir avec le cinéma.
Je voulais cependant répondre au message de Solal, qui A tendance à tout intellectualiser, plus que de raison en tout cas à mon humble avis. Les oeuvres de Kubrick me parlent essentiellement par les émotions qu'elles me procurent. Je ne me dis jamais en regardant Barry Lyndon que je vais voir un film dont la géométrie et la symétrie des plans touchent à un absolu mathématique. Comme si tout ce qui relevait de Kubrick était d'une abstraction froide, calculée, et que seul le caractère mathématique de son cinéma en faisait la valeur. Or quand je regarde Barry Lyndon c'est avant tout une oeuvre picturale qui me parle, m'interpelle et me rémémore mon education esthétique, mes premiers chocs visuels à la découverte des peintures de Maîtres dans les musées que je visitais, enfant puis adolescent. L'impression d'y retrouver le génie de Watteau, de préraphaélites, de Friedrich, d'une partie des peintres symbolistes et romantiques. Tout un pan de l'Art du XVI, XVIII et XIXème siècle que j'adore. Ce film me parle, s'adresse à mes sens et à mon coeur, j'en ressors à chaque fois bouleversé, car il me parle de cette recherche de la perfection ( qui est un leurre mais que l'on peut poursuivre), du moins de cette volonté de faire mieux, de s'atteler à la tâche. Un film initiatique pour moi, qui trouve correspondance dans une partie de ma fascination pour une certaine peinture et une vision du cinéma comme je l'aime : vibrante, chaleureuse, virtuose, classique.
Je suis tout aussi stupéfait d'apprendre que Kubrick ne serait qu'un bon publicitaire, d'autant plus quand on voit la facture plastique de ses films, et à vrai dire je ne sais pas comment le prendre quand je pense au travail sur les plans qu'il effectuait et qui demandaient un temps considérable, chose qui à mon avis doit manquer dans la pub qui est un format court et répondant à des exigences commerciales.
Il y a donc une partie de ton analyse Solal qui m'échappe, en fait elle ne correspond pas du tout à ma vision personnelle de l'oeuvre du cinéaste et je ne m'y retrouve jamais. Peut-être regardes-tu trop cérébralement ses films ?
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