René Clair (1898-1981)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Beule
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René Clair (1898-1981)

Message par Beule »

C'est arrivé demain

Revu avec grand plaisir cette charmante et inoffensive oeuvrette qui vieillit très bien, contrairement à tant de films français du René Clair d'avant-guerre. Un petit conte moral fantastique légér comme une bulle de savon, sans trop de verve mais allègrement mené et visuellement fort joliment troussé. Linda Darnell y est superbement mise en valeur et le couple qu'elle forme avec Dick Powell pétille comme du champagne. Malheureusement, les scories propres à Clair réapparaissent sous l'aspect d'un sidekick à prétention burlesque (Jack Oakie) envahissant, étirant l'intrigue plutôt que de la resserrer comme une mécanique de précision.

6.5/10

N'avais-je pas lu quelque part que l'une des deux autres jolies réussites US de René Clair, Ma femme est une sorcièredevait aussi être édité?
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NUTELLA

Message par NUTELLA »

Les grandes manoeuvres
D'habitude je ne suis pas fan de ce type de film.
Mais là que ce soit les décors,les costumes,l'histoire,l'interprétation,tout confine au chef-d'oeuvre.
Le classicisme à l'état pur...

9.5/10
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

NUTELLA a écrit :Les grandes manoeuvres
D'habitude je ne suis pas fan de ce type de film.
Mais là que ce soit les décors,les costumes,l'histoire,l'interprétation,tout confine au chef-d'oeuvre.
Le classicisme à l'état pur...

9.5/10
Ah ça fait plaisir, un très grand film de René Clair, ça a longtemps été mon film français préféré :wink:
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

C'est arrivé demain de René Clair

Postulat de départ assez sympathique mais au final, une comédie fantastique artificielle, mécanique, pas drôle et finalement ennuyeuse. Ca brasse beaucoup de vent en allant vite mais c'est plus pénible qu'autre chose.

Moi qui aimais beaucoup ce film étant jeune. Du coup j'ai énormément peur de revoir ma femme est une sorcière :?

Le DVD est un autre de ces DVD Frisbee compressé à la main :evil:
Kurwenal
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Message par Kurwenal »

Jeremy Fox a écrit : Le DVD est un autre de ces DVD Frisbee compressé à la main :evil:
C'est plutôt compressé avec les pieds que tu devrais dire car à la main ça connote fortement l'amour du travail bien fait dans les coins perdus découverts par Monsieur Pernod, grand journaliste sur TF1 :wink:
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Beule
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Message par Beule »

Jeremy Fox a écrit :C'est arrivé demain de René Clair

Postulat de départ assez sympathique mais au final, une comédie fantastique artificielle, mécanique, pas drôle et finalement ennuyeuse. Ca brasse beaucoup de vent en allant vite mais c'est plus pénible qu'autre chose.

Moi qui aimais beaucoup ce film étant jeune. Du coup j'ai énormément peur de revoir ma femme est une sorcière :?

Le DVD est un autre de ces DVD Frisbee compressé à la main :evil:
Certes, comme beaucoup de films de René Clair, la fantaisie se revèle souvent un peu mécanique et trop fabriquée, recèle une propension à tirer des artifices burlesques de situations ou personnages sans pertinence dramatique (ici tout ce qui a trait à Jack Oakie) mais je trouve que celui-là tout au moins, et contrairement à tous les "classiques français des années 30", résiste plutôt bien à l'épreuve du temps.

Pour moi le charme perdure.
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

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La Belle ensorceleuse (The Flame of New Orleans) – René Clair 1941


La Nouvelle Orléans dans la première moitié du 19ème siècle. Sur les eaux du Mississippi flotte une robe de mariée découverte par deux pêcheurs. D’où provient-elle ? Qu’est devenue sa propriétaire ? Revenant quelques jours en arrière, le film va nous dévoiler le mystère de la belle ensorceleuse du titre français. Nous voilà à l’opéra où tous les notables se sont réunis. La Comtesse Claire Ledoux (Marlene Dietrich), pour attirer l’attention de l’homme le plus riche de la ville, feint de s’évanouir dans sa loge. Le stratagème fonctionne à la perfection et le banquier Charles Giraud (Roland Young) n’a plus qu’une idée en tête, revoir la ravissante Comtesse qui ne cherche en fait qu’une seule chose, s’en faire épouser. Un quiproquo va faire que notre croqueuse de diamants –qui n’est évidemment pas plus comtesse que moi- va rencontrer un marin (Bruce Cabot) sous le charme de qui elle tombe ; malheureusement ce dernier est sans le sou. La situation va se compliquer le jour où l'un de ses anciens ‘amants’ la reconnait et risque de dévoiler sa véritable identité, ce qui compromettrait les fastueuses noces déjà en préparation…

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Tout comme Jean Renoir et Julien Duvivier, René Clair s’est exilé aux USA durant la Seconde Guerre Mondiale. Tous trois se sont plutôt bien acclimatés avec le Hollywood des studios, les magnats des Majors étant assez fiers d’avoir attirés de telles pointures. Si Jean Renoir accoucha de quelques petites pépites néanmoins sans communes mesures avec ses chefs d’œuvres français –je pense notamment aux très bons L’Homme du Sud (The Southerner), Vivre Libre (This Land is Mine) ou Le Journal d’une femme de chambre (The Diary of a Chambermaid)- Julien Duvivier ne marqua guère les esprits. Dans un domaine bien plus léger que Jean Renoir, René Clair signa quatre films dont au moins deux sont devenus de petits classiques, les délicieux Ma Femme est une sorcière (I Married a Witch) et surtout C’est arrivé demain (It Happened Tomorrow) dans lequel un journaliste recevait le don de connaitre les évènements 24 heures avant qu’ils ne se produisent. Outre également une adaptation du célébrissime roman Dix petits indiens d’Agatha Christie, René Clair réalisa aussi cette comédie mineure qu’est La Belle ensorceleuse, assez mal reçue par la critique de l’époque.

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En effet The Flame of New Orleans fut surtout boudé pour l'extrême futilité de son scénario, effectivement basé sur quelques quiproquos et péripéties vaudevillesques répétitives et tout à fait convenus. L’intrigue tourne principalement autour des stratagèmes forgés par une demi-mondaine roublarde se faisant passer pour une comtesse afin d’attirer dans son lit les hommes les plus riches des villes où elle atterrit, espérant s’en faire épouser, récolter le magot et fuir ailleurs. Ici nous assistons évidemment comme son titre l’indique à sa ‘partie de chasse’ à la Nouvelle Orléans, la ville et l’époque étant fastueusement reconstituées en studio, la sublime photographie signée Rudy Maté -futur réalisateur sous le nom de Rudolph Maté- aidant à rendre l’aspect plastique de cette cité tumultueuse fort plaisante à regarder. L’idée la plus délectable de cette histoire écrite par Norman Krasna (Noël Blanc - White Christmas, Le Milliardaire - Let's Make Love…) est d’avoir donné à la femme de chambre noire le rôle de la complice de sa maitresse, la comédienne Theresa Harris s’avérant savoureuse dans la peau de cette entrepreneuse impertinente qui se révèle bien plus intelligente que le plupart des personnages de notables, bourgeois et aristocrates croqués ici avec ironie et satire, René Clair ajoutant à sa comédie de boulevard un zest de pamphlet social loin d’être désagréable. Parmi les autres seconds rôles assez réjouissants signalons Anne Revere (la sœur du banquier) ou Misha Auer (l'amant russe).

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Après un prologue porté par une voix off nous présentant le mystère que le film va devoir résoudre, celui de la robe de mariée retrouvée dans le fleuve par deux pêcheurs, retour arrière avec une séquence ciselée aux petits oignons digne d’un Lubitsch, celle à l’opéra avec en arrière fond un morceau magnifique du Lucia de Lammermoor de Donizetti. Découpage millimétré, élégance des mouvements de caméras, beauté des cadrages, cocasserie des situations, dialogues réduits au strict minimum, tout passe divinement bien par la seule intelligence de la mise en scène. Dommage que la suite soit plus sage et moins virtuose même si plaisante et parfois assez drôle. Mais là où le bat blesse principalement, c’est dans le choix des partenaires masculins de Marlene Dietrich ; alors que l’actrice est pétillante et pétulante de bout en bout, il semble n'y avoir aucun répondant face à elle, le jeu de Bruce Cabot s’avérant d’une extrême fadeur là où l’on attendait du charisme et de la prestance. La comédienne dira d’ailleurs de son partenaire qu’il était "an awfully stupid actor" ; lorsque l'on sait qu’elle avait demandé en lieu et place de Roland Young et Bruce Cabot, Adolphe Menjou et Cary Grant, gageons qu’avec un tel duo le film aurait acquis une toute autre ampleur ! La dernière demi-heure étant surtout concentrée sur la romance entre Bruce Cabot et Marlene Dietrich, l'alchimie entre les deux comédiens étant totalement absente, cette partie s’avère assez désespérante dans son incapacité à nous faire ressentir l’amour censé exister au sein de ce couple. Dommage qu’après un début aussi enlevé et amusant, ce long final se soit révélé aussi laborieux ! La dernière image assez leste permet néanmoins de terminer le film sur une note nettement plus positive.

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Comparativement à d’autres de ses films y compris en Amérique, La Belle ensorceleuse est malgré ses évidentes qualités -surtout plastiques- indéniablement mineur dans la filmographie de René Clair ; le spectacle est cependant très plaisant, à l’image de la délicieuse chanson "Sweet is the blush of May" susurrée à merveille par une Marlene Dietrich resplendissante et au summum de sa beauté, il est vrai bien épaulée par le chef opérateur, le maquilleur et le costumier. Un marivaudage désinvolte et sans prétention, cependant assez charmant et en tout cas, grâce à une direction artistique parfaite, un régal pour les yeux ! Pour ceux qui auraient grandement apprécié ce divertissement, dans le même registre et à la même époque, on recommandera également pour les amateurs de Marlène l'amusant et émouvant Femme ou démon (Destry Rides Again) de George Marshall.
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Message par Breezy »

J'aime bien C'est arrivé demain
Sans atteindre des sommets,il parvient aisément a me ravir par son charme quelque peu désuet et quelques séquences vraiment bien senties.
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Ambroise

Message par Ambroise »

Beule a écrit :
Ambroise a écrit :
Des exemples ?
Sous les toits de Paris, à un degré moindre Quatorze juillet. Pour moi le charme passéite s'y dillue derrière la fantaisie formatée et laborieuse.
OK.

quels sont donc les meilleurs films de René Clair, cinéaste que je ne connais pas du tout ?
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Message par Jeremy Fox »

Ambroise a écrit :
Beule a écrit :
Sous les toits de Paris, à un degré moindre Quatorze juillet. Pour moi le charme passéite s'y dillue derrière la fantaisie formatée et laborieuse.
OK.

quels sont donc les meilleurs films de René Clair, cinéaste que je ne connais pas du tout ?
Les grandes manoeuvres est mon préféré
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Message par Cathy »

Les Grandes manoeuvres est un de ces films que je regarde chaque fois qu'il est diffusé, un petit chef d'oeuvre.
J'aime beaucoup le Silence est d'or qu'il diffuse sur Canal +, Fantôme à vendre est pas mal non plus. Les Belles de Nuit est pas mal non plus.

Quant à Clouzot, j'adore, à quand une édition en DVD de la Vérité.
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Message par Breezy »

Je garde un lointain mais bon souvenir de La beauté du diable...
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Ambroise

Message par Ambroise »

Cathy a écrit : J'aime beaucoup le Silence est d'or qu'il diffuse sur Canal +, .
c'est une adaption de Molière ça nan ?

c'est pas trop proche du matériau d'origine ?
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Message par Jeremy Fox »

Ambroise a écrit :
Cathy a écrit : J'aime beaucoup le Silence est d'or qu'il diffuse sur Canal +, .
c'est une adaption de Molière ça nan ?

c'est pas trop proche du matériau d'origine ?
Rien à voir, c'est un film se passant à l'époque du cinéma muet (d'où le titre)
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Beule
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Message par Beule »

Ma femme est une sorcière

Une fantaisie anodine mais gentillette qui ressuscite tout le folklore afférant à la mythologie des sorcières.

La seule véritable trouvaille du film semble résider dans le continuel retournement des sorts contre la charmante responsable de leur incantation, illustrant en cela avec malice le sempiternel adage de l’arroseur arrosé. Le charme évanescent et malicieux d’une Veronika Lake en contre-emploi reste assurément l’un des atouts majeurs de cette petite comédie dénuée d’ambition. Encore qu’il soit loisible de penser que la palette des émotions qu’elle déploie pour incarner les deux facettes successives de son personnage (d’abord séductrice vengeresse puis amoureuse éperdue de sa proie) se révèle un tant soit peu trop uniforme.

En filigrane se dessinent bien quelques traits satiriques ou sociologiques, tenant à la manipulation des masses par le quatrième pouvoir ou à l’influence de la femme de l’époque au sein du couple, mais ils ne sont jamais développés.

Si l’originalité et l’imagination font cruellement défaut, ressenti assurément renforcé par la postérité pléthorique des illustrations de ce conte de fée à l’écran, ce classique conserve néanmoins un petit charme superficiel et naïf, qui lui permet de mieux vieillir que le sinistre Couple invisible de McLeod, autre merveilleux souvenir d’enfance dont il ne reste plus rien aujourd’hui, et qui historiquement semble être au film de fantôme ce que le René Clair est au film de sorcière. A défaut de faire preuve de brio, René Clair sait tout au moins éviter l’écueil du gag trop prévisible, mécanique et répétitif. Sauf dans la longue ouverture, catastrophique, qui augurait du pire, la paraphrase oratoire des ravages physiques subis par un décor trop abstrait y tenant lieu d’unique leitmotiv « comique ».

Tel quel, ce I married a witch semble surtout s’adresser à un public juvénile, qui, nul doute, continuera d’y puiser un émerveillement intact. Les réactions des plus jeunes dans la salle en attestent d’ailleurs.
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