Festival Lumière 2023 (14-22 octobre)

[Jack Carter]

J’étais en train de répondre à Supfiction mais une mauvaise manip a effacé en grande partie ce que j’avais ecris mais je vois que tenia dit les memes choses (les cheveux blancs )

Disons que la volonté des organisateurs est d’en faire un festival pour tous et que de ce fait, il contente en effet tout type de publics cinéphiles

[tenia]

Après, quand tu vas à un festival consacré aux films de patrimoine, c'est normalement pour ses films de patrimoine, donc ça me surprendra toujours qu'il faille qu'il attire le public avec des avant-premières ou des films très récents. C'est un peu comme les gens qui iraient au McDo mais voudraient ne pas manger trop gras ("mettez moi le wrap chèvre et un Coca mais zero") : y en a, et ce sont des clients, mais c'est pas ton créneau à la base, donc faut-il vraiment aller les chercher ?

D'autant que dans le même temps, on pourrait trouver une poignée d'angles morts qui pourraient parfaitement remplacer ces créneaux, comme, typiquement, le patrimoine documentaire. Qu'on ne me fasse pas croire qu'il n'était pas possible cette année de mettre 1 de la Patellière, une AP (fallait-il vraiment qu'Arcady vienne présenter son nouveau film, ou que la tournée nationale marathon des APs du Dupontel passe par le festival ?), un doc' TV sur le ciné et un film récent (allez, disons Fury Road) en moins et réussir à passer de 2 docs de patrimoine à 6 et ainsi doter le festival d'une section dédiée.

(Je dis ça notamment car "L'année 2023 a été déclarée Année du documentaire par le CNC", et qu'il y a d'ailleurs eu un fil rouge au MIFC sur les documentaires de patrimoine avec notamment une table ronde nommée Où est le patrimoine documentaire ? et où en regardant la prog' du festival sur ces 5 dernières années, je me suis justement posé la question : oui, il est où, même au festival Lumière ?)

[Supfiction]

J'ai entendu qu'il y avait eu une nuit Star Wars, ça a beau dater maintenant, je trouve que ça n'a pas sa place dans ce festival. C'est bien d'élargir le public mais il ne faudrait pas trop s'éloigner du "vrai" naphta.

[tenia]

Y avait aussi une nuit Kenji Misumi, hein.
Après, oui, il y a chaque année une nuit évènement de la sorte, cette année c'était Star Wars, je trouve aussi cela vu et revu même si ça s'inscrit vaguement dans le centenaire Disney, mais bon, tu remplirais la Halle Tony Garnier (5000 places) avec une nuit Pagnol / Raimu ou un marathon Ozu ?

Donc un évènement isolé de la sorte, évènementialisé comme ça, ça ne me choque pas. Une section de 8-10 films, un peu plus.

[Jack Carter]

J'ai entendu qu'il y avait eu une nuit Star Wars, ça a beau dater maintenant, je trouve que ça n'a pas sa place dans ce festival. C'est bien d'élargir le public mais il ne faudrait pas trop s'éloigner du "vrai" naphta.

Il y a toujours eu des nuits de ce genre depuis 2009, date de la 1ere édition

[Supfiction]

tu remplirais la Halle Tony Garnier (5000 places) avec une nuit Pagnol / Raimu ou un marathon Ozu ?

C’est justement pourquoi ce festival existe il me semble. Pour mettre la lumière sur ces films oubliés ou méconnus, pour créer du neuf avec du vieux. Pas pour projeter des films que l’on pourrait voir partout ailleurs.

[tenia]

C’est justement pourquoi ce festival existe il me semble. Pour mettre la lumière sur ces films oubliés ou méconnus, pour créer du neuf avec du vieux. Pas pour projeter des films que l’on pourrait voir partout ailleurs.

Justement, tout particulièrement en 2023, je ne sais pas qui est encore en mesure de diffuser en salles de la sorte le catalogue Fox, en particulier les Star Wars. En ce sens, le festival fait donc préciser ce qu'on attend de lui : des projos exceptionnelles de films de 40-45 ans.

Mais cette nuit a toujours été comme ça : un évènement à portée clairement plus immédiatement accessible : en 2014 c'était la nuit Alien, en 2015 la "nuit de la peur" avec Insidious, The Thing, La nuit des morts vivants et Evil Dead, en 2016 la nuit "bande de potes" avec L'Aventure c'est l'aventure, Very Bad Trip, Les Bronzés font du ski et Mes meilleurs copains, 2017 la nuit "dans l'espace" avec Gravity, Interstellar, Star Trek 2009 et Seul sur Mars, 2018 la nuit Seigneur des anneaux, 2019 la nuit Le parrain, 2021 la nuit Jurassic Park, 2022 Tim Burton (Beetlejuice, Ed Wood, Mars Attacks, Sleepy Hollow).
La 1ere édition, c'était une nuit Sergio Leone. On pourra trouver cela plus "noble", mais Il était une fois dans l’Ouest, Le Bon, la brute et le truand et Il était une fois la révolution ne sont pas des films oubliés ou méconnus non plus. En 2010, il y avait à la rigueur le Ten de Blake Edwards, mais au milieu d'une nuit de la "comédie américaine" avec The Big Lebowski, Un jour sans fin et Tropic Thunder.

Il ne faut donc pas lui donner une orientation qu'elle n'a jamais eu.

Donc oui, le festival existe pour mettre en avant des films autrement moins vus et/ou plus anciens encore, mais d'une part : faut être soit fou soit naïf pour imaginer un instant que même dans le cadre de ce festival, il est capable par sa seule existence maintenant assez pérenne d'attirer 5000 personnes pour une nuit Michel Simon. Je me souviens encore des cris d'orfraie quand c'était La fin du jour qui avait ouvert le festival en 2015. A un moment, faut que le public suive, et il ne faut pas se leurrer sur celui-ci. Tout le monde a vu la différence entre "le prix Lumière est Tim Burton" et "le prix Lumière est Wim Wenders", par ex. Et comme je le disais plus haut, j'ai constaté aussi la différence de foule grand public entre "y a Maggie Gyllenhaal qui passe" et "y a Rintaro qui vient inaugurer sa plaque".

D'autre part, surtout : le festival diffuse maintenant environ 150 films par édition sur environ 450 séances. Même si on enlève la grosso modo trentaine de documentaires sur le cinéma, d'APs et de films très récents cumulés, il reste encore 120 films pour 420 séances. Je crois que le boulot est fait quand il y a plus de séances pour un film estonien de 1979 ou un film suisse de 1953 que pour Un nouvel espoir et Rogue One.

(et comme souvent : j'invite surtout les gens se questionnnant à venir à l'Institut un jour pendant le festival et juger par eux-mêmes de quoi on parle concrètement )

[Boba Fett 69]

Au-delà de la programmation, c'est surtout le fait de rameuter autant de monde pour une nuit complète.

Franchement, entre les chaises/strapontins tape-cul, le son dégueulasse, l'écran timbre-poste si on est sur les gradins (soit plus de la moitié de la jauge), il faut vraiment être motivé pour subir ça pendant près d'une dizaine d'heures. Même avec les tapis pour la sieste derrière l'écran.

[tenia]

Gradins + fosse assise, mais je ne sais pas ce que ça donne en répartition.
Perso, je pense aussi qu'il faut sacrément être motivé car ce sont des conditions franchement médiocres. Même à l'Auditorium, c'est limite (super souvenir d'avoir vu The Irishman mal assis, avec un son pourri, sur le côté dans un balcon, wahou que je me suis senti être un happy few...).

Mais le fait est que ça marche précisément pour l'évènement, l'effet de groupe, les animations, etc. A nouveau, je crois que ça marcherais moins bien avec des cosplays de Louis Jouvet.

[Supfiction]

(et comme souvent : j'invite surtout les gens se questionnnant à venir à l'Institut un jour pendant le festival et juger par eux-mêmes de quoi on parle concrètement )

Si je vous demande de raconter ce qu’est le festival, qui le fréquente, l’état d’esprit etc, c’est parce que je ne peux pas y aller. Les médias sont sûrement déformant, parce que c’est plus facile d’évoquer une nuit Star Wars qu’un retrospective Tanner.
En tous cas, le festival m’a donné l’occasion de découvrir le joli Alice dans les villes.

[Jack Carter]

En tous cas, le festival m’a donné l’occasion de découvrir le joli Alice dans les villes.

[tchi-tcha]

Les médias sont sûrement déformant, parce que c’est plus facile d’évoquer une nuit Star Wars qu’un retrospective Tanner.

Lors de la précédente édition, ce que certains médias ont retenu, c'est surtout la naissance d'une belle histoire entre Tim Burton et Monica Bellucci.

En tous cas, le festival m’a donné l’occasion de découvrir le joli Alice dans les villes.

On a encore un an pour voir venir, mais j'espère sérieusement que Alice dans les villes fera une progression spectaculaire dans le Top 100 édition 2024.

[tenia]

Les médias sont sûrement déformant, parce que c’est plus facile d’évoquer une nuit Star Wars qu’un retrospective Tanner.

Là dessus : oui, mille fois oui.

Je ne saurais pas dire si le festival cherche à en profiter en sachant qu'une nuit Star Wars et une AP du Miyazaki fera parler, ou si les journalistes sont nullissimes dans leur couverture (sûrement les 2), mais concrètement, cette année chez les Inrocks par ex, l'article titrait "La nuit Star Wars" et parlait de ça, Miyazaki et Wes Anderson et ah oui aussi Ozu. Voilà.

Les articles sur la conférence de presse de Wenders illustrent aussi cela : Wenders a fait un peu plus de 45 minutes de conférence de presse, avec des réponses parfois très émues sur son travail, mais Variety ont posé l'habituelle question sur Scorsese l'industrie Marvel tout ça et tous les articles n'ont parlé QUE de ça. 6 minutes sur 45, et hop, rien sur Anselm, rien sur Perfect Days, rien sur l'Europe et Lisbonne Story, rien sur Henri Alekan et Louis Cochet s'amusant comme des gosses sur Les ailes du désir, rien sur Ry Cooder et Hammett.

On parle pour certains de journalistes qui ne viennent que pour ça : le festival dure 9 jours, mais eux arrivent pour la remise du prix le vendredi soir et le diner mondain qui suit, font la conférence de presse samedi matin et repartent après la cérémonie de cloture dimanche aprem. Leur boulot est donc surtout d'au moins convenablement restituer la conférence DE PRESSE, mais ils sont plus efficaces pour tweeter leurs photos de la veille avec les invités du festival. Je les vois pourtant à certaines séances, mais aucun retour de leur part sur ce qu'ils ont vu, ce qui va de pair avec ceux qui font semble-t'il toutes les interviews possibles dont ne ressortent que des vidéos Twitter d'1 min 30. Mais ils écrivent dans des magazines nationaux, alors que veux-tu. Et si un Mehdi Omaïs reste toute la semaine, ses seuls avis détaillés sont sur les avant-premières (et le reste relève, donc, de la vidéo Twitter d'1 min 30 - un champion en la matière). Je l'ai croisé je ne sais combien de fois cette année, mais je serais bien en peine de dire s'il a effectivement vu un film de patrimoine hormis ceux des cérémonies (mais bon, au moins, il n'était pas à la conférence de presse cette année : l'année dernière, sa seule publication a été sa pote le filmant racontant à moitié en pleurs à Burton qu'il avait découvert Edward aux mains d'argent quand il était gamin) (je ne déconne pas : c'était ça, son compte rendu de la conf DE PRESSE).

Quand je vois ce que font certains médias, le plus souvent bien plus amateurs (et dont ce n'est très probablement, comme moi, pas le métier donc font ça sur leurs fonds propres) par rapport à ce que pondent ces gens pourtant autrement plus privilégiés logistiquement, je me dis que c'est pas demain que ce sera une méritocratie, et surtout que ça participe effectivement à une couverture médiatique déformée de l'évènement.

C'est pour ça que perso, j'ai choisi d'écrire mes compte rendus du festival sous forme de "journal" complet (quoique j'ai un peu simplifié à force) : parce que couvrir un festival c'est effectivement essayer de communiquer ce que ça fait d'y assister, d'y vagabonder, et surtout d'enquiller tous ces films : de qui, de quoi, où, comment, est-ce bien ? Si c'est pour écrire la même chose que si je n'y étais même pas allé, moi-même ça ne m'intéresserait pas de lire ça.

(ce qui me fait penser qu'il faudra quand même que je demande un jour comment on s'inscrit à ce diner mondain)

Si je vous demande de raconter ce qu’est le festival, qui le fréquente, l’état d’esprit etc, c’est parce que je ne peux pas y aller.

Bien évidemment, mais même nous avec des comptes rendus détaillés ne pourrons que partiellement retranscrire ce que ça fait d'y être.

Je trouve au festival, notamment à l'Institut, une ambiance très particulière, une sorte de bulle où soudainement il n'y a plus que du cinéma, des gens qui parlent de cinéma, quelques célébrités qui passent et avec qui on parle de cinéma, tout ça dans une banalité désarmante. Y a 2 ans, j'ai discuté avec une femme et sa gamine, il s'est avéré qu'il y avait Clothilde Courau à côté de nous, la gosse a eu des étoiles dans les yeux quand on lui a dit que c'était une vraie princesse. L'année dernière, j'ai gardé les bagages de jeunes qui voulaient voir Tim Burton à la sortie d'une présentation et savaient pas comment faire. Tout le monde semble s'en foutre en fait de ne pas se connaître, tu te retrouves à manger presque en tête à tête avec des inconnus parce que c'est parti de "j'ai une séance à telle heure, vous pensez qu'ils auront servi suffisamment vite le repas ?" et que t'as demandé "c'est quel film", et puis tu tournes la tête et c'est Oliver Stone qui passe.

En tous cas, le festival m’a donné l’occasion de découvrir le joli Alice dans les villes.

J'y ai découvert Au fil du temps, dans la petite salle de l'Institut en plus, et je n'aurais pas pensé tenir aussi facilement devant ce road movie allemand improvisé de 2h55.

[tchi-tcha]

...l'année dernière, sa seule publication a été sa pote le filmant racontant à moitié en pleurs à Burton qu'il avait découvert Edward aux mains d'argent quand il était gamin

Trop de la chance !
Il a vu Monica Bellucci aussi ?

il faudra quand même que je demande un jour comment on s'inscrit à ce diner mondain

Dis que tu viens de la part de DVDClassik. Tu n'imagines pas le nombre d'endroits où je mange gratos grâce à ça

[tenia]

Bellucci était interviewable pour le docufiction qu'elle venait présenter donc bien sûr que oui qu'il l'a vue, interviewée et photographiée, eh, tu crois quoi.