L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Thaddeus
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L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Thaddeus »

Vic Vega a écrit : 7 févr. 05, 00:32Du très grand film noir tout à fait à la hauteur de sa réputation. C'est porté par une superbe mise en scène classique de Raoul Walsh, un beau score signé Max Steiner et une prestation magnifique de James Cagney. Lorsqu'il exprime la folie ou la paranoia de son personnage, son jeu est toujours d'une grande justesse, jamais appuyé. Quant au scénario, sa dimension psychanalytique ne sombre jamais non plus dans l'appuyé ou le trop surligné. Avec de très grands moments de cinéma comme cette scène d'ouverture efficace sans en faire trop, le pétage de plombs de Cagney apprenant la mort de sa mère ou le superbe final où la folie mégalomane de Cagney éclate en plein jour. Le film contient également quelques dialogues faisant mouche comme le speech de Cagney sur la guerre de Troie. Ainsi qu'une gallerie de personnages secondaires tout aussi intéréssants: la compagne de Cagney, l'infiltré, l'acolyte cherchant à prendre sa place. Un chef d'oeuvre du film noir et du cinéma.
Private Joker a écrit : 19 sept. 05, 10:46White Heat (L'Enfer Est à Lui) de Raoul Walsh, sur un scénario de la romancière Virginia Kellogg (qui fut également à l'origine d'un autre grand classique du film noir : La Brigade du Suicide d'Anthony Mann).
Je l'ai découvert hier soir sur TCM. Un film vraiment magnifique et "apocalyptique" selon la formule consacrée. Sans doute l'un des plus violents (Le plus violent ?) de Raoul Walsh. Une interprétation flamboyante et hallucinée de James Cagney aidé par un suspense de premier ordre. La fin du film est admirable. En un mot : chef-d'oeuvre !
8/10.
Nestor Almendros a écrit : 24 sept. 05, 18:49Peu de films du réalisateurs ont grâce à mes yeux. Mais celui-ci en fait partie direct. Servi par un scénario très bien écrit, aux multiples rebondissements, à la fois polar, film de gangsters, film de prison. L'action ne s'arrête pas enchainant les situations et les coups de théatre. La dernière demi-heure est peut-être un peu moins remplie, mais garde quelques beaux moments de suspsense.
Ajoutez un James Cagney qui ici joue un salaud de 1ere classe et vous aurez un polar qui ne vous lache pas du début à la fin...
Une très bonne surprise.!
Philip Marlowe a écrit : 22 déc. 05, 11:49J'ai découvert ce cinéaste pas plus tard qu'hier soir avec White Heat / L'Enfer est à lui et c'est du très très bon. Beaucoup de grandes scènes(le règlement de compte dans la maison, la confession de Cagney, tout le final, depuis le commissariat-white heat- jusqu'à la fin spectaculaire), et surtout des personnages écrits avec subtilité, aux relations biens creusées, et bien sur superbement interprétées. C'est ce qui permet d'entretenir une tension constante, et qui fait du film de Walsh un grand thriller, un grand film noir, mais également un beau portrait d'homme psychotique.
k-chan a écrit : 25 avr. 06, 08:34 Un film de gangster extraordinaire ! Mise en scène puissante et sans temps mort de Raoul Walsh, et des acteurs toujours excellents, dont bien entendu James Cagney qui nous offre ici une composition magistrale de personnage instable, imprévisible, psychotique... Une interprétation qui donne lieu à de bonne scènes d'antholgie : celle du refectoir notemment, lors de son effrayant pétage de plomb, où il devient simplement bouleversant. Le final est superbe ! Génial !
Max Schreck a écrit : 10 juin 06, 11:46 Enfin vu ce film qui me fascinait de loin depuis très longtemps. Tout ce que j'avais pu lire à son propos était bien vrai. Du très grand art, on est captivé du début à la fin par un récit tendu, riche et profondément humain. C'est évidemment peu de dire que Jimmy Cagney fait une composition mémorable. Son Cody Jarret est un peu le rôle en or dont doivent rêver tous les comédiens, un personnage complexe et fascinant. La violence et le jusqu'auboutisme du film n'ont rien perdu de leur force aujourd'hui et j'ai même été assez étonné par la liberté que se permet Walsh et ses dialoguistes. Virginia Mayo incarne ainsi un personnage particulièrement peu glorieux et pourtant toujours juste.
Alligator a écrit : 30 sept. 08, 10:56Réjouissant retour personnel dans le milieu des malfrats et des malades du flingue. Walsh nous ressert un Public ennemy avec des rides en plus.

Cagney exploite à fond sa face d'acier, son rictus de sourire narquois à foutre les jetons au premier venu (on a la nette impression qu'il va fondre sur vous à la moindre occasion pour vous arracher la pomme d'Adam à pleines dents). Son regard glaçant appuyé par des sourcils accents circonflexes du mot "bête" hausse le personnage au rang de démon incarné. La folie de Cody Jarrett que parvient à reproduire James Cagney est si impressionnante qu'elle me parait donner une toute autre mesure à celle que créera Nicholson pour Shining. La filiation est encore plus évidente dans le sourire figé du Joker. Il serait étonnant que Nicholson n'ait pas vu dans la prestation délirante de Cagney un modèle à suivre.

Très belle photo de Sidney Hickox que la bonne édition Warner souligne avec fracas.

Un bon divertissant, plein de tension et de suspense. Du pur plaisir. L'enfer est à lui, à nous le paradis.
Miss Nobody a écrit : 27 août 09, 16:06Après un court détour par la comédie musicale et une tentative infructueuse dans le domaine de la production, James Cagney est de retour à la Warner avec un contrat juteux. Il accepte de revenir aux sources de son succès en interprétant un personnage de gangster nerveux que l'on peut rapprocher de celui qui l'a fait connaître en 1931 dans « l'Ennemi public ». Mais le genre a bien évolué depuis les années 30: la seconde guerre mondiale a vu naître le film noir, les intrigues se sont complexifiée et la psychologie des personnages aussi. Dans « L'enfer est à lui » le criminel n'est plus un être pourri par la société, la prohibition et la crise, mais un homme névrosé et violent qui n'obéit à aucune loi ni aucune morale, et qui ne donne ses faveurs qu'à sa mère, sur-protectrice et acariâtre. Cody Jarrett devient alors l'un des anti-héros les plus terrifiant du 7ème art car, impulsif et sans pitié, il est tout simplement incontrôlable. Pourtant, tandis que le film avance, qu'on le voit commettre des crimes ignobles et sombrer dans une démence rageuse, il devient un personnage émouvant, presque attachant, car infiniment tragique et humain. La prestation de James Cagney, qui a largement contribué à l'élaboration du personnage de Cody par des choix d'interprétation judicieux et des improvisations géniales, est tout bonnement hallucinante, extrêmement puissante et viscérale. Quant à sa crise de folie au réfectoire de la prison, il s'agit d'un moment d'anthologie effroyable.
Malgré la présence de cet acteur prodige à leurs côtés, ses partenaires à l'écran sont étonnamment tous excellents, notamment Virginia Mayo, qui interprète merveilleusement la femme de Cody, tout en vulgarité et en sournoiserie.
Le film nous plonge dans une atmosphère noire, dure, tantôt oppressante, tantôt haletante, qui ne laisse la place à aucune baisse de rythme ou moment de répit. Le tout est enveloppé par la très angoissante partition de Max Steiner et par la mise en scène de Raoul Walsh, maîtrisée et toujours efficace, qui met superbement en valeur les différentes facettes des personnages.
« L'enfer est à lui » est un film sombre et violent, excessivement riche et énergique, qui n'a absolument rien à envier aux films de gangster contemporains... Un destin grandiose filmé sans aucun excès, ni aucune faute de goût. En un mot, un chef d'oeuvre. 9/10
Sybille a écrit : 9 sept. 09, 21:23Une séquence d'ouverture presque muette, remarquable grâce à son montage tendu, redoutable de nervosité ; des extérieurs nombreux, étonnamment mis en valeur, conférant une ambiance entière et réaliste à une histoire hargneusement extravagante, des acteurs toujours investis, voilà quelques un des éléments qui font de "White heat" un film qui vaut plus qu'un simple coup d'oeil. James Cagney prouve une fois n'est pas coutume son talent immense et particulier : si la modernité n'est jamais l'apanage d'une époque, on a quand même envie de lui attribuer ce qualificatif, tant son jeu semble à la fois recherché et spontané, toujours habile et surprenant dans son attention au détail. Quant à Virginia Mayo, déjà excellente chez Walsh en femme noble et amoureuse du 18e siècle dans "Captain Horatio Hornblower", elle montre à nouveau l'étendue de son registre en incarnant cette fois une femme charmeuse, opportuniste et prête à toute les vilennies pour s'en tirer. Alors que je reste incapable de mettre le doigt sur ce qui m'a gêné, j'avoue n'avoir pas été totalement convaincue par les séquences avec les policiers, certe importantes au récit, mais assez peu intéressantes en elles-même. Possible aussi que le double jeu d'Edmond O'Brien (et ce même s'il s'agit d'un bon acteur ou que la situation s'est déjà vu) m'ait semblé un peu vain, faisant état d'une fausse ambiguité, rapprochant au contraire le film du banal, du conventionnel. Premier film de Raoul Walsh qui me plaît vraiment, ce réalisateur me laisse cependant perplexe. Sans douter ni de son assurance ni de son talent, immédiatement visibles, j'aurai encore besoin de voir d'autres de ses films avant de m'en faire un avis un peu plus définitif. 7/10
Julien Léonard a écrit : 7 mars 10, 14:13Image

Voilà 10 ans que James Cagney n'avait pas tourné dans la peau d'un gangster, et autant dire que ces retrouvailles en forme de feu d'artifice se doublent d'une collaboration de génie : Raoul Walsh est à la mise en scène, le même réalisateur qui avait dirigé The roaring twenties 10 ans plus tôt. On pouvait légitimement s'attendre à un grand film... Ce fut le cas, et bien plus encore !

Chez les grands réalisateurs de l'âge d'or du cinéma américain, on est toujours stupéfait par la somme de grands films qu'ils étaient capables de réaliser, et cela souvent dans tous les genres (ou presque). Des filmographies la plupart du temps équilibrées et maitrisées, comportant quelques fautes de parcours, mais trop insuffisamment pour en gâcher la réputation. Mais, de ces filmographies, se dégagent bien souvent ce que l'on appelle des "sommets". Chez Walsh, les sommets furent nombreux, à commencer par They died with their boots on, Gentleman Jim ou encore Objective Burma (et ce ne sont pas les seuls). White heat est l'un de ces sommets, indubitablement !

Au-delà d'un récit classique de "film de gangsters", c'est également tout un rapport avec le film noir contemporain de l'époque qui s'exprime, avec la sécheresse et la concision d'un regard acerbe et destructeur. Quelle différence entre l'œuvre léchée et tournée en studios qu'est The big sleep de Hawks, et ce véritable film d'action contrarié (souvent filmé en décors naturels) littéralement transcendé par Walsh ! Deux chefs-d'oeuvre, deux visions d'un genre, deux films mythiques, deux recettes esthétiques largement différentes... White heat (bénéficiant pour l'occasion d'un titre français magnifique : L'enfer est à lui) est un film de rythme, de précision remarquable, au timing rigoureux et au sujet démultiplié. Un parcours psychologique intense et dangereux mélangeant, pêle-mêle, une mère venue des enfers, une fiancée qui "survit" dans un univers impitoyable, une camaraderie constituée de faux semblants, et une police que rien n'arrête, au milieux desquels n'existe qu'une seule vérité, celle de Cody Jarett. Incarné par James Cagney, ce personnage de fiction devient sans l'ombre d'un doute l'un des plus passionnants de sa décennie. Cagney est habité par son rôle, il le vit jusqu'au bout, l'anime d'expressions tantôt barbares, tantôt profondément humaines, et se laisse emporter par des crises de folie totalement terrifiantes. Je retiendrais pour ma part deux séquences exemplifiant ce dernier propos... La scène du réfectoire en prison où Cagney, en totale improvisation, parvient à exploser furieusement, sombrant définitivement dans la folie la plus pure et dans une justesse qui interpelle sur la véritable expérience de vie de l'acteur (bon sang, mais d'où-tire-t'il une interprétation aussi énorme et aussi vraie ?!). Puis ensuite, la scène où, sous un arbre, en pleine nuit, il narre ses conversations nocturnes avec sa mère à son compagnon de crime (qui n'est autre que le flic infiltré dans la bande) : ahurissant de vraisemblance et de vérité, encore une fois. Je me fiche bien de savoir qui a eu l'Oscar du meilleur acteur cette année là, car il me semble que Cagney méritait cette récompense plus qu'aucun autre à ce moment précis. Aujourd'hui encore, sa prestation demeure marquée et sincère, naturelle et énergique, bref, tout à fait moderne.

Reste alors l'ensemble du film que l'on pourrait louer à n'en plus finir, mais que l'on pourrait résumer assez grossièrement par ces quelques qualificatifs : une musique tonitruante (encore Max Steiner et ses partitions absolument géniales), un scénario complexe et très riche (que ce soit thématiquement ou simplement diégétiquement), une enquête policière parallèle détaillée et convaincante (c'est incroyable de voir tout ce dont on était capable déjà à l'époque), une distribution exemplaire (comme dans tout film de Walsh qui se respecte... Ici, Virginia Mayo impeccable, Edmond O'Brien dans l'une de ses performances les plus convaincantes, Margaret Wycherly en mère littéralement unique au monde...), une photographie sublime et contrastée mettant largement en vedette des décors tous plus étonnants les uns que les autres (la maison en rase campagne, l'intérieur du camion-citerne, l'usine presque science-fictionnaire à la fin...) et un montage cut et "coup de poing" donnant une pèche d'enfer au déroulement de l'intrigue.

Un film noir âpre et violent, qui démarre au quart de tour et passe les vitesses avec un sens de l'action franchement grisant. Key Largo de Huston, l'année précédente, mettait déjà brillamment en scène la figure du gangster perdu dans une époque qui ne lui offre plus de place, mais Walsh réalise une œuvre très largement supérieure. Un condensé de plaisir et d'ambiguïté, culminant dans un dénouement aussi somptueux que violent, et qui n'a rien perdu de son sel depuis plus de 60 ans. Un immense classique.
Made it, Ma ! Top of the world !
feb a écrit : 28 mars 11, 23:40Difficile de passer à la suite d'un texte si bien écrit de la part d'un amoureux de Walsh et de Cagney...que dire de plus si ce n'est que le film de Walsh ne s'essouffle pas une seconde car il repose sur un scénario riche et très bien foutu : la police est sans arrêt aux trousses de Jarett et regorge d'ingéniosité pour le trouver, l'obligeant à toujours être en mouvement, à s'évader au plus vite, à tuer ceux qui lui barrent la route et à faire plaisir à sa Ma' coute que coute...Ensuite le film de Walsh est magnifiquement mis en scène : pas de gras, pas de chichis, la caméra colle à l'action, prend du recul quand le besoin d'espace se fait sentir, nous montre l'intérieur de la citerne, filme James Cagney au plus près comme pour tenter de lire dans sa tête, profite au maximum des scènes en extérieur, se joue de l'environnement industriel dans la scène finale de l'usine, filme une excellente scène d'évasion de prison et propose un montage aux petits oignons. Bref Walsh propose un film de très haut niveau en ce qui concerne le montage, la mise en scène et la gestion de l'action.
Enfin et surtout, il y a James Cagney qui offre une première scène hallucinante lors du repas dans la cantine carcérale :shock: comme j'en avais rarement vu (put*** des scènes de colère aussi rapide j'en demande dans tous les films), discute avec sa mère sous les arbres, semble prêt à tuer n'importe qui à partir du moment où il a été trahi et offre une seconde scène hallucinante lorsqu'il tente d'échapper à la police, qui flingue ses collègues un à un, et finit en haut d'un réservoir d'hydrocarbure...là on découvre un Jarett à la limite de la folie, qui nous gratifie de son rire narquois tout en se faisant tirer dessus et semble être entouré de flammes issues de l'Enfer tout en nous proposant un dernier Made it, Ma! Top of the world!. 9/10 et un dilemme qui s'offre à moi : qui mettre en film du mois ? White Heat ou The Night of the Hunter...la folie de Cagney ou la beauté des images du film de Laughton :D
Flavia a écrit : 19 août 12, 21:25
Quel film ! D'une grande intensité dramatique et dirigé d'une main de maitre par Raoul Walsh, il nous amène crescendo à un final dantesque. La mise en scène est nerveuse, sans temps mort, bénéficiant d'un rythme soutenu et haletant, ne laissant aucun répit aux protagonistes ainsi qu'aux spectateurs.

James Cagney est génial en gangster cynique, cruel, imprévisible, halluciné, touchant dans sa relation avec sa mère, d'où l'impression qu'il est à la fois un bourreau et une victime. J'allais oublier les performances de Edmond O'Brien et de Virginia Mayo très convaincants.

Je suis définitivement conquise par James Cagney.
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

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Furiosa


Du général Custer au boxeur Jim Corbett, du capitaine Horatio Hornblower au capitaine Quincey Wyatt, le panthéon de Raoul Walsh n'accueille que les êtres d'exception. Leurs biographies légendaires composent la chanson de geste du Nouveau Monde. Extraordinaires, ces vies illustres le sont dans la paix comme dans le conflit, dans le crime comme dans la probité, dans l'Histoire comme dans le mythe. La morale des honnêtes gens ne saurait s'appliquer aux destins hors série que chantent ballades et sagas, chroniques et odyssées. Walsh y mêle, par-delà le bien et le mal, justiciers et outlaws, pionniers et racketeers, corsaires et flibustiers, négriers et émancipateurs, joueurs professionnels et seigneurs de la guerre. Le héros se mesure pour lui à l'intensité de son énergie, à l'envergure de ses entreprises : pour s'approprier les richesses de l'univers — femmes ou trésors, terres vierges ou titres de gloire — il n'est pas de périls qu'il n'affronterait. La lutte fait tout le prix de la possession, et la mort seule clôt ce cycle dynamique de la conquête, ce jeu dialectique de l'être et de l'avoir. Un mot, quasi intraduisible en français, peut définir le protagoniste walshien : "character". Oser être soi-même, envers et contre tout : privilège royal que les dramaturges élisabéthains octroyaient à Othello, Shylock ou Tamerlan. "Character est un concept aristocratique, comme la vertu est un concept bourgeois", aimait à répéter Orson Welles lorsqu'il enveloppait ses alter ego les moins recommandables (Arkadin ou Quinlan) d'une dignité tragique. Aux caïds de la pègre, aux aventuriers sans scrupules, aux baroudeurs des jungles asiatiques, à ces barbares qui se taillent un empire le revolver ou la mitrailleuse à la main, Walsh prête lui aussi la grandeur maléfique des princes de la Renaissance, voire la stature de demi-dieux. Sur ses drames plane l'ombre de Shakespeare : dans La Vallée de la Peur, la trajectoire indécise et somnambulique de Jeb Rand rappelle la démarche d'Hamlet, et dans Une Femme Dangereuse, la folie de Lana Carlsen, hantée par le fantôme de sa victime, l'apparente à lady Macbeth.


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La cruauté du héros de L'Enfer est à Lui n'a d'égale que celle d'un Richard III. Le gangster Cody Jarrett ne recule devant aucune atrocité pour accomplir ses desseins : il a choisi de vivre dangereusement, au rythme haletant des assassinats et des hold-up. Haïssable et admirable, il domine tous les comparses, policiers ou truands, qui traversent son chemin. De sa désinvolture, de son cynisme de grand fauve, Walsh donne quelques images foudroyantes : Jarrett renversant d'un coup de pied la chaise sur laquelle est juchée sa maîtresse, lui donnant le bras pour descendre l'escalier où il vient de faire rouler le cadavre de Big Ed, achevant un mouchard à travers le coffre d'une voiture tout en continuant de grignoter une cuisse de poulet... De l'autre côté de la barrière, les inspecteurs, enquêteurs et commissaires forment un corps anonyme : pas une de ces figures, auxquelles les canons du genre attribuent d'ordinaire un signe positif, ne peut prétendre faire contrepoids. La réalisation ne les élève jamais au-dessus de leur fonction et le découpage, elliptique, ne leur consacre qu'une succession de fondus enchaînés. Quant au mouton Hank Fallon, c’est un Judas, un délateur de bas étage, payé pour trahir l'amitié dont l'honore le chef du gang. Il ne sauve la vie de Jarrett que pour mieux l'envoyer sur la chaise électrique. Comme Jack London dont il partage l'anarchisme romantique, Walsh accorde toute sa sympathie — une sympathie exempte de pitié autant que de complaisance — aux bad men, aux êtres traqués, aux bandits de grand chemin, à ceux qui n'ont pas su ou pas voulu se plier à la norme. Sans prendre parti pour un forcené tel que Jarrett, il lui reconnaît cependant une sorte d'intégrité dans l'exercice de sa volonté de puissance. On peut accuser ce tigre de tous les forfaits, sauf de bassesse. Quand il comprend que Fallon l'a entraîné dans un piège, son éclat de rire couvre le crépitement des bombes lacrymogènes. Face à la dérision et à la mort, il acquiert, à l'heure du hallali, la noblesse des joueurs qui ont tout perdu sur une seule mise. Un monstre certes, mais aussi un character.

Âpre, vigoureux, mené tambour battant, le film se présente comme une lutte victorieuse contre le métronome : aucune défaillance au tempo adopté pour ce récit de la grandeur et de la chute d’un roi du crime. Il s'ouvre sur le jet de vapeur qui ébouillante un acolyte et se ferme sur un champignon atomique. Entre les deux plans se joue l'existence tumultueuse, "chauffée à blanc", de Cody Jarrett. Les flambées de violence qui illuminent son parcours sont celles, éruptives, volcaniques, imprévisibles, de l’épileptique. Mégalomane impitoyable pour la mégalomanie d’autrui, Jarrett est par trois fois frappé du haut mal, comme le Jules César de Shakespeare : au refuge, à l'atelier et dans le réfectoire de la prison. Lors de cette dernière séquence, il vient d'apprendre le meurtre de sa mère : d'abord anéanti, il n'émet que des gémissements de bête blessée puis bondit sur les geôliers, les assomme les uns après les autres dans une fureur paroxystique, avant de se voir passer la camisole de force. En quelques secondes se trouvent suggérés le vertige du désespoir, le poids de l'hérédité (le père et le frère de Cody sont morts fous), la profondeur des traumatismes passés et l'attachement névrotique à la génitrice, effrayant épouvantail auquel le lie une pathologique adoration réciproque. Cette mère possessive, sans doute inspirée de Ma Baker, maintient une emprise qui, loin de le "déviriliser", agit sur Jarrett comme un perpétuel ressort. Elle va jusqu’à entretenir le complexe œdipien de son fils et poursuit avec lui un dialogue d’outre-tombe. L’immaturité, qui excusait les excès des héros juvéniles de la Dépression, devient dans l’environnement culturel des années quarante, porté au déterminisme et à l’objectivité, un enjeu purement tragique. Elle souligne l’aliénation intime d’un homme que détruit sa recherche infantile de l’estime maternelle.


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Cody n’est en effet qu’une obéissance en action, une force lancée à l’assaut du monde, et cherche à prouver son existence — leur existence — en soumettant celui-ci à leur volonté. Toute l’œuvre de Walsh est fondée sur cette frénésie proprement américaine à vaincre et à se rendre maître de l’espace. D’où le nombre de cartes et de plans déployés ici : cartes routières de la police qui suit géographiquement les déplacements des malfrats, plans de la raffinerie dévalisée par le gang, histoire du cheval de Troie racontée en détails aux brigands pour leur expliquer comment s’attaquer à un lieu. Or cette soif de grandeur jamais saturée entraîne fatalement à l’anéantissement. Au terme de son itinéraire sanglant, seul l'enfer appartient à Jarrett. Dressé contre l'humanité, cerné par la meute policière, il transforme son suicide en spectacle d'apocalypse, faisant sauter autour de lui les sphères géantes, pleines de produits chimiques, d’une usine aux perspectives infinies. "Made it, Ma ! Top of the world !" hurle-t-il en tirant sur la cuve de gaz avant de disparaître dans une déflagration cosmique. Plutôt que les morts pitoyables, démystificatrices, qu’un moraliste comme Hawks réserve au Tony Camonte de Scarface, ce final évoque le calvaire de Roy Earle abattu dans la high sierra, sur les pentes enneigées du mont Whitney. Ils meurent comme ils ont vécu, hors de toute mesure. Leurs actes mêmes les jugent et les condamnent, sans que le créateur se sente obligé d'imposer un point de vue exemplaire. La fascination qu'exerce la mise en scène procède précisément du contraste entre la neutralité de la narration et la véhémence des passions, la rigueur mathématique du montage et le bouillonnement de l’action, l'impassibilité du cinéaste et la tension agressive de son personnage principal. À l'outrance des situations s'oppose la minutieuse logique de la dramaturgie, le réalisme de l'écriture, que viennent souligner l'importance et l'acuité de chaque notation : est-ce un hasard si Jarrett assiste dans un drive-in à la projection d'une épopée guerrière, Horizons en Flammes de Delmer Daves ?

Par son dosage de fulgurations baroques et de sobre classicisme dans la conduite du récit, le film accède à une sorte de transfiguration produisant un sentiment d’inévitable au sein du plus grand romanesque et, réciproquement, de fantasmagorie au sein de l’univers le plus matériel. Les objets, par exemple, sont partie intégrante d’un outillage où ils rejoignent l’aigu des regards (pas un coup d’œil qui n’ait sa signification) : ainsi le fait que Jarrett tire volontiers à travers les cloisons — sans jamais rater sa proie — n’est pas sans rapport avec le miroir grâce auquel son complice sourd lit de loin sur les lèvres, à travers les barreaux d’une cellule. L’action n’est à aucun moment le vecteur d’une virtuosité gratuite ; elle renferme sa cause et son effet, son doute parfois, toujours sa pensée. Et lorsque le tueur, un instant apaisé, converse dans la nuit avec le spectre de l'être tendrement chéri, se produit l’une de ces échappées sur les abîmes de l'inconscient qui laissent entrevoir un versant méconnu de l’œuvre walshienne : son onirisme. Ce cinéma n’est si physique que parce qu’il peint le monde orageux du mental. Autour du protagoniste gravite une galerie de figures mémorables, et il n’y a pas jusqu’à Virginia Mayo, dans une silhouette de garce, ne bénéficiant de l’attention du chef opérateur Sid Hickcox. Le réalisateur, qui l’a souvent dirigée, se garde bien de la rendre vraiment odieuse. Même lors de l’épisode final, où elle incarne l’antithèse de son rôle dans La Fille du Désert (sorti la même année), elle paraît plus inconsciente qu’autre chose et conserve la séduction qui la faisait prendre au galant Mohammed V, en visite à Hollywood, pour "une preuve de l’existence d’Allah". Mais avant tout, L’Enfer est à Lui puise son intensité convulsive dans l’interprétation survoltée, pathétique et terrifiante à la fois, de James Cagney : loin de stigmatiser un simple mal social, une gangrène en marche, l’acteur personnifie une souffrance indélébile, celle d’une forme plastique qui rêve de devenir pur trajet optique. La secrète maladie qui rongeait Jarrett dans ses crises de démence, ce tintamarre qu’il était le seul à entendre et le faisait hurler, n’était en définitive que la voix rappelant cette nécessité de l’envol. Depuis, elle ne s’est jamais tue.


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Barry Egan
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Barry Egan »

Je l'ai revu pour la 3ème fois hier soir et je vais être désolé de jouer les rabat-joie mais il y a quelque chose qui ne me fait pas tout à fait jubiler comme vous tous dans ce film.

Je trouve James Cagney trop âgé ici, il n'a plus la même énergie que dans les films des années 30, il est empâté, c'est flagrant quand on compare avec "The Roaring Twenties" (que je trouve meilleur que ce "White Heat", c'est ce "Roaring Twenties" qui est absolument parfait et mérite vraiment un statut de film-culte) ou "Angels with Dirty Faces". La façon dont sa psychose est caractérisée, le jeu même de Cagney, ne pousse pas assez loin le bouchon. Il n'est pas aussi inquiétant qu'Anthony Perkins par exemple. Il manque un peu... de folie, à mon goût. Et puis les seconds rôles de gangsters ne sont pas aussi réussis que dans les films des années 30 également. Ils sont un peu trop fonctionnels ici, en dehors de l'excellent infiltré, très bien interprété.

Malgré la perfection de sa structure, de sa mise en scène et ses dialogues marquants, ça résonne plus comme un excellent revival du film de gangster à la fin d'une période historique (la puissance des policiers est d'ailleurs démontrée à l'écran, là où avant ils faisaient avec les moyens du bord) que comme un chef d'œuvre qui viendrait couronner le genre.
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murphy
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par murphy »

Barry Egan a écrit : 8 avr. 24, 19:23 Il manque un peu... de folie, à mon goût
Dans mon souvenir, il est quand même pas mal taré. La dernière photo postée par Taddheus dans sa critique en témoigne.
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Watkinssien
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Watkinssien »

Barry Egan a écrit : 8 avr. 24, 19:23 Je l'ai revu pour la 3ème fois hier soir et je vais être désolé de jouer les rabat-joie mais il y a quelque chose qui ne me fait pas tout à fait jubiler comme vous tous dans ce film.

Je trouve James Cagney trop âgé ici, il n'a plus la même énergie que dans les films des années 30, il est empâté, c'est flagrant quand on compare avec "The Roaring Twenties" (que je trouve meilleur que ce "White Heat", c'est ce "Roaring Twenties" qui est absolument parfait et mérite vraiment un statut de film-culte) ou "Angels with Dirty Faces". La façon dont sa psychose est caractérisée, le jeu même de Cagney, ne pousse pas assez loin le bouchon. Il n'est pas aussi inquiétant qu'Anthony Perkins par exemple. Il manque un peu... de folie, à mon goût. Et puis les seconds rôles de gangsters ne sont pas aussi réussis que dans les films des années 30 également. Ils sont un peu trop fonctionnels ici, en dehors de l'excellent infiltré, très bien interprété.

Malgré la perfection de sa structure, de sa mise en scène et ses dialogues marquants, ça résonne plus comme un excellent revival du film de gangster à la fin d'une période historique (la puissance des policiers est d'ailleurs démontrée à l'écran, là où avant ils faisaient avec les moyens du bord) que comme un chef d'œuvre qui viendrait couronner le genre.

Ben, je suis désolé que tu sois désolé Barry. :(

Je trouve Cagney absolument phénoménal et son Cody Jarrett l'un des plus puissants névropathes de l'histoire du cinéma, un jalon assurément, une pierre angulaire.

Pour moi, le chef-d'œuvre de Walsh, ce qui prouve à quelle estime je porte ce film!
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Alexandre Angel
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Alexandre Angel »

Barry Egan a écrit : 8 avr. 24, 19:23 Je l'ai revu pour la 3ème fois hier soir et je vais être désolé de jouer les rabat-joie mais il y a quelque chose qui ne me fait pas tout à fait jubiler comme vous tous dans ce film.

Je trouve James Cagney trop âgé ici, il n'a plus la même énergie que dans les films des années 30, il est empâté, c'est flagrant quand on compare avec "The Roaring Twenties" (que je trouve meilleur que ce "White Heat", c'est ce "Roaring Twenties" qui est absolument parfait et mérite vraiment un statut de film-culte) ou "Angels with Dirty Faces". La façon dont sa psychose est caractérisée, le jeu même de Cagney, ne pousse pas assez loin le bouchon. Il n'est pas aussi inquiétant qu'Anthony Perkins par exemple. Il manque un peu... de folie, à mon goût. Et puis les seconds rôles de gangsters ne sont pas aussi réussis que dans les films des années 30 également. Ils sont un peu trop fonctionnels ici, en dehors de l'excellent infiltré, très bien interprété.

Malgré la perfection de sa structure, de sa mise en scène et ses dialogues marquants, ça résonne plus comme un excellent revival du film de gangster à la fin d'une période historique (la puissance des policiers est d'ailleurs démontrée à l'écran, là où avant ils faisaient avec les moyens du bord) que comme un chef d'œuvre qui viendrait couronner le genre.
James Cagney n'est plus un gamin, un kid quoi..et alors?
Il n'a plus la même énergie ? Moi je vois un pitbull dont la tension et l'énergie négative s'expriment en toute latitude dans l'extraordinaire scène du réfectoire.
Je ne vois pas le rapport avec Anthony Perkins (clairement pas le même type de psychose à part peut-être l'importance malsaine de la mère ).
Je ne vois pas non plus beaucoup de rapport avec The Roaring Twenties qui est un film de gangsters plus traditionnel avec un côté fresque sociologique (le film évoque longuement la crise économique et le retour des soldats de la Grande Guerre) alors que White Heat décrit un chef de gang plus proche d'un hors-la-loi du far west que d'un caïd de l'Organisation.
Je ne vois non plus en quoi The Roaring Twenties qui a, du reste, plein de qualités, mériterait plus le titre honorifique de "film culte" que White Heat (et puis c'est quoi précisément un film culte ?).
Enfin, je trouve que c'est un grand chef d'œuvre (et on est pas obligé de me suivre) moins en tant que couronnement d'un genre que comme apogée de la filmographie walshienne.
Bref, je suis à peu près en désaccord sur tout :o
t'as fait fort! :mrgreen:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Jeremy Fox »

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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Watkinssien »

Jeremy Fox a écrit : 9 avr. 24, 11:33 Team Alexandre

Et moi je pue? :mrgreen: :mrgreen:
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Alexandre Angel »

Un petit peu mais rien de rédhibitoire.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Watkinssien »

Alexandre Angel a écrit : 9 avr. 24, 12:44 Un petit peu mais rien de rédhibitoire.
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Jeremy Fox »

Watkinssien a écrit : 9 avr. 24, 14:28
Alexandre Angel a écrit : 9 avr. 24, 12:44 Un petit peu mais rien de rédhibitoire.
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Re: L'Enfer est à lui (Raoul Walsh - 1949)

Message par Barry Egan »

Alexandre Angel a écrit : 9 avr. 24, 11:32
Barry Egan a écrit : 8 avr. 24, 19:23 Je l'ai revu pour la 3ème fois hier soir et je vais être désolé de jouer les rabat-joie mais il y a quelque chose qui ne me fait pas tout à fait jubiler comme vous tous dans ce film.

Je trouve James Cagney trop âgé ici, il n'a plus la même énergie que dans les films des années 30, il est empâté, c'est flagrant quand on compare avec "The Roaring Twenties" (que je trouve meilleur que ce "White Heat", c'est ce "Roaring Twenties" qui est absolument parfait et mérite vraiment un statut de film-culte) ou "Angels with Dirty Faces". La façon dont sa psychose est caractérisée, le jeu même de Cagney, ne pousse pas assez loin le bouchon. Il n'est pas aussi inquiétant qu'Anthony Perkins par exemple. Il manque un peu... de folie, à mon goût. Et puis les seconds rôles de gangsters ne sont pas aussi réussis que dans les films des années 30 également. Ils sont un peu trop fonctionnels ici, en dehors de l'excellent infiltré, très bien interprété.

Malgré la perfection de sa structure, de sa mise en scène et ses dialogues marquants, ça résonne plus comme un excellent revival du film de gangster à la fin d'une période historique (la puissance des policiers est d'ailleurs démontrée à l'écran, là où avant ils faisaient avec les moyens du bord) que comme un chef d'œuvre qui viendrait couronner le genre.
James Cagney n'est plus un gamin, un kid quoi..et alors?
Il n'a plus la même énergie ? Moi je vois un pitbull dont la tension et l'énergie négative s'expriment en toute latitude dans l'extraordinaire scène du réfectoire.
Je ne vois pas le rapport avec Anthony Perkins (clairement pas le même type de psychose à part peut-être l'importance malsaine de la mère ).
Je ne vois pas non plus beaucoup de rapport avec The Roaring Twenties qui est un film de gangsters plus traditionnel avec un côté fresque sociologique (le film évoque longuement la crise économique et le retour des soldats de la Grande Guerre) alors que White Heat décrit un chef de gang plus proche d'un hors-la-loi du far west que d'un caïd de l'Organisation.
Je ne vois non plus en quoi The Roaring Twenties qui a, du reste, plein de qualités, mériterait plus le titre honorifique de "film culte" que White Heat (et puis c'est quoi précisément un film culte ?).
Enfin, je trouve que c'est un grand chef d'œuvre (et on est pas obligé de me suivre) moins en tant que couronnement d'un genre que comme apogée de la filmographie walshienne.
Bref, je suis à peu près en désaccord sur tout :o
t'as fait fort! :mrgreen:
Ne surinterprète pas non plus mon point de vue. Mes réserves ne m'empêchent pas d'apprécier le film. Je reste tout de même sur ma préférence pour "The Roaring Twenties", plus haletant, plus émouvant (Gladys George...), et toujours aussi pertinent, avec un Cagney plus teigneux, plus vulnérable, plus nuancé. Plus entier aussi. Dans la scène du réfectoire de "White Heat", il me fait le même effet que dans la scène de condamnation à mort dans "Angels with Dirty Faces", dans le sens où j'ai l'impression qu'il sort de son personnage pour en jouer un autre afin de parvenir à interpréter d'autres émotions qui ne lui sont pas naturelles en tant qu'acteur. C'est difficile à exprimer avec plus de clarté, mais il y a quelque chose pour moi d'un peu off quand il sort d'un registre particulier (et encore, je ne crois pas l'avoir vu dans une de ses comédies musicales).
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