William A. Wellman (1896-1975)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Frances
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Frances »

Frisco Jenny de William A. Wellman – 1932 - Ruth Chatterton, Louis Calhern, Helen Jerome Eddy, Donald Cook.
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Les films pré-code ont fait la part belle aux portraits de femmes. Des héroïnes du quotidien qui doivent leur survie et leur réussite à leur opiniâtreté et leurs capacités à se mouvoir dans une société aux mains des hommes, ou corrompue ou en crise ou les trois à la fois. Démunie après le tremblement de terre de San Francisco mais libérée d’un père grossier et intraitable qui l’exploitait dans son bouge, Jenny (Ruth Chatterton formidable), enceinte du pianiste qu’elle désirait épouser, prend son destin en mains.
Sans jamais verser dans le mélodrame, Wellman suit la trajectoire de cette femme devenue mère. Il travaille sans cesse le thème de la dualité : les activités illégales de Jenny (prostitution, Trafic d’alcool, corruption) et ses sentiments maternels qui vont de l’abnégation au sacrifice / Le sens de la fidélité dans la communauté interlope et l’aveuglement de la justice preste à condamner / Ceux d’en bas et les privilégiés. Comme souvent dans les pré-code, le scénario ne s’embarrasse pas de circonvolutions. Le montage est efficace et les ellipses temporelles mènent à l’essentiel du propos sans oublier une reconstitution plutôt réussie du tremblement de terre de San Francisco.
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
Mains Rouges.

Mes films du mois :
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Jan 21 : Cousin Jules
Fev 21 : Midnight special
Mar 21 : Nanouk l'esquimau
Avr 21 : Garden of stones
Mai 21 : Fellini Roma
The Eye Of Doom
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par The Eye Of Doom »

J’ai attaqué le coffret Forbidden Hollywood par le 1er de la liste:

Night Nurse

Film tres sympa, enlevé, porté par une Barbara Stanwyck jeune (et meconnaissable pour moi qui ne la connaissait que dans ses roles des annees 50...), tres en forme.
Mise en scene de Wellman impecable, du trajet de l’ambulance au debut, jusqu’a la traversee par l’infirmiere de la fete mondaine.
J’ai beaucoup aimé le volonté de décrire frontalement une réalité de la société americaine de l’époque: vie de l’hopital au quotitien (avec une notable presence de populations immigrées), corruption du monde médical, traffics maffieux, précarité de l’emploi,...
On parle tout de meme :
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De meutre d’enfant par malnutrition avec la benediction du corp medical...
et le talent indéniable de Wellman derrière la camera fait le reste.
Alors c’est vrai, l’intrigue sur la seconde partie est un peu approximative, Clark Gable n’est pas tres bon, les demoiselles en déshabillés sont de rigueur, la morale de l’histoire est tout de meme tres surprenante:
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L’infirmière « toute en dignité » n’est pas choquée plus que ca que son copain est commandité un meurtre.
Mais si tout les films du coffret sont de ce niveau, encore 9 seances de bonheur (et decouverte)!!
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John Holden
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par John Holden »

Il y aurait peut être quelque intérêt autre qu'archéologique à ce que certains esprits desoeuvrés et/ou curieux décantent en toute objectivité la carrière foisonnante de William Wellman.
Car, en effet, dès lors qu'on se laisse dériver hors des sentiers battus, on est amené à faire de séduisantes découvertes. Ce fut le cas pour ma part il y a quelques mois avec Good-bye, My Lady (1956), vibrante observation du passage insidieux de l'insouciance enfantine à l'age adulte avec un Walter Brennan souverain et poignant.
Rebelote avec My man and I (1952), étude de moeurs assez originale, où l'on retrouve un peu de la patte rugueuse du merveilleux John Fante, adoptant le point de vue de l'immigré sur l'american way of life. Et toujours chez Wellman cette volonté sereine d'éviter la violence pour résoudre les problèmes. Shelley Winters est littéralement "imprégnée", bouleversante, en face d'elle Ricardo montalban interprète à sa mesure un immigré mexicain plus investi de l'idéal progressiste américain que certains américains eux mêmes. A sa place, Wendell Corey promène sa morgue patibulaire tandis que Jack Elam, une fois n'est pas coutume, se range du côté des gentils.
Une découverte attachante.

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Jack Carter
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Jack Carter »

Je note, merci John :wink:
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par The Eye Of Doom »

Help wanted:
Ayant un déplacement pro aux us fin septembre, je vais faire un peu de rattrapage zone A. J’ai voulu prendre Beggars of life », bluray kino, mais il est épuisé….
Il y a bien une « edition «  espagnole mais j’ai peur que ce soit une vieille copie… et les suppléments du kino ont l’air tres intéressant….
Donc je cherche un classikien (parisien ?) qui aurait cette édition et aurait la gentillesse de me la preter le temps de voir le film+bonus… me contacter en MP. Merci.
Désolé pour le HS.
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par The Eye Of Doom »

Profondo Rosso a écrit : 5 juin 13, 02:34 Safe in Hell (1931)

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La Nouvelle-Orléans. Gilda, employée au service de Piet Van Saal, est renvoyée lorsque la femme de ce dernier découvre leur liaison. Piet lui rend visite et à la suite d'une violente dispute, Gilda l'assomme avec un vase. Croyant l'avoir tué, elle s'enfuit. Mais une lampe tombée accidentellement provoque un incendie dans l'appartement. Gilda, soupçonnée du meurtre, est recherchée par la police. Elle quitte la ville avec son ami, Carl. Le couple débarque sur une île, refuge de nombreux criminels...

Wellman signe avec ce Pré Code un mélodrame puissant au parfum de tragédie inéluctable. Cette tragédie pèse au-dessus de notre héroïne Gilda (Dorothy Mackaill) dont tous les rebondissements semblent vouer au malheur et à la perdition. Le film s'ouvre de façon fort crue où on découvre Gilda prostituée en route vers la chambre de son prochain client. La rencontre avec ce dernier va s'avérer explosif car il s'agit de Piet Van Saal (Ralf Harolde) le responsable de sa condition. Elle fut auparavant sa maîtresse et lorsque son épouse découvrit la liaison, la fit renvoyer et interdire d'embauche dans toute la ville ce qui la contraignit à vendre son corps. Toute cette amertume et colère ressurgit donc face à cet homme qui souhaite une nouvelle fois profiter d'elle et dans un accès de colère elle le tue accidentellement. Recherchée par la police, Gilda trouve le salut dans son amour de toujours, le marin Carl (Donald Cook) qui va lui pardonner ses errances et la sauver. Le refuge se trouvera dans une île des Caraïbes empêchant l'extradition et où ils pourront se marier.

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Plutôt qu'un refuge ce cadre sera celui de l'expression définitive de l'aura de malheur qui poursuit Gilda. Le script manifeste cela dans ses situations (le mariage avorté mais improvisé dans une très jolie scène), par la symbolique (Gilda observant de nombreuses fois l'horizon déserte comme condamnée sur cette île) et bien sûr par l'environnement de plus en plus délétère des lieux. L'île est en effet le repère de divers criminels en fuite qui vont autant éveiller les bas-instincts de Gilda que la confronter à leurs désirs libidineux. Dorothy Mackaill est aussi fragile que provocante dans le regard de Wellman qui l'érotise à merveille (première apparition affolante en bas et nuisette, son changement de tenue lorsqu'elle s'apprête à se mêler à ses voisins) tout en faisant de ses atouts l'instrument de son malheur à travers une pureté, une virginité qu'on lui refuse de retrouver. Le titre du film s'avère explicite et l'île un ersatz confiné de l'enfer que représente le monde pour ses âmes perdues, peuplées de monstres à l'image de l'ignoble bourreau incarné par Morgan Wallace. Gilda retrouvera pourtant sa dignité tout en disant définitivement adieu au bonheur dans une conclusion poignant où Dorothy Mackaill définitivement libérée de ses afféteries s'abandonne enfin totalement. Son funeste sort final fait presque figure de libération dans l'ultime plan filmé par Wellman, la laissant enfin apaisée dans sa marche vers l'oubli. 5,5/6

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Decouvert ce soir dans une superbe copie Warner Archive ramenée des states.
Je dois avouer que je partage pas beaucoup l’avis de Profondo Rosso malheureusement.
J’ai pas cru au recit un seul instant, contrairement aux autres precode de Wellman que j’ai pu voir jusqu’ici.
Cette sorte de malédiction qui pese sur la pauvre heroine, c’est trop…
Et puis les quelques rebondissements de l’histoire sont assez peu vraisemblable.
Voila pour le fond.
Sur la forme et le traitement de l’histoire en tant que tel (une fois acceptée le scénario), c’est souvent excellent.
La photo est superbe.
Dorothy Mackaill est non seulement superbe mais aussi tres bonne actrice. Elle est particulièrement érotisée (intro en ptite tenue, strip tease hors champ assez hot) comme c’est de rigueur dans ces precodes, sans etre jamais vulgaire.
Wellman filme tres habilement et avec recul et humour ce microcosme poisseux.
Il sait emporté l’émotion du spectateur comme dans la scene du mariage.
Ce n’est donc ni du côté de l’interprétation ni du côté du metteur en scene ou des dialogues que le bas blesse pour moi, mais bien dans la structure de ce melo.
De plus, malgré l’absence de racisme du film, le côté exotique fait tiquer. On demeure dans la collection de clichés.
Donc pour moi, a découvrir surtout pour découvrir Dorothy Machaill

Edit le lendemain : en y repensant, c’est l’ecart entre le ton ouvertement comique de la peinture du petit groupe des clients de l’hotel (homme aux noix, les postures sur les chaises,…) et la fin tragique qui ne fonctionne pas bien pour moi. On ne sens jamais vraiment la jeune femme en danger devant ces bras-cassés et d’ailleurs on comprend que ce sont en fait des « gentils » qui la soutiendront a la fin.
Du coup le virage dramatique final semble artificiel et pour tout dire surprenant.
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Profondo Rosso
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Profondo Rosso »

L'étrangleur (1943)

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Dixie Daisy est l’une des vedettes d’un spectacle burlesque dans un théâtre de Broadway transformé en music-hall. Lolita, une des actrices de la troupe, est retrouvée assassinée. Dixie est très vite soupçonnée à cause de la rivalité qui régnait entre les deux femmes. Mais d’autres crimes inexpliqués sont bientôt commis et Dixie veut mettre en place un piège pour démasquer l’assassin.

L'étrangleur est un plutôt habile mélange de whodunit et de film musical, adapté du roman The G-String Murders de Gypsy Rose Lee publié en 1941 - le titre anglais du livre étant la première victime des censeurs du Code Hays. L'argument criminel est traité à échelle égale, voire inférieure, de la partie musicale, et ce pour une bonne raison. Gypsy Rose Lee, autrice du roman est une véritable icône du monde du spectacle américain, lancée sur scène dès son plus jeune âge avec sa sœur l'actrice June Havoc par une mère abusive, et qui popularisa le spectacle burlesque ainsi que l'art du striptease auquel elle ajouta une dimension caustique et intellectuelle. Cette carrière tumultueuse sera immortalisée dans la comédie musicale de Broadway puis sa transposition cinématographique Gypsy (Mervyn LeRoy (1962)), tous deux adaptés de Gypsy: A Memoir, son autobiographie publiée en 1957.

Fort de ce passif, le film soigne particulièrement les séquences scéniques et les coulisses de ce théâtre de Broadway, passé de l'opéra au music-hall par intérêt économique. Les scènes de spectacle, les chorégraphies, le soin apporté aux costumes (conçus par Edith Head) et même le côté sophistiqué/coquin (dans la mesure de ce que pouvait permettre le code Hays) bénéficient d'une volonté de réalisme certain, mais toujours gentiment facétieux notamment dans le jeu avec le public. Pour les coulisses on oscille entre le ton badin et enlevé de la screwball comedy, dans la lignée des films de Busby Berkeley des années 30 avec le "couple" vachard constitué par Barbara Stanwyck et Michael O'Shea, et la foire d'empoigne teintée de rivalités sourdes entre danseuses. La solidarité se dispute à la mesquinerie, mais on sent un vrai besoin d'authenticité notamment dans la caractérisation de Dixie (Barbara Stanwyck), ses doutes, ses ambitions et un passif que l'on devine difficile, le personnage se voulant un double fictionnel de Gypsy Rose Lee. La partie criminelle avec cet étrangleur décimant les danseuses de la troupe fonctionne ainsi moins sur la tension et le suspense que sur tout le cadre tendre, concurrentiel et scandaleux (les descentes de police sont légion) que William A. Wellman a pris le temps de nous exposer, y compris les protagonistes masculins louches gravitant autour des danseuses. Les scènes d'interrogatoires ou de découverte de cadavre manque un peu du piquant du thriller et s'avèrent assez conventionnels, mais l'identité et les motivations du coupable vont faire habilement le lien avec la vision non-»noble» et vulgaire que les rétrogrades associent au spectacle burlesque. Une œuvre très plaisante dans son mélange des genres et portée par la prestation pleine de panache de Barbara Stanwyck. 4,5/6


Et au passage pour une fois le dvd Artus est très correct, ce qui n'est pas toujours le cas avec eux sur les productions américaines libres de droits.
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Jeremy Fox
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Re: William A. Wellman (1896-1975)

Message par Jeremy Fox »

Une Etoile est née chroniqué par Nicolas qui poursuivra bientôt avec les versions de Cukor et Pierson.
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