Novembre 1999
C'est le mois où David Lynch oublie de faire du David Lynch et livre ainsi, sans doute, son meilleur film.
Une Histoire Vraie est une équipée lyrique au ralenti, qui distille une forme de romanesque infinitésimal, et où le cinéaste se tient à distance de la mièvrerie et du ricanement avec la même obstination, la même légèreté que le héros accomplissant ce qu'il s'est promis. Un conte, une parabole, une balade aérée en même temps qu'un cheminement vers la mort, un film simple autant qu'indécidable, classique parce qu'un peu secret, limpide et changeant comme un cours d'eau : une oeuvre sereine, profonde et très émouvante.
C'est également le mois où l'un des plus grands cinéastes actuels (j'ai nommé Wes Anderson) livre sa première réussite notable avec
Rushmore,
high school comedy délicieusement cocasse, tendre et décalée. Le mois où Kiyoshi Kurosawa frappe un gros coup avec
Cure, polar enténébré à la lisière du fantastique, qui fait ressentir comme rarement le vertige au bord de l'abîme (pas sûr qu'il ait jamais fait mieux depuis). Le mois où Solveig Anspach relate son expérience de la maladie avec
Haut les Coeurs !, fiction poignante et rigoureuse, superbement portée par Karin Viard. C'est enfin le mois où David Fincher offre le film-culte définitif pour les vingt années à venir (on n'en est hélas toujours pas sorti) avec
Fight Club, qui tente de faire passer sa vacuité prépubère pour de l'intelligence, et ses effets putassiers et arrogants pour du style.