Pietro Germi (1914-1974)
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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Effectivement, Divorce à l'italienne est une comédie. Je ne le "reproche" pas vraiment au film, ni ne pense qu'une comédie ne peut pas être un grand film. J'idolâtre Lubitsch et L'impossible bébé de Hawks est pour moi un chef-d'oeuvre. En revanche, ce que j'appelle, à tort ou à raison, une "comédie italienne" est pour moi une comédie d'un genre assez particulier racontant une farce s'inscrivant à un moment de l'histoire de l'Italie et finissant dans la désillusion (je renvoie à ce que j'ai écrit dans le topic Scola). Peut-être que mon regard sur la comédie italienne a été tellement façonné par les Risi et Comencini que j'ai du mal à me défaire de cette impression première qui crée chez moi, comme tu l'as perçu ed, des attentes que Divorce à l'Italienne n'a pas comblées. Cela étant dit, je n'ai vu pour le moment qu'un seul film de Germi et je retiens vos conseils concernant Il Ferroviere et Meurtre à l'Italienne.
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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Traqué dans la ville (La Citta si difende) - 1951
Quatre hommes de milieu différents (ex-footballeur, artiste, étudiant, ouvrier...), mais tous actuellement dans la détresse, volent la recette d'un match de foot et se séparent puisque immédiatement pris en chasse par la police. Germi ne réalise pas un film policier puisqu'il se moque un peu de l'enquête, prétextant de cette intrigue pour tracer le tableau de la misère qui sévit dans la société italienne de l'époque et de l'indifférence des nantis qui la côtoient dans cette Italie de l'immédiat après-guerre. Et Germi n'a déjà pas son pareil pour mettre en valeur les décors naturels avec une triste mais belle poésie du quotidien. Que ce soit également au niveau du montage qui impose un rythme dégraissé et des cadrages, le film est formellement remarquable. Certes sur le fond le côté mélodramatique est ici un peu trop poussé (accentué par une musique assez réussie mais qui pousse à fond un lyrisme parfois grandiloquent) mais qui n'aura pas pris en pitié quelques uns des protagonistes et notamment ce père de famille qui ne supporte plus de ne pas pouvoir mettre sa femme et sa petite fille à l'abri de la pauvreté. Loin des grandes réussite à venir du cinéaste mais néanmoins un très joli film, puissant et touchant.
6.5/10
Quatre hommes de milieu différents (ex-footballeur, artiste, étudiant, ouvrier...), mais tous actuellement dans la détresse, volent la recette d'un match de foot et se séparent puisque immédiatement pris en chasse par la police. Germi ne réalise pas un film policier puisqu'il se moque un peu de l'enquête, prétextant de cette intrigue pour tracer le tableau de la misère qui sévit dans la société italienne de l'époque et de l'indifférence des nantis qui la côtoient dans cette Italie de l'immédiat après-guerre. Et Germi n'a déjà pas son pareil pour mettre en valeur les décors naturels avec une triste mais belle poésie du quotidien. Que ce soit également au niveau du montage qui impose un rythme dégraissé et des cadrages, le film est formellement remarquable. Certes sur le fond le côté mélodramatique est ici un peu trop poussé (accentué par une musique assez réussie mais qui pousse à fond un lyrisme parfois grandiloquent) mais qui n'aura pas pris en pitié quelques uns des protagonistes et notamment ce père de famille qui ne supporte plus de ne pas pouvoir mettre sa femme et sa petite fille à l'abri de la pauvreté. Loin des grandes réussite à venir du cinéaste mais néanmoins un très joli film, puissant et touchant.
6.5/10
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Re: Pietro Germi (1914-1974)

Meurtre à l’italienne
Du fameux roman de Carlo Emilio Gadda, ce polar à l’italienne tire son intérêt pour les exilés de la ville, assassins et voleurs condamnés à y revenir pour l’engrosser. Le viril Germi, commissaire-réalisateur aux lunettes noires par pudeur, par peur de trop voir, y compose une sorte de Maigret romain lucide quant aux turpitudes de ses semblables, évoluant au sein d’un milieu où sexe et argent sont devenus les nouveaux dieux et où l’omniprésence du clergé et de la croix du Christ se fait l’écho d’une décadence plus générale. Au gré d’une dramatisation fermement construite, de séquences liées par de sombres vibrations rosziennes et ciselées par des clairs-obscurs inquiétants autour de la naked city, il signe un film dont la netteté du trait ne nuit ni à la diversité des contours ni à la richesse des portraits. 4/6
Divorce à l’italienne
L’histoire d’un baron sicilien qui jette sa femme dans les bras d’un amant et obtient de ce fait la permission de la société pour la tuer. Bouffi, placide, gominé et moustachu, périodiquement affecté d’un rictus de la bouche qui signifie tour à tour l’inquiétude, l’ennui, la satisfaction ou le plaisir, seul trait vivant dans un visage par ailleurs constamment fermé, Mastroianni est ce cocu volontaire qui, parce que la loi interdit le divorce mais est plus indulgente pour les crimes passionnels, ne trouve pas d’autre moyen de se débarrasser de sa gênante épouse. Traité avec une distanciation narquoise et une férocité souriante dans le style des romans-photos, le film est une sorte de Noblesse Oblige dans la cadre du Bel Antonio, trouvant toujours l’équilibre entre satire cruelle et humour débridé. 4/6
Séduite et abandonnée
L’innocente petite souris a un visage de Marie-Madeleine. Les chats qui la croquent, la jugent, s’arrogent le droit de lui faire payer le péché qu’un des leurs a commis, sont dessinés eux par Bosch et Tex Avery : cousin ou parrain, parents ou voisins, amis et ennemis pour qui le pucelage est une affaire d’honneur. En son nom tout est permis, le mensonge, le chantage, la délation, la tentative d’assassinat. De cette tragédie vécue par toutes les jeunes filles qui savent qu’en chaque famille existent quelques "humeurs de draps", le réalisateur tire une farce dévastatrice, effrénée, grinçante et outrancière jusqu’au cauchemar, atomisant l’hypocrisie obscène d’une société sicilienne asphyxiée par ses traditions, confondant l’œil de la caméra avec celui que ses facétieux ancêtres calligraphiaient au fond de leurs vases de nuit. 5/6
Top 10 Année 1964
Ces messieurs dames
Quitter l’Italie du Sud pour la patrie de Goldoni n’empêche pas l’auteur de poursuivre son inventaire des médiocrités et petitesses des passions humaines. Ainsi observe-t-il à la loupe grossissante un quarteron de séducteurs licencieux et de cocus aphasiques, de pucelles en chaleur et de matrones acariâtres, vitelloni pour lesquels rien n’est scandaleux pourvu que ce ne soit pas public. En trois sketches construits sur un schème identique de critique sociale, il se livre à une satire acide des tabous qui pourchassent et persécutent l’amour dans les villes de province. La concision dans l’effet et la férocité du propos, vertus d’une ironie classique aimant à se souligner elle-même avec une prétention justifiée, permettent d’atteindre le point où la vulgarité devient un style qui découle d’une honnêteté artistique. 4/6
Mon top :
1. Séduite et abandonnée (1964)
2. Divorce à l’italienne (1961)
3. Meurtre à l’italienne (1959)
4. Ces messieurs dames (1966)
Ces quelques films grinçants, iconoclastes, offensifs sur les plans politique et idéologique, sont assez représentatifs du tournant pris par le cinéma italien à la fin des années cinquante. Traversés par une amertume que tempère à peine un sens de la bouffonnerie débridé, ils témoignent d’une analyse sociale sans illusion, trouvant à s’exprimer aussi bien sur le registre de la comédie que sur celui du drame.
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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Les propos sont brillants mais tout ceci n'est pas cher payé (je sais, les notes sont accessoires
)
Pour les faciles à voir, reste : Il Ferroviere (Carlotta), Le témoin (Bach films), Mademoiselle la présidente (M6 Video), et un polar que j'aime beaucoup, un film criminel néo-réaliste : Traqué dans la ville (Tamasa)

Pour les faciles à voir, reste : Il Ferroviere (Carlotta), Le témoin (Bach films), Mademoiselle la présidente (M6 Video), et un polar que j'aime beaucoup, un film criminel néo-réaliste : Traqué dans la ville (Tamasa)
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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Celui là devrait au moins atteindre le 5/6 pour Thaddeus.kiemavel wrote:
Pour les faciles à voir, reste : Il Ferroviere (Carlotta)
Pour moi l'une des plus belles découvertes de ces dernières années que ce cinéaste italien.
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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Oui mais j'ai autant aimé Traqué dans la ville ( mais c'est probablement du à mon intérêt particulier pour le genre )Jeremy Fox wrote:Celui là devrait au moins atteindre le 5/6 pour Thaddeus.kiemavel wrote:
Pour les faciles à voir, reste : Il Ferroviere (Carlotta)
Pour moi l'une des plus belles découvertes de ces dernières années de ce cinéaste italien.
Edit : Je n'avais pas vu que tu avais évoqué le film plus haut. Pour ne pas faire moins que pour Thaddeus

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Re: Pietro Germi (1914-1974)
Au nom de la loi (In nome della legge) - 1949
Encore un excellent film de Germi (dispo sur MyCanal en meme temps que Le Chemin de l'espérance et La Tanière des brigands)
C'est l'histoire d'un juge qui débarque dans une petite ville de Sicile où règne la loi de la mafia - bon mon pitch est un peu nul, mais le film vaut vraiment le coup
Germi arrive à donner à son film un souffle épique et des touches de néo-réalisme, de western et de drame shakespearien.
L'interprétation est parfaite, à noter Charles Vanel en chef mafieux, qui meme doublé en italien est génial.
Et enfin Germi arrive à donner à tous ses personnages une vraie dimension, sans jugement ni mièvrerie.
A noter que le scénario est signé Germi, Fellini et Monicelli
Encore un excellent film de Germi (dispo sur MyCanal en meme temps que Le Chemin de l'espérance et La Tanière des brigands)
C'est l'histoire d'un juge qui débarque dans une petite ville de Sicile où règne la loi de la mafia - bon mon pitch est un peu nul, mais le film vaut vraiment le coup
Germi arrive à donner à son film un souffle épique et des touches de néo-réalisme, de western et de drame shakespearien.
L'interprétation est parfaite, à noter Charles Vanel en chef mafieux, qui meme doublé en italien est génial.
Et enfin Germi arrive à donner à tous ses personnages une vraie dimension, sans jugement ni mièvrerie.
A noter que le scénario est signé Germi, Fellini et Monicelli