La scène avec les rats est très bonne... un peu longue niveau mordillements de jambes... Un peu déconnecté du reste du film. Mais sublime... Ne serait-ce que pour son dénouement génial que rappelle manhunter. Je me rappelle encore du choc de frousse que m'avait fait ce twist complètement inattendu à la première vision d'"Inferno".
Le couteau brandi dans la nuit, le grouillement croissant des rats vomis par les égouts dans des éclairages expressionnistes (véritable image à la EC Comics), et ce plan incroyable de New York par une nuit d'éclipse (trucage signé Bava père si mes souvenirs ont exacts). Et la musique, quelle musique ! Sur la fin de la scène en particulier, inoubliable !
Toute cette scène avec le libraire et les chats relève de la logique du rêve et de celle d'un espèce de conte de fées lugubre, avec ce personnage de vieillard acariâtre fourrant des chats vivants dans un sac de jute pour ensuite les noyer - un peu EC Comics, à nouveau, c'est vrai.
La construction de ce passage et son dénouement, totalement choquant, totalement libre à nouveau en terme d'art et de construction, se libèrent de la logique attendue par le spectateur traditionnellement, tout en étant au fond cohérente avec la logique du métrage (et du cycle formé avec "Suspiria" car c'est un écho de la scène de l'aveugle).
A savoir que les sorciers et leurs serviteurs sont partout : dans les bibliothèques parmi les lecteurs qui lancent des regards étrange à une visiteuse, dans l'atelier du relieur (scène
sublime de la bibliothèque), dans un amphithéâtre de musicologie (avec la sorcière qui lance un sortilège muet à Marc : quel découpage, quelle ambiance !) et même dans une baraque à frites de Central Park, où un séide attend le moment le plus théâtral pour accomplir la vengeance des sorcières contre celui qui persécute leurs Familiers - là aussi au sens magique du terme, à savoir leurs chats.
La magie, l'étrange est partout. Je crois avoir vu une interview récente de Gans qui dit que dans "Les frissons...", Argento film comme quelqu'un qui a peur de tout, et c'est très vrai. Avec "Inferno", il va plus loin : il filme et raconte en partant du principe que la magie - noire - est partout, même à New York dans les années 80.
Je ne pense pas que les mots que j'égrène ici vont changer votre regard sur "Inferno". Ils sont écrits dans l'espoir que quand le lecteur sceptique reverra ce film plus tard, il y aura dans un coin de sa perception quelques petites portes qui se seront ouvertes qui lui feront mieux aimer le métrage, ou mieux comprendre en tout cas, au moins.
Mais je ne vais pas en dire plus long ce soir - car il est dangereux de briser ce que les alchimistes appelent le "Silentium"...