Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Demi-Lune
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Demi-Lune »

AtCloseRange a écrit :
Demi-Lune a écrit : C'est la première fois que je vois une digression chez Lynch, chose exceptionnelle compte tenu de l'imprévisibilité de son système narratif.
Je ne comprends pas ta phrase (ni dans un sens ni dans un autre d'ailleurs).
Ça ne m'étonne pas, je me rendais bien compte en écrivant mon message que j'étais peu clair.
On est d'accord sur la composante digressive de la narration chez Lynch (d'ailleurs tu me rappelles effectivement la scène avec Crispin Glover que j'avais oubliée... mon argumentaire sur l'utilité de chaque scène de Sailor & Lula prend donc un peu du plomb dans l'aile, du coup).
Mais autant ces digressions me paraissent fluides et claires dans d'autres œuvres pourtant plus complexes (parce qu'elles sont potentiellement la substance même du jeu narratif, comme par exemple pour Lost Highway et sa construction en ruban de Möbius), autant sur cette scène de l'accident, et plus généralement dans Sailor et Lula (je constate que je l'avais déjà écrit il y a plusieurs mois, ça me rassure), c'est la première fois que je ressens vraiment ce caractère digressif chez Lynch. Dans d'autres films, la petite musique lynchienne me fascine totalement et le réalisateur peut malmener autant qu'il veut la narration, ça passe, ça m'impressionne, j'applaudis. Bon, j'avoue que parfois, j'ai besoin d'une redécouverte comme dans Fire walk with me où quelques digressions m'avaient également fait sortir du truc.
Là, cette digression me fait sortir de l'histoire que raconte Lynch. Et c'est sans doute parce que, contrairement à d'autres de ses œuvres, je ne voue pas pour Sailor & Lula suffisamment d'admiration ou d'envoûtement pour me laisser aspirer dans cette sorte de "trou noir" que représente la mort de Sherilyn Fenn dans le film.
Ça va, je donne pas trop l'impression de ramer ? :oops:
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MJ
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par MJ »

Demi-Lune a écrit :Ça va, je donne pas trop l'impression de ramer ? :oops:
Si, si, c'est très touchant. :mrgreen:

Il y a cela dit je crois une part de vrai dans ton ressenti: je vois dans cette séquence une forme d'absurdité qui heurte au sein du film. Comme si la révélation de cette douleur sans sens n'était pas acceptable pour les deux protagonistes, suivant jusque-là la route tracée de leur amour. Il y a quelque chose d'inacceptable pour Sailor et Lula dans cette souffrance isolée. Après, c'est un des moments du film qui me touche le plus, en partie pour ce désarroi qu'il transmet des personnages au spectateur.
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AtCloseRange
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par AtCloseRange »

Je n'avais jamais remarqué les correspondances entre le film et les premiers travaux de Tarantino.
Sailor et Lula font autant penser au couple de fugitifs de True Romance que de Tueurs Nés avec le côté à la fois ingénu et très sensuel du perso féminin. La figure tutélaire de Presley également présente dans True Romance, les dialogues mi humoristiques, mi méta (les échanges sur les marques de cigarettes), la présence de chansons of course. Marcello Santos d'un côté, Marcellus Wallace de l'autre (bon, là je pousse peut-être un peu).
ça m'a un peu sauté au visage à la révision. Même si le film reste important pour moi (avec de nombreux grands moments - notamment l'accident de voiture), il reste un peu à part dans la filmo de Lynch mais on sent au final un peu un film de transition (avant d'aller vers quelque chose de plus mental surtout à partir de Lost Highway), quelque part un peu putassier dans son usage de la violence (là encore, la scène inaugurale et les bouts de cervelles qui dépassent peuvent ramener à la scène de la voiture de Pulp Fiction) et du sexe.
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par 7swans »

Le Lynch que j'aime le moins.
Une boursouflure que je n'avais même pas réussie à terminer.
Palmer Lynch pour ce film là, ça me reste en travers de la gorge.
Comme les Notting Hillbillies : "Missing...Presumed Having a Good Time (on Letterboxd : https://letterboxd.com/ishenryfool/)"
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Rockatansky »

ça doit pas être loin d'être mon Lynch préféré
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par AtCloseRange »

7swans a écrit :Palmer Lynch pour ce film là, ça me reste en travers de la gorge.
Avec le recul, ça n'est pas faux. D'ailleurs, ça ne ressemble vraiment pas à un film "palmé" (ou palmable).
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Rockatansky »

Oui mais ils ne jugent pas avec le recul.
Je me souviens du choc qu'avait déclenché la projection à l'époque, j'étais très content de cette palme.
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par AtCloseRange »

Rockatansky a écrit :Oui mais ils ne jugent pas avec le recul.
Je me souviens du choc qu'avait déclenché la projection à l'époque, j'étais très content de cette palme.
Ah mais moi aussi. j'étais ultra fan donc ça me faisait plaisir. C'est effectivement facile de refaire l'histoire mais il faut bien dire quand on voit la sélection que ce n'était pas une grosse année.
Donc à part Cyrano (qui aurait fait une belle Palme je pense).

L'Interrogatoire, de Ryszard Bugajski
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La Captive du désert, de Raymond Depardon
Chasseur blanc, cœur noir, de Clint Eastwood
Rodrigo D - Futur : Néant, de Víctor Gaviria
Nouvelle Vague, de Jean-Luc Godard
L'Oreille (Ucho), de Karel Kachyňa
Secret défense (Hidden Agenda), de Ken Loach
Taxi Blues, de Pavel Lounguine
Sailor et Lula, de David Lynch
L'Aiguillon de la mort, de Kohei Oguri
Tilai, d'Idrissa Ouedraogo
La Mère, de Gleb Panfilov
Bienvenue au Paradis, d'Alan Parker
Cyrano de Bergerac, de Jean-Paul Rappeneau
Daddy nostalgie, de Bertrand Tavernier
Ils vont tous bien !, de Giuseppe Tornatore
Judou, de Zhang Yimou et Yang Fengliang

Je ne comprends pas trop la présence de L'interrogatoire qui date de 82 (très bon film d'ailleurs) ou de l'Oreille (bon film aussi) qui date de 70 mais ce que je connais du reste, mouaif.
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Demi-Lune
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Demi-Lune »

AtCloseRange a écrit :D'ailleurs, ça ne ressemble vraiment pas à un film "palmé" (ou palmable).
Comme Pulp fiction quatre ans plus tard, pour continuer le parallèle avec Tarantino (ou même Barton Fink en 1991).
Heureusement que les jurys de Cannes ne s'astreignent pas à récompenser des profils-types. Ce serait d'un conformisme... Au-delà de la caricature facile du festival (les films ouzbèkes de 4 heures), quand on détaille la liste des films palmés, force est de constater que c'est très varié et souvent moins auteurichiant que ce que les mauvaises langues veulent bien dire.
Et puis, on ne peut même pas dire que ce soient des Palmes effets de mode qui n'auraient pas résisté au temps. Sailor & Lula n'est certes pas le meilleur film de David Lynch, mais ça reste du pur David Lynch.
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par AtCloseRange »

Demi-Lune a écrit :
AtCloseRange a écrit :D'ailleurs, ça ne ressemble vraiment pas à un film "palmé" (ou palmable).
Comme Pulp fiction quatre ans plus tard, pour continuer le parallèle avec Tarantino (ou même Barton Fink en 1991).
Heureusement que les jurys de Cannes ne s'astreignent pas à récompenser des profils-types. Ce serait d'un conformisme... Au-delà de la caricature facile du festival (les films ouzbèkes de 4 heures), quand on détaille la liste des films palmés, force est de constater que c'est très varié et souvent moins auteurichiant que ce que les mauvaises langues veulent bien dire.
Et puis, on ne peut même pas dire que ce soient des Palmes effets de mode qui n'auraient pas résisté au temps. Sailor & Lula n'est certes pas le meilleur film de David Lynch, mais ça reste du pur David Lynch.
Sauf que je n'aurais pas pensé ça si n'importe quel autre film de Lynch avait été palmé. Peut-être le côté boursouflé dont parle 7swans, un côté un peu vulgos. Même s'il y a des points communs avec le Tarantino, à 25 ans de distance, un des 2 tient beaucoup mieux la route en tant que Palme d'Or que l'autre.
Mais j'aime le film, hein. C'est juste que je lui trouve un côté forcé, racoleur qui me saute davantage aux yeux aujourd'hui.
Et la faiblesse du reste de la sélection explique aussi cette Palme (on est loin du niveau de 89).
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par ballantrae »

Loin du niveau de 1989 c'est sûr mais avec tout de même un bon Eastwood et le dernier grand JLG Nouvelle vague.
Il y avait eu aussi HC sûrement Non ou la vaine gloire de commander de Oliveira (qui est superbe) , Rêves de Kurosawa et La voce della luna de Fellini.
Mais la Palme, la vraie, était dans une sélection parallèle : Bouge pas , meurs , ressuscite de V Kanevski, météore hallucinant venu de nulle part qui hélas n'a pas débouché sur une longue oeuvre ( un docu et la suite tout aussi magnifique Une vie indépendante) .
Malgré qqs moments très réussis Wild at heart est le Lynch que j'aime le moins avec Dune mais avec le temps je l'aime bien comme le témoignage d'une époque où j'étais un peu plus jeune.
En revanche Twin peaks : fire walk with me aurait mérité une tout autre consécration deux ans après.Et il n'a essuyé que bide public et étonnement voire hostilité critique.
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Demi-Lune
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Demi-Lune »

ballantrae a écrit :Mais la Palme, la vraie, était dans une sélection parallèle : Bouge pas , meurs , ressuscite de V Kanevski, météore hallucinant venu de nulle part qui hélas n'a pas débouché sur une longue oeuvre ( un docu et la suite tout aussi magnifique Une vie indépendante) .
Très mauvaise expérience de mon côté, que Bouge pas, meurs, ressuscite. Qu'est-ce que c'était chiant et pénible. :oops:
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Alexandre Angel »

AtCloseRange a écrit : Ah mais moi aussi. j'étais ultra fan donc ça me faisait plaisir. C'est effectivement facile de refaire l'histoire mais il faut bien dire quand on voit la sélection que ce n'était pas une grosse année.
Donc à part Cyrano (qui aurait fait une belle Palme je pense).

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Daddy nostalgie, de Bertrand Tavernier
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Judou, de Zhang Yimou et Yang Fengliang
Donc petite parenthèse cannoise : ça me rappelle des souvenirs précis (je me souviens avoir vu coup sur coup La Voce Della Luna, Rêves et le Eastwood au printemps 90).
Par contre , c'est vraiment une autre époque : on imagine mal maintenant un Rappeneau ou un Tavernier en compétition.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par Alexandre Angel »

Demi-Lune a écrit :Très mauvaise expérience de mon côté, que Bouge pas, meurs, ressuscite. Qu'est-ce que c'était chiant et pénible.
Je suppose que tu n'a pas vu Kroustaliov, ma voiture (Alexeï Guerman-1999) :mrgreen:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Iiiiiiil est des nôôôôtres
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Re: Sailor & Lula (David Lynch - 1990)

Message par gnome »

Rockatansky a écrit :Oui mais ils ne jugent pas avec le recul.
Je me souviens du choc qu'avait déclenché la projection à l'époque, j'étais très content de cette palme.
Clairement !
Mais je me souviens avoir vu des gens quitter la salle quand je suis allé le voir...
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