L'Etoffe des héros (Philip Kaufman - 1983)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Johnny Doe
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par Johnny Doe »

Très belle description du film, vraiment, et tu met peut-être le doigt sur ce qui m'a gêné : cet absence de catharsis, ce sentiment d'attente créé par le film qui ne donne pas vraiment de satisfaction "facile" au spectateur. Quand j'ai découvert le début dans le bar, j'avais l'impression de m'être trompé de film.

A revoir donc, mais en même temps j'ai tellement un souvenir lénifiant de ce Kaufman que l'idée de retenter la longue expérience ne m'emballe pas vraiment.
- Errm. Do you want to put another meeting in?
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Alexandre Angel
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par Alexandre Angel »

Johnny Doe a écrit :A revoir donc, mais en même temps j'ai tellement un souvenir lénifiant de ce Kaufman que l'idée de retenter la longue expérience ne m'emballe pas vraiment.
Kauffman est un intellectuel qui s'exprime avec préciosité. Il canalise cette tendance avec beaucoup de bonheur dans The Right Stuff : il suffit de se laisser porter par un récit qui prend son temps, à la façon d'un livre puisque cette préciosité canalisée confère au film une tonalité littéraire. Du coup, on est jamais dans l'affirmation idéologique, mais dans les chemins de traverses, le contournement, l'allusion, la distanciation. Et puis, il y a des moments très rigolos..
Il faut voir aussi le lointain cousin anglais du film : Le Mur du son, de David Lean
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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ctoutafetwa
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par ctoutafetwa »

AtCloseRange a écrit :Le gars découvre le ciné américain.... C'est touchant de voir autant de (fausse) naïveté.
Tu as dû passer à côté des "-e" à la fin des participes passés qui émaillent mon premier message ;)

Armaggedon : je l'ai vu, je suis prête à concéder qu'on n'est pas au même niveau de caricature. Ce n'est pas le même genre de film non plus - heureusement.

Je suis surprise qu'on me tombe dessus pour en pas avoir aimé le film : comme Johnny Doe, je l'ai en effet trouvé lénifiant, fade et lisse.
Alexandre Angel a écrit :il suffit de se laisser porter par un récit qui prend son temps, à la façon d'un livre puisque cette préciosité canalisée confère au film une tonalité littéraire. Du coup, on est jamais dans l'affirmation idéologique, mais dans les chemins de traverses, le contournement, l'allusion, la distanciation. Et puis, il y a des moments très rigolos..
Mais ça se voit, je suis plutôt d'accord avec ce que tu dis, sauf qu'à force de se laisser porter, ben je me suis profondément ennuyée...
On regarde quoi ce soir ?
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Thaddeus
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman, 1984)

Message par Thaddeus »

Je m'autoquote en hommage à Sam Shepard, dont on vient d'annoncer la disparition.
Quel film fabuleux que cette Étoffe des Héros, quelle scène, quel acteur et quel personnage !
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Demi-Lune
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par Demi-Lune »

Moment gravé en moi où, en dialogue avec les astronautes du programme Mercury se regardant sur fond de Debussy, Shepard/Yeager pousse les limites de son engin à la verticale et dépasse l'atmosphère pour voir, l'espace de quelques secondes, l'espace et les étoiles qu'il a toujours convoités.
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman, 1984)

Message par la_vie_en_blueray »

Thaddeus a écrit : Je m'autoquote en hommage à Sam Shepard, dont on vient d'annoncer la disparition.
Quel film fabuleux que cette Étoffe des Héros, quelle scène, quel acteur et quel personnage !
Je plussoie. La scene de fin est encore plus charismatique.
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par gnome »

J'ai failli regarder le film hier sans savoir pour la disparition de Shepard... :| :(
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Thaddeus
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman, 1984)

Message par Thaddeus »

la_vie_en_blueray a écrit :Je plussoie. La scene de fin est encore plus charismatique.
Putain mais oui !

Enfin, "charismatique" je ne sais pas, mais combien exaltante, galvanisante !
"For a brief moment, Gordo Cooper became the greatest pilot anyone had ever seen".
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harry
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman, 1984)

Message par harry »

The Right Stuff c'est juste du film "inusable", ca a beau durer 3h, a chaque fois que je le mate j'ai toujours l'impression qu'il dure 2x moins, c'est epique comme rarement, c'est un gros morceau d'americana (mais en meme temps aussi critique), c'est drole, c'est exaltant, c'est grand...

L’enchainement de l'extrait apres le crash de Yeager avec la replique pleine de sens"Is that a man? Yeah, you damn right it is!", le lancement de Cooper avec le "Go Hot dog, Go!" de Grissom(Fred Ward) qui renvoie a sa mission "ratee" et quand on connait son destin funeste, en quelques instants tu passes des frissons aux yeux qui commencent a transiprer.

Bref, tout ca pour dire que c'est un putain de film, et que ca fait chier que Sam Shepard ne soit plus la.
RIP Mr Shepard.
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scottspeed
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par scottspeed »

C'est tout simplement mon film préféré, celui que j'ai le plus regardé et dont je ne me lasse jamais (et Paris, Texas est également dans mon top 10).
Sam Shepard sera parti avant Chuck Yeager.
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la_vie_en_blueray
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1984)

Message par la_vie_en_blueray »

Quand je parlais de charisme, je pensais au crash de Yeager, et Sam Shepard qui sort de la fumée, avec son look "real hero is here". En même temps c'est le but recherché, mais ca m'avait marqué.
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Alexandre Angel
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1983)

Message par Alexandre Angel »

Pour ne pas me faire gronder, je transfère cela ici
ex-beldvd man a écrit : 15 sept. 21, 23:45
Alexandre Angel a écrit : 15 sept. 21, 21:50 First Man (...) J'ai très vite pensé à L'Etoffe des Héros : ce qui est un grand compliment.
C'est marrant moi je les trouve très dissemblables. The Right Stuff (que j'ai dû voir 5-6 fois) est quand même très "simpliste" dans ces personnages des astronautes/scientifiques (et caricatural dans sa représentation des politiciens par exemple).
Cela me paraît fort ancré dans les années Reagan: les astronautes sont les conquérants, les héros "invincibles" (e.a. le personnage de Chuck Yeager) et incompris des scientifiques ("
on pourrait envoyer des singes, ils sont plus dociles"). Ils sont "bigger than life", alors que dans First Man, c'est quand même beaucoup plus subtile me semble-t-il.
Il y a ça et là un peu de cynisme dans TRS, mais uniquement dans les situations vécues par les astronautes (les premiers astronautes sont vus accomplissant des faits héroïques et extraordinaires, les suivants ont droit à moins d'égards). Ils sont vus comme sans peur et sans reproche (mis à part la controverse lors de l'amerrissage de Grissom)
Je ne suis pas trop d'accord sur l'aspect reaganien. En tout cas, s'il est présent dans le scénario, la réalisation de Kauffman, cinéaste tout sauf affirmatif, nous en éloigne formidablement.
Les simplismes et autres caricatures que tu mentionnes sans doute à juste titre ne me semblent pas être au service d'une idéologie mais à celui d'une dynamique de récit enlevé et ironique à la fois (les caricatures, je dirais moi chambrages, que tu évoques ne sont pas éloignées de celles de L'Insoutenable Légèreté de l'Etre dans l'esprit).
Mais surtout, ce qui relie, pour moi, First Man à The Right Stuff, c'est le David Lean du Mur du son, et dans la thématique, et dans la forme.
Ce qui nous éloigne aussi bien du reaganisme, que d'une certaine uniformité des années 2010 (et 2020 je le crains).

Edit : je viens de voir que je dis des trucs similaires en haut de la page.

En tous cas, plus que les films précédents, c'est First Man qui m'a fait croire enfin à Damien Chazelle.
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ex-beldvd man
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1983)

Message par ex-beldvd man »

Par « reaganien » je parlais de la figure du héros sans faille. De nos jours, comme dans First man, on montre et on s’attarde plus sur leurs défauts et doutes. Ils sont plus présentés comme des gens « ordinaires » faisant des choses extraordinaires. De façon générale, on est plus dans une époque cynique au contraire des années 80.
Armstrong et Yeager, tous les deux des First men sont traités bien différemment alors que je trouve leurs exploits respectifs tout aussi remarquables et extraordinaires…
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Watkinssien
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1983)

Message par Watkinssien »

Il me semble que le traitement de Yeager est quand même très bien posé, très distingué. C'est le héros "oublié", qui ne demande pas tant de couverture à lui, le pionnier qui a fait avancer la machine. Pour moi, c'est le véritable protagoniste du film, et je pense que Kaufman s'attarde à montrer le charisme de cet homme hors normes, mais aux valeurs plus "simples" (bien aidé par la présence magnétique de Sam Shepard).
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ex-beldvd man
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Re: L'étoffe des héros (Philip Kaufman - 1983)

Message par ex-beldvd man »

Il me semble d’ailleurs que la présence de ce personnage (qui n’a rien à voir directement avec l'histoire principale, je ne parle pas de son rôle dans l'Histoire évidemment en tant que pionnier) avait fait l’objet de vives discussions avec le studio.
Ce que je veux dire est qu’en 2020, il aurait très certainement été présenté autrement (une « blessure » qui le pousserait à agir de la sorte, une rancœur développée parce qu’il n’est pas médiatisé comme les astronautes-star,…).
Par exemple comme ceci, extrait de son autobiographie (d’après Wiki):
Dans ses mémoires, "Yeager, An Autobiography", il évoque les atrocités qu'il avait ordre de commettre contre les civils allemands :

« Des atrocités furent commises par les deux camps. […] Une zone de cinquante miles sur cinquante à l'intérieur de l'Allemagne fut assignée à nos soixante-quinze Mustangs et ils reçurent l'ordre de mitrailler tout ce qui bougeait. Le but était de démoraliser la population allemande. […] Si quelqu'un avait refusé de participer (et, autant que je me souvienne, personne ne refusa), il aurait probablement été traîné en cour martiale. »


On le verrait en faire des cauchemars et que toute sa carrière après, e.a. les risques qu’il prend en tant que pilote d’essais sont en quelque sorte des désirs de mort.

ou ce moment, après le fameux crash: he said that when he ejected, the seat struck his face which caused a fire in his helmet due to the pure O2 environment. The rubber and plastic lining in the helmet melted to his face which took days to remove. He also made it clear that it was one of the most painful things he had ever experienced so if chuck says it hurts, you know it hurt.

Alors que dans le film, son apparition après le crash est bien plus "mythique". Ca cadre bien avec le personnage présenté dans le film et avec le film lui-même (que j'adore), mais je trouve que cela tranche nettement avec l'approche de First Man. Il y a plein de scènes dans TRS qui sont "over the top" (au début: la conférence de presse, la réponse à la question: "qui est le meilleur ?" où tous les candidats astronautes lèvent la main, le tonnerre d'applaudissement qui suit)

Comparons la vraie conférence:


et celle du film:


:uhuh:
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