John Woo

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Roy Neary
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Re: John Woo

Message par Roy Neary »

Demi-Lune a écrit : The Killer (1989)
Mélancolique, romantique, désespéré, violent, tragique, exacerbé : un tourbillon de virtuosité et d'émotions qui se marie ici avec une rare grâce. C'est, en effet, peut-être bien le chef-d'oeuvre de son auteur, qui, reprenant les fondamentaux de son cinéma et en repoussant les limites, touchait ici au sublime.
Demi-Lune a écrit :Non, franchement, autant The killer ne passe plus du tout chez moi, autant Le syndicat du crime garde quelque chose de mystérieux et de solide.
En 4 ans, tu es passé du sublime au rejet total ?
Punaise, moi qui pensais que mon camarade Jeremy Fox avait tendance à faire la girouette... Au moins, il lui faut 30 ans pour changer d'avis. :mrgreen:
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Demi-Lune
Bronco Boulet
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Re: John Woo

Message par Demi-Lune »

Oui, ça avait été la déconvenue totale lorsque j'ai voulu le revoir il y a quelques années. Peut-être étais-je mal (demi)-luné ce jour-là.
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Rockatansky
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Re: John Woo

Message par Rockatansky »

Je trouve que le film est celui qui a le plus mal vieilli de toute la période HK de Woo, mais il garde mon affection
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Re: John Woo

Message par Blue »

Techniquement, "The Killer" gardera éternellement ses qualités de montage, de découpage et sa photographie. Je n'ose croire qu'on puisse les remettre en question. De même qu'il conservera son romantisme, son lyrisme et sa puissance dramaturgique. Historiquement, il demeure le témoignage d'une cinématographie alors à son apogée dans le domaine du polar, et de cette collaboration entre Woo et Tsui Hark producteur.
Alors quoi ? Si "The Killer" n'est plus considéré comme un chef d'oeuvre de l'histoire du cinéma, ce n'est pas parce que le film a changé ou vieilli. C'est parce que le monde et ses valeurs ont changé, et/ou que nous-mêmes avons changé. D'ailleurs, je n'ose plus revoir "The Killer" ; je veux conserver jusqu'au bout cette admiration pour le film de Woo :wink:
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Demi-Lune
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Re: John Woo

Message par Demi-Lune »

Blue a écrit :Techniquement, "The Killer" gardera éternellement ses qualités de montage, de découpage et sa photographie. Je n'ose croire qu'on puisse les remettre en question. De même qu'il conservera son romantisme, son lyrisme et sa puissance dramaturgique.
C'est précisément l'aspect dramatique (les élans naïfs de mélo au forceps) qui n'est plus trop passé la dernière fois. La magie ne s'est pas reproduite, mais ça ne signifie pas pour autant que je jette le film aux orties. Il ne s'agit pas de remettre en question les qualités techniques, qui me paraissent également indéniables au-delà de la simple mise en scène de l'action (même si je crois me souvenir d'une surabondance gavante de ralentis lors de la fusillade finale dans l'église).
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Kevin95
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Re: John Woo

Message par Kevin95 »

A BETTER TOMORROW II (Ying hung boon sik II) de John Woo (1987) découverte

Durant la première demi-heure, on se dit "mauvaise pioche" en assistant à un défilé de coquilles qu'on regrettait déjà dans le premier opus: musique Bontempi, scénario à la vas-y comme je te pousse (un frère jumeau aux U.S.A. ? Vraiment ?), comédiens over the top et humour chelou (respecte le riz bordel !) Puis le film bifurque et l'on comprend que John Woo profite d'une suite non désirée pour faire péter ses envies d'action dans tous les sens. Hommage décomplexé à Sam Peckinpah (une séquence rejoue celle du motel de The Getaway et le final est un clin d'œil évident à The Wild Bunch), A Better Tomorrow II est une pépite jouissive, sans grande complexité narrative mais visuellement festive. Des gun fights affolants, des personnages iconiques et un sens graphique à la Woo dans ses meilleures heures. Ironiquement, cette récréation surclasse le premier opus et constitue (sans doute) l'opus le plus fort de la saga A Better Tomorrow. Culte.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
The Eye Of Doom
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Re: John Woo

Message par The Eye Of Doom »

Hum, j'ai tenu 20min et laisser tomber pour les raisons ci dessus (musique, humour, absurdité du point de départ)
J'ai enchaîné sur le 3 de Tsui Hark, à mon avis bien supérieur au 2.
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Kevin95
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Re: John Woo

Message par Kevin95 »

The Eye Of Doom a écrit :Hum, j'ai tenu 20min et laisser tomber pour les raisons ci dessus (musique, humour, absurdité du point de départ)
J'ai enchaîné sur le 3 de Tsui Hark, à mon avis bien supérieur au 2.
Fallait être patient, tu aurais été récompensé.
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tenia
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Re: John Woo

Message par tenia »

Aaaaah, A Better Tomorrow 2...
Oui effectivement, on peut directement passer à l'orgie finale feu d'artifice visuel sans aucune autre raison d'être sinon de tout faire péter dans la joie et la bonne humeur.
Le reste navigue effectivement entre l'ennui poli, les ficelles grosses comme l'accent de bûcheron enroué du doubleur français de Chow Yun-fat et l'hallu complète devant les conneries en roue libre du film (TU VAS LES BOUFFER, MES ORANGES !!! :lol: ).
Parce qu'on rigole beaucoup du frère jumeau sorti de Montcuq, mais le craquage en règle de Dean Shek est particulièrement savoureux aussi (mais pour d'autres raisons).

La belle déconvenue que j'avais eu quand j'avais redécouvert le film avec le coffret DVD HK Video (alors que le 1er film était, a contrario, une excellente redécouverte).
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Thaddeus
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Re: John Woo

Message par Thaddeus »

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(en italiques : films découverts en salle à leur sortie)


Le syndicat du crime
La culture de John Woo est évidente, sa bonne volonté aussi. Difficile souvent de déterminer ce qui chez lui tient de l’art ou de l’habileté, même si certaines séquences parviennent clairement à combiner les deux. La violence chorégraphiée n’est pas ici une forme d’expression plaquée sur une fiction mais le moyen de décrire un chaos, une humanité gangrenée par la dérive mafieuse. Que la vindicte contre les triades relève d’un idéal chevaleresque un peu naïf ne constitue pas le défaut le plus flagrant d’un film plombé par ses développements psychologiques au pilon, ses ruptures de ton maladroites, sa musique de supermarché. Mais l’aplomb avec lequel le réalisateur ramasse la double mise d’une amitié masculine inébranlable et d’une réconciliation fraternelle douloureuse s’avère assez payant. 4/6

Le syndicat du crime 2
On reprend les mêmes et en recommence, en recourant aux artifices scénaristiques les moins scrupuleux si besoin (Chow Yun Fat était mort à la fin du premier : on lui invente un frère jumeau). Plus que jamais le cinéaste travaille en plein et en délié, en pauses et en accélérations, selon une espèce de forme sinusoïdale où le calme et la tempête sont indissolublement liés. Il élargit également sa narration en développant une structure dramatique qui oscille entre Hong Kong et New York, multiplie intrigues et personnages secondaires, accentue une logique d’inflation qui voit une situation impossible se résoudre en huis-clos hystérique (le carnage final, grand moment de délire) et pousse le dosage du sentimentalisme jusqu’au seuil du mélodrame noir. Le tout est à la fois sincère, généreux et grotesque. 4/6

The killer
Un flic et un tueur à gages aux aspirations symétriques s’affrontent et s’estiment en une rigoureuse construction dramatique, qui sous-tend un questionnement romantique sur l’honneur, la rédemption et la religion. De l’aveu du réalisateur, le film doit beaucoup à Melville et à son Samouraï, auquel il emprunte même le prénom du personnage principal. En opposant l’univers réel d’une société en pleine mutation, rongée par la violence, et le monde imaginaire de la jeune aveugle autour de laquelle évolue les antagonistes, il scelle une étrangeté qui alterne en permanence entre des moments extrêmes, radicaux, chorégraphiés comme des ballets, et des séquences d’un hiératisme presque contemplatif. Virtuose mais d’une naïveté parfois sulpicienne, brillant mais comme souvent trop emphatique. 4/6

Une balle dans la tête
Sur une trame très proche de The Deer Hunter, le cinéaste accouche d’un patchwork invraisemblable qui vivifie les contrées nanardesques d’un bon vieux Chuck Norris des familles : succession d’explosions et de fusillades contre des truands patibulaires et de méchants soldats de l’armée régulière dans la jungle, qu’accompagne un synthé digne des fleurons de la série Z. La stigmatisation de l’horreur de la guerre se fait dans l’esthétisation permanente de l’artillerie, de la balistique, des morts aux ralentis ; l’exaltation de l’amitié n’est que gesticulation hystérique et caractérisation à la serpe (mention à Paul qui passe en mode Orange Sanguine en deux-deux) ; bref j’ai passé l’essentiel du temps à pouffer devant tant de grotesque boursouflé, malgré une dernière demi-heure pas trop mauvaise. 2/6

À toute épreuve
Dernier film réalisé par l’auteur avant sa carrière américaine, ce polar de crime-fiction se déroule quelques semaines avant la rétrocession de Hong-Kong à la Chine. Plus intéressé à mettre en scène des conflits de forces physiques que des débats d’idées, Woo glisse subrepticement son histoire entre les balles, et décline sa figure canonique du brothers in arms en la faisant évoluer (les deux hommes sont pour une fois du même et bon côté de la loi). Si son approche psychologique et émotionnelle a la subtilité d’un hippopotame, difficile de nier que sa caméra-sulfateuse organise le chaos avec une grande dextérité, jusqu’à l’hécatombe conclusive dans un hôpital ravagé par les projectiles, les cadavres et les explosions, véritable nef des fous où sévit une même violence absurde de la morgue à la nursery. 4/6

Volte-face
Soumis aux exigences d’une production hollywoodienne et à la rigueur d’un scénario très brillant, Woo domine sans l’étouffer sa tendance à l’épanchement baroque et à la surcharge stylistique. Le film pourrait de facto se résumer à une énorme convulsion visuelle et sonore, assaillie de pulsions, d’affects plus ou moins fracassés, de chorégraphies de corps en charpie, de vacarmes percussifs digitalisés, et accouchant au forceps d’on ne sait quelle morale. Mais si le brio ornemental du cinéaste flirte toujours avec la boursouflure, il accouche d’authentiques fulgurances. Personnages, enjeux, thèmes, tout y est pris dans une spirale épique, un jeu de masques et de miroirs qui pulvérise la question de l’identité et illustre la porosité du bien et du mal en un réseau infini de permutations, de lignes, de déplacements. 5/6

Mission : impossible 2
Après De Palma, John Woo se voit octroyer par Cruise le loisir de cannibaliser gentiment ce qui lui est donné et d’imposer sa marque identifiable et forte à un produit que tout destinait à être savamment manufacturé. Les ralentis grandiloquents, le montage au rasoir, les explosions en gerbe, les doubles, les battements d’ailes des colombes, l’imagerie codée : rien ne manque à l’appel. Cependant, parce qu’il ne respecte pas la complexité ludique des intrigues que le volet précédent avait tressée jusqu’au vertige, cette suite verse dans l’univers pas déshonorant mais assez futile de James Bond : on fignole le détail, on peaufine le brillant, mais on passe à côté de l’essentiel. Le spectacle n’a presque rien à proposer en dehors de l’ivresse de sa surface ; c’est sa limite et aussi, quelque part, sa qualité. 4/6

Windtalkers
Le cadre de la guerre du Pacifique, une histoire de camaraderie masculine, des moyens importants… A priori rien ne manque à John Woo pour faire fructifier ses préoccupations habituelles, si ce n’est le principal : la rage au ventre. Comme entravé par l’enjeu artistique et commercial du projet, il accouche d’une fresque tiède, conventionnelle, plombée de sentimentalisme, que l’on suit avec un intérêt plus que ténu et qui s’attache à grand-peine à restituer la relation entre deux soldats (un Américain et un Navajo) derrière les lignes ennemies. Conforme à toutes les règles du genre, le film semble ne pas vouloir oublier un seul poncif, fait l’impasse sur la psychologie réaliste pour suivre sans risque les rails d’un scénario pourtant bien boiteux, et brode péniblement sur l’amitié, l’abnégation et le sacrifice. 2/6

Les trois royaumes
Attention les yeux. Maître d’œuvre d’une superproduction panasiatique tournée en mandarin, John Woo se penche sur l’une des périodes fondamentales de l’unification de la Chine et s’attèle à la reconstitution de l’équivalent extrême-oriental du combat des Thermophyles : batailles navales, exploits guerriers, armées de figurants, échelles dantesques et tout le toutim. En termes de sidération visuelle, difficile de nier que le spectacle produit son effet, le cinéaste ne lésinant pas sur les perspectives vertigineuses et l’emphase martiale. Pour le reste, on peut estimer qu’il pèche sur le plan humain autant qu’il croule sous ses ambitions : deux heures et demie d’une fresque aux enjeux obscurs, noyée de personnages et d’intrigues qui se neutralisent, et peinant à captiver par ses contours politiques. 3/6


Mon top :

1. Volte-face (1997)
2. The killer (1989)
3. À toute épreuve (1992)
4. Le syndicat du crime (1986)
5. Le syndicat du crime 2 (1987)

L’une des idoles générationnelles d’à peu près tous les mordus de cinéma asiatique depuis vingt-cinq ans. Personnellement, et hormis pour Volte/Face, je ne peux pas dire que ce réalisateur m’enthousiasme : non seulement je ne suis pas vraiment sensible à ses préoccupations thématiques, mais surtout j’ai bien du mal à adhérer à un style dont le brio frise bien souvent la grandiloquence ampoulée. Pardon pour l'hérésie.
Dernière modification par Thaddeus le 29 janv. 19, 23:04, modifié 2 fois.
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Re: John Woo

Message par AtCloseRange »

Je suis avec toi (pour Volte-face aussi).
Et lors des dernières tentatives de revoir ses films hongkongais, tout m'est tombé des yeux.
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tenia
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Re: John Woo

Message par tenia »

Pas Hard Boiled, quand même ?
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Re: John Woo

Message par bruce randylan »

The robinsons : Lost in space (2003)

John Woo et la télévision, épisode 3.

Après deux tentatives peu glorieuses et ratées de lancer des séries télés (les repentis et Blackjack), le cinéaste n'arrive cette fois même pas à atteindre le pilote finalisé puisque The robinsons ne sera tout bonnement jamais diffusé à la télévision et sera rapidement enterré.

Cette nouvelle transposition des Robinsons de l'espace souffre il est vrai, à l'instar des autres tentatives télévisuelles de John Woo, d'un casting exécrable et d'une écriture médiocre avec une psychologie clichée au possible et des dialogues d'une banalité affligeante. On dirait que le cinéaste est toujours bloqué aux représentations stéréotypées des années 60 (encore qu'on y trouve vite fait des personnages féminins plus sexuée qu'à l'accoutumée chez le cinéaste). Le réalisateur qui apprécie peu la science-fiction a sans doute été attiré par le projet pour ce contexte familial mais y semble totalement étranger.
Le visuel des aliens est également problématique et donne plus envie de ricaner que de frisonner.
Pour autant, ce n'est pas non plus un ratage complet et si on oublie la première partie sur terre, la suite dans l'espace se montre d'un niveau décent. On voit un certain savoir-faire avec une bonne gestion de l'espace qui passe par des plans assez longs comme le plan-séquence qui introduit l'intérieur du vaisseau pour suivre le garçon déambuler dans les couloirs avant d'arriver dans l'appartement de ses parents. Ca marche aussi assez bien dans le suspens avec la fille Robinson isolée durant la longue attaque alien qui fonctionne assez bien même si elle n'a rien d'original... encore que John Woo rajoute un peu de combats et de gunfights :mrgreen:
Et le cliffhanger a plutôt de l'allure, à défaut d'être crédible. Même si on préférerait que l'endive qui joue le fiston disparaisse à jamais (comme son jeune frère). :fiou:

Mais c'est évident que la présentation et l'approche totalement désuètes ne font pas le poids face à d'autres séries SF autrement plus matures et adultes. Ironiquement, le décor du vaisseau sera d'ailleurs revendu à Battlestar Galactica (dont le pilote reprend le concept du plan séquence de John Woo pour introduire l'intérieur du navire spatial).

Même si ce pilote de 40 minutes n'a jamais été diffusé, un bootleg a réussi à fuité. C'est clairement un rough cut / work-in-progress avec de nombreux effets spéciaux non finalisés ou tout simplement absents, une musique provisoire (celle de predator qui donne tout de suite un sacrée tension) et un montage vraiment taillé à la serpe, surtout au début lors du dîner qui ouvre le téléfilm de manière cheap et maladroite. Ca n'aide pas à faire passer la niaiserie de la présentation du frère et de la soeur, Woo étant toujours aussi peu à l'aise dans le "romantisme" (mais ça lui permet de caler ses incontournable oiseaux en papiers).
Pour les courageux/curieux/complétistes, ça se trouve facilement sur youtube.
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
bruce randylan
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Re: John Woo

Message par bruce randylan »

The crossing - part I (2014)

Durant les années 40 à Shanghai, plusieurs personnages se croisent. Il y a l'infirmière Yu Zhen qui recherche un amour de jeunesse parmi les soldats blessés et qui a une fait une fausse photo de mariage avec Yifang, lui-aussi soldat, pour que tous deux aient droit à de meilleures rations ou de meilleures conditions de logement. Il y un général de l'armée nationale qui tombe sous le charme d'une jeune aristocrate qui n'apprécie pas le monde guindé de ses parents. Et il y un médecin taïwanais enrôlé de force dans l'armée japonaise et qui sort de prison avec l'espoir de retourner dans sa ville natale pour retrouver sa fiancée japonaise dont il est sans nouvelle.

Avec sa piètre réputation, son cuisant échec au box-office et sa seconde partie rafistolée dans l'urgence pour essayer de sauver les meubles (et son budget), la dernière saga de John Woo n'a pas bousculé les distributeurs étrangers ni même crée l'enthousiasme chez les nombreux fans du cinéaste peu motivé par ce changement de registre pour le cinéaste qui s'essaye à la fresque mélodramatique et historique, retraçant l'histoire vraie d'un naufrage ayant couté la vie d'un millier de personne. Bref, rapidement catégorisé en sous "Titanic" The crossing semble embarrasser tout le monde qui préfère détourner le regard comme si le film n'existait pas.
Moi le premier, j'hésitais depuis quelques temps à acheter les blu-ray taiwanais, les seuls disponibles facilement en import, et j'ai finalement sauté le pas lors de mon voyage en Chine en trouvant des éditions pas trop cher (pirates en fait). Et bien, je ne regrette pas ! Ce n'est clairement pas la plus grande réussite du cinéaste et le diptyque est bancal a plus d'un titre mais il ne mérite absolument pas ce purgatoire dans lequel il est tombé.

Premier constat vraiment positif : c'est un pur film de John Woo et on sent vraiment son style. Je dirais même plus : sa réalisation m'avait manqué. Ses fondus, ses travellings, ses mouvements de grue, sa fluidité... En un mot sa musicalité m'avait manqué. Et pour l'occasion, et vu le sujet, il n'est plus opératique mais symphonique pour un film choral où Woo jongle entre une demi-douzaine de caractère, l'équivalent de 3 couples. Son scénario comme sa mise en scène sont plus que jamais une véritable partition et sa caméra est comme une baguette de chef d’œuvre qui donne le tempo glissant littéralement d'un visage à l'autre, oscillant d'un personnage à l'autre. Les plans sont ainsi assez longs pour une chorégraphie du mouvement virevoltante et élégante, n'hésitant pas à jouer notamment d'un gigantesque envol pour lier en un seul plan les deux personnages féminins, chacune dans un secteur très différent de Shanghai. C'est sans doute son film qui assume le plus son classicisme hollywoodien suranné, façon David Lean d'autant que le budget et la reconstitution sont impressionnant et parfaitement maitrisés (décor, costumes, figuration en pagaille). Dans ses meilleurs moments, en tout cas pour qui aime ce style, c'est remarquable, tant dans la légèreté (comme toute la séquence du bal) que dans la gravité (la précarité autour de Zhang Ziyi). L'autre excellente surprise, et j'en suis le premier surpris, c'est que John Woo évite généralement la mièvrerie dans laquelle il est souvent tombé. J'avais des craintes à le voir affronter le mélodrame et les histoires d'amour mais pour le coup, il a réussi à en contourner les pièges. Quelques passages romantiques possèdent bien-sûr une réelle candeur mais qui est souvent contrebalancé par une tonalité plus amer. Il est ainsi vraiment étonnant de le voir filmer Zhang Ziyi se livrer à la prostitution sans le moindre pathos, avec d'habiles ellipses.
Ca conduit au troisième point positif et sans doute le plus audacieux vu la production cinématographique chinoise actuelle : le choix et le traitement des personnages. Pour voir qu'il s'agit en grande partie d'un film de guerre mettant en scène l'affrontement entre armée nationale et les révolutionnaires communistes, The crossing évite toute propagande ou lecture politique : aucun patriote mais prostituée, taïwanais enrôlé dans l'armée japonaise, bourgeoisie, officier militaire (et non communiste). C'est assez incroyable que Woo ai réussi à imposer et conserver ces différents personnages qui vont à l'encontre de tous les diktats du pouvoir chinois et c'est d'autant plus admirable que jamais ces personnages ne sont jugés ou condamnés pour ce qu'ils sont ou font. John Woo reste concentré sur eux, leurs sentiments et évite les poncifs attendus même si Woo n'a de toute façon jamais été un cinéaste politisé.

Alors qu'est-ce qui coince du coup dans The crossing et qui explique son échec retentissant ? Plusieurs points malheureusement. Il y a bien-sûr ce style, loin du clinquant pétaradant des autres blockbusters chinois qui font passer le classicisme Wooien pour de l'anachronisme désuet. Autrement plus gênant, il y aussi de gros problèmes de rythme et de structure. On devine que Woo a un peu galéré au montage pour retrouver la fluidité qu'il avait sur le plateau avec ses comédiens et sa caméra. la gestion de la temporalité est assez maladroite et on a l'impression que quelques jours correspondent pour d'autres personnages à plusieurs mois. Il y a surtout d'énormes tunnels et longueurs, principalement dans la seconde moitié qui est recentré sur le front de guerre. C'est d'ailleurs assez incroyable de se dire que le cinéaste semble plus à l'aise à décrire le quotidien des personnages féminins que celui des soldats. Il faut dire que les enjeux de ceux-ci sont assez plats, se résumant à des problèmes assez conventionnels et stéréotypés du film de guerre même si le personnage de Yifang est assez touchant. C'est le moment où l'approche dé-politisé de John Woo se retourne contre lui en n'osant pas aborder de front le conflit idéologique et morale entre une population, ancien amis et voisins, contraint de se faire une guerre fratricide, surtout à une époque où les jeux semblent faits.
Par contre la maestria du cinéaste pour les deux scène de batailles n'est plus à démontrer et certains plans sont assez dingues. Mais ça ne fait que deux scènes de bataille pour 2h10 de film qui manque de climax pour relancer les rouages de sa fresque. Ce premier épisode a en effet des airs de longue exposition pour annoncer le drame du naufrage. Car oui, durant ce premier film, ce bateau n'intervient que comme un horizon lointain mais jamais une finalité claire. On peut comprendre que le public se soit senti frustré, pour ne pas dire floué.
La réalisation a beau être régulièrement brillante et d'une grande beauté plastique (ahhhh, la découverte de la maison japonaise à Taïwan avec la lettre cachée dans un tableau), on se demande régulièrement quand est-ce que l'histoire va enfin commencer. Et c'est quelqu'un qui adore le style John Woo qui le dit.
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Re: John Woo

Message par Max Schreck »

Merci pour cet avis, pas trop décourageant (ça n'a pas l'air plus indigne que d'autres).

Encore un réal dont l'heure de gloire semble inexplicablement derrière lui, passé de mode et désormais jugé insuffisamment bankable aux yeux des distributeurs. Pourtant je ne suis pas persuadé que la sortie en salle de ses films en France au milieu des 90's déplaçait tant de monde que ça...
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