Commentaires à propos de votre film du mois

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Rockatansky
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Rockatansky »

Petit mois niveau quantité, avec un retour vers les séries télé.
Un très grand film qui sera film du mois avec Spotlight, et quelques trucs sympa comme Time Lapse, Margin Call ou Repo Men, rien de bien follichon pour le reste. Mention pour la saison 2 de Leftovers qui renouvelle le concept après une saison 1 déjà réussie.

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Mars 2016

Films découverts

Spotlight - Tom McCarthy - 9/10

The Leftovers - Saison 2 - 8/10
Time Lapse - Bradley King - 7,5/10
Margin Call - JC Chandor - 7/10
Repo Men - Miguel Sapochnik - 6,5/10
Tunnel - Saison 2 - 6,5/10
20 ans d'écart - David Moreau - 6/10
Zootopie - Byron Howard & Rich Moore - 6/10
Overheard 3 - Alan Mak & Felix Chong - 6/10
Cop Car - Jon Watts - 5,5/10
In a world - Lake Bell - 5,5/10
Brooklyn - John Crownley - 5/10
Le voyage d'Arlo - Peter Sohn - 5/10
Truth - James Vanderbilt - 4,5/10
Regression - Alejandro Amenabar - 3,5/10
La Belle et la Bête - Christophe Gans - 3/10
Point Break - Ericson Core - 3/10
Woodlawn - Erwin Brothers - 3/10
Dangerous People - Henrik Ruben Gentz - 3/10
Connasse, princesse des coeurs - Eloïse Lang & Noémie Saglio - 3/10
Shaolin Basket - Chu Yen-Ping - 3/10
Voltage (Ra-One) - Anubhav Sinha - 2,5/10

Films revus

X-Files - Saison 1 - 7,5/10
Espace Détente - Bruno Solo & Yvan Le Bolloch - 6/10
Clear Eyes, Full Hearts Can't Lose !
« S’il est vrai que l’art commercial risque toujours de finir prostituée, il n’est pas moins vrai que l’art non commercial risque toujours de finir vieille fille ».
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Major Tom
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Message par Major Tom »

Très bon mois de mars pour moi itou. Carburant à une moyenne d'un film/jour, alors que c'était un mois chargé de boulot, c'est plutôt une bonne moyenne, avec à la clé un Top Five qui dégomme :
  • Les ailes (Wellman) ♥♥♥♥
    Chien enragé (Kurosawa) ♥♥♥♥
    Bad Lieutenant (Ferrara) ★★★
    Les mois d'avril sont meurtriers (Heynemann) ★★★
    Turkish Délices (Verhoeven) ★★★
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Le récap' intégral :
  • Films vus / Films revus :
Turkish Délices (Verhoeven) ★★★
Maps to the Stars (Cronenberg) ★
Comment tuer son boss ? (Gordon) ○
Quelque part dans le temps (Szwarc) ★★★
(début du cycle Robert Lamoureux)
Mais où est donc passée la 7ème compagnie
On a retrouvé la 7ème compagnie
La 7ème compagnie au clair de lune
Impossible pas français
(arrêt du cycle Robert Lamoureux)
Gone Girl (Fincher) ★★★
Chien enragé (Kurosawa) ♥♥♥♥
The Walk : Rêver plus haut (Zemeckis) ★★
Des hommes d'honneur (Reiner) ★★
Les mois d'avril sont meurtriers (Heynemann) ★★★
Les Infiltrés (Scorsese) ★★
Black Rain (Scott) ★
French Lover (Marquand) ★ (voire mais la musique de John Barry + Karen Allen à poil me font chavirer)
Masquerade (Swaim) ★ (voire mais la musique de John Barry + Kim Cattrall à poil me font chavirer)
Interstellar (Nolan) ★★
Bad Lieutenant (Ferrara) ★★★
3:10 pour Yuma (Mangold) ★★
The Hot Spot (Hopper) ♥♥♥♥
THX 1138 (l'original, Lucas) ★★
Alien 3 (Fincher) ★
Les ailes (Wellman) ♥♥♥♥
Élémentaire mon cher... Lock Holmes (Eberhardt) ★★★
Cloverfield (Reeves) ★★
Apollo 13 (Howard) ★★
À toute épreuve (Woo) ★
Star Wars, épisode VII : Le Réveil de la Force (Abrams) ○
La Crème de la Crème (Chapiron) ○
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AtCloseRange
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par AtCloseRange »

Petit mois en nombre mais quelques belles découvertes

1 Tokyo Story (Ozu)

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2 The Visit (Shyamalan)

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3 He Never Died (Krawczyk)

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Thaddeus
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Message par Thaddeus »

AtCloseRange a écrit :Petit mois en nombre mais quelques belles découvertes

1 Tokyo Story (Ozu)

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Tu ne l'avais jamais vu ? :shock:
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Thaddeus
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Thaddeus »

Film du mois de mars 2016
1. The Assassin (Hou Hsiao-hsien, 2015)


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2. Marie-octobre (Julien Duvivier, 1959)


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3. Taking Off (Miloš Forman, 1971)


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Mes découvertes en détail :
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Elle (Blake Edwards, 1979)
Il a une maîtresse ravissante, un métier lucratif, une Rolls décapotable, une villa luxueuse sur les hauteurs de Beverly Hills, mais George est soudain saisi par le démon de midi – cet enfantillage qui consiste à refuser de vieillir. Oscillant avec aisance entre loufoquerie débridée de cartooniste et mélancolie secrète d’un temps révolu, Edwards cultive l’érotomanie hypocrite du spectateur pour lui préférer en dernier lieu la fidélité. Tel un héritier de Leo McCarey, il reproduit les mécanismes de la comédie sophistiquée, analyse la confrontation entre deux styles de vie, deux modes de pensée, et s’amuse du touchant ridicule d’un héros qui, en séduisant sans coup férir la bombe de ses mauvaises pensées, se défait de ses illusions pour retourner, ailleurs, à son bonheur. Une belle comédie de moraliste accompli. 4/6

The adjuster (Atom Egoyan, 1991)
Brûlantes solitudes. Tel pourrait être le sous-titre de cette œuvre étrange, insolite, flirtant avec le glauque sans jamais y sombrer, et dont la préoccupation centrale touche à l’idée de représentation. Non seulement les personnages s’y noient dans un magma d’impuissance en substituant à la réalité de l’acte son assouvissement dans l’imaginaire, mais le réalisateur organise une structure en puzzle qui nous contraint à mettre en relation les diverses parcelles de réel éparpillées dans le film. Egoyan comprend ce qu’il faut mettre dans une image pour la charger d’électricité et passer à la suivante, parvient à suggérer l’envahissement de la vie par le fantasme, le règne du voyeurisme, de la frustration, de la nostalgie, de la perversion, en témoignant d’une maîtrise sophistiquée qui garantit une réelle fascination. 4/6

The addiction (Abel Ferrara, 1995)
Propos philosophiques incohérents, assomption du Mal, apothéose christique, le film va assez loin dans le n’importe quoi et ce n’est pas vraiment une qualité. Le vampirisme file ici la métaphore appuyée de la douleur toxicomaniaque, de la dimension salvatrice de la culpabilité, de la souffrance comme rédemption – ces grands motifs ferrariens qui clignotent dans tous les coins. Fort heureusement, le cinéaste ne cherche pas à donner une forme forte à ce pataquès farci de citations de Nietzsche, Sartre et Heidegger, préférant la dissoudre dans la logorrhée et le brouhaha. En résulte un conte symbolique assez schizophrène, braqué sur certains points névralgiques et souffrants du corps, baudelairien tendance Litanies de Satan, et dont la large gamme de noirs et blancs compensent la faiblesse du discours. 4/6

Le maître du logis (Carl T. Dreyer, 1925)
C’est une histoire toute simple à valeur de parabole, un huis-clos fondé sur l’épuration progressive, une fable exaltant le courage de la femme et les vertus de l’amour conjugal, où Dreyer impose son sens rigoureux du décor, point central autour duquel se dessine la maturation d’un style. De l’horloge au poêle en passant par les tableaux anodins, le fil à linge ou les portes entrouvertes, le deux-pièces-cuisine devient un emblème : tout y mis en place, méticuleusement reconstitué jusque dans le désordre, pour cristalliser les pulsions des êtres. Le tête à tête, le croisement des regards, le despotisme domestique maté puis repentant sont captés par une caméra qui aiguise ou adoucit les angles, et qui trouve avec autant de justesse que de simplicité l’adéquation entre le cadre et le sentiment qui s’y exprime. 4/6

Marie-octobre (Julien Duvivier, 1959)
À la veille de l’éclosion de la Nouvelle Vague, villipendeuse acharnée d’une "Qualité française" honnie, Duvivier réunit les plus grands acteurs hexagonaux de son époque et vient offrir comme le baroud d’honneur d’un cinéma d’artisanat millimétré, fondé sur l’attention constante au fait signifiant et le souci d’une tension dramatique jamais relâchée. Unité de lieu (le salon d’un manoir), de temps (une soirée de retrouvailles qui tourne à l’enquête et au procès), d’action (un entortillement de suspicions, de doutes et de voltes-faces sur le mode accusation-défense) : le débat moral, passionnant comme un huis-clos policier et interprété avec une verve délectable, offre à ce Neuf hommes et une femme en colère tout ce qu’il faut d’ambigüité, de jeux de conversion, de ripostes et de rebondissements. 5/6

The assassin (Hou Hsiao-hsien, 2015)
Avec une liberté conquérante à l’égard de l’autorité et de la tradition, une irrévérence qui s’oppose à tout ce qui enrégimente, commande et oppresse, Hou dispose en calligraphe d’une intrigue shakespearienne pour atteindre à une sorte de présent immémorial. En résulte des couleurs poussées à la quintessence de leur pigmentation, des images inouïes de brume soyeuse et de feu acrobate, de coursives parfumées et de vapeurs d’encens, de chevelure d’encre dissimulée dans les replis d’une tenture rougeoyante. Et si autant d’alchimie chamanique, de minutie et de précision laissent dans un tel état d’envoûtement, c’est parce que leur économie de la retenue et de l’incomplétude laissent percevoir les tourments intimes de personnages déchirés par des conflits et des tourments qu’ils ne peuvent exprimer. Une splendeur. 6/6
Top 10 Année 2015

Des nouvelles de la planète Mars (Dominik Moll, 2016)
Rien ne va plus pour Philippe Mars, quinqua informaticien divorcé, dépassé par ses enfants, parasité par un collègue de travail dépressif, lorsqu’il n’hallucine pas carrément le retour de ses défunts parents. Moll cherche manifestement à s’approprier le schéma des comédies américaines de crise telles qu’elles fleurirent à la fin des années 90, d’American Beauty à Fight Club. Pour dynamiser son discours il s’octroie une fantaisie plus ou moins heureuse à base de personnages fantasques, de situations puisées dans un quotidien morose gagné par l’extravagance. Mais il privilégie la tendresse du sirop à l’acidité du vinaigre, comme en témoignent la réconciliation finale et le recours au deus ex machina un peu facile des anges gardiens. Sans être désagréable, tout cela reste assez anecdotique. 3/6

Betty (Claude Chabrol, 1992)
Betty a soif. Betty boit. À bout, Betty n’est plus qu’une petite bête apeurée qui se réfugie dans l’inconscience d’un coma éthylique. Recueillie, protégée, maternée par une riche veuve qui a établi ses pénates dans un palace versaillais, elle se raconte, et Chabrol nous entraine dans un jeu savant de flash-backs qui éclaire son passé bourgeois, son existence de jeune mante religieuse dont on perce peu à peu les secrets, les blessures, la force indomptée sous les gifles d’un destin fourvoyé. Pas de transcendance malgré la lente remontée vers la vie, tout au plus la mise au point d’une ambigüité constitutive qui consiste à multiplier les questions plutôt que d’apporter de réconfortantes réponses. Sans éclat ni génie, érigé par une sorte de solide efficacité littéraire, le film doit beaucoup à Marie Trintignant. 4/6

Midnight special (Jeff Nichols, 2016)
En abordant le fantastique et la SF, le réalisateur réussit à en préserver l’une des vertus les plus précieuses : créer du sens sans écorner le mystère. Son inclination pour les zones d’ombre, son aisance à filmer grands espaces, motels et stations services, son approche résolument low-fi d’un genre dont il capte la vibration intime plutôt que la dimension spectaculaire, son sens de l’équilibre entre densité narrative et portée métaphorique contribuent à donner poids et substance à cette cavale méditative. Et si l’émotion ne jaillit pas autant que dans les films précédents, la sincérité avec laquelle Nichols exprime ses angoisses de père, exalte le lien familial, filial, amical, sa confiance obstinée à leur égard, son optimisme lumineux et sa douceur à rebours des modes suscitent une adhésion à peu près complète. 5/6

Spetters (Paul Verhoeven, 1980)
Cette chronique rugueuse s’ouvre un registre bêtifiant (courses de moto et blagues potaches sur fond de disco) pour mieux déranger par son âpreté dès qu’apparaît la femme, garce fatale et cynique. Car si l’opportuniste n’est pas avare de ses charmes, elle réclame en retour une promotion sociale dont la quête oblige ses trois prétendants à oublier leur belle amitié et leurs doux enfantillages pour se frotter abruptement aux dures réalités de l’existence. Avec noirceur et crudité, Verhoeven dresse ainsi le portrait de trois adolescents déchus en n’épargnant rien de leurs sordides désillusions, illustre la désespérance et le quotidien sinistre d’une banlieue d’Amsterdam à la manière d’un Pialat batave, et souligne le destin étriqué de ces godelureaux censés perdre peu à peu les rêves fous de leur jeunesse. 4/6

Le banni (Howard Huges & Howard Hawks, 1943)
Officiellement Hawks n’a pas réalisé ce film, pris en main par l’autre Howard H., obnubilé selon la légende par le décolleté très échancré de la pulpeuse Jane Russell, ce qui enflamma les bien-pensants. Aujourd’hui c’est plutôt le sous-texte homosexuel qui frappe : les amitiés de Pat Garrett, Doc Holliday et Billy le Kid y sont racontées avec force chamailleries de pisseuses, jalousies boudeuses, stratégies de reconquête et retournements affectifs. Cantonnés à la rivalité virile, ils s’y disputent la propriété d’un cheval davantage que le cœur de la femme, et piétinent allègrement l’image lisse des preux chevaliers du western en pratiquant manœuvres et coups fourrés qui apportent un peu de piment à une œuvre somme toute assez molle, et trop hétérogène dans les registres auxquels elle recourt. 3/6

Triple 9 (John Hillcoat, 2016)
Si l’on accepte de remiser au placard ses attentes vis-à-vis d’un genre routinier qui offre rarement l’occasion de surprendre, ce polar urbain bâti sur un canevas de diversion rappelant Une Journée en Enfer a de quoi maintenir une vraie tension. Il n’est évidemment pas avare en effets de manche, gonflant à outrance ses prestiges factices (forme plastronnante, hyperréalisme de pacotille, cabotinage éhonté) pour mieux imposer son discours prévisible sur l’hyper-criminalité, la corruption et la déliquescence avancées d’un pays au bord du gouffre. Ces réserves faites, la vigueur du récit, son ossature solide, la faculté d’Hillcoat à le laisser respirer pour jouer sur les couleurs, les climats, le tissu multiethnique de la jungle d’Atlanta, viennent largement à bout de l’irritation que peut générer l’entreprise. 4/6

Les baisers de secours (Philippe Garrel, 1989)
Un couple. Il est cinéaste, elle joue au théâtre. Il veut faire un film sur leur union, intense et délicate, mais lui préfère une autre actrice alors qu’il jouera son propre rôle. Rupture, errances, déambulations psycho-spatiales, jusqu’au point de non-retour où la relation se reconstitue grâce à l’enfant. Garrel filme d’amour, d’eau fraîche et en famille (sa compagne Brigitte Sy, son père Maurice, son fils Louis), à la manière d’un journal intime qui substituerait à l’autisme underground des opus précédents un mélange de distance analytique et de projection personnelle. Posant la question de la conciliation entre vérité et art, vie et création, il raconte l’histoire d’un enlisement dans le désir de filmer la survie par les sentiments et livre ce balbutiement d’un cœur meurtri aux happy few. Moins indigeste que souvent. 3/6

En présence d’un clown (Ingmar Bergman, 1997)
L’oncle Carl (celui de Fanny et Alexandre) et la Mort. Dans la lumière crue et décharnée de son laboratoire télévisuel, Bergman pousse l’allégorie macabre jusqu’aux confins du grotesque. Son clown grinçant et pailleté n’amuse pas innocemment la galerie, mais ce conte de la folie extraordinaire laisse pourtant éclater un drôle d’humour farceur ; beaucoup de tendresse et de bienveillance aussi envers ces doux dingues qui conçoivent le premier film parlant et, un soir de neige et de feu, transforment une composition au pied levé en la plus enthousiasmante des représentations. Avec quelques décors nus et trois invraisemblables situations, le cinéaste exalte ainsi la magie consolatrice de la scène, du spectacle et de ses multiples avatars, et dresse l’art comme rempart contre la noirceur de l’existence. 4/6

Juge et hors-la-loi (John Huston, 1972)
Hauts faits et titres de gloire de Roy Bean, voleur de chevaux et détrousseur de banques, qui traversa la rivière Pecos vers 1890 pour se déclarer juge et imposer sa vision très partiale de la loi, de la justice et de la civilisation. Une inconscience satisfaite de soi serait incapable d’apprécier le film selon ses propres termes de référence, car il se propose de raconter l’Histoire sur le mode de la satire (non de la parodie), en l’élevant à la dimension d’une parabole : de son édification ambigüe à sa destruction finale dans un feu purificateur, la bourgade de Langtry résume l’évolution des temps individualistes de la conquête à l’ère contemporaine de l’industrialisation et de l’affairisme. Mais le registre de farce truculente fonctionne hélas sur courant alternatif, ce qui alourdit et amollit considérablement le propos. 3/6

Les hommes de la mer (John Ford, 1940)
Ne pas s’attendre à une exaltation romantique de l’aventure maritime ou à un récit chargé de ferveur métaphysique. Loin de Conrad ou de Melville, le réalisateur adapte quatre pièces d’Eugene O’Neill, écrivain sans doute bien plus proche de sa sensibilité, et raconte dans un style anti-épique le voyage dans lequel, au début de la Seconde Guerre mondiale, un groupe de matelots est entraîné par le destin. Description réaliste des petits faits du bord, amitié forgée par des années de camaraderie, impératifs d’une existence aventureuse qui laisse miroiter l’ancrage à terre comme la promesse d’un horizon inaccessible… La truculence du ton est constamment contrecarrée par la mélancolie, et l’atmosphère de la chronique, que sculptent les images travaillées de Gregg Toland, aussi généreuse que fataliste. 4/6

Un merveilleux dimanche (Akira Kurosawa, 1947)
Le conflit vient de s’achever, et aux deux extrémités du monde les cinématographies nationales se rejoignent. Tourné comme un documentaire, en caméra cachée, dans les rues de Tokyo miné par la défaite japonaise, cette chronique d’un quotidien misérable procède d’une démarche similaire au néoréalisme italien de l’immédiat après-guerre. La pudeur de Kurosawa infléchit le récit vers une émotion allusive et fait participer aux joies, aux peines et au désarroi d’un jeune couple d’amoureux désargentés, qui affrontent les vicissitudes de l’existence en se réfugiant dans le rêve, seul vecteur possible de miracle. Dans une disposition d’esprit propice, ils percevront ainsi les accents d’une musique irréelle au sein d’une salle de concert vide : point d’orgue de ce fort joli film, plein de charme et de tendresse. 4/6

Taking off (Miloš Forman, 1971)
Ce qui aurait pu n’être qu’un témoignage supplémentaire sur le conflit des générations devient le portrait en parallèle de deux univers retranchés dans leurs phobies respectives : le monde déboussolé des adultes, d’une moyenne bourgeoisie new-yorkaise en pleine décomposition, et celui d’une chapelle adolescente pseudo-hippie qui lui est définitivement étrangère. Réfractaire à toute pétrification du réel dans l’idéologie ou la moralisation, le cinéaste multiplie les moments désopilants (l’anthologique cours de fumette donné par Schiavelli à une assemblée BCBG), sait se faire cruel sans être méprisant, magnanime sans être tendre, et témoigne d’un esprit corrosif et d’une lucidité critique qui font sans doute de ce film l’un des instantanés les plus justes de la société occidentale de l’époque. 5/6



Et aussi :

Belgica (Felix Van Groeningen, 2016) - 4/6
Room (Lenny Abrahamson, 2015) - 4/6
Elephant (Alan Clarke, 1989) - 3/6
Jodorowsky's Dune (Frank Pavich, 2013) - 4/6
Les ogres (Léa Fehner, 2015) - 5/6
Keeper (Guillaume Senez, 2015) - 4/6
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Films des mois précédents :
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Février 2016Le démon des femmes (Robert Aldrich, 1968)
Janvier 2016La Commune (Paris 1871) (Peter Watkins, 2000)
Décembre 2015Mia madre (Nanni Moretti, 2015)
Novembre 2015Avril ou le monde truqué (Franck Ekinci & Christian Desmares, 2015)
Octobre 2015Voyage à deux (Stanley Donen, 1967)
Septembre 2015Une histoire simple (Claude Sautet, 1978)
Août 2015La Marseillaise (Jean Renoir, 1938)
Juillet 2015Lumière silencieuse (Carlos Reygadas, 2007)
Juin 2015Vice-versa (Pete Docter & Ronaldo Del Carmen, 2015) Top 100
Mai 2015Deep end (Jerzy Skolimowski, 1970)
Avril 2015Blue collar (Paul Schrader, 1978)
Mars 2015Pandora (Albert Lewin, 1951)
Février 2015La femme modèle (Vincente Minnelli, 1957)
Janvier 2015Aventures en Birmanie (Raoul Walsh, 1945)
Décembre 2014Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (Elio Petri, 1970)
Novembre 2014Lifeboat (Alfred Hitchcock, 1944)
Octobre 2014Zardoz (Sean Connery, 1974)
Septembre 2014Un, deux, trois (Billy Wilder, 1961)
Août 2014Le prix d’un homme (Lindsay Anderson, 1963)
Juillet 2014Le soleil brille pour tout le monde (John Ford, 1953)
Juin 2014Bird people (Pascale Ferran, 2014)
Mai 2014Léon Morin, prêtre (Jean-Pierre Melville, 1961) Top 100
Avril 2014L’homme d’Aran (Robert Flaherty, 1934)
Mars 2014Terre en transe (Glauber Rocha, 1967)
Février 2014Minnie et Moskowitz (John Cassavetes, 1971)
Janvier 201412 years a slave (Steve McQueen, 2013)
Décembre 2013La jalousie (Philippe Garrel, 2013)
Novembre 2013Elle et lui (Leo McCarey, 1957)
Octobre 2013L’arbre aux sabots (Ermanno Olmi, 1978)
Septembre 2013Blue Jasmine (Woody Allen, 2013)
Août 2013La randonnée (Nicolas Roeg, 1971)
Juillet 2013Le monde d’Apu (Satyajit Ray, 1959)
Juin 2013Choses secrètes (Jean-Claude Brisseau, 2002)
Mai 2013Mud (Jeff Nichols, 2012)
Avril 2013Les espions (Fritz Lang, 1928)
Mars 2013Chronique d’un été (Jean Rouch & Edgar Morin, 1961)
Février 2013 – Le salon de musique (Satyajit Ray, 1958)
Janvier 2013L’heure suprême (Frank Borzage, 1927) Top 100
Décembre 2012 – Tabou (Miguel Gomes, 2012)
Novembre 2012 – Mark Dixon, détective (Otto Preminger, 1950)
Octobre 2012 – Point limite (Sidney Lumet, 1964)
Septembre 2012 – Scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman, 1973)
Août 2012 – Barberousse (Akira Kurosawa, 1965) Top 100
Juillet 2012 – Que le spectacle commence ! (Bob Fosse, 1979)
Juin 2012 – Pique-nique à Hanging Rock (Peter Weir, 1975)
Mai 2012 – Moonrise kingdom (Wes Anderson, 2012)
Avril 2012 – Seuls les anges ont des ailes (Howard Hawks, 1939) Top 100
Mars 2012 – L'intendant Sansho (Kenji Mizoguchi, 1954)
Février 2012 – L'ombre d'un doute (Alfred Hitchcock, 1943)
Janvier 2012 – Brève rencontre (David Lean, 1945)
Décembre 2011 – Je t'aime, je t'aime (Alain Resnais, 1968)
Novembre 2011 – L'homme à la caméra (Dziga Vertov, 1929) Top 100 & L'incompris (Luigi Comencini, 1967) Top 100
Octobre 2011 – Georgia (Arthur Penn, 1981)
Septembre 2011 – Voyage à Tokyo (Yasujiro Ozu, 1953)
Août 2011 – Super 8 (J.J. Abrams, 2011)
Juillet 2011 – L'ami de mon amie (Éric Rohmer, 1987)
Dernière modification par Thaddeus le 9 mars 17, 17:10, modifié 1 fois.
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Père Jules
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Père Jules »

Thaddeus a écrit :Tu ne l'avais jamais vu ? :shock:
Moi ce qui me surprend le plus c'est que le Major découvre Bad Lieutenant.
Thaddeus a écrit :2. Marie-octobre (Julien Duvivier, 1959)

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Un de mes Duvivier post années 30 favoris ! :D
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Major Tom
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Major Tom »

Père Jules a écrit :
Thaddeus a écrit :Tu ne l'avais jamais vu ? :shock:
Moi ce qui me surprend le plus c'est que le Major découvre Bad Lieutenant.
Je ne suis pas franchement fan de Ferrara... Comme toi d'ailleurs. Du coup j'ai toujours traîné des pieds pour le voir.
Mais celui-là, et King of New-York sont des monuments.
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Kevin95
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Kevin95 »

Major Tom a écrit :
Père Jules a écrit : Moi ce qui me surprend le plus c'est que le Major découvre Bad Lieutenant.
Je ne suis pas franchement fan de Ferrara... Comme toi d'ailleurs. Du coup j'ai toujours traîné des pieds pour le voir.
Mais celui-là, et King of New-York sont des monuments.
Ses meilleurs clairement. Avec Ms .45 un poil en dessous.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Thaddeus
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Thaddeus »

Père Jules a écrit :Moi ce qui me surprend le plus c'est que le Major découvre Bad Lieutenant
Bien sûr, on est très régulièrement surpris par ce genre de trucs.

Mais tout de même, sachant que :
1. Voyage à Tokyo est quand même l'un des 5-10 plus grands classiques de l'écran, au niveau de L'Aurore ou des Sept Samouraïs.
2. AtCloseRange était (me semble-t-il) un gros fan d'Ozu

... je suis particulièrement étonné.
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Major Tom
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Major Tom »

Jeremy Fox a écrit :Films découverts, redécouverts ou revus (Hors compétition) par ordre décroissant d'appréciation

* Goldfinger : Guy Hamilton 1964 : 5.5/10

Séries en cours

* Ma Sorcière bien aimée saison 2 (25 épisodes)
* Star Trek saison 1 (23 épisodes)
* A la maison blanche saison 6 (2 épisodes)
* Game of Thrones / saison 5 (5 épisodes)
On a compris que tu as plusieurs télés, mais tu arrives à comprendre quelque chose quand tu regardes tout ça dès le premier jour (il n'est même pas encore midi) ? :o

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Dernière modification par Major Tom le 1 avr. 16, 11:15, modifié 1 fois.
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Père Jules
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Père Jules »

Kevin95 a écrit :
Major Tom a écrit : Je ne suis pas franchement fan de Ferrara... Comme toi d'ailleurs. Du coup j'ai toujours traîné des pieds pour le voir.
Mais celui-là, et King of New-York sont des monuments.
Ses meilleurs clairement. Avec Ms .45 un poil en dessous.
J'avais détesté celui-là :oops:
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AtCloseRange
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par AtCloseRange »

Thaddeus a écrit :
AtCloseRange a écrit :Petit mois en nombre mais quelques belles découvertes

1 Tokyo Story (Ozu)

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Tu ne l'avais jamais vu ? :shock:
Je suis fan maintenant mais j'ai découvert mon premier Ozu il y a 4 ans et j'en regarde environ 1 par an donc le rattrapage va prendre du temps (c'est mon 5ème je crois) :mrgreen:
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Kevin95
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Kevin95 »

Père Jules a écrit :
Kevin95 a écrit :Ses meilleurs clairement. Avec Ms .45 un poil en dessous.
J'avais détesté celui-là :oops:
Il est très grindhouse, je comprends qu'on y adhère pas d'où le "un poil en dessous". :wink:
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Major Tom
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Major Tom »

Père Jules a écrit :
Kevin95 a écrit :
Ses meilleurs clairement. Avec Ms .45 un poil en dessous.
J'avais détesté celui-là :oops:
Pas vu mais pas tenté.

Ah j'oubliais New-York, deux heures du matin (Fear City) avec Tom Berenger, Billy Dee Williams, Jack Scalia et une Melanie Griffith bien plus sexy qu'en punkette choucroutée dans Body Double, tous très bons.
C'est violent, c'est cochon, ça se termine comme un duel Rocky vs karaté kid, c'est un peu un giallo façon Ferrara... et c'est vachement bien ! Pas un monument au niveau de ceux que j'ai cité, mais curieusement c'est celui que j'ai le plus envie de revoir. Parce qu'il est plus ludique, certainement...
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Rick Blaine
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Re: Commentaires à propos de votre film du mois

Message par Rick Blaine »

Tu n'as pas vu Nos Funérailles ?
Comme King of New York et Bad Lieutnant, c'est un monument.
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