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Une palme d'or pour La Chambre du fils et un prix de la mise en scène pour Journal intime, effectivement il doit l'avoir bien mauvaise contre Le Festival en général et Gilles Jacob en particulier.Stygma2 wrote:Cest bien ça, de donner la présidence du Jury, à cet auteur qui n'a rien reçu à Cannes l'année dernière!?je veux dire j'espère qu'il l'a digéré...j'imagine que oui...
Plussun, une belle surprise, un joli film malgré une mise en scène un peu anonyme à mon sens...mais les acteurs et notament Moretti sont très bons.Alligator wrote:Caos calmo (Antonio Luigi Grimaldi, 2008) :
http://alligatographe.blogspot.com/2011 ... calmo.html
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Quel joli film, d'une extrême délicatesse, comme une grande et longue respiration. C'est très agréable de voir un film de ce type. Comme dire? Je cherche des équivalences, je n'en trouve pas. Peut-être dans certains films japonais, ou plus largement asiatiques, dans lesquels le temps est considéré à sa juste place. Je ne dis pas forcément que le cinéma doit à tout prix suivre une cadence ultra réaliste, non, bien entendu, mais qu'il est bon parfois de voir un film qui prend le temps, qui donne à ses personnages l'occasion de se poser et d'attendre qu'un évènement arrive.
C'est bel et bien le cas ici. Pietro (Nanni Moretti) perd sa femme. Attentif avant tout à la réaction de sa fille, il en oublie sa propre tristesse. Le jour de la rentrée, il l'accompagne à l'école et décide de rester là, tout près, à attendre, tous les jours, jusqu'à... il ne sait pas trop, il veut juste être là au cas où sa fille aurait besoin de lui.
Il le peut, il en a les moyens. Et donc il passe ses journées sur la grande place en face de l'école, guettant le moindre appel de sa fille, il passe son temps sur un banc, au café, dans sa voiture, il marche, il observe, il attend, il s'octroie une incroyable liberté. Avec le temps, va, tout s'en va.
Dans notre société, il est devenu commun de rejeter cette liberté. Souvent on se la nie. On n'a plus le temps. Les gens qui en ont sont vus comme des privilégiés, des rentiers, des gens qui peuvent, des salops qu'on envie la plupart du temps, dans le pire des cas on les rejette comme des feignants, à la marge, il faut s'en méfier, des excentriques, des artistes ou des va-nu-pieds. Et le film n'aborde pas cette liberté sous cet angle, sans doute parce que tout le monde estime qu'en période de deuil, Pietro en a bien le droit après tout.
Il est vrai qu'il ne s'exclut pas pour autant de la société. Sa secrétaire vient le voir, il lit les journaux, rentre avec sa fille chez eux chaque soir, aborde des gens, communique, téléphone, mange, drague, fait l'amour, s'amuse, travaille, réfléchit, reçoit ses amis, sa famille, ses collègues, son patron. La vie ne s'arrête pas totalement.
Mais les priorités ont changé. Celle d'attendre est au premier rang. Cette place est en quelque sorte devenue son nouveau bureau. On le complimente sur la beauté de l'endroit. On s'habitue. Avec le temps. Pietro s'habitue lui aussi, à l'endroit, à ce rythme de vie, aux personnes qu'il croise, qu'il apprend à connaitre.
Peu à peu le temps fait son travail. C'est cette lente progression que le film nous conte avec une belle maitrise car on pouvait craindre à la fois une charge de pathos et également ce foutu ennui qu'on associe trop bêtement à l'attente.
Les scènes de tristesse sont incroyablement légères. Comment fait Antonello Grimaldi? Sans doute que la manière de décrire cette attente, faite de moments gais, voire drôles, que la photographie souvent lumineuse et le jeu de Moretti d'une profondeur authentique préparent admirablement le terrain pour que cette douce sérénité s'empare du film et des personnages. Quand arrive le moment où Moretti expulse sa douleur, il se dégage de la scène une sorte de soulagement, comme si le spectateur pouvait le toucher et lui offrir une épaule pour s'épancher. Tout se déroule comme la vie le prévoit, malgré les complexités de l'être humain, c'est à dire dans un élan tout simplement naturel. Ses pleurs ne sont en aucun cas pathétiques. C'est juste la vie.
Il y a une bande musicale très anglo-saxonne, très rock-pop qui se voudrait tout aussi guillerette mais que j'ai trouvé un peu trop artificiellement posée là, juste pour alléger le récit. Trop voyante. Pas aimé. Ça m'a souvent dérangé. C'est bien le seul truc qui m'a chiffonné.
Voilà un film sur le deuil qui répond avec enchantement à "La chambre du fils", qui pour le coup m'avait déplu parce que sur-pathétique, d'une trop agressive noirceur. Ce "Caos calmo" est blanc. Pas le pur mais le neutre, celui de la pause. "Stop, je prends le temps de peser l'évènement, la mort de ma femme, la souffrance de ma fille, je prends le temps de réaliser ce qui se passe pour elle et pour moi, j'attends le moment où elle pourrait tomber, je la rattraperais". Voilà. Simple, doux et beau, comme la vie.
Le portrait du cinéaste à travers ses films.C'est aujourd'hui que sort en salle Mia Madre, le nouveau long métrage de l'indispensable Nanni Moretti honteusement absent du palmarès du dernier festival de Cannes alors que le réalisateur aurait pu briguer sans conteste une seconde Palme d'or. L'occasion pour nous de revenir sur la carrière de l'un des plus grands cinéastes de notre temps à travers les douze longs métrages qu'il a réalisé en quarante ans.
Je comprends pas, y a des spectateurs dans la salle qui écoutaient de la musique pendant le film ? O_oJeremy Fox wrote:Mia Madre - 2015
Très beau film, brillamment réalisé, intelligemment écrit et construit, formidablement bien interprété. Je n'ai cependant pas ressenti l'émotion attendue (celle qui m'avait rendue La Chambre du fils bouleversant) et la liberté de ton de Journal Intime me convient mieux. Ceci dit, la pudeur de l'ensemble, la cocasserie de certaines séquences grâce à un John Turturro grandiose, des morceaux de Philip Glass et Arvö Part, le tout harmonieusement combinés, font que je ne m'arrêterais pas à une seule vision d'autant que, pour une fois que je me rendais en ville voir un film, des voisins sans gêne m'ont gâché une partie de la séance en mettant leur musique à fond. Avouez que ça n'arrange pas l'immersion dans un film intimiste
D'accord avec toi pour le coté planplan et convenu de l'ensemble, "la chambre du fils" m'avait paru plus profond, "vécu".G.T.O wrote:Malheureusement pour moi, j'ai trouvé ce Mia Madre totalement quelconque, monotone et facile.
En premier lieu, le film m'a paru très scolaire, académique même, dans ses idées comme dans son traitement. Le film traite du thème de la disparition d'un parent. Mais sur un mode comico-tragique qui se révèle totalement foiré car trop attendu, stéréotypé, dans son humour ( ahh, la star cabot totalement nul) comme dans ses effets mélodramatiques ( la préparation à la perte et Arvo part ne ne suffisent pas à émouvoir). Et, qui, tente d'établir, de manière assez grossière, un parallèle entre l'agonie et le tournage ubuesque d'un film consacré à la fermeture mouvementée d'une usine, entre une mère et une autre, idée passionnante que le film fait semblant de traiter, se contentant plutôt d'enfiler mécaniquement des scènes de dignes d'un téléfilm - superficiel. Reste plus qu'à se rabattre, dans ce cas, sur les personnages et les acteurs. Et, là aussi catastrophe, la qualité d'écriture, la subtilité, complexité, ne sont pas au rendez-vous. John Turturro, faire-valoir d'un film, qui n'a, visiblement, pas besoin de lui, est embarrassant. Moretti est inexistant dans le rôle du frère pour ne pas dire transparent. Et, quant à l'héroïne du film, Margherita Buy, elle se démène comme elle peut pour faire vivre ce rôle de mère-fille-réalisatrice. Mais, ces nombreux efforts sont réduits à néant par un film cherchant moins la complexité que l'empathie facile, le personnage se rapetissant en silhouette éplorée. Il y avait longtemps que les ficelles de l'humour et du mélo ne m'avaient pas apparu aussi énormes, faciles, dénuées d'intensité. On est très, mais alors, très loin de l'incandescence de la Chambre du fils ou même de la legereté d'un Habemus Papam.
C'est étonnant, ça.mannhunter wrote:D'accord avec toi pourG.T.O wrote:Malheureusement pour moi, j'ai trouvé ce Mia Madre totalement quelconque, monotone et facile.
En premier lieu, le film m'a paru très scolaire, académique même, dans ses idées comme dans son traitement. Le film traite du thème de la disparition d'un parent. Mais sur un mode comico-tragique qui se révèle totalement foiré car trop attendu, stéréotypé, dans son humour ( ahh, la star cabot totalement nul) comme dans ses effets mélodramatiques ( la préparation à la perte et Arvo part ne ne suffisent pas à émouvoir). Et, qui, tente d'établir, de manière assez grossière, un parallèle entre l'agonie et le tournage ubuesque d'un film consacré à la fermeture mouvementée d'une usine, entre une mère et une autre, idée passionnante que le film fait semblant de traiter, se contentant plutôt d'enfiler mécaniquement des scènes de dignes d'un téléfilm - superficiel. Reste plus qu'à se rabattre, dans ce cas, sur les personnages et les acteurs. Et, là aussi catastrophe, la qualité d'écriture, la subtilité, complexité, ne sont pas au rendez-vous. John Turturro, faire-valoir d'un film, qui n'a, visiblement, pas besoin de lui, est embarrassant. Moretti est inexistant dans le rôle du frère pour ne pas dire transparent. Et, quant à l'héroïne du film, Margherita Buy, elle se démène comme elle peut pour faire vivre ce rôle de mère-fille-réalisatrice. Mais, ces nombreux efforts sont réduits à néant par un film cherchant moins la complexité que l'empathie facile, le personnage se rapetissant en silhouette éplorée. Il y avait longtemps que les ficelles de l'humour et du mélo ne m'avaient pas apparu aussi énormes, faciles, dénuées d'intensité. On est très, mais alors, très loin de l'incandescence de la Chambre du fils ou même de la legereté d'un Habemus Papam.