Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Répondre
Hitchcock
Electro
Messages : 967
Inscription : 9 déc. 13, 13:34
Localisation : Londres

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Hitchcock »

Je trouve Kent Smith particulièrement sympathique (voir même bon) dans La Féline, personnellement.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Hitchcock a écrit :Je trouve Kent Smith particulièrement sympathique (voir même bon) dans La Féline, personnellement.
Oui, je suis d'accord. Je devais avoir l'air d'extrapoler à toutes ses interprétations dans le message précédent alors qu'il est effectivement au minimum agréable dans le Tourneur. Il émane de lui une certaine chaleur et de la douceur qui font son charme discret, et même sa retenue, son coté policé, le coté rationnel, surtout cet aspect là d'ailleurs colle bien avec ce personnage rassurant qui ne veut pas croire aux histoires mystérieuses de la belle Simone (un peu comme l'était Dana Andrews dans RDV avec la peur). Je préfère évidement Dana Andrews comme acteur mais le personnage joué par Kent Smith est même plus intéressant, tout au moins sur le plan émotionnel, mais ça ne tient pas aux jeux des comédiens mais au fait que l'un soit juste un scientifique assez froid et ultra-rationnel…et l'autre un type amoureux.

Je trouve que son registre était quand même un peu limité alors il pouvait souffrir plus qu'un autre d'être mal distribué. L'exemple extrême c'est Comanche, dans lequel il joue un chef indien :shock: (mais je ne l'ai pas vu depuis très longtemps celui là…). Il était en revanche plutôt bon dans L'amant sans visage de Vincent Sherman par exemple. Pour ce qui est de This Side of the Law, comme je l'ai dit sur la page précédente, mon jugement assez sévère sur ce film a pu me faire mal juger de la prestation de son acteur principal mais si j'exprime des opinions qui peuvent être systématiquement contreditent ou au minimum qui seraient sensiblement nuancés par d'autres amateurs, c'est encore plus vrai pour ce genre de film noir pour lesquels il faut passer par dessus certaines incohérences ou invraisemblances sur lesquels je coince parfois (mais pas systématiquement sinon Hitch. ne serait pas dans le top 5 de mes cinéastes préférés)
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Image
Réalisation : Richard L. Bare
Production : Saul Elkins (Warner)
Scénario : William Sackheim
Photographie : Ted McCord
Musique : David Buttolph

Avec :

Virginia Mayo (Linda Vickers)
Bruce Bennett (Marty Fain)
Robert Hutton ('Doc' Vickers)
Tom d'Andrea (Sparky Lynch)
Richard Rober (Lt. McReady)
Helen Westcott (Toni Peters)

Le Club Bermuda, le casino appartenant à Marty Fain est attaqué et ses clients détroussés par un gang rival dirigé par Johnny Warjak. Fain reçoit le soir même les clients afin de les dédommager. Nelson Clark, un petit escroc réclame son du alors qu'il doit beaucoup d'argent au casino et à sa suite, Linda Vickers, issue d'une riche famille de la ville mais ayant connu des revers de fortune et qui est aussi une célébrité locale dont les faits et gestes font la une de la presse, tente à son tour d'escroquer le casino en tentant de se faire rembourser pour 18 000 $ de bijoux probablement faux. C'est en tout cas ce que soupçonne Marty Fain qui raccompagne la jeune femme chez elle puisqu'elle prétend pouvoir apporter la preuve de ce qu'elle avance. Mais elle avait bluffé et pour tenter de se sortir de cette situation délicate, elle tente de séduire Fain et passe la soirée en sa compagnie. Le lendemain matin, Linda est réveillée par le Lt de police McReady qui l'informe que sa voiture a été utilisé par le ou les tueurs de Warjak qui a été retrouvé mort au petit matin. Comprenant que son véhicule qui était resté à proximité du casino de Fain avait du être utilisée par ses hommes de main, elle n'en dit rien et lui fourni même un alibi…
Image
Un film qui offre la vedette à une star comme Bruce Bennett, ça sent la superproduction ! Mais le bel endormi se sort finalement assez bien de son personnage de gangster ayant une façade sympathique et charmeuse mais qui derrière son sourire, ses bonnes manières et ses gouts raffinés dissimule un vrai chef de gang. On avait vu d'emblée le voyou séduisant à l'allure de notable et soucieux de respectabilité, capable d'une froideur de comptable quand il avait fallu envoyer ses tueurs exécuter les sales besognes mais même s'il pourra être tenté de s'assagir, il n'en aura ni le temps ni véritablement l'occasion car bien vite les circonstances l'amèneront à se salir personnellement les mains sans que l'on puisse parler dans son cas de la fatalité des voyoux condamnés d'avance car lui n'aura même pas eu le temps de savoir si se ranger l'aurait rendu plus heureux et on ne sait même pas s'il en avait véritablement le désir. La 1ère fois, il va y ramasser une blessure qui par ricochet provoquera sa perte quand il apprendra à ses dépends qu'il ne fallait pas toucher au petit frère de sa nouvelle petite amie…
ImageImageImage
Car la vraie vedette du film, c'est Virginia Mayo. Elle joue un peu sur tous les registres et elle est excellente. On découvre une jeune femme de la haute société mais qui n'a plus les moyens allant avec ses bonnes manières. Ses bonnes relations se sont-elles détournées ou est elle attirée par le souffre ? Toujours est-il qu'après avoir tenté de séduire le gangster avec quelques arrières pensées, elle va véritablement et sincèrement être séduite par lui. Mais elle va faire du chemin car sous l'influence de son jeune frère, un futur médecin soucieux des nouvelles mauvaises relations de sa soeur, elle va tenter de rompre avec son nouveau petit ami et va même jouer un dangereux double jeu en acceptant d'entendre le policier McReady (interprété par un très bon second couteau, Richard Rober) qui dresse un portrait plus sombre encore de son petit ami…Dans les rôles secondaires, on remarque Robert Hutton ('doc' Vickers, le petit frère) qui va mettre les pieds au casino et s'acoquiner avec les méchants, d'abord sans le vouloir par l'intermédiaire de Toni, la chanteuse du casino interprétée par l'excellente Helen Wescott, puis en quelque sorte contraint et forcé…et sans prendre conscience des conséquences.
ImageImageImage
C'était le premier long métrage réalisé par Richard L. Bare et donc son 1er film noir sur les 3 qu'il a réalisé (qui sont maintenant tous dans ce topic). C'est le moins ambitieux, le moins réussi esthétiquement mais celui dans lequel il y a le moins de maladresses mais il est néanmoins selon moi facultatif. A été diffusé à la télévision chez nous. J'avais évoqué sa carrière à la fin du texte sur Flaxy Martin. Mais puisque je n'aurais pas l'occasion de revenir sur ce metteur en scène, je (re)signale qu'il est toujours parmi nous. Il a 101 ans (et demi) . Il y a encore 3 ou 4 ans, il était encore en bonne forme. Sur YT, on peut le voir s'exprimer sur sa carrière en compagnie de sa femme dans un document d'une demi-heure. Pour l'anecdote, Smart Girls Don't Talk (Les filles intelligentes ferment leurs gueules) est un des films préférés d'Eric Zemmour (faut pas chercher confirmation, c'est un scoop)
Spoiler (cliquez pour afficher)
ImageImage
Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

A signaler que SHOOT-OUT AT MEDECINE BEND (le vengeur)( 1957) de Richard L. Bare vient de sortir en dvd (all zone) chez Archive WB collection, VO non s/t. Ce petit western en N et B, interprété par Randy Scott, James Garner , Angie Dickinson et James Craig, à cheval entre comédie et action , tourné en 19 jours, est un des moins connus parmi ceux tournés par Scott dans les années 50.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22172
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Smart Girls Don't Talk

Message par Supfiction »

kiemavel a écrit :la vraie vedette du film, c'est Virginia Mayo. Elle joue un peu sur tous les registres et elle est excellente. On découvre une jeune femme de la haute société mais qui n'a plus les moyens allant avec ses bonnes manières. Ses bonnes relations se sont-elles détournées ou est elle attirée par le souffre ? Toujours est-il qu'après avoir tenté de séduire le gangster avec quelques arrières pensées, elle va véritablement et sincèrement être séduite par lui.
Rien que ça, ça me donne très envie de le voir ce Les filles intelligentes ferment leurs gueules. Le titre est excellent aussi !
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Smart Girls Don't Talk

Message par kiemavel »

Chip a écrit :A signaler que SHOOT-OUT AT MEDECINE BEND (le vengeur)( 1957) de Richard L. Bare vient de sortir en dvd (all zone) chez Archive WB collection, VO non s/t. Ce petit western en N et B, interprété par Randy Scott, James Garner , Angie Dickinson et James Craig, à cheval entre comédie et action , tourné en 19 jours, est un des moins connus parmi ceux tournés par Scott dans les années 50.
Je l'ai dans mes étagères (en vost) mais je ne sais plus si c'est une diffusion tv ou un st amateur. Je l'ai vu mais n'en ai absolument aucun souvenir…ce qui n'est pas forcément un si mauvais signe. Bare a réalisé plusieurs westerns mais c'est le seul que je connais. Tu en as vu d'autres ?
Supfiction a écrit :Rien que ça, ça me donne très envie de le voir ce Les filles intelligentes ferment leurs gueules. Le titre est excellent aussi !
Le prochain sera encore meilleur : The Good Die Young….qui a été distribué en France sous le titre Les bons meurent jeunes. Contrairement au précédent, du travail de professionnel :mrgreen:
Geoffrey Carter
Doublure lumière
Messages : 317
Inscription : 9 avr. 14, 15:57

Re: Smart Girls Don't Talk

Message par Geoffrey Carter »

Un film que j'aimerais découvrir, surtout pour Virginia Mayo, une actrice bien oubliée aujourd'hui et qui n'a d'ailleurs peut-être pas eu la carrière qu'elle méritait.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22172
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Re: Smart Girls Don't Talk

Message par Supfiction »

Geoffrey Carter a écrit :Un film que j'aimerais découvrir, surtout pour Virginia Mayo, une actrice bien oubliée aujourd'hui et qui n'a d'ailleurs peut-être pas eu la carrière qu'elle méritait.
Pas forcement plus oubliée que les autres à mon avis.
Je pense que les seules actrices qui ne sont pas oubliées du grand public (à de rares exceptions comme Marilyn, Bette Davis,..) sont celles que le grand public associe à un film célèbre (Vivien Leigh dans Autant en emporte le vent, Ingrid Bergman dans Casablanca).
Donc les actrices spécialistes du film noir sont passablement oubliées.

Je pense que les cinéphiles se rappellent de Virginia Mayo pour L'enfer est à lui au moins.
Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

De Richard L. Bare , vu aussi " le cavalier masqué (return of the frontiersman)(1950) avec Gordon Mac Rae( bof!), Rory Calhoun et julie London, lointain souvenir, un film qui n'a pas imprimé ma mémoire.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Smart Girls Don't Talk

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :
Geoffrey Carter a écrit :Un film que j'aimerais découvrir, surtout pour Virginia Mayo, une actrice bien oubliée aujourd'hui et qui n'a d'ailleurs peut-être pas eu la carrière qu'elle méritait.
Pas forcement plus oubliée que les autres à mon avis.
Je pense que les seules actrices qui ne sont pas oubliées du grand public (à de rares exceptions comme Marilyn, Bette Davis,..) sont celles que le grand public associe à un film célèbre (Vivien Leigh dans Autant en emporte le vent, Ingrid Bergman dans Casablanca).
Donc les actrices spécialistes du film noir sont passablement oubliées.

Je pense que les cinéphiles se rappellent de Virginia Mayo pour L'enfer est à lui au moins.
Oui c'est sans doute son film le plus connu du grand public avec Les plus belles années de notre vie dans lequel malgré tout elle vient nettement derrière les deux autres filles du casting mais dans lequel elle était très bien en bécasse superficielle qui préférait son Jules en uniforme, déplorait son manque d'ambition et son médiocre salaire... qui réduisait nettement l'attractivité du bon Dana Andrews à ses yeux. Elle faisait un bon usage la dedans d'une de ses marques de fabrique, le large sourire souvent moqueur.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22172
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Re: Smart Girls Don't Talk

Message par Supfiction »

kiemavel a écrit :Elle faisait un bon usage la dedans d'une de ses marques de fabrique, le large sourire souvent moqueur.
A ne pas confondre avec son sourire n°2 : le sourire J.R.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :
kiemavel a écrit :Elle faisait un bon usage la dedans d'une de ses marques de fabrique, le large sourire souvent moqueur.
A ne pas confondre avec son sourire n°2 : le sourire J.R.
:lol: Alors en fait, s'il existe bien un sourire J.R. breveté, j'avais parlé pour ma part de plans du même nom. Si le sourire en lui-même est comparable, la différence c'est que, par exemple dans Flaxy Martin, de nombreuses apparitions de Virginia se terminaient par un plan fixe sur elle (mais pas forcément un gros plan) pour bien profiter de ses sourires narquois (Ils souffrent ; keskecbon :mrgreen: ). Dans le film de Wyler, on ne voit rien de comparable ou en tout cas le personnage est beaucoup plus subtile. Elle avait éprouvé de la fierté d'épouser pendant la guerre un beau gars qui en jetait en capitaine mais elle se rendait compte à son retour que son héros, dès qu'il tombe la veste est juste un petit employé de drugstore, qu'il est un peu ronchon, qu'il se réveille en sursaut au milieu de la nuit et croit voir des japonais partout :mrgreen: alors qu'elle a envie de profiter de sa jeunesse et de danser cheek to cheek. On découvre certes que Virginia n'avait sans doute pas été patiente pendant l'absence de son époux mais je dirais que ça fait partie des dommages de guerre mais c'est progressivement qu'ils s'éloignaient l'un de l'autre. Wyler montre graduellement la détérioration de leur relation par sa mise en scène. Je me souviens de scènes ou il les sépare, montre l'un dans la pièce principale, l'autre dans la salle de bain et leurs dialogues tranquilles qui disent autre chose que les images d'une Virginia qui exprime plutôt des "cause toujours" ou des "ras le bol de ce boulet" dans le dos de son époux qui ne voit rien mais dont on sent le dépit et l'inquiétude. Bref, les personnages sont autrement plus consistants, y compris celui de Virginia même si c'est aussi une garce et qu'on lui voit donner tour à tour les mêmes sourires enjôleurs ou moqueurs. Je n'ose même pas comparer comment ces personnages sont mis en scène par deux cinéastes ne concourant pas du tout dans la même catégorie, j'aurais peur d'être désobligeant alors que je viens quand même de consacrer 3 textes au vénérable Richard L. Bare. On n'a d'ailleurs pas trop vu Virginia sous la direction de pointures dans le film noir en dehors de Walsh. Elle a eu plus de chance du coté du cinéma d'aventures et surtout du western…(et encore plus du coté de la comédie mais pour le coup les films ne sont pas très connus en France).
Spoiler (cliquez pour afficher)
Image
On lui donnerait, entre autres, le bon dieu sans confessions sur cette image et pourtant, y va pleurer sa mère le Dana ! Obligé de retourner vivre chez son père et sa belle doche ! Un gars qui a fait la guerre quand même !

Image
Elle réussissait même à mettre hors de lui un gars aussi zen que Jimmy

Image
A tel point qu'un autre, pourtant du genre solide et équilibré, était obligé de l'attacher (probablement son 3ème film le plus célèbre…et elle y est excellente dans un type de rôle pourtant habituellement assez limité que Tourneur a bien enrichi.


Image
Un autre de ses meilleurs films, le magnifique remake de High Sierra
La suite est quand même indigne de la bonne tenue de ce topic mais allez : Virginia en maillot
Spoiler (cliquez pour afficher)
ImageImage
ImageImage
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

The Good Die Young - Les bons meurent jeunes - 1954

Message par kiemavel »

Image
Les bons meurent jeunes - 1954
Réalisation : Lewis Gilbert
Production : Jack Clayton (Remus)
Scénario : Vernon Harris et Lewis Gilbert
Image : Jack Asher
Musique : George Auric

Avec : Laurence Harvey (Miles 'Rave' Ravenscourt) ; Gloria Grahame (Denise Blaine) ; Richard Basehart (Joe Halsey) ; Joan Collins (Mary Halsey), John Ireland (Eddie Blaine) ; Stanley Baker (Mike Morgan) et René Ray, Robert Morley, Margaret Leighton

Une voiture circule dans le centre de Londres au milieu de la nuit. A son bord, 4 hommes de milieux sociaux différents et qui ne se connaissaient pas quelques semaines auparavant. 4 hommes sans passé criminel qui attendent nerveusement que le conducteur arrête la voiture à l'endroit prévu. Celui qui les a amené là s'arrête et demande à son voisin d'ouvrir une valise à ses pieds. Il en sort 4 revolvers et les distribuent aux trois autres malgré leurs protestations puisqu'il était semble t'il convenu qu'ils ne feraient pas usage de violence…Commence alors le très long flashback qui va nous montrer ce qui les a amené là…
Image
Pour la première fois dans ce topic, un film noir britannique, une délocalisation que je m'étais pour l'instant plus ou moins interdit d'aborder ayant déjà pas mal de pain sur la planche par ailleurs mais je fais une exception en raison du casting de celui ci constitué pour moitié d'acteurs américains. En dehors de son casting incroyable, ce film s'appuie sur un scénario d'une précision d'orfèvre pour nous montrer comment les destins de 4 hommes qui n'auraient jamais du seulement se côtoyer vont être amené à converger. On peut déjà mesurer le talent des scénaristes et du metteur en scène en raison de l'habilité dont ils font preuve pour montrer le lent processus qui va les amener à rentrer en contact, commençant à se rapprocher en fréquentant les mêmes lieux (en terme de mise en scène, l'utilisation de la profondeur de champ est admirable), se croisant sans se connaitre, avant les premières rencontres qui vont conduire, encore une fois lentement et d'une manière magnifiquement orchestrée, à se retrouver un jour tous les 4 à la même table.

Car c'est le pub principalement, qui va être le lieu ou ces hommes vont pouvoir trouver d'autres hommes comme eux, déçus et malchanceux, victimes à la fois d'une époque difficile, parfois d'un membre de leur entourage ou carrément trahis par des proches. La succession d'évènements systématiquement défavorables, leurs situations se dégradant inexorablement, va alors les pousser dans un état de fébrilité voir de dépression, qui les rendra réceptifs au projet dément d'un des leurs qui va utiliser la détresse des trois autres et leur besoin impérieux d'argent, pour les entrainer dans un engrenage mortel qui va faire de 3 braves types des criminels improvisés…et ratés. Pour en arriver là, ils avaient éprouvés toutes formes de déceptions et de désillusions, aussi différentes que leurs origines sociales.
ImageImageImage
Car avant qu'ils ne soient amenés à se rencontrer enfin, les histoires d'abord parallèles de ces 4 hommes permettent aussi de nous montrer des milieux sociaux très différents. Nous ne découvrons pas seulement 4 hommes, leurs épouses respectives (dont le rôle est capital) et pour 3 d'entre eux un 3ème personnage plus ou moins proche qui va précipiter leurs chutes. En dehors d'une étude de caractères admirable, on nous montre aussi le milieu et l'origine sociale de ces hommes, en particulier la mentalité de la haute-société, celle de la classe ouvrière (qui permet de nous plonger dans l'univers de la boxe) mais un peu moins celui de la classe moyenne car pour cette dernière, les évènements impliquant les deux couples concernés appartiennent davantage au drame psychologique qu'au drame social. Les voici ces personnages et leurs milieux :

Miles Ravenscourt (Laurence Harvey) marié à Eve (Margaret Leighton). Le proche est ici le père de Miles, Sir Francis Ravenscourt (Robert Morley). Miles, surnommé 'Rave' est un playboy éduqué, raffiné et très séduisant mais derrière ce charme apparent, c'est aussi un oisif qui passe son temps à jouer, multipliant les dettes que paye jusque là systématiquement Eve, sa femme artiste peintre, elle aussi issue d'une riche famille mais qui se lasse des dettes de jeu de son jeune époux et surtout de ses multiples conquêtes féminines. Son père interprété par Robert Morley, qui est extraordinaire dans la seule séquence ou il apparait lorsque son fils vient le retrouver à son cercle, va être le révélateur de la véritable personnalité de celui que l'on prend surtout pour un charmant manipulateur au pire égoïste et narcissique, bluffé que nous sommes par le charme qui se dégage de Laurence Harvey qui est lui aussi extraordinaire et absolument fascinant. Ce père, un Lord, dans le cadre feutré de son cercle, lance à son fils les paroles les plus terribles qu'un père puisse dire à son fils, exprimant le dégout qu'il lui inspire et lui lançant pour finir que son seul espoir serait de lui survivre. Il semble à la fois dégouté et terrifié par ce fils dont on se demande bien, en raison du charme indéniable qu'il dégage, ce qu'il peut bien avoir de si terrible mais il fini par laisser voir, une fois son fils reparti, l'épreuve qu'a été pour lui de le rejeter ainsi. Saisissant!
ImageImageImage
Le second est Joe Halsey (Richard Basehart), un ancien GI revenu aux USA et devenu employé de bureau. Il se trouve ainsi éloigné de sa femme Mary (Joan Collins), une anglaise connue pendant la guerre et qui y est restée pour vivre au moins pour quelques temps au coté de sa mère malade. N'en pouvant plus de cet éloignement, il demande un congé exceptionnel qui lui est refusé, est finalement licencié et arrive en GB très heureux d'apprendre que sa jeune femme est enceinte. Le proche est ici Mme Freeman (Freda Jackson), la mère maladivement possessive de Mary qui va tout faire pour contrecarrer les projets des jeunes mariés et les empêcher de partir aux USA. Si Richard Basehart est bien, Joan Collins est excellente et touchante en jeune épouse tendre et éprise de son mari mais déchirée entre les désirs de celui ci, qui veut à tout prix éloigner Mary d'une mère à laquelle malgré tout la jeune femme reste attachée, et cette mère geignarde, culpabilisante, malade imaginaire complètement tordue...et incarnée par une formidable Freda Jackson.

Eddie Blaine (John Ireland) est un pilote de US Air Force cantonné en Angleterre. Trop souvent absent, il délaisse sa femme Denise (Gloria Grahame), elle aussi américaine et actrice de seconde zone…Le 3ème personnage est ici la co vedette du dernier film de Denise, Tod Maslin (Lee Paterson). C'est de loin le couple le moins intéressant et c'est la seule réserve que je ferais sur ce film. John Ireland fait la gueule et se raidit…mais pas assez visiblement pour une Gloria Grahame lascive qui nous joue sa partition favorite : paupière lourde, démarche trainante, l'air embrumé. Elle se fout de ce mari décidément trop sérieux et coincé qui ne supporte pas qu'elle ramène à la maison un homme qui manifestement n'a pas besoin qu'on lui explique ou trouver la boite de médoc de Denise. Pfff…Trop lourd le Eddie. Il faut voir comment, sortant des bras d'un autre homme, pour se faire pardonner, elle se pend mollement au cou d'un époux dans le regard duquel on peut lire des sentiments mélangés mais qui aura du mal à décliner l'offre. Bref, Denise, c'est le genre énervant qu'on a envie de foutre à la porte mais malheureusement c'est pas la première idée qu'elle inspire…
ImageImageImage
Le boxeur Mike Morgan (Stanley Baker) a promis à sa femme Angela (Rene Ray) que son prochain combat serait le dernier et qu'ensuite il se retirerait, confiant dans l'avenir en raison des 900 £ gagné péniblement après 10 ans de ring qui permettent tout de même de voir venir. Celui qui a toujours été cantonné aux combats de seconde zone voit arriver les jeunes boxeurs plein d'espoir avec un oeil ironique… lui qui est partiellement aveugle d'un oeil, sourd d'une oreille et qu'une douleur dans la main, qu'il essaie de cacher, inquiète... Le milieu de la boxe est admirablement présenté avec l'atmosphère des vestiaires qui rappelle l'atmosphère de Nous avons gagné ce soir . Stanley Baker, dans un de ses meilleurs rôles, est lui aussi remarquable dans tous les registres, tout à fait crédible en boxeur (les combats sont d'ailleurs remarquablement mis en scène) que par la suite ou le film prend carrément des airs de film social montrant la difficile réinsertion d'un ex boxeur souffrant de handicaps. Le 3ème personnage est ici le jeune frère d'Angela, Dave (James Kenney), un bon à rien qui va précipiter sa chute.

Je ne veux pas trop évoquer la partie finale qui nous fait retrouver les rues sombres du centre de Londres. J'en dis un minimum mais je déconseille la lecture de ce qui suit…
Spoiler (cliquez pour afficher)
Un mot quand même sur ce final. Evidemment le film se termine par un braquage mais contrairement à la plupart des films du genre, on aura compris que l'on ne nous montre pas ici les préparatifs d'une opération…qui tourne à la catastrophe en raison de la maladresse des hommes mais surtout en raison de la folie de 'Rave' que l'on sentait venir mais la réalité dépasse largement ce que l'on avait pu anticiper. Le vol en lui même tourne court, avant une course poursuite dans les rues de Londres qui se termine à l'aéroport (et qui ne dépare pas avec la qualité du reste). Final totalement en accord avec le reste du récit : 4 morts et un butin de 90 000 £ perdu pour toujours, ironique et totalement "film noir".

ImageImageImage
A propos de ce film et de quelques autres films anglais de même famille, Raymond Lefèvre parlait de "mélodrame policier". Policier non, puisque ce n'est pas de ce point de vue là que le film se place mais mélodrame noir, pourquoi pas. Le film tient aussi du film social, les 4 portraits parvenant à bien saisir les difficultés économiques de l'Angleterre de l'après guerre mais aussi du drame psychologique. J'ai rendu compte du mieux que je peux de ce scénario d'une quasi perfection. De la mise en scène de Lewis Gilbert, fonctionnelle mais parfois franchement inspirée lorsqu'il montre les approches des 4 hommes qui ne se connaissent pas encore… ou lors des scènes d'action de toute la partie finale. J'ajoute qu'esthétiquement, le film est splendide. La musique signé George Auric ne dépare pas. Quelques uns des comédiens donnent sans aucun doute au moins une de leurs meilleures compositions (René Ray, dont je n'ai pas parlé ; Freda Jackson ; Robert Morley ; Joan Collins et surtout Stanley Baker et Laurence Harvey tous les deux exceptionnels)…Et pourtant, Il est absolument impossible par les mots de rendre compte d'un film d'une telle richesse. Et cependant, inexplicablement, ce film est très rare et très méconnu (mais il a déjà été diffusé en France). The Good Die Young est un indispensable du genre, un presque chef d'oeuvre et je ne sors pas ce qualificatif tous les jours.
Dernière modification par kiemavel le 18 déc. 20, 14:16, modifié 1 fois.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22172
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Backfire / Du sang sur le tapis vert (1950)

Message par Supfiction »

Image
Toujours à propos de Virginia Mayo, elle tient un rôle décoratif et sans intérêt dans le très mauvais Backfire / Du sang sur le tapis vert (1950) mis en scène sans talent par Vincent Sherman et à la construction narrative lourdingue. La faute à un abus de flashbacks explicatifs à répétition et à un scenario un peu difficile à suivre (on suit tantôt O'Brien tantôt McRae et même Mayo à la fin dans sa seule scène "utile") et ce pour vraiment pas grand chose en plus.

L'argument :
Bob Corey, sorti d'une opération après la guerre (et remis sur pied par l'infirmière Virginia Mayo, fantasme masculin qui donnerait envie de passer sa vie à l’hôpital), apprend que son ami, Steve Connolly, est impliqué dans une affaire d'assassinat. Il découvre vite qu'une série de meurtres a été commise par un joueur renommé et que Steve est accusé à tort...

C'est très mal joué (seul Edmond O'Brien s'en sort et encore, moins bien que le chien, sans doute le meilleur acteur du film) mais les acteurs ne sont peut-être pas totalement à blâmer tellement certaines scènes sont mal écrites (Viveca Lindfors tombant amoureuse en deux secondes, ou sommet du ridicule Edmond O'Brien, la colonne vertébrale brisée descendant de l'escalier pour aller secourir son pote en mauvaise posture face au méchant (Dane Clark en dessous de tout).

Bref, en dépit d'un premier quart d'heure encourageant, c'est de mémoire l'un des films noirs les plus brouillons que j'ai vu. Même si pour être honnête, la photographie est plutôt pas mal et que le thème de la réinsertion de deux amis vétérans est intéressant à la base - et d'ailleurs souvent exploité dans les films de la fin des 40's que ce soir dans le noir, le drame ou la comédie (Gene Kelly et Sinatra par exemple).
Image
Dispo dans ce coffret, mais bon vous aurez compris que je ne conseille pas.

Image
Dernière modification par Supfiction le 18 déc. 20, 14:47, modifié 4 fois.
Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Chip »

Celui-là, je l'ai ! Il me faut le revoir, la critique très négative de Kiemavel m'intrigue, et puis j'aime bien le casting, hormis le fade Gordon Mac Rae.
Répondre