En bien parfois, en mal beaucoup.
Pour cette fois je vais changer d'épaule et ouvrir le topic avec une "critique" (*tousse*) un peu négative. A ceux qui l'ont apprécié de pouvoir en parler bien mieux que je ne le pourrais.
Non mais j'avoue que ça me démangeais en fait, pardon.
Pas taper les modos, hein pas taper.
Elle «colonise» son cerveau, et acquiert des pouvoirs illimités...
Quelque part j'ai l'impression que tout le film est un aveu de la part de Luc. "J'ai plus envie de faire du cinéma" ou "Tourner c'est lourd et fatiguant".
Pourtant je sais pas, il devait bien y avoir une étincelle au départ, une idée, une ambition. Fascinante impression de constater pendant le visionnage que tout fout le camp en direct. Si, si. La mise en scène (formidable cet accéléré/ralenti sur les bad boys arrivant vers la Johansson au début, les inserts, les cadrages moches), la pensée, Eric Serra qui semble découvrir Pro Tools et abandonner dans le même temps. Je sais pas. Je n'avais plus vu de film récent de Besson depuis Le cinquième élément du coup je partais sans a priori sur le film. Et si j'avais évité soigneusement son Adèle Blanc-Sec par respect pour la BD de Tardi et la peur évidente d'être déçu, je me disais qu'avec un tel sujet de SF, Lucy prévoyait du lourd.
Au final, l'impression étrange que le Besson producteur (un peu comme Mozinor le caricaturait) a remplacé le Besson cinéaste. Celui qui avait pu m'émerveiller avec Atlantis, Nikita et Le grand bleu. Suis-je trop vieux pour ces conneries ? Être ou ne pas être ? Fromage ou dessert ? Le mieux c'est sans doute de laisser Luc parler du film. Luc, c'est à toi.
Merci. Du coup, pour mieux qu'on comprenne mon film, je vais en parler tout en absorbant un peu de la drogue du film.
...Voilà...
Donc Lucy à 10% prend de la drogue, elle a un orgasme, elle se frotte au mur, au plafond, elle fait l'amour aux néons, c'est très beau, j'y place un clin d'oeil à Subway, l'un de mes tous premiers films vous savez. On voit tout de suite que côté direction d'acteurs, c'est autre chose que son bidule là, Under the skin (j'y fais un clin d'oeil aussi à la fin pour dire que j'ai vu le film hein) d'où elle dégageait quelque chose. Non, là, elle est vraiment mal dirigée et j'ai pris un grand plaisir à ce que vous sentiez qu'avec mon film, elle est vraiment très mauvaise. Un gros challenge de rendre mauvais un acteur qui a su prouver qu'il pouvait aller très loin. Tout un travail de déconstruction vous savez.
A 20%, elle peut prendre possession de tout son corps et influer sur celui des autres et la matière. C'est très pratique, j'ai essayé une fois à distance pendant le tournage en me préparant un risotto. Mais comme je ne contrôlais pas encore la nature des molécules de riz, j'en ai foutu plein mon chef op'. J'ai ri, pas lui. Pourtant, je suis un vrai boute-en-train sur les tournages.
30%. Tiens, pendant que j'y pense, j'ai mis plein de panneaux comme des chapitres qui indiquent le pourcentage de progression de Lucy invariablement à la destruction des neurones du spectateur et de moi-même. A la fin le spectateur devrait ressentir les mêmes effets que pendant le 4ème Transformers que j'ai beaucoup aimé. Et je ne dis pas ça seulement parce que Michael est un copain. Bon, ça casse peut-être tout rythme cette progression par pourcentage je sais pas. Au moins mon film ne fait qu'une heure trente. Les Américains ont aimé alors ça va marcher. Voilà des gens qui reconnaissent mon génie. Et je ne dis pas ça parce que je le pense vraiment hein.
40%. Tiens d'ailleurs j'y pense, pour la version longue, on pourra rajouter des ajouts et se justifier en truquant le pourcentage. Le spectateur étant un peu bête, vu que j'ai fait tout ça pour lui et qu'il comprenne vraiment mon film, il ne devrait pas y avoir de problème. On aura du 35%, du 50,5%, du 62% de progression de colonisation du cerveau de Lucy. Je pense qu'il y a moyen d'étirer le film et de doubler les SFX afin d'étirer jusqu'à 3 ou 4h comme mon ami Peter avec ses hobbits. Je sais pas comment y fait, il ressort des versions longues de plein de ses films à chaque fois et les gens marchent toujours. Il est fort. Très fort.
50%. A un moment, j'ai mis un twist rigolo où le corps se déstructure. C'est un clin d'oeil très fineau à Inception, influence que je revendique pleinement pour mon film (*). Ce mélange réel/rêve, c'est beau. En même temps j'ai pas voulu mélanger dans les strates de rêves comme mon ami Christopher. Il ne faut pas perdre le spectateur. Les inserts Discovery Channel ça va bien un moment même si il faut bien faire comprendre au spectateur qu'il est bête comme Lucy au début du film. Qu'il n'est rien et qu'elle est tout. J'ai bien aimé les animaux qui se reproduisent quequettes et foufounes à l'air. J'aurais bien aimé en mettre plus quand j'y repense. Et j'ai même fait un clin d'oeil à mon ami Malick. Tu vois Terrence, j'ai aussi pu même mettre un dinosaure, et même mieux encore si tu regardes mon film.
On arrive à 60%. Je contrôle votre perception ainsi que tout mon être. Là je viens de modifier la structure de mon corps. C'est imperceptible. Il y a des chances que vous ne le voyiez pas. C'est pas grave, je ne vous en tiendrais pas rigueur. C'est pas facile d'être un génie vous savez.
70%. Donc là on arrive à la fin du film. J'ai pas mal cogité sur les cellules pour ce film. Le fait qu'elles restent en place ou choisissent de s'adapter au milieu. Moi je voulais pas que Scarlett se reproduise sur mon film, du coup comme je savais pas trop comment finir mon film, j'ai fait des clins d'oeils à plein de film. Notamment 2001 l'odyssée de l'espace. Bon, y'a un peu de Matrix hein mais ce film il est trop génial. Moi aussi j'peux faire mieux. Sinon c'est une vraie production Europacorp et j'en suis pas peu fier. La preuve, les asiatiques qui sont une fois de plus des méchants. Qu'on vienne pas me traiter de raciste après ça car moi je leur donne vraiment un vrai rôle hein, tandis que le cinéma français... Chez moi les niaks ils font ninjas, terroristes, assassins ou des gens morts. De vrais rôles hein. Surtout les gens morts. Même que j'ai pu leur donner un bazooka pour qu'ils fassent joujou à la fin. Ils sont mignons.
80% Je réfléchis déjà à la suite du film, ça marche tellement bien qu'il faut une suite. J'ai pas encore réfléchi au scénario, je le ferais au dernier moment mais je vois bien Lucy en Thaïlande ou Lucy chez les nudistes. Si je peux placer du nu, Paris, des audis, des flics caricaturaux et pas efficaces et des asiatiques méchants, ça ne peux que cartonner. Peut-être que je rajouterais des inserts plus historiques repris des chaînes du câble et satellite, afin de donner un vrai background.
Je suis à 90% et je sens que j'influe sur le continuum spatio-temporel. Mine de rien c'est pas facile mais je sens que je peux y arriver. Vous inquiétez pas pour les perturbations sonores, visuelles et auditives, ce n'est pas sale.
Voilà, je suis arrivé à 100%, j'ai atteint les limites de la pensée et du corps. Je suis partout et nulle part en même temps. Je te vois toi là bas en train de télécharger un film, ce n'est pas bien, c'est même pas du Europacorp et c'est en noir et blanc.
Sinon, vous avez aimé mon film ?
Merci Luc, c'était passablement instructif.
(*) Authentique par contre. Besson avait déclaré avoir trois influences principales pour le film : Inception, 2001 l'odyssée de l'espace et... Léon.