René Clair (1898-1981)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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cinephage
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par cinephage »

Pour ma part, j'aime bien, même si je concède que ce n'est pas le divertissement du siècle...
L'avant-garde, ou ce qui se joue dans Entr'acte, ce n'est pas la recherche pour la recherche, mais le tatonnement pour essayer de faire autre chose, c'est de la création brute, non canalisée par l'habituel schéma narratif, c'est la reflexion d'un artiste sur son art, mais par le biais du jeu et de la liberté.
Bien sur, il y a également l'approche dadaïste, à laquelle tu n'adhères probablement pas, mais qui encadre le film (tourné pour l'entr'acte d'un ballet dadaïste, justement), et diverses références (apparitions et collaborations, clins d'oeil à des films plus anciens).
On trouve sur wikipedia le "scénario" du film, qui démontre bien le coté onirique du film.
Un rêve d'enfant. Des cheminées penchées en tous sens. Le ciel à la place de la terre. Des poupées dont la tête se gonfle et explose. Une danseuse si légère qu'elle ne touche pas terre. Un bateau de papier qui flotte sur les toits et fait naufrage. Un chasseur comique qui ne peut arriver à casser un œuf dansant sur un jet d'eau. L’œuf se dérobe, se divise, enfin reste à peu près en place. Le chasseur de brise. Une colombe sort de l'oeuf et se pose sur la tête du chasseur, enchanté. Un autre chasseur survient, veut tuer la colombe, mais tue le chasseur. Qui est L'enterrement du chasseur a lieu aussitôt. Une foule de grotesques dansants accompagne le suit le cortège qui prend de la vitesse et s'emballe. Le cortège se disperse dans la campagne. Une poursuite insensée à laquelle se mêlent des cyclistes, des avions, des bateaux. Enfin, le cercueil tombe. Le chasseur en sort, transformé en magicien. A l'aide de sa baguette il fait disparaître les poursuivants, un garçon de banque, une vieille dame, un coureur à pied. Puis il se fait disparaître lui même. Il ne reste plus qu'un paysage. Le rêve s'est effacé.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Commissaire Juve
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

Père Jules a écrit :Entr'acte (1924) est un film éminemment chiant...
C'est aussi ce que j'ai pensé en le découvrant (d'ailleurs, à l'époque de sa diffusion sur France 3, je crois qu'il était passé en 1.33 zoomé en 1.77 :roll: ).
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Federico »

L'INA a mis en ligne la série radiophonique de Georges Charensol et Roger Régent en 12 épisodes Rencontre avec René Clair de 1951.
Avec des textes lus par Gérard Philipe et François Périer.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
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Commissaire Juve
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

J'ai revu Les grandes manœuvres hier soir. Je pensais ne rester qu'un petit moment (me faire une petite "séquence du spectateur") et puis je suis allé jusqu'au bout.

Je l'ai déjà écrit (où ? sur le topic Jean Renoir peut-être), j'aime énormément le travail effectué sur les décors, sur la palette de couleurs (blanc, crème, gris clair, gris, beige), la grande classe. On est assez loin des ambiances bariolées -- pour ne pas dire kitsch -- de Renoir. S'il ne tombait pas entre les mains de gougnafiers (qui foutraient du jaune en veux-tu en voilà), ça serait sûrement très beau en HD.

Tout bien pesé, le seul truc raté pour ce film, c'est l'affiche (je parle de l'affiche qu'on voit le plus souvent, une croûte sur fond de tonnelles).
Profondo Rosso a écrit :... Un beau technicolor...
Eastmancolor.
Profondo Rosso a écrit :... Visuellement c'est vraiment un des plus beaux films français de l'époque, couleurs chatoyantes, intérieur studios de tout beautés...
Hein ? Chatoyantes ? :mrgreen: Ah ben, non. Tout est dans la retenue, la distinction. La seule chose chatoyante, c'est le rouge des pantalons et des casquettes militaires.

EDIT : je crois qu'il y avait aussi un bon travail sur les couleurs pour les fêtes galantes. Je me souviens notamment d'une séquence avec de jolis bleus (mais, le Gaumont à la demande n'ayant pas été restauré, les couleurs du dvd sont moyennement fiables).
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

Commissaire Juve a écrit :J'ai revu Les grandes manœuvres hier soir. Je pensais ne rester qu'un petit moment (me faire une petite "séquence du spectateur") et puis je suis allé jusqu'au bout...
Truc que je n'avais jamais vu : je passe sur Amazon.UK pour voir ce qu'il y a comme DVD de Gérard Philipe chez les Grands-Bretons, et, après avoir cliqué sur la jaquette de "Les grandes manœuvres", je vois ce message...
Sorry, we can't deliver this item to France
:shock:
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Cathy »

Commissaire Juve a écrit :
Commissaire Juve a écrit :J'ai revu Les grandes manœuvres hier soir. Je pensais ne rester qu'un petit moment (me faire une petite "séquence du spectateur") et puis je suis allé jusqu'au bout...
Truc que je n'avais jamais vu : je passe sur Amazon.UK pour voir ce qu'il y a comme DVD de Gérard Philipe chez les Grands-Bretons, et, après avoir cliqué sur la jaquette de "Les grandes manœuvres", je vois ce message...
Sorry, we can't deliver this item to France
:shock:
A mon avis c'est parce qu'il n'est pas vendu par Amazon, mais simplement livré par Amazon.
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

Je me demande... J'ai plutôt l'impression qu'il y a une histoire de droits derrière tout ça ! Mais ça ne touche que les films vendus par The World Cinema Store (des Gérard Philipe, mais aussi "Une parisienne" avec Bardot).

En revanche, pour A nous la liberté, chez le même vendeur, on a :
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Chdx »

Commissaire Juve a écrit :Je me demande... J'ai plutôt l'impression qu'il y a une histoire de droits derrière tout ça ! Mais ça ne touche que les films vendus par The World Cinema Store (des Gérard Philipe, mais aussi "Une parisienne" avec Bardot).

En revanche, pour A nous la liberté, chez le même vendeur, on a :
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Je pense comme Cathy, et si tu regardes ici, tu vois que ce vendeur ne pratique que le "Domestic Delivery Rates", c'est donc cuit pour l’expédition hors UK, il te reste l'exemplaire neuf vendu par Amazon a £5.00, celui neuf a £4.08 de findprice...
ou le "used-like new" a £49.80 de WholeFilmsMarket
:mrgreen:
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

Ah mais, je ne veux rien, moi. J'ai déjà tous les DVD en édition française ou américaine.
Chdx a écrit :... tu vois que ce vendeur ne pratique que le "Domestic Delivery Rates"
Non, puisque le même vendeur "can" sur certains titres, et "can't" sur d'autres.
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Nestor Almendros »

Les belles de nuit (1952)

Je reste partagé entre une intrigue poussive et un concept assez habilement utilisé par René Clair. Je n'ai pas été intéressé par cette histoire, globalement, avec des situations trop légères à mon goût. Mais dès que l'on quitte le réel, que l'on passe dans les rêves, le film se réveille. Il y a des idées de scénario (les micro-éléments du réel que l'on retrouve, amplifiés ou pas, dans les rêves, avec beaucoup de notes humoristiques). Il y a surtout un plaisir évident de la mise en scène, un travail extrêmement dynamique de René Clair qui s'amuse comme un petit fou à passer du réel à l'imaginaire. Fondus, panoramiques filés, et même au sein d'un seul plan, les passages du quotidien à la fantaisie sont légion et assez bien exécutés.
Pas suffisant, par contre, pour m'éviter un petit ennui.

Bon rendu du Blu-ray Gaumont. Copie propre avec de bons contrastes (pour une fois). Bonne définition, sauf dans les (nombreux) plans en fondu où la qualité du piqué est un peu retranchée.
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Commissaire Juve
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Commissaire Juve »

Nestor Almendros a écrit :... Mais dès que l'on quitte le réel, que l'on passe dans les rêves, le film se réveille...
C'est marrant, pour moi, c'est l'inverse. Et comme le "quotidien" n'est pas assez exploité, ben, je me suis "rasé".
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lilmoz
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par lilmoz »

Son film que j'ai préférer c'est "sous les toits de paris" le premier chef d'oeuvre du parlant!! Les décors sont fantastique au point que quand les nazis sont arriver a paris, ils pensaient que paris était comme dans le film et chercher en vain ces quartiers de paname qu'ils avaient vu dans le film!
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Profondo Rosso
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Profondo Rosso »

Les Belles de nuit (1952)

Image

Les aventures oniriques d'un jeune professeur de musique. Chaque nuit, Claude (Gérard Philipe) retrouve en rêve les femmes qu'il connaît autour de lui. Chaque fois dans des situations romanesques et périlleuses où il joue le héros qu'il aimerait être… Hélas, le réveil le ramène à une réalité moins agréable.

René Clair nous offre une féérie inégale où la magie des atmosphères est contrebalancée par un récit un peu poussif. Claude (Gérard Philippe) est un jeune professeur de musique qui ne trouve que dans le rêve l'évasion et l'extase tandis que le réel n'est que frustration. Cette frustration s'exprime par divers motifs dans l'approche de René Clair, le plus superficiel nous menant à la vraie souffrance intime de notre héros. C'est d'abord la nuisance sonore qui sera la plaie du musicien avec cette scène d'ouverture où ses répétitions au piano sont interrompus par le garage voisin, plus tard par les cris d'enfants de sa salle de classe où les travaux alentours. René Clair prolongera cette idée dans d'amusants désagréments administratifs (l'épisode de la poste) ou quotidien (les moqueries de ses amis) provoquant la colère d'un Claude survolté et interprété avec une bel énergie par Gérard Philippe. Le manque d'amour ou en tout cas celui qu'il ne sait pas voir, sa carrière de musicien qui piétine, tout cela est résolu dès qu'il ferme les yeux, traversant des environnements onirique envoutant, séduisant toute les jeunes femmes qu'il croise sans succès dans le monde réel et composant une musique qui captive les foules.

René Clair offre des transitions virevoltantes et bourrées d'inventions où une astuce de montage, un panoramique où un fondu enchaîné habile nous emmène soudain très loin. Les sauts dans le temps rêvés convoque une Algérie sortie des contes des Mille et Une nuit, la Révolution Française ironique et à l'hystérie contagieuse le tout dans une atmosphère et des décors aussi épurés que stylisés par une pure abstraction de songe. C'est dans ces moments que le réalisateur excelle, laissant exploser son imagination. Ce sera bien moins probant dans la description du monde réel même si il réutilise nombre d'éléments marquant de ses œuvres précédentes. Les milieux populaires avec cette bande de copains, quelques brillants jeu comique sur le son (le vif échange entre Claude et son facteur se perdant dans le vacarme des travaux) rappelle par exemple les meilleurs moments de Le Million (1931). La grosse différence est le manque d'implication. Si le côté abstrait, gentiment érotique et archétypal des trois romances fonctionne dans le rêve (et avec quelle prétendantes : Martine Carol, Magali Vendeuil, Gina Lollobrigida) ce sera assez suranné et superficiel dès que l'on retourne au réel. De même les manifestations d'amitié de la bande de copain sont plus une caution comique mais ne nous y attache jamais. Tout cela contribue à un désintérêt pour l'histoire, le spectateur étant comme Claude impatient de le voir s'endormir pour retrouver un réel souffle de magie. Un ennui poli dans la réalité et un émerveillement dans le songe donc, tout cela se perpétuant à la prestation de Gérard Philippe de plus en plus agaçant en héros boudeur alors que toujours charmeur et bondissant en miroir assuré de lui-même. 3/6
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Kevin95
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par Kevin95 »

Je vais finir par être le seul à trouver ce film charmant et d'une réelle élégance. :|
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: René Clair (1898-1981)

Message par locktal »

Non tu n'es pas le seul : j'ai un très bon souvenir de Les belles de nuit. Il y a certes un moment que je ne l'ai pas revu (pourtant je le possède en blu-ray), mais j'en ai gardé un souvenir plutôt charmant... Cela dit, j'ai du coup un peu peur de le revoir.
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