Raoul Walsh (1887-1980)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Strum
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Strum »

AtCloseRange a écrit :Pour l'avoir revu récemment, j'ai juste toujours un peu de mal avec la Vallée de La Peur dont l'aspect psychologisant/psychanalytique me semble avoir plus mal vieilli.
Oui, je pense que ça reste moins bon que Colorado Territory. Et puis, personnellement, je préfère Joel Mc Crea à Mitchum.
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AtCloseRange
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par AtCloseRange »

Je te rejoins sur Mc Crea (même si j'ai peur de relancer un débat sur les "vraies" qualités d'acteur de Mitchum :mrgreen: )
Et je rajouterais, dans un autre registre, The Strawberry Blonde.
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Thaddeus
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Thaddeus »

Strum a écrit :Oui, je pense que ça reste moins bon que Colorado Territory. Et puis, personnellement, je préfère Joel Mc Crea à Mitchum.
Une autre question serait : préfères-tu Joel McCrea au Bogart de La grande évasion ?

Par ailleurs, Pursued possède (à mes yeux) un sacré atout en la personne de Teresa Wright. Une des petites faiblesses qui me perdra.
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Strum »

Thaddeus a écrit :Une autre question serait : préfères-tu Joel McCrea au Bogart de La grande évasion ?
Dans l'absolu, je préfère Bogart. Mais je pense que Colorado Territory, même si c'est un remake, est un meilleur film que La Grande Evasion. Peut-être que le récit fonctionne encore mieux dans le cadre du western et de ses grands espaces. Et je trouve le sex appeal de Virginia Mayo, dans son chandail échancré, supérieur à celui d'Ida Lupino. :oops:
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Thaddeus
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Thaddeus »

Faut dire qu'elles ne jouent pas dans le même registre. Virginia Mayo investit la sensualité incendiaire de la sauvageonne impétueuse, au tempérament de feu. Ida Lupino fait plus petite chose fragile et délicate, qu'on aurait envie de protéger des turpitudes du monde.
Dernière modification par Thaddeus le 6 août 13, 19:10, modifié 1 fois.
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par riqueuniee »

Moi j'aime bien les deux films. La transposition de l'histoire dans un cadre westernien fonctionne en effet particulièrement bien.
A noter que j'ai toujours entendu parler du premier film (High Sierra) sous son titre original. Sans doute à cause de l'homonymie (en VF) avec le film de Sturges avec McQueen. C'est l'inverse pour le deuxième (je préfère même le titre français).
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Strum »

A Thaddeus : Certes. Mais je pense que j'ai un faible pour les sauvageonnes impétueuses. :mrgreen:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par AtCloseRange »

Je crois que je confonds parfois Virginia Mayo et Rhonda Fleming

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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Federico »

Thaddeus a écrit :Pursued possède (à mes yeux) un sacré atout en la personne de Teresa Wright. Une des petites faiblesses qui me perdra.
Tant qu'à se perdre, je préfère aussi les petites faiblesses de ce type à certaines forces plus brutales (je ne donnerai pas de nom pour ne vexer personne) :wink:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Federico »

AtCloseRange a écrit :Je crois que je confonds parfois Virginia Mayo et Rhonda Fleming
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C'est pourtant facile de les distinguer : Mayo a une coquetterie dans l'oeil et Fleming dans le bassin :mrgreen: :arrow:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Supfiction »

Thaddeus a écrit :Faut dire qu'elles ne jouent pas dans le même registre. Virginia Mayo investit la sensualité incendiaire de la sauvageonne impétueuse, au tempérament de feu. Ida Lupino fait plus petite chose fragile et délicate, qu'on aurait envie de protéger des turpitudes du monde.
Bien vu. Personnellement je ne saurai choisir entre Virginia et Ida, les deux sont excellentes dans leur genre respectif (attention, Ida est délicate mais pas si fragile que ça..).
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Federico »

Supfiction a écrit :
Thaddeus a écrit :Faut dire qu'elles ne jouent pas dans le même registre. Virginia Mayo investit la sensualité incendiaire de la sauvageonne impétueuse, au tempérament de feu. Ida Lupino fait plus petite chose fragile et délicate, qu'on aurait envie de protéger des turpitudes du monde.
Bien vu. Personnellement je ne saurai choisir entre Virginia et Ida, les deux sont excellentes dans leur genre respectif (attention, Ida est délicate mais pas si fragile que ça..).
Tout à fait. Ida Lupino, même encore à ses débuts (elle s'est un peu ragaillardit avec l'âge) avait l'air d'une brindille mais dégageait déjà une très forte personnalité. Sa voix rauque, son regard lourd de sens et la légère dissymétrie plus moqueuse que mutine de son visage n'étaient pas ceux d'une petite chose fragile.
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par kiemavel »

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Les nus et les morts (The Naked and the Dead)
1958
Scénario : Denis et Terry Sanders
D'après le roman de Norman Mailer
Image : Joseph LaShelle
Musique : Bernard Herrmann
Produit par Paul Gregory (RKO)
mais distribué par Warner

Durée : 131 min

Avec :

Aldo Ray (Le sergent Croft)
Cliff Robertson (Le lieutenant Hearn)
Raymond Massey (Le général Cummings)
Richard Jaeckel (Gallagher)
Lili St. Cyr (Lily)
Barbara Nichols (Mildred Croft)

Impossible de résumé un tel film…L'essentiel de l'action se déroule sur une ile indéterminée du Pacifique occupée par les japonais. On assiste au débarquement puis alors que les troupes américaines sont bloquées par des ennemis dissimulés en grand nombre dans des poches de résistance difficiles à prendre, le gros des troupes japonaises restant invisible, le comandant en chef de l'opération, le général Cummings décide d'envoyer une compagnie vers une colline qui domine la région pour identifier l'emplacement et l'importance des troupes ennemis. Par ressentiment à son égard, le général donne le commandement de cette mission dangereuse au jeune et inexpérimenté Lieutenant Hearn qui s'attire ainsi la méfiance des hommes de troupe et l'inimitié du sergent Croft qui commandait la compagnie jusque là…

Les hommes
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Un film construit en deux parties. Dans la 1ère, 3 personnages exposent leurs conceptions de la guerre et la façon dont elle doit être menée. Il y a d'abord le général Cummings (Raymond Massey), un vieil officier convaincu que pour obtenir des résultats, il doit mener ses hommes d'une main de fer, instiller la peur chez ses hommes et les briser pour qu'ils craignent encore plus leurs supérieurs que l'ennemi. C'est le même discours que tient à ses hommes le sergent Croft (Aldo Ray), impitoyable avec les ennemis comme avec les hommes de sa compagnie. Si le général est le théoricien, son relai sur le terrain sans que jamais ils ne soient en contact, c'est le sergent Croft sauf que ce dernier ne s'en tient pas aux discours. Ses conceptions sur la guerre et la façon dont elle doit être menée se traduira en actes. Entre les deux, par son grade comme pour les conceptions qu'il affiche, il y a le lieutenant Hearn (Tony Richardson), un officier humaniste qui s'opposera d'abord à Cummings puis à Croft dans la seconde partie du film qui suivra la progression de la compagnie infiltrée en territoire ennemi. Les travaux pratiques en quelques sorte car on verra l'application sur le terrain de ces conceptions et les conséquences de ses conflits de personnalité, tout à fait concrètement en raison des choix plus ou moins justes qui seront fait et leurs conséquences parfois tragiques qu'ils auront pour les hommes de la compagnie.

Avant çà, c'est aussi dans la 1ère partie, que l'on aura la partie "les nus"…du titre, c'est à dire les femmes, omniprésentes malgré leur absence. C'est pour ainsi dire uniquement par les femmes et la sexualité que Walsh (adaptant Mailer) résumera -et utilisera de manière symbolique- le contraste entre la vie civile et le comportement guerrier des hommes en présence. Mais cette "obsession" des femmes ne passera que par l'imaginaire, le souvenir et les rêveries des hommes à part dans le préambule qui fait office de prologue tout à fait distinct du reste du film qui débute par une longue séquence montrant les soldats passant une soirée dans un baraquement en retrait des combats. Ils boivent, parlent haut, se battent, parlent des femmes surtout, de leurs petites amies. Certains en ont d'ailleurs parmi les "artistes" légèrement vêtus qui animent les lieux. Après çà, on ne verra effectivement aucune femme sauf qu'elles seront omniprésentes dans l'esprit des combattants. Une façon sans doute de conjurer la peur car dès le lendemain de la soirée libre des soldats, ils débarquent sur une ile indéterminée tenue par les japonais. Mailer et les scénaristes établissent même un lien entre l'attitude des hommes vis à vis des femmes et leurs comportements de guerriers. Les souvenirs des soldats sont presque tous directement érotiques pour ne pas dire clairement sexuels même si Raoul Walsh se plaignait que l'on avait censuré un film dont il disait, parlant des producteurs et du studio : "Ils ont coupé les nus et ils ont laissé les morts ". En fait, le film montre le maximum de ce que l'ion pouvait montrer en 1958. La frustration sexuelle des hommes y est même plutôt démonstrative. Elle est exprimée par les hommes de troupe : Un soldat amuse toute la compagnie lorsqu'il leur montre ce qu'il a fait peindre à l'intérieur de son duvet par un peintre professionnel, le portrait grandeur nature d'une femme. Il se roule dedans et plus tard l'exhibera pour amuser les copains mais cette frustration se traduit surtout par les rêves et les rêveries des principaux personnages par lesquels Mailer cherche à démontrer que les frustrations et les rancoeurs des uns en raison de l'échec de leurs vies privées rejaillira sur leurs comportements de guerriers. Alors qu'un violent orage éclate, le Sgt. Croft s'abrite sous un camion et commence une rêverie pendant laquelle il se revoit dans les premiers temps de la rencontre avec sa femme. L'enthousiasme et l'émerveillement qu'ils affichent et leur dialogue montrent qu'ils viennent manifestement de faire l'amour. Plus tard, Croft rêvera à nouveau de sa femme mais pour un sale souvenir. Il se rappelle un retour imprévu à son domicile au cours duquel il surprend sa femme avec un autre homme. C'est Croft lui-même qui plus tard au cours d'un échange avec ses hommes révèlera la suite des événements, la rupture avec sa femme, et qui leur dira -coupant une conversation des soldats- de ne pas se faire d'illusions sur le comportement de leurs femmes respectives qui, alors qu'ils sont au combat, doivent s'amuser et profiter de la vie en leur absence. Le sergent Croft est montré comme littéralement obsédé par ses souvenirs et ses discours sur l'infidélité des femmes reviendront à 2 ou 3 reprises.

Les nus
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Les rêves du lieutenant Hearn sont plus heureux. Au cours de son seul rêve, Il se revoit avec plusieurs femmes et manifestement sa vie sentimentale est beaucoup plus satisfaisante. C'est d'ailleurs ce qu'il dit un peu imprudemment au général Cummings dans la scène clé du film qui intervient au bout d'une heure. Alors que des divergences étaient déjà apparues entre le général et son second aux sujets des privilèges dont bénéficient les officiers, l'opposition reprend de plus belle au cours d'une partie d'échec entre les deux hommes. La conversation reprend de manière d'abord détendue. On commence à comprendre le ressentiment de Cummings qui voudrait être compris par le jeune Hearn dont il a connu le père. On en apprend ainsi un peu plus sur Hearn, visiblement un homme issu d'un milieu privilégié dont le père fut un brillant officier avant de devenir un homme d'affaires prospère. Le jeune lieutenant fait d'ailleurs le rapprochement entre le discours du général vis à vis de ses hommes avec celui que tient son père au sujet de son personnel qu'il traite : "comme du bétail ou des machines sans âme". L'échange se raidit à nouveau mais il dégénère vraiment lorsque le général commence à livrer des informations sur sa vie privée. Après que Hearn se soit vanté devant le général de ses succès féminins, lui révélant avoir plusieurs maitresses et aucunement l'intention de se marier, le général lui dira avoir toujours aimé sa femme et n'avoir jamais pensé à la séparation malgré le fait qu'ils n'ont pas eu d'enfants. Une révélation qui provoque un discret sourire chez Hearn et qui provoque une réaction hargneuse du vieil homme : " Vous croyez que c'est moi, n'est ce pas ? "…et sa colère. Encore une fois, Walsh (et surtout Mailer) "psychologise" beaucoup, laissant entendre que l'infertilité assimilée parfois dans "l'inconscient collectif" à l'impuissance crée une distorsion entre l'attitude virile de l'homme de pouvoir qui est affiché et l'image "profonde" qu'il a de lui-même et de sa virilité. Çà se double ici de son incompréhension devant celui qu'il voudrait voir comme son fils spirituel…Cummings est donc montré comme un homme frustré et déçu par sa vie privée…tout comme Croft, le mari trompé, dont l'échec de la vie sentimentale, conditionne en partie le comportement. Quoiqu'il en soit, la scène se termine par un coup de téléphone du général qui recommande le Lt Hearn pour une mission dangereuse que doit mener le bataillon de Croft...

La dernière heure nous montre donc la progression de la patrouille et c'est du grand cinéma qui rappelle souvent des choses vues notamment dans Aventures en Birmanie (Objective Burma) en tout cas visuellement çà y ressemble…car pour la psychologie des personnages on est plus proche d'un autre film montrant lui aussi une compagnie isolée, c'est le Côte 465 (Men in War) d'Anthony Mann. Alors que l'on s'attend, en raison des scènes précédentes, à une confrontation immédiate entre Hearn et Croft, il n'en est rien. On avait vu auparavant ce dernier abattre des prisonniers japonais, employer des hommes pour ôter les dents en or des cadavres et les garder en collier autour de son cou, etc…Mais Croft est tout de même montré comme un chef compétent et respecté de ses hommes, bien que craint par eux. D'ailleurs, dans un premier temps, Hearn le respecte et écoute ses conseils avisés malgré son hostilité préalable et le jeune lieutenant commence même à gagner le respect des hommes de troupe mais très vite çà se gâte.
Spoiler (cliquez pour afficher)
…D'abord quand Croft veut abandonner un soldat grièvement blessé alors que Hearn est prêt à utiliser deux hommes pour le ramener. Par la suite, Croft ment délibérément au sujet de la soi-disant absence des japonais dans un secteur que les hommes ont été chargée d'explorer…Puis tente d'envoyer le Lt. Hearn à la mort pour s'en débarrasser. Il est clairement montré comme un homme aux tendances suicidaires et au bord de la folie qui provoquera la mort d'un de ses hommes, la grave blessure d'un autre, menacera de mort un troisième.
Mailer (et Walsh ) prennent clairement parti contre Cummings et Croft et d'ailleurs pour ce qui est de "la grande histoire", c'est un colonel désobéissant aux ordres de Cummings qui permettra la victoire des troupes américaines et -en dépit des discours cyniques sur les motivations humaines de Croft et Cummings- c'est bel et bien le dévouement de 3 hommes qui sauveront la vie du Lt. Hearn, en le transportant sur 25 km à travers la jungle pour qu'il soit ramené à temps pour être soigné. Ce film qui nous montre un vieil officier buté, réactionnaire et aux tendances fascisantes et un sous-officier névrosé gagné par la folie et les graves conséquences que leurs décisions entrainent, peut être considéré comme un des grands films antimilitaristes qui virent le jour durant les années 50 (après ceux d'avant guerre)/spoiler]

Les morts
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J'ai toujours considéré ce film comme le meilleur film de guerre de Raoul Walsh mais je sais que cet avis est loin d'être majoritaire, de nombreux cinéphiles préférant Objective Burma. C'est un film de guerre que l'on peut qualifié de "psychologique" dans lequel les discours et les symboles sont certes un peu trop démonstratifs et appuyés mais çà reste pour moi, à l'issu de cette nouvelle vision, le plus riche film de guerre de Walsh. Le trio d'interprètes principaux est remarquable. Raymond Massey en vieux général obtus est sur une vitesse mais il est excellent. Cliff Robertson trouve un de ses meilleurs rôles dans celui de cet officier humaniste. Enfin, Aldo Ray est formidable en sous-officier aux pulsions suicidaires. En revanche, je suis un grand admirateur de Bernard Herrmann mais je trouve que cette fois sa musique est trop omniprésente, tonitruante et parfois agaçante. Par moment il recycle des thèmes antérieurs mais en "agravant" sa partition par l'omniprésence des cuivres mais par exemple la progression du détachement de Croft dans des paysages de jungle qui rappellent objectif Burma pouvaient se passer de musique. En revanche le thème principal qui ouvre le film et que l'on retrouve dans la partie finale est lui très bon. Vu en VF et en VOST. Le film avait été édité en vhs en version française dans une copie correcte (et semble t'il aussi en vost mais je ne l'ai pas eu en main) et il a été diffusé à la TV en vost mais pas hier. Double aberration : pas de passage TV depuis des lustres…et pas de DVD disponible.
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daniel gregg
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par daniel gregg »

Il me semble pourtant qu'il avait été diffusé il n'y a pas si longtemps sur TCM. Une bonne occasion de le revoir tiens !
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Profondo Rosso
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Profondo Rosso »

Gentleman Jim (1942)

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A San Francisco, Jim Corbett n'est qu'un modeste employé de banque passionné par la boxe et désireux de s’élever au-dessus de sa condition. Cet arrivisme agace les membres du Club Olympique ainsi que la jolie Victoria Ware dont la tentative de faire corriger l'ambitieux Jim lance au contraire sa carrière...

Gentleman Jim est un des sommets de la collaboration entre Errol Flynn et Raoul Walsh. Le film est le biopic de James J. Corbett, considéré comme un des pères de la boxe moderne et qui connut son heure de gloire à la fin du XIXe. Le scénario de Horace McCoy adapte d'ailleurs The Roar of the Crowd, autobiographie de Corbett parue en 1924 tandis que le film sort neuf ans après sa disparition en 1933. Plus qu'un boxeur émérite, Corbett fut une véritable star de son temps, étendant sa notoriété sportive à d'autres disciplines en jouant notamment au théâtre. C'est cet angle que choisit d'exploiter Walsh avec Errol Flynn dans le rôle-titre qui incarne à merveille le mélange de charisme et de vantardise que représente le champion. D'une assurance sans faille et doté d'un bagout irrésistible, Corbett un phénomène dont l'énergie naturelle préfigure constamment celle dont il saura faire preuve sur le ring. Sa vivacité s'exprimera tout d'abord ainsi par sa capacité à attirer l'attention, s'attirant les bonnes faveurs d'un juge lors d'une rafle mouvementée durant un combat clandestin et s'introduire ainsi dans le très huppé Olympic Club dont il sera la coqueluche tout en s'attirant l'inimitié des habitués mécontents de s'acoquiner à ce bruyant parvenu.

Ainsi dépeint, Corbett aurait pu être un personnage agaçant d'assurance mais Errol Flynn par son aisance et énergie gagne immédiatement les faveurs du spectateur. L'empathie fonctionne d'autant plus en faisant de sa réussite sportive un ascenseur social qui en fait le miroir des classes populaires gouailleuses se pressant aux combats clandestins tandis que les nantis qu'il a nargué y espèrent sa défaite. La présentation tapageuse de la famille Corbett s'inscrit dans cette logique et s'imprègne de cet état d'esprit bagarreur où l'attachement mutuel ne s'exprime que par des beuveries épiques, des désaccords et moqueries se concluant par de mémorable bagarres fraternelles que l'entourage guette avec le running gag du hurlement à la cantonade The Corbetts are at it again!. Walsh orchestre ainsi un film qui file à tout allure, ne s'appesantit pas en questionnement et réflexions inutiles à l'image de la trajectoire triomphale de son héros bondissant. La famille est ainsi caractérisée dans le bruit et la fureur (hormis un très joli moment où Corbett vient rassurer sa mère inquiète avant un combat) et il en va de même pour l'histoire d'amour entre Corbett et Victoria Ware (Alexis Smith) où l'animosité et les répliques vachardes cachent une passion qui ne demande qu'à s'exprimer. Agacée par la prétention de Corbett tandis que ce dernier ne supporte pas son caractère hautain, il faudra la conclusion où notre héros fend l'armure face à un adversaire vaincu pour que Victoria comprenne enfin sa noblesse d'âme sous les rodomontades. Si l'on ne ressent pas tout à fait l'alchimie si parfaite qui pouvait exister entre Flynn et Olivia De Havilland, Alexis Smith compose un enjeu amoureux élégant et plein de caractère.

Dernier point marquant, il s'agit évidemment des combats. Walsh signe une mise en scène percutante où la puissance, la vélocité et la technique des combattants est constamment mise en valeur. Le réalisateur capture l'énergie de joutes toujours dépeintes dans des cadrages limpides donnant un sentiment de mouvement perpétuel avec une caméra semblant se plier au pas chassés de Corbett. Le découpage est ainsi restreint à son efficacité la plus stricte (Walsh se prémunissant ainsi d'un remontage du studio avec un travail quasi impossible à remanier) où les inserts ne servent qu'à offrir un reflet enfiévré de la foule par rapport à ce qui se joue sur le ring. Le combat épique contre Joe Choynski en offre un exemple parfait, prolongeant ce mouvement et multipliant les rebondissements en dehors (le shérif jeté à l'eau, les frères de Corbett vivant littéralement le combat qu'ils miment avec ardeur) que sur le ring avec des assauts furieux, de la tricherie et des adversaires se mettant tour à tour au tapis (Flynn donna tant de sa personne qu'il frisa d'ailleurs l'attaque cardiaque sur le tournage, son train de vie dissolu n'aidant pas). Walsh fait d'ailleurs une vraie distinction entre la barbarie entre brute épaisse du début du film et la virtuosité et énergie dont fait preuve sa mise en scène par la suite, capturant par la seule image les lettres de noblesse qu'acquiert la boxe sous la férule de Corbett. Cette idée culmine dans le magnifique affrontement final contre Jack L. Sullivan (Ward Bond) où la férocité du ring n'a d'égale que le très touchant témoignage de respect mutuel qui conclut le film. C'est là que la différence se fait et que la boxe gagne ses galons de discipline de gentlemen, le folklore gravitant autour d'eux n'ayant plus d'importance. 5/6
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