James Ivory

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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joe-ernst
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Re: James Ivory

Message par joe-ernst »

Jeremy Fox a écrit :Chambre avec vue sur DVDclassik
une transposition cinématographique réussie d’un roman mêlant brillamment romantisme édouardien et réflexion féministe.

Il y a pourtant une autre thématique très importante dans le roman et qui n'apparaît qu'en filigrane dans le film, c'est la question des classes sociales. La relation entre Lucy et George, si compliquée soit-elle, s'explique entre autres par la différence de classe à laquelle ils appartiennent chacun.
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
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Profondo Rosso
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Re: James Ivory

Message par Profondo Rosso »

Les Vestiges du jour (1993)

En 1959, Miss Kenton écrit à son ancien chef, Mr Stevens, au sujet de la mort récente du maître de celui-ci, Lord Darlington, un comte anglais ; ils ont été tous deux à son service avant-guerre, elle comme intendante et lui comme majordome. Elle évoque également un scandale qui a éclaté après la Guerre ayant impliqué le comte. Afin d'aller rendre visite à Miss Kenton, Stevens obtient un congé de son nouveau patron, riche américain nommé Lewis qui a racheté le domaine Darlington. Chemin faisant, dans la limousine que Lewis lui a prêtée, Stevens repense au jour de 1936 où il a engagé Miss Kenton.

The Remains of the Day est certainement un des fleurons des productions Ivory/Merchant avec cette très belle adaptation du roman éponyme. Le récit narre l'introspection à laquelle procède le majordome Mr Stevens (Anthony Hopkins) alors qu'il s'apprête à retrouver Miss Kenton (Emma Thompson) avec laquelle il fut au service de Lord Darlington (James Fox) près de vingt ans plus tôt au milieu des années 30. Il se souvient de ce qui aurait pu être, de leurs désaccords et attirances mutuelles, sacrifiée sur l'autel de la dévotion à leur maître d'alors. Pourtant, tout au long de ces souvenirs Stevens se remémora un Lord Darlington engagé dans les grandes affaires du monde, aux intentions nobles peut-être mais aux alliances douteuses avec les ténors de l'Allemagne Nazie émergente dont il contribuera à rétablir l'éclat avec les conséquences que l'on sait. L'ensemble du récit questionnera ainsi la fidélité finalement vaine de Stevens, les occasions qu'il a manqué de vivre réellement plutôt que de s'oublier derrière un maître inapproprié.

Kazuo Ishiguro avait mêlé l'intime et la grande Histoire avec une subtilité rare dans son roman. Il narrait ainsi le tournant politique critique des années 30 qui vit l'Angleterre (et d'autres nations européennes) soutenir le rétablissement militaire de l'Allemagne désormais gouvernée par Hitler pour préserver la paix mais aussi par culpabilité suite à un traité de Versailles abusif. En Angleterre ce mouvement se fit par des lords anglais sympathisant du régime nazi, par conviction ou en étant abusés. Par ses origines, Ishiguro se sera souvent interrogé sur les choix qu'il aurait eu à effectuer s'il était né une génération plus tôt dans un Japon totalitaire et s'il aurait suivi le mouvement de fanatisme collectif qui animait le pays. En replaçant cette idée dans cette Angleterre des années 30, l'auteur la situait à une plus petite échelle en confrontant un pouvoir qui se perd avec Lord Darlington et ses accointances suspectes et un peuple s'interrogeant entre soumission aveugle et volonté propre représenté par le majordome Mr Stevens. James Ivory capture merveilleusement cela dans cette adaptation très fidèle où ces grands questionnements constituent un arrière-plan primordial mais diffus et où ce sera surtout la terrible histoire personnelle de Stevens qui nous touchera au cœur.

Les sentiments, la nostalgie et les regrets de Stevens ne peuvent s'exprimer qu'à travers le souvenir. Ivory ouvre donc le film sur un ensemble de fondu enchaîné où s'entremêle le domaine de Darlington déserté du présent (et désormais occupé par le un propriétaire américain Mr Lewis (Christopher Reeve)) avec l'effervescence du passé, ces réunions au sommet, l'agitation des domestique et surtout la présence de Miss Kenton. Le réalisateur reprend la structure du roman tout en l'allégeant (les rencontres du présent durant le voyage de Stevens son moins nombreuse tout comme ces observations du panorama naturel anglais dont un passage donne son titre au livre) avec ce voyage physique mais surtout intérieur pour notre héros. Dans une sorte de métaphore entre colon et colonisé, Stevens est un masque sans émotion qui ne s'anime que pour satisfaire les attentes de Lord Darlington. Il excelle dans cette tâche où il croit contribuer à un grand dessein qui le dépasse mais où son maître va changer l'histoire pour le meilleur. L'arrivée de Miss Kenton comme intendante va bousculer ces certitudes et le confronter à ses manques. Ce sera d'abord ses carences relationnelles quand il s'avéra incapable de communiquer avec Miss Kenton dans le cadre de leur travail. Puis ses carences morales le montrant incapable de se révolter face aux dérives de Lord Darlington renvoyant deux servantes juives et enfin la carence amoureuse où malgré des sentiments réciproque il ne saura répondre à l'amour de Miss Kenton.

Ivory reste totalement dans la continuité d'Ishiguro qui est un écrivain de la retenue et de la suggestion, où le bouillonnement des personnages est nié par leur voix intérieure faussement stoïque (ce sera tout aussi vrai dans Never Let Me Go) mais trahi par de subtil détail dans leur réactions. Anthony Hopkins s'avère un bouleversant interprète pour exprimer cela. Le scénario de Ruth Prawer Jhabvala (reprenant le travail d'Harold Pinter pour une adaptation initialement destinée à Mike Nichols) agence ainsi des situations de plus en plus cruelles trahissant la coquille vide que semble être Stevens. Face au décès de son propre père il n'oublie pas de renvoyer le médecin à un invité souffrant d'ampoules aux pieds, il se range aveuglément derrière l'opinion de Darlington lors du renvoi des jeunes juives et n'arrive pas à retenir une Miss Kenton bouleversée et sur le départ qui n'attend qu'une réaction de sa part pour s'affairer à une énième réunion politique de Darlington. Tout doit être sacrifié à l'atteinte de la dignité du grand majordome qu'il pense être, au soutien d'un maître qui en sait forcément plus et qui voit plus loin que lui (le scénario intégrant magnifiquement dans la narration toutes les envolées sur la définition d'un grand majordome prétexte à de passionnantes réflexions dans le livre et montrant la vision étriquée de Stevens). Le personnage aurait pu être détestable sans un Anthony Hopkins dont le phrasé distingué et impersonnel est constamment trahi par ce regard vacillant d'amour mais incapable d'être suivit par un mot ou un geste. Si l'on s'amuse des échanges revêches entre Stevens et Miss Kenton (comme des enfants l'amour ne pouvant s'exprimer que par le conflit), c'est par les timides expressions de son trouble qu'Hopkins bouleverse et rend ce majordome psychorigide si humain. Toute manifestation affective ne passe que par l'angle froid du travail, d'un vous être très importante pour cette maison lancé pour la remercier de ne pas avoir démissionné ou ce moment terrible où il évoque un problème domestique alors qu'elle est en larmes suite à son attitude. Et parfois le temps d'un instant suspendu l'armure se fend dans la plus belle scène du film illustrant parfaitement leur relation. Miss Kenton taquine Stevens sur un ouvrage qu'il lit et ne souhaite pas lui montrer (un livre d'amour), elle s'agrippe à lui en lui retirant doucement le livre des mains tandis qu'il demeure immobile, l'observant fasciné et amoureux dans la pénombre sans pouvoir répondre à ce rapprochement. Emma Thompson, ardente, vindicative et lumineuse est absolument magnifique et le couple si troublant façonné par Ivory dans Retour à Howards End (1992) dégage toujours autant d'alchimie.

Le récit est d'autant plus cruel qu'en plus de ne pas (chercher à) comprendre les liaisons dangereuses de son maître, Stevens ne voit même pas à quelle point elles méprisent sa propre condition sociale. Autant avec le personnage de Stevens que celui de Lord Darlington (excellent James Fox) le récit semble effectuer une transition deux générations. L'anglais flegmatique plaçant l'honneur avant toute chose quitte à se faire duper (Darlington avec les allemands, Stevens avec Darlington) et celui plus lucide voyant au delà de la surface représenté par le personnage de Hugh Grant, le virage étant annoncé par l'américain joué par Christopher Reeve (une idée renforcée par Ivory fusionnant en un seul personnage dans le film l'américain participant à la première réunion et celui possédant Darlington Hall à la fin) qui traitera judicieusement ces gentlemen pétris de bonnes intentions d'amateurs. A l'échelle de l'Histoire cela causera le déshonneur de ceux qui n'ont pas su voir et laisser envenimer la situation jusqu'à l'explosion de la Deuxième Guerre Mondiale. A un niveau plus intime ce sera une vie gâchée et des regrets éternels avec l'ultime entrevue entre Stevens et Miss Kenton bien trop tard. Une fois de plus l'échange informel trahit le trouble de chacun et la détresse ne peut s'exprimer qu'une fois l'autre suffisamment éloigné avec les yeux baigné de larmes d'Emma Thompson emmenée par le bus et un Anthony Hopkins brisé et immobile sous une pluie battante. Un grand film et une magnifique adaptation. 5,5/6
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Re: James Ivory

Message par Supfiction »

Profondo Rosso a écrit :Les Vestiges du jour (1993) 5,5/6
Merci! Just Profond. Un très très grand film! :D :D
ça me rappelle que je devais me procurer le BR sur zavvi...
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Re: James Ivory

Message par Profondo Rosso »

Très beau BR en plus, sinon après Never Let Me Go Kazuo Ishiguro inspire décidément des films somptueux !
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Re: James Ivory

Message par Profondo Rosso »

Quartet (1981)

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Marya et Stephan, jeune couple bohème, vivent dans l'insouciance du Montparnasse des années 20. Jusqu'au jour ou Stephan se fait arrêter pour recel d'œuvres d'art. Marya est alors recueillie par un couple de mécènes anglais, bien connu des milieux artistiques.

Quartet est une des œuvres qui amorce la reconnaissance la reconnaissance critique en devenir de James Ivory, salué notamment par le prix d'interprétation d'Isabelle Adjani à Cannes (qui réussira l'exploit d'avoir un double prix d'interprétation féminine puisqu'elle est récompensée durant le même festival pour Possession). Le film adapte le roman Postures de Jean Rhys qui s'y inspirait en partie de sa propre existence dans le Paris des Années Folles. C'est un matériau idéal pour James Ivory qui y retrouve ses thématiques sur les rapports de classe et la soumission. Marya (Isabelle Adjani) une jeune anglaise d'origine créole mène une vie bohème et insouciante avec son époux Stefan (Anthony Higgins) jusqu'à ce que celui-ci se fasse arrêter pour recel d'œuvre d'art. Livrée à elle-même tandis que Stefan est condamné à un an de prison, Marya croit trouver une planche de salut quand les Heidler, un couple anglais formé de HJ (Alan Bates) et Lois (Maggie Smith) décide de la recueillir. Pourtant très vite un rapport malsain va s'établir entre les trois.

Le Paris romantique et flamboyant fantasmé de cette période n'existe vraiment que par intermittence et surtout au début du film. Dès l'installation du ménage à trois un lien sordide lie le couple et leur jeune protégée. La bienveillance de HJ n'avait pour but que de posséder (dans tous les sens du terme) Marya, tous cela avec l'assentiment de Lois. Marya après avoir tenté en vain de résister va finalement céder aux avances insistantes de HJ. Le scénario développe avec finesse l'issue inéluctable de cette cohabitation. D'abord par ce fameux rapport de classe, Marya livrée à elle-même n'ayant d'autre choix que de s'abandonner aux assauts de HJ. Son dénuement en fait une proie facile, d'autant que la connivence entre les époux la rabaisse sans cesse à sa condition où elle n'est finalement pour eux qu'un jouet, une sorte d'animal de compagnie dont ils finiront par se lasser (ce qui est arrivé à d'anciennes protégée comme on l'apprendra). L'essentiel est de maintenir des apparences respectables derrières lesquelles les relations peuvent être plus libres. Le film est également captivant dans sa description sordide de la condition féminine. Toutes les femmes de l'histoire son dépendante d'un "maître", qu'il soit époux, amants ou client qui disposent d'elles à leurs guise. Sans cela, aucune carrière ou quelconque possibilité d'avenir, ce que l'on comprendra avec toutes les tentatives de fuites vouées à l'échec de Marya, la candeur et la vulnérabilité d'Isabelle Adjani ajoutant à ce côté enfant livré à lui-même. Le plus frappant est l'absence de rébellion de ces femmes face à ce destin, Lois acceptant et encourageant avec tristesse les écarts de son époux (magnifique Maggie Smith qui fait passer toutes nuances en silence et avec un détachement de façade). Marya qui conjugue l'infériorité de sa classe et de son sexe va tomber bien plus bas, tombant finalement folle amoureuse de celui qui la tourmente tant. Isabelle Adjani développe finalement en parallèle de son rôle de Possession une autre expression de la folie, cette fois amenée par celle d'un monde qui ne lui laisse pas d'autre choix que cette soumission déguisée en amour passionnel. Elle semble toujours dominée, affaissée et assujettie par Alan Bates lors de leur scènes d'amours et lorsqu'elle daigne l'affronter on ressent plus une sorte de dépit résigné que de la vraie rébellion. Ivory et la scénariste Ruth Prawer Jhabvala renforce le côté passionné et torturé de ces rapports en comparaison du livre, HJ étant plutôt un anglais réfléchi pour lequel ce type de relation est normale au vu de son statut quand la prestation d'Alan Bates tutoie la démence par instant. De même Marya est nettement moins jolie que son équivalent au cinéma rendant naturel cette soumission alors que le drame est plus fort dans le film puisque même la beauté d'Isabelle Adjani ne pourra la sauver. C'est un thème au cœur de l'œuvre de Jean Rhys notamment son livre le plus connu La Prisonnière des Sargasses, sorte préquel de Jane Eyre où elle narrait le destin de la première épouse créole maudite de Rochester.

James Ivory instaure une atmosphère lente, oppressante et mortifère où l'on est bien loin des pétaradantes visions hollywoodiennes des Années Folles. La photo de Pierre Lhomme ajoute un côté terne et blafard qui jure avec l'inspiration impressionniste des compositions de plan d'Ivory, les scènes musicales montrent des danseuses momifiées et fantomatiques et la bande-son réinvente de façon plus contemporaine les deux titres de jazz interprétés par Armelia McQueen comme pour mieux s'éloigner des sons plus pétaradants et joyeux de l'époque. Les femmes restent les grandes perdantes jusqu'au bout et si rupture il y a, ce sera toujours pour tomber dans les griffes d'un nouveau "protecteur" à l'image du final glaçant. Pas le Ivory-Merchant le plus facile d'accès mais absolument captivant. 4,5/6
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Re: James Ivory

Message par Grimmy »

En faisant de recherches pour savoir si enfin Mr and Mrs Bridge de James Ivory serait enfin disponible en VOSTF chez nous (hélas non, toujours pas), je découvre l'existence du toujours dernier Ivory en date, un mystérieux The city of your final destination tourné en 2007 avec Anthony Hopkins, Laura Linney et Charlotte Gainsbourg et dont les dates de sorties s'étalent dans différents pays entre 2008 et 2010. A ma connaissance, rien chez nous. Pas de sortie salles, pas de dvd ...Quelqu'un connait et/ou l'a vu ?
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Thaddeus
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Re: James Ivory

Message par Thaddeus »

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(en italiques : films découverts en salle à leur sortie)


Quartet
En apparence seulement, Quartet est un joli bibelot inutile, où rien ne manque ni ne dépasse dans la peinture des intellectuels anglo-saxons du Paris cosmopolite des Années folles, et qui joue sur l’anachronisme et l’ambigüité des rapports humains. Mais cette surface dissimule l’essentiel : le balancement entre deux mondes et le désespoir de n’appartenir à aucun. Éternelle errante, étrangère à tous les milieux, l’héroïne fidèle à son cœur continue seule sa course infinie et son destin vagabond, trouvant en Isabelle Adjani une interprète intense et très touchante. C’est sa sincérité qui fait mal, et c’est l’ironie tendre dont témoigne Ivory envers tous ces paumés du petit matin, se réfugiant sous la gomina et les fards pour dissimuler leur vide et leur ennui, qui offre au film sa belle identité. 5/6

Chambre avec vue
Là encore, tout est sa place et brille d’un sens consommé de la disposition : les Anglaises victoriennes pour qui un baiser volé est symbole d’infamie, les vieilles gouvernantes bavardes, les beaux jeunes gens avec la mèche en désordre qui barbotent gaiement dans un étang pendant que ces dames leur glissent des regards troublés. Un petit ver dans le fruit, et cette mise en scène oxygénée aurait un air du Messager de Losey. Une nouvelle fois, le cinéaste s’intéresse donc aux conventions sociales et à leurs rapports contrariés avec la petite musique des sentiments, aux impressions juvéniles accompagnant les premiers émois, à la lutte entre les élans du cœur et l’éducation... Une délicate chronique de mœurs où germent toutes les composantes des grandes réussites à venir. 4/6

Maurice
Ivory enroule son tableau social autour d’un jeu subtil sur un transfert passionnel : à la veille de la Grande Guerre, un jeune homme de la haute bourgeoisie anglaise devient un petit monsieur vite effrayé par son idylle homosexuelle, qui se réfugie dans la chasteté puis le mariage de convention, tandis que son amant sincère et entier finit par assumer toutes les conséquences de sa nature. Il poursuit ainsi sa dénonciation de l’hypocrisie et de la mesquinerie morale d’une société lisse et policée, où à la crainte constante du scandale s’ajoutent le comportement d’exclusion et le mépris de ceux qui "savent". Le héros devra franchir la barrière de classe et transgresser pleinement les interdits pour pouvoir enfin gagner la paix avec lui-même – issue d’un très classique mais beau drame de l’amour contrarié. 4/6

Retour à Howards End
Ivory poursuit son exploration d’une Angleterre corsetée à travers le choc de deux cultures, l’attirance entre des êtres que tout oppose, les drames qui se nouent dans des ambiances feutrées. Il montre comment la classe bourgeoise intellectuelle désargentée triomphe sur la bourgeoisie possédante, au prix du sacrifice des classes laborieuses en plein dérapage de leur ascension sociale. Il capte le caractère des personnages, les remous qui affleurent en sourire, l’élégance de la phrase qui dissimule sans nier, la faute pardonnée pour en tirer profit : tout le mécanisme de la diplomatie familiale de caste. Son raffinement, sa subtilité psychologique, son mariage subtil d’humour, de satire au vitriol et d’études de mœurs confèrent à ce tableau du grand monde londonien une vraie perfection harmonique. 5/6

Les vestiges du jour
Le remords et les ruines : voilà ce qu’il reste d’une vie consacrée à une fausse idée de l’existence, gâchée par le souci de l’étiquette et le poids des conventions. Retrouvant précisément sa veine d’entomologiste minutieux, le cinéaste fait l’autopsie d’un échec amoureux, d’une relation et d’un bonheur manqués, en une analyse subtile d’une aristocratie trompée par ses bonnes intentions. Un monde clos, où le rituel quel qu’il soit et son respect peuvent créer un aveuglement coupable. Si la beauté de l’exécution décorative et historique s’exprime à chaque plan, témoignant d’une précision d’orfèvre, jamais elle n’étouffe la tangibilité d’un drame psychologique tout en retenue émotionnelle et douleur à peine perceptible, qui trouve en Anthony Hopkins et Emma Thompson des interprètes plus que parfaits. 5/6

La fille d’un soldat ne pleure jamais
Le plus british des cinéastes américains quitte la haute société anglaise du début du siècle et retrouve sa ville d’élection, Paris, pour une adaptation du roman autobiographique de la fille de James Jones, auteur de La Ligne Rouge et Tant qu’il y aura des hommes. Son récit adolescent, avec ses émois et ses doutes, devient une espèce de plaidoyer sensible pour l’exil désiré, une petite chronique familiale de la fin des années 60 dont la discrétion même est gage de sincérité. D’une facture très appliquée, celle-ci aligne les saynètes mi-tendres mi-nostalgiques en témoignant d’une certaine fraîcheur, mais la ténuité du propos et des portraits de caractères, prétexte à brosser un pan de l’histoire contemporaine par le côté anecdotique (et un peu Art déco) de la lorgnette, en font un film tout à fait oubliable. 3/6


Mon top :

1. Les vestiges du jour (1993)
2. Retour à Howards End (1991)
3. Quartet (1981)
4. Maurice (1987)
5. Chambre avec vue (1985)

Tenant d’un classicisme qui pourrait aisément tirer vers l’académisme décoratif, James Ivory a signé quelques très beaux films d’époque qui en font un réalisateur plus qu’appréciable à mes yeux : une sorte de maître en sa partie. Mais il est vrai que je n’ai pas vu ses films sans doute plus mineurs.
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Re: James Ivory

Message par Jack Carter »

James Ivory invité d'honneur de la 9e édition du festival Écrans Mixtes

Oscarisé en 2018 pour son scénario de CALL ME BY YOUR NAME, le réalisateur américain James Ivory sera présent à Lyon au festival Écrans Mixtes pour sa première rétrospective en France !
8 films dont 3 restaurés 4k et une Master class seront programmés dans cette rétrospective qui se déroulera dans plusieurs cinémas de Lyon et de la Métropole.

Ouverture du festival à l'Institut Lumière mercredi 6 mars, avec la première projection française de la copie restaurée 4k du grand classique MAURICE (1987), en présence de James Ivory.

Rétrospective James Ivory

LES BOSTONIENNES (1984 - restauré 4k)
CHAMBRE AVEC VUE (1985 - 35 mm)
MAURICE (1987 - restauré 4k) - Film d'ouverture
RETOUR À HOWARDS END (1992 - restauré 4k)
LES VESTIGES DU JOUR (1993 - 35 mm)
LA FILLE D'UN SOLDAT NE PLEURE JAMAIS (1998 - 35 mm)
LA COUPE D'OR (2000 - 35 mm)
CALL ME BY YOUR NAME (2017 - Scénariste - Oscar 2018)

+ MASTER CLASS À L'UNIVERSITÉ LYON 2 - BERGES DU RHÔNE
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Supfiction
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Re: James Ivory

Message par Supfiction »

Bien.. mais rien pour Jefferson à Paris que j’espérais car pas revu depuis sa sortie salles.
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Re: James Ivory

Message par Supfiction »

Profondo Rosso a écrit :Chaleur et Poussière (1983)

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Les destins croisés d'Olivia Rivers et d'Anne, sa petite-nièce : la première, épouse d'un fonctionnaire en poste à Satipur, aux Indes britanniques, dans les années 1920, deviendra la maîtresse du Nawar local ; la seconde, après une désillusion amoureuse, quitte son emploi à Londres en 1982 et part en Inde, à Satipur, sur les traces de sa grand-tante, après avoir rencontré un survivant de cette première époque, Harry Hamilton-Paul...

Heat and Dust entame un formidable cycle créatif pour l'association liant le réalisateur James Ivory, son producteur Ismael Marchant et la scénariste Ruth Prawer Jhabvala réunis sous la bannière Merchant Ivory Production, leur maison de production. Le trio réunis depuis 1963 et le premier script de Ruth Prawer Jhabvala pour Merchant Ivory Production où elle adaptait son roman The Householder allait atteindre durant dix ans une reconnaissance publique et critique massive jusqu'aux Vestiges du jour (1993). Ruth Prawer Jhabvala adapte d'ailleurs à nouveau ici un de ses plus fameux romans avec ce Chaleur et Poussière paru en 1975 et pour lequel elle reçut le prestigieux Prix Booker.

Le ton du film se partage constamment entre un idéal de romanesque et un rêve, un fantasme de romanesque. Cette différence se fait à travers la double narration du film, contemporaine et d'époque, la première poursuivant sans cesse la seconde. Anne (Julie Christie), à travers les documents, témoignage et pèlerinage entamé sur place marche donc sur les traces de son arrière tante Olivia (Greta Scacchi) épouse d'un fonctionnaire en poste en Indes dans les années 20 et qui abandonna tout pour l'amour d'un prince indien. La narration offre un joli jeu de miroir entre les époques où si le mimétisme se fait par des même lieux traversés à 60 ans d'écarts, le ton diffère grandement. En 1920 l'héroïne est en opposition constante à son environnement. Quand l'aristocratie anglaise toise les indiens et leur culture du haut de leur condescendance coloniale, Olivia s'y sent comme un poisson dans l'eau et s'ennuie dans les dîners mondain auquel elle doit se soumette. Pétillante, fougueuse et débordant d'énergie ce pays est fait pour elle et c'est par elle qu'on le découvre vraiment à travers son regard émerveillé le temps de beaux moments comme la longue séquence de pique-nique. Cette séduction du pays se concrétisera progressivement à travers celle exercée par le Nawab (Shashi Kapoor) dont le charme, le bagout et le charisme la fera succomber.

La partie contemporaine ne manque pas d'attrait non plus grâce à la prestation pleine d'allant de Julie Christie. On y retrouve la vision bariolée de l'Inde mais sous un jour plus intimiste. Comme son ancêtre, Ann se sent en communion avec cette contrée mais elle n'a pas l'entrave raciale et de classe de son ainée et peut s'y épanouir pleinement. Pourtant ce qui peut être vu comme une avancée est en fait un obstacle. La force de l'histoire d'amour d'Olivia venait de sa rébellion progressive envers son milieu et ses semblables, l'accomplissement de l'interdit magnifiant cette romance par le danger encouru. Ann court après ce genre de sensation suivant la route de sa grande tante mais son environnement est plus paisible, la proximité et les relations mixtes sont acceptées (à l'image du boudhiste occidental farfelu incarné par Charles McCaughan, le dialogue moquant ceux venant en Indes pour suivre un gourou) et lorsqu'elle s'abandonnera à une histoire avec son hôte Inder Lal (Zakir Hussain) leur jolie histoire n'atteindra jamais le souffle de celle du passé. Le présent trop sage semble avoir perdu cette flamme qui animait une Inde pourtant montrée comme une poudrière dangereuse (le pays n'obtenant son indépendance que plus de 20 ans après les évènements du film) mais où la menace agit comme un stimulant au contraire d'un monde moderne endormi. D'ailleurs si l'Inde contemporaine et ses habitants paraissent idylliques, la vision du passée s'avère moins manichéenne avec notamment un Nawab soupçonné de complicité avec des voleurs pillant le village.

Ivory capture ces moments avec une grande élégance et sobriété, loin de la flamboyance affichée par un David Lean sur La Route des Indes au sujet proche. La narration prend son temps, explique calmement les tenants et aboutissants géopolitiques, la psychologie des personnages de manière à la fois très littéraire et poétique mais sans lourdeur grâce au brio et à l'inventivité du montage. On vogue ainsi d'une temporalité à une autre, le glissement se faisant par la réutilisation d'un décor, par l'incursion d'une voix-off dans le passé ou le présent (les entrevues entre Julie Christie et Harry Hamilton-Paul), la répétitivité de certains moments. La conclusion obéit aux deux tonalités exprimées tout au long de l'intrigue. Le passé fut douloureux mais vibrant et passionné, le présent est lui serein mais incertain avec cette ultime vision solitaire de Julie Christie. L'actrice y est formidable de douceur et de charme, pendant parfait d'une Greta Scacchi quasi débutante et au tempérament espiègle et séducteur inoubliable.5/6
Actuellement dispo sur OCS.
Effectivement, la mise en scène de Ivory est élégante et sobre retranscrivant avec beaucoup d'élégance une ambiance coloniale exotique et folklorique sans pourtant être hermétique aux tensions et préjugés de l'époque. C'est un film d'ambiance avant tout (un peu à la manière de Chocolat de Claire Denis ou même un peu de L'amant de Jean-jacques Annaud, l'érotisme en moins). Greta Scacchi, mutine et charmante, porte totalement le film axé autour de deux époques, les années 20 et l'époque contemporaine. Son histoire est entrecoupée de séquences contemporaines avec Julie Christie. Ce montage alternant les époques permet de renforcer la saveur des scènes de l'époque coloniale d'autant plus que la partie moderne avec Julie Christie n'a que très peu d'intérêt en soi et s'avère bien fade. Peut-être était-ce justement l'objectif du réalisateur à travers ce montage. Plus récemment, Claude Lelouch a donné dans Un + Une (2015) une vision bien plus colorée et romantique de l'Inde moderne.
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Message par Jeremy Fox »

Carlotta ressort en salle cette semaine et pour la première fois Chambre avec vue.
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Message par Jack Carter »

Supfiction a écrit :Bien.. mais rien pour Jefferson à Paris que j’espérais car pas revu depuis sa sortie salles.
retro Ivory à la cinematheque en ce moment.
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Re: James Ivory

Message par Supfiction »

Jack Carter a écrit :
Supfiction a écrit :Bien.. mais rien pour Jefferson à Paris que j’espérais car pas revu depuis sa sortie salles.
retro Ivory à la cinematheque en ce moment.
Merci! Je pense que les séances sont ici mais le site semble inaccessible en ce moment : https://www.cinematheque.fr/film/54781.html
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Re: James Ivory

Message par bruce randylan »

Une retro qui tombe à point pour ma part connaissant mal son cinéma, à part ses 3-4 plus connus (Maurice, Vestiges du Jour, Howards End et les Bostoniennes que j'ai découvert il y a quelques mois)

Adventures of a Brown Man in Search of Civilization (1972) est un documentaire d'un peu moins d'une heure sur l'auteur indien Nirad C. Chaudhuri lors d'un voyage en Angleterre où il peut ainsi commenter à loisir son pays et les différences sociaux-politiques entre les deux pays. L'écrivain est pour le moins charismatique, passionnant et propose des points de vue détonants – au point d'avoir été controversé en Inde pour des positions pro-britanniques. Après, personnellement, j'ai un peu tendance à me méfier des personnes qui assènent des propos en vérités absolues lors de monologues qui cherchent à se mettre en valeur face à leur auditoire. Là, par moment, ça fait vraiment numéro bien rodé et complaisant. Toujours est-il que ça donne envie de découvrir Chaudhuri, notamment son premier roman autobiographique.

Sauvages (1972) est un film curieux, sorte de fable sur la civilisation et sa décadence, à travers des "sauvages" découvrant par hasard une demeure façon victorienne, ce qui les conduit à en reproduire les codes. Une construction cyclique qui ne cherche jamais la crédibilité mais plutôt l'allégorie. On atteint assez vite les limites du genre avec un point de vue assez flou, une réalisation qui ne sait pas trop quoi faire de son sujet et des comédiens principalement livré à eux-mêmes.
C'est pas forcément désagréable à suivre (même sans savoir où l'on peut bien aller) et c'est moins arty/stridant que je ne craignais au début, par contre ça aurait mérité un scénariste et un réalisateur d'une autre trempe, genre Boorman.

The wild party (1974) mérite sans doute mieux que sa réputation et sa production houleuse (caprices de Raquel Welch qui fit renvoyer plusieurs techniciens ; producteurs ne sachant pas comment sortir le film et qui le tripatouillèrent au montage pour le sortir sous deux versions). La copie française semble être la director's cut d'après wikipedia et ne possède en tout cas pas de flash-forwards, mais une construction avec un gros flash-back central.
L'histoire est inspirée d'un poème de 1926, lui même basé sur la fameuse soirée chez Fatty Arbuckle où une jeune figurante trouva la mort. Le scénario situe l'intrigue en 1929 pour appuyer le côté has-been de son héros qui tente un come-back en projetant son nouveau long-métrage auto-produit lors d'une soirée dans sa villa, espérant qu'un producteur lui fera une offre dans la foulée.
Le film est en effet assez bancal, avec de grosses longueurs, une interprétation inégale, une bande-son pas toujours fidèle à l'esprit des séquences et une structure un peu lâche qui n'ose pas affronter la dimension « wild » de la party. La décadence déviante Hollywoodienne est assez superficielle et arrive maladroitement, sans se greffer naturellement à la trame principale.
Malgré tout, le film présente quelques moments touchants dans le portrait de cette ancienne vedette qui n'a rien fait depuis 5 ans et qui tente un retour de la dernière chance au pire moment possible (l'arrivée du parlant qui se profile). Sa relation avec son épouse ne manque pas d'une certaine tendresse, loin du cynisme criard qu'on aurait pu croire vu l'époque. Il y aussi une atmosphère atypique et désabusée quand le poème de 1926 est cité en voix-off pour illustrer l'arrivée de plusieurs invités.
Les moments de malaise, une sincérité qui n'a rien d'opportuniste, Raquel Welch plus fragile que d'habitude et James Coco impliqué dans son rôle sont suffisamment de points intéressant pour qu'on lui redonne une chance.

Roseland (1977) est un film à sketch plutôt réussi prenant place dans un célèbre Ballroom de New-york. Soit trois histoires douces amères et mélancoliques de rencontres sur - et autour - des pistes de danses.
Celle centrale - et la plus longue - avec Christopher Walken est la plus faible à cause d'enjeux qui ne tiennent pas toute la durée de l'épisode, même si la conclusion est très réussie. En revanche, les deux autres sont bien plus touchantes avec un regard tendre sur des personnes âgées plus ou moins prisonniers de leur passé et de rêves dépassés auxquelles ils s'accrochent toujours. Sans aucune trace de moquerie ou de cynisme, Ivory fait preuve de retenue et de délicatesse.
Volontairement ou non, le film fait vraiment partie de son époque visuellement et pourrait presque être un témoignage sociologique de cette époque, où les danses de salon sont sur le point de disparaitre avec leur fidèles adeptes vieillissants alors que le disco prend de plus en plus de place.

Hullabaloo Over Georgie and Bonnie's Pictures (1978) est un téléfilm assez symptomatique des limites du style Ivory où l'académisme le plus terne empêche une histoire de vibrer comme elle devrait. Ici, ce sont des collectionneurs occidentaux qui se rendent dans le palais d'un Maharaja en espérant lui acheter certaines peintures de sa collection privée, réputée sublime.
Le sujet aurait pu être passionnant avec les thèmes de la préservation du patrimoine artistique, du colonialisme, d'une Inde fantasmée ou encore d'une période révolue – ou sur le point de l'être. Le tout avec une ambiance ludique et truculente qui aurait même pu jouer avec les codes du Caper movie.
Presque rien de tout ça sous la caméra amorphe d'Ivory qui passe totalement à côté de son sujet pour un objet creux terriblement frustrant.

Les européens (1979) est une autre œuvre dont le potentiel est parfaitement gâché par le style d'Ivory qui manque désespérant de vie. Certes la photo est belle mais je n'ai jamais compris le véritable intérêt du sujet et qui m'aurait donné envie de suivre ses personnages. Les dernières séquences laissent vaguement penser que ça aurait pu être une comédie de mœurs spirituelle et lumineuse. Mais pour ça, il aurait fallut du rythme, un point de vue et surtout un contenu.

The white countess (2005) m'a agréablement surpris. C'est pas le mélo historique du siècle et ca grouille sous les conventions mais Ivory dynamise son style, sans doute grâce à la présence de Christopher Doyle à la photo : mouvements de grue plus, caméra plus nerveuse, jump cuts et même des explosions ! Bigre.
Quoiqu'il en soit, cette histoire d'amour dans le Shanghai des années 30, la veille de l'occupation japonaise, entre un diplomate veuf et aveugle et une aristocrate russe déchue contrainte de se prostituer ne manque pas de charme et même d'émotion.
On sent que le budget est un peu étriqué dans sa reconstitution sans que ça affaiblisse forcément le résultat qui repose fortement sur l'alchimie entre Ralph Fiennes et Natasha Richardson.
Et on retrouve les thèmes du cinéaste, à commencer par cette peinture d'une société (voire d'une civilisation) à un tournent majeur de son histoire, qui tente un moment de se replier sur elle-même en se coupant de l'extérieur, pour mieux nier son risque de disparaître.
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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Roilo Pintu
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Re: James Ivory

Message par Roilo Pintu »

Découverte de Chambre avec vue, captivé par Helena Bonham-Carter qui joue Lucy et qui lors de son voyage en Toscane, croise George (magnétique Julian Sands), inspirée par sa beauté elle va se laisser embrasser dans un champs. Sur une musique de Puccini, et à la lumière d’un soleil couchant, la scène ne manque pas de beauté !
Pour autant le film ne se limite pas qu’au romantisme, beaucoup d’humour, entre la chaperonne surprotectrice Maggie Smith, le maladroit Delholm Eliot, et l’espiègle Simon Callow. Enfin doit-on encore douter de voir comment Daniel Day-Lewis disparait magistralement dans un rôle, même petit et loin d’être secondaire (ici seulement 29 ans !).
Pour finir, le film fait une belle boucle finale et l’amour triomphe !

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