Seconde adaptation par le réalisateur et documentariste James Hill d'une pièce à succès de John Mortimer, après Lunch hour en 1961.
Après des dizaines d'années à user les bancs des tribunaux sans décrocher la moindre affaire, Wilfred Morgenhall (Peter Sellers), un avocat miteux est enfin promu d'office à la défense d'Herbert Fowle, qui vient d'assassiner son épouse*. Fowle (Richard Attenborough, affublé d'un faux nez en patate) est un petit homme tranquille aussi inoffensif et idiot que son pauvre défenseur qui croit, lui, tenir l'affaire de sa vie. Marié depuis des années à une femme aussi expansive et portée à la plaisanterie façon coussin-péteur qu'il est éteint et imperméable à l'humour (seul l'intéresse le calme de sa volière à perruches), ils ont pris comme colocataire un homme au tempérament aussi rigolard que Mrs Fowle. Et il faut avouer que leur épuisant duo noces et banquets donnerait des envies de meurtre au plus vénérable moine tibétain. L'actrice Beryl Reid (qui ressemble à Line Renaud) et David Lodge (un vieux complice de Sellers) seraient reçus haut-la-main comme hôtes d'honneur des Grosses têtes de Bouvard. Ces deux amateurs de blagues de Toto passent d'ailleurs leur journée à écouter des émissions radio où la moindre phrase leur déclenche un tonnerre de rires agricoles.
"Une question de Mme Tume-Lamay (dans le Bas-Rhin)..."
Il y a quelques belles idées de ci-de là comme le décor ouvert permettant de passer de la cellule à la salle du tribunal et ce que je nommerai des flashbacks accompagnés, où les deux zigotos viennent réellement observer des séquences de leur passé avec un jeu de surimpression très bien fignolé. Sellers et Attenborough incarnent aussi plusieurs personnages simultanés lors de la simulation de procès.
Quelques (rares) formules font également mouche par leur idiotie, telle que : "On ne peut improviser sans avoir répété".
Petite curiosité : le gardien de la prison est joué par le gros Patrick "Mère-Grand" Newell, qui n'a qu'une brève réplique.
Mais le problème majeur est que l'ensemble se traine au rythme d'un basset arthritique. Les acteurs s'expriment aussi lentement et posément qu'ils se déplacent et sans tomber dans l'excès inverse d'un découpage/montage moderne, on pourrait facilement réduire les 1h16 de moitié. Résultat des courses : deux grands comédiens qui ont l'air de s'être divertis dans une satire judiciaire pantouflarde dont les parquets craquent. L'encaustique l'aura finalement emporté sur le caustique. C'est d'autant plus flagrant quand on songe que le film est contemporain du nouveau cinéma britannique qui commençait à tout casser.
NB : Pierre Rouve, l'auteur de l'adaptation n'a aucun lien de parenté avec Jean-Paul Rouve. Né Peter Christoff Ouvaliev, ce Bulgare d'origine fit toute sa carrière en Grande-Bretagne. On le retrouvera quelques années plus tard... producteur-exécutif sur... Blow up d'Antonioni !
(*) Le terme "dock brief" se réfère à un élément du droit anglais permettant à un prévenu passible de la peine capitale mais aux revenus modestes de se voir octroyer un avocat désigné par les tribunaux et rémunéré par l'Etat.
A noter au passage que nous ne saurons jamais comment Fowle a tué son épouse. Mais, à vrai dire, on s'en contrefout.