Léonide Moguy (1899-1976)
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Léonide Moguy (1899-1976)
Voici ce que j'ai trouvé sur ce réalisateur d'origine russe un peu tombé dans l'oubli. En attendant vos contributions..
Licencié en droit et en économie politique de l'université d'Odessa, Léonide Moguy commence sa carrière cinématographique dans des emplois techniques. Il est promu directeur des laboratoires du cinéma scientifique à Moscou en 1928, puis émigre en France en 1929 où il devient un monteur apprécié.
Il poursuit et perfectionne sa maîtrise de la technique cinématographique (notamment du montage). En 1942 il s’exile aux États-Unis où il réalise trois films, puis retourne en Europe dès la fin du conflit.
Carrière au cinéma :
Monteur pour Marcel L'Herbier (Le scandale) et Max Ophüls (Divine) notamment, puis assistant réalisateur Baccara (1935), Léonide Moguy se lance dans la réalisation avec Le Mioche (1936), film sur le problème des enfants abandonnés, et il doit attendre deux ans pour obtenir la sympathie du public avec Prison sans barreaux (1938), généreux plaidoyer pour l'instauration d'un régime plus libéral dans les prisons pour femmes. Léonide Moguy exploite ces succès et devient un spécialiste de films sociaux au ton mélodramatique. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se réfugie aux Etats-Unis où il signe trois films de série B, dont Tragique rendez-vous (1945), qui marque les débuts d'Ava Gardner. Il se fixe pour un temps en Italie et nous offre Demain, il sera trop tard (1950), un film en faveur de l'éducation sexuelle des adolescents. Ses films suivants s'attachent à mettre en scène les grands problèmes sociaux et politiques de son temps, de la prostitution (Le Long des trottoirs, 1956) à la peur atomique (Les Hommes veulent vivre, 1961).
Quand il met un terme à sa carrière, Léonide Moguy se consacre à la direction du département cinématographique de la Croix-Rouge.
Filmographie :
1936 : Le Mioche
1938 : Prison sans barreaux
1938 : Conflit
1939 : Le Déserteur (Autre titre : Je t'attendrai)
1940 : L'Empreinte du dieu
1943 : Paris After Dark
1944 : Action in Arabia
1946 : Tragique rendez-vous (Whistle Stop)
1947 : Bethsabée
1950 : Demain il sera trop tard (Domani è troppo tardi)
1951 : Demain est un autre jour (Domani è un altro giorno)
1953 : Les Enfants de l'amour
1956 : Le Long des trottoirs
1957 : Donnez-moi ma chance
1961 : Les hommes veulent vivre
Licencié en droit et en économie politique de l'université d'Odessa, Léonide Moguy commence sa carrière cinématographique dans des emplois techniques. Il est promu directeur des laboratoires du cinéma scientifique à Moscou en 1928, puis émigre en France en 1929 où il devient un monteur apprécié.
Il poursuit et perfectionne sa maîtrise de la technique cinématographique (notamment du montage). En 1942 il s’exile aux États-Unis où il réalise trois films, puis retourne en Europe dès la fin du conflit.
Carrière au cinéma :
Monteur pour Marcel L'Herbier (Le scandale) et Max Ophüls (Divine) notamment, puis assistant réalisateur Baccara (1935), Léonide Moguy se lance dans la réalisation avec Le Mioche (1936), film sur le problème des enfants abandonnés, et il doit attendre deux ans pour obtenir la sympathie du public avec Prison sans barreaux (1938), généreux plaidoyer pour l'instauration d'un régime plus libéral dans les prisons pour femmes. Léonide Moguy exploite ces succès et devient un spécialiste de films sociaux au ton mélodramatique. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se réfugie aux Etats-Unis où il signe trois films de série B, dont Tragique rendez-vous (1945), qui marque les débuts d'Ava Gardner. Il se fixe pour un temps en Italie et nous offre Demain, il sera trop tard (1950), un film en faveur de l'éducation sexuelle des adolescents. Ses films suivants s'attachent à mettre en scène les grands problèmes sociaux et politiques de son temps, de la prostitution (Le Long des trottoirs, 1956) à la peur atomique (Les Hommes veulent vivre, 1961).
Quand il met un terme à sa carrière, Léonide Moguy se consacre à la direction du département cinématographique de la Croix-Rouge.
Filmographie :
1936 : Le Mioche
1938 : Prison sans barreaux
1938 : Conflit
1939 : Le Déserteur (Autre titre : Je t'attendrai)
1940 : L'Empreinte du dieu
1943 : Paris After Dark
1944 : Action in Arabia
1946 : Tragique rendez-vous (Whistle Stop)
1947 : Bethsabée
1950 : Demain il sera trop tard (Domani è troppo tardi)
1951 : Demain est un autre jour (Domani è un altro giorno)
1953 : Les Enfants de l'amour
1956 : Le Long des trottoirs
1957 : Donnez-moi ma chance
1961 : Les hommes veulent vivre
Dernière modification par Supfiction le 20 oct. 13, 19:06, modifié 4 fois.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Euh...Baccara est une réalisation à 100% d'Yves Mirande, Moguy n'y est qu'assistant réalisateur. (La preuve, il n'apparaît pas sur la filmo que tu as copié-collé)
L'occasion d'évoquer ce chef d'oeuvre à redécouvrir d'urgence ( je me demande s'il n'appartient pas au catalogue Gaumont) et découvert cette semaine à Lyon, Le déserteur/ Je t'attendrai (1939) où de façon elliptique, Moguy évoque avec une conviction saisissante les dégats de la guerre (en l'occurence la 1ère guerre mondiale).
Et cette bande son, inquiétante et oppressante où l'on entend, en filigrane, le tonnerre grave des bombardements au loin, est inoubliable.
L'occasion d'évoquer ce chef d'oeuvre à redécouvrir d'urgence ( je me demande s'il n'appartient pas au catalogue Gaumont) et découvert cette semaine à Lyon, Le déserteur/ Je t'attendrai (1939) où de façon elliptique, Moguy évoque avec une conviction saisissante les dégats de la guerre (en l'occurence la 1ère guerre mondiale).
Et cette bande son, inquiétante et oppressante où l'on entend, en filigrane, le tonnerre grave des bombardements au loin, est inoubliable.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
J'ai corrigé la coquille, merci. J'ai prévu de voir Le long des trottoirs ce soir, d'ailleurs, avec Anne Vernon.
L'affiche anglaise :
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
J'en ai vu cinq...
Si l'on excepte les films des années 30 ("Prison sans barreaux" et "Conflit"), les masters René Chateau des films années 50 sont bien voire très bien ("Le long des trottoirs", "Donnez-moi ma chance" en particulier).
Sur le dernier en date, j'avais écrit :
Si l'on excepte les films des années 30 ("Prison sans barreaux" et "Conflit"), les masters René Chateau des films années 50 sont bien voire très bien ("Le long des trottoirs", "Donnez-moi ma chance" en particulier).
Sur le dernier en date, j'avais écrit :
Commissaire Juve a écrit :
Donnez-moi ma chance" (Léonide Moguy, 1957).
Très sympa, ce film... après les filles-mères, les filles tombées au ruisseau, Léonide Moguy nous montre les filles confrontées au miroir aux alouettes. Ici, il est question du cinéma et, si l'on fait abstraction du côté "film pour midinettes" (le côté "bibliothèque rose" des années 50), l'ensemble se laisse vraiment regarder. J'ai bien aimé -- notamment -- le petit couplet de Danik Patisson sur "au cinéma, il ne suffit pas d'être jolie, il faut aussi savoir montrer son derrière !" Pour l'époque, c'était plutôt "direct" (au passage, je me demande si ça n'est pas une allusion au fait que Nadine Tallier a servi de doublure "fesses" pour Martine Carol dans "Caroline Chérie"). A titre perso, j'ai trouvé ça nettement mieux que "Futures vedettes" (Marc Allégret, 1955).
Accessoirement : ça a dû être "le-rôle-de-ma-vie" pour Nadine Tallier (qui, lorsqu'elle se couche, ou lorsqu'elle se lève après une bonne nuit de sommeil, est coiffée et maquillée comme pour aller à une réception à l'ambassade du grand duché du Luxembourg ! toute une époque ! )
test du DVD au commissariat
Je reposte pour poser une question aux collègues qui s'aventureront par ici...
Dans ce film, il semble que le réal se soit amusé à évoquer certaines figures du cinéma d'alors... si j'ai pu en identifier deux :
- Coste... pour Pierre Bost
- Maurange... pour Jean Aurenche
Je me demande qui se cache derrière les personnages de :
- Fournier, le grand réalisateur auquel on prête la réputation d'auditionner les jeunes actrices sur son divan (et qui travaille avec Bost et Aurenche)... Est-ce Julien Duvivier ? Gilles Grangier ? (je fais une fixette sur la terminaison en "ier", mais c'est peut-être autre chose) Quelqu'un a une idée ?
- Saint-Vallier, le professeur de théâtre interprété par Noël Roquevert. Est-ce Louis Jouvet ? Louis Seigner ?
Merci d'avance à ceux qui tenteront d'éclairer ma lanterne.
Dernière modification par Commissaire Juve le 20 oct. 13, 19:07, modifié 1 fois.
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
J'ajoute que Le long des trottoirs a connu un équivalent britannique The flesh is weak / Le trottoir (1957) 15 mois après sa sortie voir ma présentation au commissariat
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
CONFLIT de Léonide MOGUY- 1938
Avec Annie DUCAUX, Corinne LUCHAIRE, Raymond ROULEAU, Claude DAUPHIN, Roger DUCHESNE, Armand BERNARD, Pauline CARTON, Marguerite PIERRY, DALIO
Catherine, une dame de la haute société, apparemment heureuse en ménage et maman d’un petit garçon tente d’assassiner sa sœur. Quel horrible drame a-t-il pu l’amener à cette extrémité ?
Bon, j’ai peur de spolier en évoquant ce film !
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
PRISON SANS BARREAUX de Léonide MOGUY -1937
Avec Annie DUCAUX, Corinne LUCHAIRE, Roger DUCHESNE, Ginette LECLERC
Dans une maison de redressement, une détenue sauvée par la sollicitude d'une directrice compréhensive, ravit à cette dernière le cœur de l'homme qu'elle aime.
Ce très vieux mélo manque de vraisemblance. Les vilaines surveillantes de la maison de correction ainsi que certaines pensionnaires sont des personnages tellement caricaturaux qu’on a du mal à suivre sérieusement cette histoire. Que dire des grands clins d’œil dont abuse la délinquante Ginette Leclerc (trop âgée pour le rôle) quand elle va faire une bêtise. De même, la romance "coupable" entre Corinne Luchaire et le docteur de la maison de correction parait extrêmement datée (et l’histoire du chapeau de paille abimé stupide), tout comme le regard illuminé d’Annie Ducaux quand elle entreprend de réformer la maison de correction et que derrière elle défilent des images des changements constatés dans l’établissement.
Et pourtant malgré tout ou grâce à tout cela, le film se laisse suivre sans aucun temps mort (avec un brin de second degré) et reste tout à fait distrayant et parfois drôle ; Les très bonnes prestations de Corinne Luchaire (actrice au destin « contrarié » dans son premier rôle) et d’Annie Ducaux (dans un rôle injouable) y sont pour beaucoup. (Merci Ann Harding pour cette rareté !)
Le succès fut tel qu’une version anglaise fut tournée avec la même Corinne Luchaire et une toute jeune Glynis Johns, ainsi qu'une version italienne avec Camilla Horn.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Je remets ça là du topic Ava Gardner !
Tragique rendez-vous (1946)
La belle Mary est convoitée à la fois par un joueur (et un raté) professionnel et le propriétaire d'un bar interlope. Entre les deux hommes, la lutte sera sans pitié.
1946 est une année charnière dans la carrière d'Ava Gardner. Jusque-là, son nom aura plutôt agité la rubrique mondaine par ses mariages de courtes durées avec Mickey Rooney et le musicien Artie Shaw, la court assidue et vaine de Howard Hughes ainsi que sa réputation de noceuse invétérée. Côté film ce n'est guère reluisant puisque malgré son physique de rêve un terrible accent sudiste dont elle aura bien du mal à se débarrasser la cantonne à de la figuration et des rôles sporadiques. Elle détient d'ailleurs à l'époque un bien triste record puisque après cinq passé à la MGM elle jamais dépassé le huitième rôle dans toute les distributions dont elle a pu faire partie. Tout change donc en 1946 avec son légendaire rôle de femme fatale dans Les Tueurs de Robert Siodmak qui marque la naissance à l'écran du "plus bel animal du monde". Avant ce film mythique, la MGM lui aura cette même année donnée une première fois sa chance avec ce plus méconnu Whistle Stop. Le film est certes assez mineur mais Ava, plus mûre, plus élégante et assurée y dessine tous les motifs du mythe à venir.
Vendu comme un film noir, Whistle Stop n'en emprunte que timidement les motifs sur sa toute fin et fait plutôt figure de mélodrame ou romance rurale. Ava Gardner y est Mary, jeune pour un temps de retour dans sa petite ville natale après deux ans passé à Chicago. Ce retour réveille la haine féroce entre deux de ses prétendants, Kenny (George Raft) et Lew Lentz (Tom Conway) aux personnalités et statut en tous points opposés. Kenny est le grand amour de sa vie, celui qu'elle n'a jamais cessé d'aimer mais ce dernier est un raté sans le sous engoncé dans de mauvaises habitudes (jeu, boisson) et qui n'est jamais sorti de la ville. Au contraire Lew est un riche entrepreneur, la figure locale la plus puissante alliant allure séduction et richesse. La jalousie et le complexe d'infériorité de Kenny vont pourtant le pousser dans une voie de plus en plus dramatique alors qu'il cherche reconquérir Mary et être enfin digne de ses attentes.
Malgré un petit souci de différence d'âge (on suppose qu'ils ont grandi ensemble même Ava Gardner est bien plus jeune que George Raft) l'alchimie est palpable entre George Raft et Ava Gardner. Léonide Moguy saisit bien l'irrésistible attrait physique qui les lie dès leur première scène commune mais cet amour est entravé par les non-dits, la rancœur et la jalousie essentiellement dû à un George Raft pathétique et touchant à la fois. On a ainsi un triangle amoureux intense ou l'immaturité de Kenny va constamment pousser Mary vers la compagnie plus rassurante de Lew. L'argument de polar va naître du fait de la voie criminelle supposée ou ouvertement franchie par chacun d'eux par dépit : le turbulent Kenny va-t-il céder définitivement à ses mauvais penchants ou alors le respectable Lew révéler une nature plus noire que ce qu'il laisse croire ? Malgré quelconques longueurs et facilités dans l'intrigue le tout est plutôt prenant et parvient à surprendre avec un rebondissement final assez inattendu.
Enjeu de cette lutte, Ava Gardner affirme déjà ce charme ravageur qui terrassera quelques mois plus tard les premiers spectateurs de The Killers. Léonide Moguy l'a bien compris et la met superbement en valeur tout au long du film, en particulier à travers le regard passionné de Raft pour qui elle figure une lumière apaisante dans la fange où il vivote. Les première retrouvailles, l'entrevue sur le perron de la maison (où la copie moyenne du dvd ne permet pas de savourer la photo de Russel Metty) et la réunion finale (et une apparition quasi angélique d'Ava Gardner) offre ainsi de très beaux moments où l'empathie fonction à plein avec un George Raft subjugué. Malgré un manque d'expérience évident, Ava s'en sort bien dans le registre dramatique également et exprime bien l'amour et le dépit de son personnage face à cet amant autodestructeur. Il faut saluer aussi la belle performance de Victor McLaglen en Gildo bienfaiteur et tentateur à la fois. Pas inoubliable mais se laissant regarder sans ennui, un film qui marque les vrai premier pas d'une débutante pas encore déesse. 4/6
Tragique rendez-vous (1946)
La belle Mary est convoitée à la fois par un joueur (et un raté) professionnel et le propriétaire d'un bar interlope. Entre les deux hommes, la lutte sera sans pitié.
1946 est une année charnière dans la carrière d'Ava Gardner. Jusque-là, son nom aura plutôt agité la rubrique mondaine par ses mariages de courtes durées avec Mickey Rooney et le musicien Artie Shaw, la court assidue et vaine de Howard Hughes ainsi que sa réputation de noceuse invétérée. Côté film ce n'est guère reluisant puisque malgré son physique de rêve un terrible accent sudiste dont elle aura bien du mal à se débarrasser la cantonne à de la figuration et des rôles sporadiques. Elle détient d'ailleurs à l'époque un bien triste record puisque après cinq passé à la MGM elle jamais dépassé le huitième rôle dans toute les distributions dont elle a pu faire partie. Tout change donc en 1946 avec son légendaire rôle de femme fatale dans Les Tueurs de Robert Siodmak qui marque la naissance à l'écran du "plus bel animal du monde". Avant ce film mythique, la MGM lui aura cette même année donnée une première fois sa chance avec ce plus méconnu Whistle Stop. Le film est certes assez mineur mais Ava, plus mûre, plus élégante et assurée y dessine tous les motifs du mythe à venir.
Vendu comme un film noir, Whistle Stop n'en emprunte que timidement les motifs sur sa toute fin et fait plutôt figure de mélodrame ou romance rurale. Ava Gardner y est Mary, jeune pour un temps de retour dans sa petite ville natale après deux ans passé à Chicago. Ce retour réveille la haine féroce entre deux de ses prétendants, Kenny (George Raft) et Lew Lentz (Tom Conway) aux personnalités et statut en tous points opposés. Kenny est le grand amour de sa vie, celui qu'elle n'a jamais cessé d'aimer mais ce dernier est un raté sans le sous engoncé dans de mauvaises habitudes (jeu, boisson) et qui n'est jamais sorti de la ville. Au contraire Lew est un riche entrepreneur, la figure locale la plus puissante alliant allure séduction et richesse. La jalousie et le complexe d'infériorité de Kenny vont pourtant le pousser dans une voie de plus en plus dramatique alors qu'il cherche reconquérir Mary et être enfin digne de ses attentes.
Malgré un petit souci de différence d'âge (on suppose qu'ils ont grandi ensemble même Ava Gardner est bien plus jeune que George Raft) l'alchimie est palpable entre George Raft et Ava Gardner. Léonide Moguy saisit bien l'irrésistible attrait physique qui les lie dès leur première scène commune mais cet amour est entravé par les non-dits, la rancœur et la jalousie essentiellement dû à un George Raft pathétique et touchant à la fois. On a ainsi un triangle amoureux intense ou l'immaturité de Kenny va constamment pousser Mary vers la compagnie plus rassurante de Lew. L'argument de polar va naître du fait de la voie criminelle supposée ou ouvertement franchie par chacun d'eux par dépit : le turbulent Kenny va-t-il céder définitivement à ses mauvais penchants ou alors le respectable Lew révéler une nature plus noire que ce qu'il laisse croire ? Malgré quelconques longueurs et facilités dans l'intrigue le tout est plutôt prenant et parvient à surprendre avec un rebondissement final assez inattendu.
Enjeu de cette lutte, Ava Gardner affirme déjà ce charme ravageur qui terrassera quelques mois plus tard les premiers spectateurs de The Killers. Léonide Moguy l'a bien compris et la met superbement en valeur tout au long du film, en particulier à travers le regard passionné de Raft pour qui elle figure une lumière apaisante dans la fange où il vivote. Les première retrouvailles, l'entrevue sur le perron de la maison (où la copie moyenne du dvd ne permet pas de savourer la photo de Russel Metty) et la réunion finale (et une apparition quasi angélique d'Ava Gardner) offre ainsi de très beaux moments où l'empathie fonction à plein avec un George Raft subjugué. Malgré un manque d'expérience évident, Ava s'en sort bien dans le registre dramatique également et exprime bien l'amour et le dépit de son personnage face à cet amant autodestructeur. Il faut saluer aussi la belle performance de Victor McLaglen en Gildo bienfaiteur et tentateur à la fois. Pas inoubliable mais se laissant regarder sans ennui, un film qui marque les vrai premier pas d'une débutante pas encore déesse. 4/6
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Je sais, c'est vilain de pomper sur ses petits camarades mais je copie-colle moi aussi ce que j'avais d'abord mis sur le topic Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus puis sur celui dédié à Ava Gardner :
Il y a pourtant du beau linge, outre la distribution : scénario de Philip Yordan, photo de Russell Metty, musique de Dimitri Tiomkin...
D'après ce que j'ai compris, ce film à petit budget devait servir de rampe de lancement à l'encore débutante Ava (évidemment en femme fatale éclatante de beauté et partagée entre deux hommes) mais heureusement, six mois plus tard sortira un certain film de Robert Siodmak. George Raft, en joueur invétéré, semble passablement absent et Victor McLaglen joue une fois de plus (et assez mal) la brute sympathique.
Pour donner une idée : le film abonde en séquences de poursuites automobiles sur-accélérées et d'à-peu-près à effets comiques involontaires. Abattu de deux balles dans le dos, McLaglen s'effondre... en se tenant le ventre puis se redresse quelques instants plus tard, ayant retrouvé toutes ses forces, pour étrangler son assassin.
Mais j'ai eu le temps de voir une séquence assez étonnante qui se déroule dans une kermesse. D'abord le passage où Raft se retrouve face à un clown-automate au rire dément (c'est classique mais ça fait toujours son effet) et surtout celui où sa copine, malade, se voit embarquée dans une danse tourbillonnante endiablée puis violemment lâchée, évanouie, propulsée comme un pantin dans les chaises des spectateurs.
Tragique rendez-vous (Whistle stop) 1946 - Léonide Moguy
Je l'ai pris en cours de route dans une copie très moyenne et j'ai décroché avant la fin donc mon avis vaudra ce qu'il vaut... mais le hasard ayant fait que j'aurai donc vu deux Léonide Moguy en quelques jours, faudra que le père Tarantino m'explique pourquoi il semble autant apprécier ce cinéaste né en Russie qui fit carrière en France, à Hollywood et en Italie...Il y a pourtant du beau linge, outre la distribution : scénario de Philip Yordan, photo de Russell Metty, musique de Dimitri Tiomkin...
D'après ce que j'ai compris, ce film à petit budget devait servir de rampe de lancement à l'encore débutante Ava (évidemment en femme fatale éclatante de beauté et partagée entre deux hommes) mais heureusement, six mois plus tard sortira un certain film de Robert Siodmak. George Raft, en joueur invétéré, semble passablement absent et Victor McLaglen joue une fois de plus (et assez mal) la brute sympathique.
Mais j'ai eu le temps de voir une séquence assez étonnante qui se déroule dans une kermesse. D'abord le passage où Raft se retrouve face à un clown-automate au rire dément (c'est classique mais ça fait toujours son effet) et surtout celui où sa copine, malade, se voit embarquée dans une danse tourbillonnante endiablée puis violemment lâchée, évanouie, propulsée comme un pantin dans les chaises des spectateurs.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Je reviens là-dessus. Plusieurs sites évoquent une co-réalisation Mirande/Moguy, comme cette fiche sur Lucien Baroux ou même la fiche imdb du film.daniel gregg a écrit :Euh...Baccara est une réalisation à 100% d'Yves Mirande, Moguy n'y est qu'assistant réalisateur.
C'est également évoqué dans ce passage du livre "LES ÉCRANS NOSTALGIQUES DU CINÉMA FRANÇAIS" :
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Le long des trottoirs (1956)
Ce film offre de très belles scènes du vieux Paris et rien que pour cela il mérite d'être vu (comme Paris Blues, d'ailleurs) et une réalisation très soignée. Danik Patisson est une belle découverte, personnellement, et Anne Vernon confirme tout le bien que je pensais d'elle (après Edouard et Caroline).
L'histoire apparait quelque-peu (voir très) datée et on a parfois l'impression d'être dans Les misérables. Néanmoins la très belle fin fait passer la pilule, le réalisateur apportant un réel point de vue et une certaine ironie. Du beau cinéma réaliste.
Ce film offre de très belles scènes du vieux Paris et rien que pour cela il mérite d'être vu (comme Paris Blues, d'ailleurs) et une réalisation très soignée. Danik Patisson est une belle découverte, personnellement, et Anne Vernon confirme tout le bien que je pensais d'elle (après Edouard et Caroline).
L'histoire apparait quelque-peu (voir très) datée et on a parfois l'impression d'être dans Les misérables. Néanmoins la très belle fin fait passer la pilule, le réalisateur apportant un réel point de vue et une certaine ironie. Du beau cinéma réaliste.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Le truc un peu fou, pour l'époque, c'est l'âge de Danik Patisson (17 ans quand même*). Sinon, oui, après "Martine est une fille-mère", il y a un côté "Martine fait le trottoir".
Je crois qu'à l'époque, ma grand-mère emmenait ma mère voir ce genre de films, ça lui évitait les grands discours (dixit ma mère).
EDIT (9 ans plus tard) : ma mère allait encore à l'école élémentaire, alors, euh...
* je me dis que ça a pu choquer (en 1957, les Britanniques ont carrément X-é leur propre version... et, vu d'aujourd'hui, il n'y avait vraiment pas de quoi)... comme a pu choquer le film Beau-père de Bertrand Blier (Ariel Besse avait 15 piges !).
Je crois qu'à l'époque, ma grand-mère emmenait ma mère voir ce genre de films, ça lui évitait les grands discours (dixit ma mère).
EDIT (9 ans plus tard) : ma mère allait encore à l'école élémentaire, alors, euh...
* je me dis que ça a pu choquer (en 1957, les Britanniques ont carrément X-é leur propre version... et, vu d'aujourd'hui, il n'y avait vraiment pas de quoi)... comme a pu choquer le film Beau-père de Bertrand Blier (Ariel Besse avait 15 piges !).
Dernière modification par Commissaire Juve le 26 janv. 22, 18:19, modifié 1 fois.
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Oui.. quand on avait vu ça et La fille du puisatier ou Naïs, plus besoin de grands discours, c'était pratique. Ces films en disent plus sur leur époque et l'évolution de la moralité que n'importe-quel documentaire.Commissaire Juve a écrit :Le truc un peu fou, pour l'époque, c'est l'âge de Danik Patisson (17 ans quand même*). Sinon, oui, après "Martine est une fille-mère", il y a un côté "Martine fait le trottoir".
Je crois qu'à l'époque, ma grand-mère emmenait ma mère voir ce genre de films, ça lui évitait les grands discours (dixit ma mère).
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Est-ce que les mères d'aujourd'hui emmènent leurs filles voir Jeune & jolie d'Ozon ?Commissaire Juve a écrit :Je crois qu'à l'époque, ma grand-mère emmenait ma mère voir ce genre de films, ça lui évitait les grands discours (dixit ma mère).
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
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Re: Léonide Moguy (1898-1976)
Aujourd"hui, si l'on en croit une certaine télévision, les jeunes filles veulent être "Star du X". (sinon, je ne suis pas sûr que ma mère ait vu "Le long des trottoirs" en 56 ; elle était encore un peu jeune... on a dû lui en montrer d'autres dans le même genre, plus tard... ou alors, le film est re-sorti !).joe-ernst a écrit :Est-ce que les mères d'aujourd'hui emmènent leurs filles voir Jeune & jolie d'Ozon ?Commissaire Juve a écrit :Je crois qu'à l'époque, ma grand-mère emmenait ma mère voir ce genre de films, ça lui évitait les grands discours (dixit ma mère).
La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...