Michael Curtiz (1886-1962)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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allen john
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Message par allen john »

Rick Blaine a écrit :un excellent moment.
Ensuite:
On nage dans le bonheur!!
Je crois qu'on est d'accord. :mrgreen:
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Jeremy Fox
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Jeremy Fox »

Aujourd'hui, Errol Flynn en une de classik pour la critique de L'aigle des mers
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Jeremy Fox
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Jeremy Fox »

Julien Léonard poursuit les critiques du coffret Legends of Horror avec Doctor X
allen john
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par allen john »

Jeremy Fox a écrit :Julien Léonard poursuit les critiques du coffret Legends of Horror avec Doctor X
:D
...Et c'est une très bonne critique, qui montre bien le coté "Ovni" du film, son incroyable crudité aussi. C'est, avec ses qualités et ses défauts (Lire pour ça l'excellent texte en question), un film que je considère depuis fort longtemps comme l'un de mes préférés de Curtiz, et soyons clairs, comme l'un de mes préférés tout court.

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 12774.html
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Ann Harding »

Une bonne biographie de Michael Curtiz de Alan K. Rode devrait sortir l'année prochaine, éditée par THE UNIVERSITY PRESS OF KENTUCKY.
Des infos .
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par daniel gregg »

Ann Harding a écrit :Une bonne biographie de Michael Curtiz de Alan K. Rode devrait sortir l'année prochaine, éditée par THE UNIVERSITY PRESS OF KENTUCKY.
Des infos .
Que tu vas t'empresser de traduire, hein ? :D
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Ann Harding
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Ann Harding »

daniel gregg a écrit :
Ann Harding a écrit :Une bonne biographie de Michael Curtiz de Alan K. Rode devrait sortir l'année prochaine, éditée par THE UNIVERSITY PRESS OF KENTUCKY.
Des infos .
Que tu vas t'empresser de traduire, hein ? :D
Je veux bien. Trouve-moi un éditeur! :mrgreen:
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Rick Blaine
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Rick Blaine »

Ann Harding a écrit :Une bonne biographie de Michael Curtiz de Alan K. Rode devrait sortir l'année prochaine, éditée par THE UNIVERSITY PRESS OF KENTUCKY.
Des infos .
Excellente nouvelle!!
Ann Harding a écrit :
daniel gregg a écrit :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Que tu vas t'empresser de traduire, hein ? :D
Je veux bien. Trouve-moi un éditeur! :mrgreen:

Je n'y crois pas beaucoup à un éditeur qui veuille se lancer là dedans, mais ce serait super chouette!! :D
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par allen john »

Night and day (Michael Curtiz, 1946)

La biographie ultra-fantaisiste de Cole Porter (1891-1964) par Michael Curtiz est en soit un "véhicule" pour Cary Grant, qui n'avait pas encore totalement établi son style Hitchcockien, entre comédie délurée et charme fatal d'espion dangereux... Alors on a droit a des scènes édifiantes, entre répétitions et représentations, évènements de l'histoire (Le Lusitania coulé, la nouvelle tombe en pleine premiière triomphale d'une revue qui va souffrir des suites de l'incident, l'engagement de Porter dans les forces Françaises sans attendre la déclaration de guerre en 1917, etc)... Son idylle tumultueuse avec son épouse (Alexis Smith), présentée ici d'une façon acceptable, quasi-familiale, alors que le principal problème entre eux, c'était bien sur l'homosexualité du compositeur. Le tout est émaillé de chansons de Cole Porter (Begin the beguine, Let's do it, Just one of those things...) , chantées ou jouées de façon teriblement académiques...

Michael Curtiz, qui ne se privait en rien de morceaux de bravoure de mises en scènes (Ces longs travellings d'exposition, ces ombres de danseuses, etc), tuait le temps en reluquant les danseuses, et faisait strictement son travail sans rien ajouter à sa gloire. mais ce film, dont les numéros musicaux sont signées d'un réalisateur/chorégraphe de la Warner, Leroy Prinz, se situe exactement au confluent de deux genres illustrés par Curtiz, qui sont parmi les moins intéressants de son impressionnante carrière: les "musicals" (Mammy, This is the army) et les biographies de grands hommes (Yankee Doodle Dandy, The Will Rogers Story); de plus, Night and day nous permet une fois pour toutes de montrer ce qui n'allait pas chez Curtiz dès qu'il s'attaquait à un musical: là ou avant lui Busby Berkeley, et après lui Vincente Minnelli ou Gene Kelly faisaient exploser les lmites du studio pour donner à voir du rève, Curtiz soulignait à gros traits le carton-pâte, maintenait en évidence le fait que tout ce spectacle était un travestissement de la vérité: une constante dans son oeuvre, et une sérieuse limite dans l'art escapiste et basé sur le merveilleux d'un genre aimé entre tous...

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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par allen john »

Dodge City (1939)

En 1939, un renouveau soudain et inattendu du western va faire resurgir le genre dans la cour des grands. Non que le genre n'existe pas, bien au contraire, mais les Cow-Boys et les Indiens, c'est plutôt dans la série B, et les Serials qu'on en trouve. Mais les studios, petits et grands, vont s'y replonger, avec bonheur: rien qu'en cette année 1939, la Fox, la Warner, la Paramount et la Universal s'y mettent: Union Pacific, Dodge City, Destry rides again... le film le plus emblématique de ce renouveau en cette année, c'est bien sur Stagecoach, de Ford (Tourné pour le compte de Walter Wanger et distribué par UA), mais il ne faut pas passer à coté d'autres oeuvres condidérées comme plus ou moins mineures, dont ce Dodge City, du à l'impeccable patte de Curtiz, qui retrouve son petit monde à cette occasion autour de Errol Flynn et Olivia de Havilland, pour le premier Western de l'acteur de Tasmanie... On ne dit pas vraiment "Western" d'ailleurs à cette époque, le nom est par trop entâché de cette indignité liée aux petits compléments de programme tournés par les petites compagnies que sont Monogram ou Republic.

Au milieu de l'ensemble de films tournés par Curtiz avec Flynn, celui-ci fait partie en apparence des moins intéressants: il ne possède pas la fougue pionnière d'un Captain Blood, film primal sur une certaine vision d'un désir de révolte; le personnage de Wade Hatton, redresseur de torts bien dans la ligne, pourrait passer pour assez insipide, à tel point qu'on l'a flanqué de deux zigotos (Joués par les vieux complices Alan Hale et Guinn Williams) chargés de mettre un peu de comique de situation la-dedans. Olivia de Havilland est une jeune femme partagée entre sa situation de lady et sa volonté d'indépendance, qui la pousse à devenir active en participant à sa façon au développement de la presse.
L'intrigue est basée sur l'assainissement d'une ville qui est la proie d'une bande de gangsters, qui impoent leur loi. On propose le poste de shériff à Flynn, qui le refuse jusqu'au moment ou il ne peut plus se dérober; à partir de là, avec l'appui courageux de la population, il va réussir à faire revenir la loi et la sécurité à Dodge City. Une intrigue qui rend le film assez proche de My darling Clementine de Ford (ou de Frontier marshall de Dwan, qui est lui sorti en cette même année 1939): un canevas somme toute commun à des dizaines de westerns....

Alors? dans ces circonstances on se sentirait autorisé à pouser le film du coude, et pourtant il ne manque pas d'atouts spéciaux; d'une art, c'est après le très moyen Gold is where you find it le deuxième western en couleurs de Curtiz, et la palette et magnifique; d'autant qu'on sait à quel point la couleur inspire le metteur en scène, qui la pratique depuis la fin du muet. Ensuite, le réalisateur a traité son sujet en s'autorisant comme souvent cette appropriation en contrebande du film, par le biais de ces plans qui en disent plus long sur l'humanité présente dans ces rues, dans cette ville, que de longs discours: ces plans à la grue qui partent d'un détail pour se promener ensuite dans le saloon dont nous voyons ainsi toute la vie et la faune... Curtiz commence son film par du mouvement, et il nous montre en réaité trois groupes en chemin pour ce qui deviendra bientôt Dodge City: Wade Hatton et ses deux camarades, qui six ans après la fin de la guerre civile travaillent en tant que convoyeurs de bétail, mais sont interessés par l'édification des Etats-Unis aux côtés du colonel Dodge, le célèbre artisan de la construction des lignes de chemin de fer vers l'ouest; les bandits, qui convoitent le bétail et sont déja très menaçants, et enfin le colonel Dodge lui-même qui amène avec lui le chemin de fer, symbole d'un monde en construction. C'est la locomotive qu'on aperçoit en premier, avec donc un clin d'oeil à ce trait de Michael Curtiz, de commencer un film par un plan de véhicuile en mouvement...

Le film est célèbre pour une homérique bagarre d'une dizaine de minutes, menée en particulier par Williams et Hale, mais on y remarque d'autres traits moins évidents: c'est un film complètement dans la ligne Warner, avec une tendance Rooseveltienne totalement asumée: la présence tutélaire d'un vieux chef, d'un père de la nation, en la personne du colonel Dodge; l'union sacrée des ex-sudistes (Hatton et ses copains Texans) et du Nord; la nécessité communautaire de retrousser ses manches, face au risque du chaos; l'assimilation de la menace d'une criminalité facilement comparable au fascisme, bien sur, et le combat pour la justice incarné par un cow-boy certes un peu trop propre sur lui, mais aussi un journaliste motivé (Qui paiera cher!) et une femme volontaire. Ce monde est impitoyable, et le film nous montre toutes les facettes du mal lorsqu'un enfant devient la victime même indirecte des exactions des bandits; de son côté, Flynn se rend durant le premier acte involontairement responsable de la mort du frère de la femme qu'il aimera bientôt... Mais surtout, et là on retrouve la notion chère à Curtiz du perpétuel exil, le film se clôt sur un nouveau voyage: la civilisation n'est pas encore installée partout, et Flynn et Havilland partent une fois mariés vers Virginia City, ou ils vont procéder à ce même travail de nettoyage de la criminalité... (L'un des westerns suivants de Curtiz et Flynn s'appellera d'ailleurs bien Virginia City, mais ce seront d'utres héros, ne concluons pas trop vite!)

Dans ce film, Curtiz s'abandonne bien sur à son péché mignon de faire jouer les ombres, par deux fois: d'une part, lors de la mort du journaliste vu dans la pénombre de son bureau, alors qu'il range des documents dans son coffre, on aperçoit sur le mur du fond la silhouette d'un bandit situé hors champ qui va tirer. Le coup de feu sera entendu dans le plan suivant, depuis la rue. Mais à ce plan impecable et esthétique, Curtiz ajoute quelques séquences plus loin une superbe idée, plus riche de sens: alors que les héros sont dans un train, pour convoyer un bandit qui devra être jugé à Wichita, Olivia de Havilland observe depuis le wagon l'ombre du train sur le sol, et constate qu'il y a des silhouettes de bandits sur le toit... Elle sait à quoi s'en tenir; avec ces deux plans, Curtiz renforce l'idée d'une criminalité désincarnée, plus menaçante car elle tend à échapper à la physicalité humaine. Une idée qui prolonge la réflexion sur un fascisme qui avance masqué, qui acquiert ainsi une dimension fantastique et insaisissable... Mais comme Curtiz est Curtiz, il va aussi prendre un malin plaisir à incendier le train pour une séquence riche en émotions, comme il l'avait déja fait en Autriche pour Les chemins de la terreur. Tout ceci est bien riche pour un film mineur...

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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par bruce randylan »

Ma critique 1kult de Jusqu'au crime (aussi connu sous le titre les chemins de la terreur qu'allen john évoque juste avant) :D

http://www.1kult.com/2012/12/21/jusquau ... el-curtiz/
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Message par allen john »

Bruce Randylan a écrit : Ma critique 1kult de Jusqu'au crime (aussi connu sous le titre les chemins de la terreur qu'allen john évoque juste avant)

http://www.1kult.com/2012/12/21/jusquau ... el-curtiz/
Excellente critique, et retour bienvenu sur ce que je considère moi aussi comme l'un des meilleurs films muets de Curtiz (Avec L'avalanche). Voici ce que j'en disais, il y a... un certain temps.
allen john a écrit :Le Cinéma de Minuit a deux fois rendu hommage à Curtiz en diffusant des oeuvres rares. Après vérification, Patrick Brion estime que la quasi-totalité des œuvres hongroises ont disparu, et non toutes… Cela dit, on possède des films Autrichiens, grace aux cinémathèques européennes, en particulier Vienne bien sur, mais aussi Luxembourg et Amsterdam.

WEGE DES SCHRECKENS/LABYRINTH DES GRAUENS
Sorti en 1921, ce film Autrichien aux nombreux titres alternatifs(Labyrinthe des passions, les chemins de la terreur et Jusqu’au crime)nous est parvenu via la cinémathèque de Luxembourg qui en restaura une copie Française ; cette dernière nomme les personnages de patronymes Anglais, et situe une grande partie de son action explicitement à Londres. C’est également le cas d’une copie Autrichienne de Sodom und Gommorah, on peut donc penser que les intertitres originaux le faisaient aussi: Curtiz se garde de donner une dimension purement nationale à son mélo, ce sera une constante dans les films ultérieurs: il vise à l’internationalité, et sait que de situer son film dans un pays Germanique risque de le condamner en cette après-guerre. D’où le recours à des péripéties qui renvoient pour une grande part au cinéma serial Américain: l’héroïne, après tout, est une femme, comme Pearl White. Mais on renvoie aussi à Dickens, et il ne faut pas pousser le bouchon trop loin pour discerner du Feuillade ou du Lang ici…
Au-delà du feuilletonisme mélodramatique aux invraisemblables péripéties, Curtiz nous expose une vision du monde très pessimiste, notamment par la dimension Dickensienne de l’œuvre :

L’alliance entre deux firmes concurrentes, par le biais d’un mariage arrangé, est compromise lorsque le fils de l’un des magnats rencontre une jeune femme pauvre, mais belle. Lorsque celle-ci est compromise, par la faute de son frère, dans une affaire de vol, les personnages sont pris dans une spirale de rebondissements qui vont culminer dans le drame, bien sur, le plus absolu : train enflammé, crime, tricherie, prostitution… j’en oublie certainement.

Extrêmement maîtrisée, la mise en scène de Curtiz en 1921 porte déjà en elle plusieurs de ses marques de fabrique: la stylisation efficace des décors, un cadrage et un découpage impeccables, un rythme soutenu et le recours discret à la profondeur de champ, dans un espace qu’il contrôle jusqu’au dernier figurant. Le tout est mis au service d’une histoire presque gênante par son invraisemblance, mais qu’il aborde frontalement, sans sourciller, et dont il triomphe par l’enthousiasme constant dont il fait preuve. Mais l’une des belles surprises de l’œuvre est d’y déceler la source de ce qui reste sans doute la grande spécialité de Curtiz, son utilisation des ombres, à laquelle on attribue souvent une origine « expressionniste », c’est-à-dire Allemande, tant la confusion entre le cinéma de Weimar et le Caligarisme est répandue. Hors, point d’expressionnisme ici, mais la lumière et l’ombre sont déjà convoquées par le cinéaste : C’est un curieux spectacle d’ombres chinoises qui donne au héros l’idée(Fausse)que sa promise le trompe, et plus tard, les deux policiers convoqués pour arrêter l’héroïne seront aperçus d’abord en silhouettes, inquiétants et chapeautéssymboles d'un destin fatal, avant de se révéler peu menaçants et inutiles pour l’action(Bien qu’ils n’apparaissent que quelques secondes, ils seront très marquants, à la façon du vendeur de billets de loterie, anodin, mais dont on remarque le sparadrap dans Greed: ici, l’un des policiers mâche un chewing-gum avec insistance). L’usine où se déroule une grande partie de l’action apparaît souvent en silhouette dans le décor afin de rappeler le destin des protagonistes, et lorsque le drame se noue, Curtiz abandonne la pleine lumière pour se réfugier dans la nuit, ce qui lui permet l’emploi d’un clair-obscur déjà bien maîtrisé : à la photo, son complice, le futur metteur en scène(du cinéma Nazi)Gustav Ucicky.
On comprend l’enthousiasme des metteurs en scène de l’époque pour le train : l’excitation de la vitesse, liée au fait qu’on puisse habiter le véhicule, mettre en valeur le mouvement, et jouer sur le suspense tout en en faisant un signe des temps : industriels et modernes… Mai ici, le train a un petit plus : le train incendié est l’image la plus communément associée à ce film ; il faut dire que cette séquence est vraiment impressionnante, par son suspense et son réalisme ; de plus, le train est réellement en flammes : je pense que les scénaristes n’avaient pas trop à pousser Curtiz pour que celui-ci réalise leur vision…
Dans ce film nous est présenté un monde compartimenté, un monde qui est bien l’Europe de 1921, vue par une lorgnette Dickensienne, dans laquelle on voit les riches et les pauvres ; si les pauvres veulent le bonheur, c’est manifestement par la richesse qu’ils le trouveront ; et si il y a un happy-end dans ce film, c’est par le sacrifice du frère de l’héroïne que les deux héros trouvent le bonheur : le frère, véritable gibier de potence, a commis moult crimes, et les autres pauvres ne sont pas meilleurs : lorsqu’elle cherche sa mère, l’héroïne tombe dans les filets de proxénètes, et elle ne devra son salut qu’à la fuite, mais, semble-t-il, trop tard… Cette dimension binaire est accentuée par des intertitres illustrés : tous ceux qui ont trait au monde des riches montrent une vision stylisée de l’usine, les autres montrent… une potence !

Pour résumer, si par le jeu souvent insupportable de son héroïne(Lucy Doraine, madame Curtiz)le film reste daté, la mise en scène est d’une grande modernité, alliant les ressources du mélodrame sans jamais en avoir honte, et le film porte bien la marque sinon d’un auteur, en tout cas d’un metteur en scène singulier, déja passionné par la forme, attaché à la dépiction des noirceurs de l'humanité, et qui est déjà promis à un bel avenir….
allen john
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par allen john »

Captain Blood (1935)

Il y a un commencement à tout; par exemple, Captain Blood: c'est le premier film parlant spectaculaire de Michael Curtiz, le premier film de pirates à la Warner depuis les années 20 (Et encore ceux-là étaient généralement des films importés de la Vitagraph ou de la First National, les compagnies avalées par WB durant la décennie), la première grosse production à confier un premier rôle à Errol Flynn, et la rencontre de celui-ci avec Olivia de Havilland. L'année 1935, qui voyait le code de production (Supposé amener une auto-censure plus drastique de la part des studios eux-mêmes) se renforcer, voyait également les studios retrouver les films à panache, les grosses productions et le "swashbuckler". Cette même année, la WB sortait A midsummer night's dream (Max Reinhardt et William dieterle) et préparait Anthony Adverse (Mervyn le roy), la MGM obtenait l'Oscar du meilleur film avec Mutiny on the Bounty (Frank Lloyd)... C'était donc une période charnière.

De tous ces débuts, le film de Curtiz est surtout notable pour être le début de la carrière Hollywoodienne proprement dite de Flynn: c'est Curtiz qui l'a signalé au studio, en remplacement de Robert Donat qui était le premier choix. L'acteur de Tasmanie allait donc pouvoir interpréter son premier Irlandais... Peter Blood n'est pas un pirate, c'est un médecin: lors de soulèvements protestants contre Jacques II, il ne lève pas le petit doigt, estimant être pus utile à tous en tant que docteur. C'est donc parce qu'il a soigné un rebelle qu'il se fait arrêter. Avec d'autres condamnés à mort, il est envoyé à Port Royal comme esclave, ce qui rapporte plus à la couronne que de les exécuter. Là, il doit supporter le joug du tyrannique Colonel Bishop, aide camp du gouverneur. Par contre il s'attire les bonnes grâces de ce dernier en soignant sa goutte; il tombe amoureux de la nièce du colonel, la jolie Arabella, qui a tout fait pour alléger sa charge... A la faveur d'une attaque Espagnole, Blood et ses camarades s'évadent, chapardent un bateau aux Espagnols, et se font pirates...

Peter Blood est l'archétype du héros joué par Flynn: apolitique de coeur, il ne prend parti que contraint et forcé, pour des raisons humaines toujours, jamais idéologiques. Capable d'indulgence envers le camp adverse, à plus forte raison si Olivia de Havilland y figure (Arabella Bishop comme Maid Marian Fitzwater), il est aussi un Irlandais cabochard dont les vertus sont parfois entâchées d'un soupçon d'arrogance (Custer, Blood), d'une tendance à la vengeance qui est d'abord et avant tout une tenace rancune: Peter Blood en veut particulièrement, non à la couronne, mais au roi Jacques II. quand celui-ci est déposé, il abandonne la piraterie et se porte immédiatement au secours des Anglais qu'il vouait à la mort quelques secondes auparavant... C'est un meneur d'hommes porté par un code d'honneur très strict, qu'il n'impose qu'en en démontrant la nécessité... Beaucoup plus complexe et entier que bien des héros, il n'hésite jamais à joindre le geste à la parole, ce qui nous donne d'impeccables scènes d'action. Il est secondé par la fine fleur de la Warner: Guy Kibbee, Ross Alexander, et doit croiser le fer avec Lionel Atwill (Bishop) ou le grand Basil Rathbone (Le pirate Français Levasseur, qui a décidé de vivre en dehors du code d'honneur de Blood...). Et il tombe bien sur amoureux de celle qu'il recroisera sept films durant: Olivia de Havilland, l'autre grande découverte du film; Arabella est un personnage complexe là aussi, mue par autre chose que ses sentiments de classe, elle est clairement attirée par Blood, envers lequel elle nourrit sans doute bien plus qu'un intérêt matrimonial.Son tempérament fait d'Arabella une égale, ou en tout cas une femme qui dépasse le rôle conventionnel de potiche.

Michael Curtiz a mis du temps à revenir à un film de l'ambition de celui-ci. Mais son métier impeccable, et ses états de service irréprochables lui ont sans doute valu d'être considéré par la Warner comme le seul à même de mener un tel spectacle à son terme. C'est un pari tenu, et le metteur en scène le signe dès le début, dès cette scène qui voit Jeremy Pitt, à cheval (Un souvenir de la fameuse chevauchée de Paul Revere pour fédérer le public Américain? Peut-être...), se mettre en quête d'un médecin pour soigner un de ses compagnons de rebellion. Le mouvement, dès la première image: c'est une tradition qui a la peau dure chez le réalisateur fasciné par la notion même de locomotion, qui entend ainsi signaler que le cinéma se doit de bouger. Et c'est parti pour un film dont chaque scène est parfaitement intégrée à une continuité solide, pour 119 minutes... Curtiz accompagne la destinée du vagabond des mers Peter Blood, à nouveau un héros de ses films qui a la bougeotte, et nous le montre aspirer à une idée de conquête et de pillage, certes, mais avec décence. Apolitique par nature, comme d'autres personnages de Curtiz, il se situe de lui-même hors du droit Anglais, à l'écart de tous, à la recherche d'un idéal qui n'existe pas encore, mais qui pourrait bien être l'Amérique... Le film n'est pas un pamphlet, pourtant. Curtiz est trop occupé à faire le meilleur des films de pirates possible, et y parvient semble-t-il sans peine! Il convoque suffisamment de scènes obligées, d'humour, et de possibilités de s'identifier à la quête de Blood, pour permettre au public de s'y retrouver parfaitement. Les scènes de bataille portent sa marque, c'est-à-dire qu'elles sont épiques, montées de mains expertes, et filmées au plus près: la caméra est au milieu du bateau, et les plans semblent s'approcher toujours plus près des visages et des armes...

Au beau milieu des années 30, donc, Captain Blood rend une nouvelle jeunesse à un genre tout entier, le recrée de fait. impossible d'imaginer après ce film une épopée de pirates qui n'en aurait pas subi l'influence, un héros qui aurait vu le personnage créé par Flynn. Ce film va placer Curtiz au sommet de la Warner, le rendre définitivement incontournable... et en plus, Captain Blood est totalement irrésistible! Chef d'oeuvre, donc, en plus d'inaugurer une noucvelle ère...

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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

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...
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Re: Michael Curtiz (1886-1962)

Message par Jeremy Fox »

Tommy Udo a écrit :Un chef-d'oeuvre, ça c'est clair ! 8)
)

Sans hésitation
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