En tout cas, pour avoir zieuté le bouquin making-of du film, il apparaît nettement que Ridley Scott s'est beaucoup investi dans l'écriture, a balancé les grandes idées. Donc voilà encore des tomates que les détracteurs se feront une joie de lui balancer dessus...
C'est de lui, le coup du space-jockey qui n'est qu'une combinaison, par exemple. Il a aidé à la définition de la morphologie particulière de l'Alien final (encore plus laid en photo que dans le film). Contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, c'est donc loin d'être un simple exécutant, il a façonné l'univers autour de quelques idées "fortes" et savait exactement ce qu'il voulait, comme pour la plupart de ses films (je dis ça parce que la grande mode en ce moment, apparemment, c'est de le faire passer pour un exécutant qui pioche au hasard ses sujets de film comme on choisit son menu sur une carte de resto. Faut un peu ouvrir les yeux, quand même, hein.). Voilà donc qui confortera les déçus que le réalisateur est bien le premier responsable de l'échec. Le bouquin se conclue d'ailleurs sur son commentaire comme quoi il s'est éclaté à faire ce film et réfléchit déjà à la suite.
Le bouquin, en lui-même, est très intéressant... si la tonalité esthétique grisâtre de
Prometheus était déjà définie en amont, certains concept art ont de la gueule, c'est curieux qu'on ne retrouve pas autant cette puissance visuelle dans le film, alors que les sketchs de Cobb, Moebius ou Giger pour
Alien étaient vraiment le concentré sur papier de ce qu'on allait voir sur grand écran, en mieux encore. Je pense notamment aux peintures préparatoires de la pyramide sur LV-223, qui évoquent le concept art de Giger pour le
Dune avorté de Jodorowsky. Honnêtement je n'ai pas tellement ressenti la filiation dans le film ! Les patrons du studio ont peut-être mis le holà, trop bizarroïde le machin. Un extrait à ce sujet, qui me paraît central quant aux enjeux de
Prometheus et sa position en porte-à-faux vis-à-vis d'
Alien :
"L'approche finale [de la pyramide], davantage en forme de dôme, a été inspirée par un croquis de Giger pour des "terres ovoïdes" que Max a découvert dans les archives d'
Alien. "L'architecture a été un peu influencée par le premier film, mais revue et corrigée, en ce que nous avons supprimé l'accent mis par Giger sur les formes biologiques", explique-t-il. "Nous sommes plutôt allés vers les formes mécaniques qui étaient incluses dans son style architectural. Le design de Giger est très clairement organique. Ça ressemblait à une vessie de porc gonflée. Nous en avons retiré la nature organique et l'avons davantage fait ressembler à une formation rocheuse. Le défi était de déconstruire Giger, de prendre ses formes et de les purifier. Il y a des motifs qui ont été revisités, mais, nous l'espérons, de façon subtile, afin que votre attention n'en soit pas distraite."
Pour rappel, la Pyramide était envisagée dès
Alien, on trouve des concept art à ce sujet dans le bouquin
Alien Vault.
Apparemment, la seule participation concrète de Giger à
Prometheus aurait été l'élaboration de la fameuse fresque.
Bref, il y a des trucs assez intéressants dans ce bouquin ; ça ne fera pas réévaluer le film mais on entrevoit des choses quand même curieuses. Pas nécessairement plus convaincantes que ce qui a été critiqué depuis 50 pages, mais qui invitent à reconsidérer certains éléments de l'histoire avec un peu plus de clarté. L'ouverture du film est notamment plus explicite, avec la présentation de story-boards au contenu légèrement différent et plus littéral que ce que le film met finalement en scène.