Serguei Eisenstein (1898-1948)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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karmen
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Message par karmen »

les préocupations de eisenstein sont trés particulières et rendent peut-être ses films ou ses écrits difficiles pour ceux qui n'y sont pas sensibilisés. le sens peut donc rester flou.

mais il n'a jamais été proche de staline. cette critique est finalement faite à tous les soviétiques à partir de 27 et à tous les militants comunistes (encore aujourd'hui). être l'un ou l'autre, c'est être un barbare assoiffée de sang frais ou sa victime.
la réalité est bien-sur trés différente mais eisenstein a bien fait le choix de la révolution sociale et d'utiliser le cinéma dans ce sens. on peut tout à fait voir dans ses films une démarche de propagande. du moins un cinéma politique (mais quel film n'en fait pas parti ?).

il a construit toute sa théorie sur la base d'une critique de l'art et de la littérature bourgeoise, nottement du cinéma étasunien naissant qui, de son point de vue étaient en train d'inventer une réthorique conservatrice, mais aussi une grammaire spécifique au cinématographe qui allait permettre à cette réthorique d'être cinématographique. sa critique s'est surtout organisée autour de griffith et de la représentation des groupes sociaux qu'il fait dans ses films. loin d'exclure l'existence de classes sociale, griffith définit leur rapport comme n'étant pas sociaux mais individuels et souvent sentimentaux.

le génie de eisenstein, c'est d'avoir su représenter des groupes et des rapports sociaux. les personnages se définissent par les mécanismes collectifs et les rapports entre les groupes qui sont bien-sur d'intérets. c'est ainsi qu'il pousse les specateurs (russes des années 20 ou 30) à se situer par rapport à l'ensemble de la société et à voir avec qui il partage le plus d'intérets. autrement dit à quelle classe il appartient.
et lorsque l'action se précise, c'est lorsque les groupes sont définits en tant qu'acteurs homogènes. et ce sont ces groupes qui agissent. les vrais personnages de eisenstein sont collectifs.

tout cela s'organise autour de l'idée de déconstruire l'idéologie, l'ésthétique et la réthorique bourgeoise, ce qui implique d'en construire des propores. l'ésthétique d'eisenstein, disons même du réalisme soviétique s'est construite en réaction à celle de la bourgeoisie dans le but de conscientiser les travailleurs de leur situation dans la société et qu'il est nécessaire pour améliorer leur condition de vie d'agir collectivement.
ce qui est dommage, c'est de l'avoir fait sur la base du modèle d'une avant-garde ouvrière organisée dans le POSDR et de n'avoir pas mis en avant l'importance de l'indépendance des luttes. néanmoins, ce en quoi ses films deviennent des oeuvres de propagandes pour le régime soviétique (léniniste et non stalinien) est aussi à placer dans le cadre d'un débat sur ce régime qui n'est peut-être pas que simplement totalitaire. de le replacer aussi dans son contexte historique et politique.
Strum
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Message par Strum »

karmen a écrit :les préocupations de eisenstein sont trés particulières et rendent peut-être ses films ou ses écrits difficiles pour ceux qui n'y sont pas sensibilisés. le sens peut donc rester flou...
As-tu remarqué que c'est lorsqu'il n'a plus fait allégeance à ces âneries théoriques professées par un régime totalitaire qui s'escrimait à formater l'art et l'esthétisme qu'Eisenstein a réalisé son plus beau film (Ivan le Terrible) ? C'est à méditer.
Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Strum a écrit :
karmen a écrit :les préocupations de eisenstein sont trés particulières et rendent peut-être ses films ou ses écrits difficiles pour ceux qui n'y sont pas sensibilisés. le sens peut donc rester flou...
As-tu remarqué que c'est lorsqu'il n'a plus fait allégeance à ces âneries théoriques professées par un régime totalitaire qui s'escrimait à formater l'art et l'esthétisme qu'Eisenstein a réalisé son plus beau film (Ivan le Terrible) ? C'est à méditer.
Dans le même genre, je parlais d'Alexandre Nevski avec un proche ayant lu quelques écrits d'Eisenstein qui m'a dit que le film était volontairement baclé (hormis la réalisation), qu'il avait conclu avec l'acteur principal que le personnage était fade et qu'il pouvait mal le jouer s'il voulait... Eisenstein était en effet à cette époque psychologiquement détruit par l'échec de ses projets Le Pré de Béjine et Que viva México! dû aux autorités, et il ne croyait plus à l'idéal du régime comme au temps de Octobre, tout comme la plupart des soviétiques eux-même. Il a donc réalisé Alexandre Nevski parce que 1) il n'avait pas vraiment le choix et 2) pour entrainer sa technique, mais sans vraiment plus de conviction.
karmen
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Message par karmen »

Strum a écrit :
karmen a écrit :les préocupations de eisenstein sont trés particulières et rendent peut-être ses films ou ses écrits difficiles pour ceux qui n'y sont pas sensibilisés. le sens peut donc rester flou...
As-tu remarqué que c'est lorsqu'il n'a plus fait allégeance à ces âneries théoriques professées par un régime totalitaire qui s'escrimait à formater l'art et l'esthétisme qu'Eisenstein a réalisé son plus beau film (Ivan le Terrible) ? C'est à méditer.
waow !!! comme c'est tranché ! je ne sais pas trop sur quoi te répondre. sinon qu'à mon avis, tu devrais t'en tenir aux images de ses films et te retenir de toutes considérations "politique" ou te documenter un peu sur l'auteur et les 20 premières années du régime soviétique (je te déconseille les hors série du figaro).
à moins que tu ai des choses à dire un peu plus précises sur "ces âneries théoriques..." parce que lu comme ça, ça à l'aire d'un simplisme défiant toutes concurences. on dirait du Courtois en fin de vie.
Strum
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Message par Strum »

Les considérations théoriques artistiques du réalisme soviétique reviennent à tuer l'art car le privant de liberté en l'enfermant dans un carcan forgé par des doctrinaires. C'est une absurdité. Quant aux 20 premières années du régime soviétiques que tu évoques, c'était les débuts d'une des pires expériences jamais tentées par l'homme dans le domaine politique qui a débouché sur la collectivisation forcée et ses millions de morts dans les années 30 et les procès de Moscou de 38. Une horreur. Vassili Grossmann (il y a des allusions terribles dans Vie et Destin à la collectivisation forcée des années 30) et Koestler (Le Zéro et l'Infinie qui fait référence aux procès de Moscou) en ont très bien parlé.

Parlons plutôt d'Ivan Le Terrible. Qui l'a vu ici ?
karmen
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Message par karmen »

Strum a écrit :Les considérations théoriques artistiques du réalisme soviétique reviennent à tuer l'art car le privant de liberté en l'enfermant dans un carcan forgé par des aveugles. C'est une absurdité. Quant aux 20 premières années du régime soviétiques que tu évoques, c'était les débuts d'une des pires expériences jamais tentées par l'homme dans le domaine politique qui a débouché sur la collectivisation forcée et ses millions de morts dans les années 30 et les procès de Moscou de 38. Une horreur. Vassili Grossmann (il y a des allusions terribles dans Vie et Destin à la collectivisation forcée des années 30) et Koestler (Le Zéro et l'Infinie qui fait référence aux procès de Moscou) en ont très bien parlé.

Parlons plutôt d'Ivan Le Terrible. Qui l'a vu ici ?
c'est bien ce que je disais. du Courtois en fin de vie.
mais bon. si c'est tranché, c'est tranché. passons à autre chose.

Ivan le terible, alors ?...
Strum
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Message par Strum »

karmen a écrit :du Courtois en fin de vie...
Jamais lu Courtois. D'ailleurs, ce que j'écris relève du bon sens. Lis donc Vie et Destin de Grossman et on en reparle. Bon, fin du HS :mrgreen: ?
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Demi-Lune
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Demi-Lune »

Oui, discutons d'Eisenstein. :mrgreen:
J'ai découvert en début de mois son Ivan le Terrible en deux parties, et même s'il souffre à mon sens de longueurs et est moins immédiatement fougueux que ses films muets des années 1920, cette œuvre testamentaire est encore une éclatante démonstration du génie cinématographique d'Eisenstein. L'ouverture avec le couronnement du jeune Ivan, notamment, s'est tout de suite imposée comme l'une des plus grandes scènes que j'ai pu voir au cinéma. La succession d'images sur les regalia et les visages de l'assistance, rythmées selon un tempo quasi musical, est absolument étourdissante. Les plans magistraux se comptent par pelletées et le souffle de la démesure balaie la narration. Il y a peu, les découvertes d'Octobre et du Cuirassé Potemkine bombardaient illico Eisenstein au panthéon de mes cinéastes favoris : l'accomplissement de son langage visuel et narratif y est hors-normes, la perfection structurelle et émotionnelle du Cuirassé rivalisant avec l'extraordinaire puissance signifiante des montages échevelés d'Octobre.
Si je remonte ce sujet, c'est moins pour évoquer mes enthousiasmes que pour comprendre pourquoi le cinéma d'Eisenstein me semble un peu dans l'ombre. En effet, j'ai l'impression, peut-être fausse, que ses films n'intéressent plus tellement, comme s'ils étaient connus par cœur, comme si le génie précurseur du réalisateur barbait tellement il a abreuvé par son héritage le cinéma mondial. Ses films sont peu discutés en ces lieux, d'ailleurs. Voilà, j'ai l'impression d'une paradoxale confidentialité : cinéaste tellement marmorisé qu'il paraît désormais être tombé en désuétude. C'est mon sentiment personnel, je le rappelle. Je voulais donc savoir ce que vous pensiez du cinéma d'Eisenstein. Pour l'anecdote, Anorya me confiait récemment sa déception amusée face à mon admiration naissante pour le cinéaste, qui pour lui est trop conscient de ses effets, de sa virtuosité, rendant ses films un peu trop poseurs en leur genre. Je ne partage pas ce sentiment. Je trouve au contraire que l'intelligence de l'expression d'Eisenstein ne paraît pas forcée, comme si elle coulait naturellement de source. Et même quand il se livre à ses grands découpages formels, comme la danse du paon mécanique dans Octobre ou encore ce qu'il fait dire, par la puissance de son montage, à des figurines de Napoléon, je trouve ça franchement jubilatoire même si l'on peut considérer cela comme très théorique, très pensé.
Nomorereasons
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Nomorereasons »

Demi-Lune a écrit : Pour l'anecdote, Anorya me confiait récemment sa déception amusée face à mon admiration naissante pour le cinéaste, qui pour lui est trop conscient de ses effets, de sa virtuosité, rendant ses films un peu trop poseurs en leur genre.
Ouille, je ne vois pas en quoi ce serait plus poseur que La Jetée ou que A bout de Souffle. Un réalisateur qui explore les possibilités de la grammaire d'un art naissant sous un angle baroque peut à la rigueur donner l'impression de s'amuser, mais la pose me semble davantage affecter sa coupe de cheveux, par exemple. Et puis bon, c'est des russes, on prend pour de la pose ce qui n'en est pas forcément.
En ce qui me concerne, j'aime beaucoup La Grève, mon premier Eisenstein dont le sujet ne me disait pourtant trop rien, ainsi que Potemkine.
J'ai l'intention de me recoller un peu sérieusement au cinéma, je reviendrai sur ce topic.
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Re: Serguei Eisenstein (1898-1948)

Message par julien »

Demi-Lune a écrit :En effet, j'ai l'impression, peut-être fausse, que ses films n'intéressent plus tellement, comme s'ils étaient connus par cœur, comme si le génie précurseur du réalisateur barbait tellement il a abreuvé par son héritage le cinéma mondial.
Pour moi Eisenstein c'était avant tout "l'artiste total", comme on en trouve très peu dans le cinéma. Celui qui maîtrisait et mettait en valeur, au plus haut degré de perfection, tout les composants esthétiques d'un film. Musique, Montage, Décors, Cadrage, Lumière etc. Au même titre que Walt Disney ou Charlie Chaplin. A ce niveau là, je pense qu'il aura eu quelques disciples comme Orson Welles, Akira Kurosawa, Karel Zeman, Peter Greenaway ou même Ken Russell, qui lui rend un hommage assez espiègle dans une séquence de Billion Dollar Brain.
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par riqueuniee »

yaplusdsaisons a écrit :
Demi-Lune a écrit : Pour l'anecdote, Anorya me confiait récemment sa déception amusée face à mon admiration naissante pour le cinéaste, qui pour lui est trop conscient de ses effets, de sa virtuosité, rendant ses films un peu trop poseurs en leur genre.
Ouille, je ne vois pas en quoi ce serait plus poseur que La Jetée ou que A bout de Souffle. Un réalisateur qui explore les possibilités de la grammaire d'un art naissant sous un angle baroque peut à la rigueur donner l'impression de s'amuser, mais la pose me semble davantage affecter sa coupe de cheveux, par exemple. Et puis bon, c'est des russes, on prend pour de la pose ce qui n'en est pas forcément.
En ce qui me concerne, j'aime beaucoup La Grève, mon premier Eisenstein dont le sujet ne me disait pourtant trop rien, ainsi que Potemkine.
J'ai l'intention de me recoller un peu sérieusement au cinéma, je reviendrai sur ce topic.
D'accord. Ce n'est pas un cinéma poseur. La virtuosité n'est pâs gratuite. Eisenstein utilise toutes les possibilités techniques que pouvait offrir le cinéma de cette époque pour les mettre au service de son récit (que la façon de mener le récit ne plaise pas, c'e'st autre chose), pas pour dire "voyez ce que je sais faire"'.
La grève et Potemkine sont deux films superbes, Potemkine faisant même partie de mes préférés.
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Anorya »

Demi-Lune a écrit :Pour l'anecdote, Anorya me confiait récemment sa déception amusée face à mon admiration naissante pour le cinéaste, qui pour lui est trop conscient de ses effets, de sa virtuosité, rendant ses films un peu trop poseurs en leur genre. Je ne partage pas ce sentiment. Je trouve au contraire que l'intelligence de l'expression d'Eisenstein ne paraît pas forcée, comme si elle coulait naturellement de source. Et même quand il se livre à ses grands découpages formels, comme la danse du paon mécanique dans Octobre ou encore ce qu'il fait dire, par la puissance de son montage, à des figurines de Napoléon, je trouve ça franchement jubilatoire même si l'on peut considérer cela comme très théorique, très pensé.

Ahlàlà on a vite fait de déformer mes propos quand j'ai le dos tourné. :|

Le 12 février 2012 en MP, je disais ça :
Attention je ne critique en rien son travail et je te conseille vivement de voir La grève et Le cuirassé potemkine dont la richesse ne peut que t'éblouir. Mais le hic, et tu le reconnaîtras vite c'est que Eisenstein travaille essentiellement le montage (il en a tiré de nombreux essais théoriques, de même que Vertov, que je me suis farci en fac, tout comme ceux d'Epstein (que j'aime beaucoup par contre. Il y a un aspect lyrique dans les écrits d'Epstein qu'on retrouve pas toujours dans ses films à la différence du russe qui peut lui, être lyrique et d'une rare poétique dans ses films mais dont les écrits peuvent vite être très --trop-- terre à terre) et l'iconographie au détriment du travelling, presque quasi-inexistant chez lui (et je trouve que le "presque" est de trop). Bien des fois je me suis surpris à penser que j'aurais fait un petit travelling de ci, de là et que c'est un peu trop fixe à mon goût. M'enfin c'est subjectif, je suis du genre à penser que parfois le montage ne fait pas tout...

Je ne conteste en rien le travail d'Eisenstein que je trouve éblouissant aussi. Par contre je trouve un peu dommage qu'il n'ait pas tenté des travellings et mouvements de caméra. Ce en quoi Tarkovski s'oppose plus ou moins dans Le temps scellé en exposant sa conception du plan qui se construit dès lors dans la durée (faut que je retrouve le passage mais c'est même limite s'il tape sur le pauvre Serguei). J'évoquais principalement Eisenstein dans sa pente théorique et sur ce versant, je préfère largement les écrits d'Epstein. Pour en revenir à nos russes chéris, j'avoue être évidemment bien plus Tarkovskien qu'Eisensteinien (si tant est que cela puisse se dire). Si on pouvait comparer, Eisenstein travaille très frontalement, voire "verticalement" (toute puissance du montage, de la surimpression, de l'allégorie et des idées), là où Tarkovski travaille plus d'une manière "horizontale" (durée du plan, travail de la couleur, du ressenti).

Quand je peux dire qu'Eisenstein peut parfois se reposer sur ses lauriers (et non pas "poseur"), c'est dans sa conception théorique du cinéma. Quand on lit La non-indifférente nature du monsieur, les explications sur la conception du paysage et le rapport à l'histoire de l'Art s'avèrent assez intéressants. Mais c'est trop froid, il manque quelque chose. Du coup cela me fait croire que si tu trouves son cinéma jubilatoire justement en raison de cet aspect cérébral et très pensé, les écrits peuvent te laisser un peu plus pantois. Après c'est à voir, question de sensibilité et de subjectivité.

Je ne sais pas si je suis très clair du coup. :oops:
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Strum »

Anorya a écrit :Par contre je trouve un peu dommage qu'il n'ait pas tenté des travellings et mouvements de caméra. Ce en quoi Tarkovski s'oppose plus ou moins dans Le temps scellé en exposant sa conception du plan qui se construit dès lors dans la durée
Juste pour préciser ou pinailler un peu : ;)

Ce n'est pas principalement par le mouvement ou les mouvements de caméra, mais par la durée et le rythme que s'opposent Tarkovski et Eisenstein. Chez Tarkovski, le rythme est à l'intérieur du plan, souvent long, le rythme du film vient du plan lui-même, qui est d'ailleurs assez souvent fixe surtout dans les derniers films de Tarkovski, alors que chez Eisenstein, les plans (souvent chocs) sont des instants et non des durées, et le rythme procède à dessein du montage, dont il est pour Eisenstein le produit.

Le temps scellé selon Tarkovski, c'est donc le temps capturé et ressenti dans sa durée par le plan, et non par le montage.

Ou pour le dire autrement, Ivan le Terrible, c'est excitant, Andreï Roublev, c'est planant. :mrgreen:
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Demi-Lune »

Anorya a écrit :Ahlàlà on a vite fait de déformer mes propos quand j'ai le dos tourné. :|
Je ne retrouvais justement plus ton MP dans mes archives, désolé. :oops: Je voulais éviter les déformations... mais ça a loupé. :|
Pour ma punition, deux Tarkovski ce mois-ci.
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Mais pourquoi ? Pourquoi Seigneur Dieu m'inflige-je un châtiment si cruel ? :mrgreen:
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Re: Discutons d'Eisenstein

Message par Strum »

Strum a écrit :Ou pour le dire autrement, Ivan le Terrible, c'est excitant, Andreï Roublev, c'est planant. :mrgreen:
Et pour conclure en m'autocitant, si tu préfères Tarkovski à Eisenstein, Anorya, cours voir Colonel Blimp de Powell & Pressburger, qui vient de ressortir au cinéma dans une sublime version restaurée (+ possiblement quelques minutes inédites) mettant à l'amende le dvd actuel et ses couleurs parfois un peu palies, et qui est un des plus beaux film sur le temps qui passe qui soient (même si picturalement parlant, c'est un film plus proche d'Eisenstein que de Tarko, c'est un film qui fait ressentir la durée).
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