Superbe!Alphonse Tram a écrit :
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Une idée de l'artiste?
Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky
C'est une affiche signée Ferracci.Akrocine a écrit :Superbe!
Une idée de l'artiste?
Superbe film et belle critique !Profondo Rosso a écrit :Women in love (1970)
C'est dommage, car cela ne m'aurait pas gêné de le voir dans le plus simple appareil !Profondo Rosso a écrit :La production impose le bankable Oliver Reed pour jouer Gerald Crich au détriment d'Edward Fox plus proche physiquement du personnage du livre.
C'est sûr que l'approche aurait été différente avec lui là ça joue bien du décalage entre le côté massif et viril de Reed et la fragilité du personnage. Avec Edward Fox ça aurait plus accentué dessus. Après pour celui ayant le plus de prestance en tenue d'Adam à voirjoe-ernst a écrit :C'est dommage, car cela ne m'aurait pas gêné de le voir dans le plus simple appareil !Profondo Rosso a écrit :La production impose le bankable Oliver Reed pour jouer Gerald Crich au détriment d'Edward Fox plus proche physiquement du personnage du livre.
Tout comme toi, un film qui m'avait tantôt horripilé et fasciné par ses outrances visuelles, sonores, verbales pendant le visionnage jusqu'à petit à petit durant la projection puis surtout après, me conquérir totalement... Peut-être une des expériences les plus fortes, finalement difficile soutenable tant par la crudité visuelle que par son délire hystérique, que j'ai pu avoir devant un petit ou grand écran. Un modèle d'audace et d'intelligence (le film est d'une richesse et d'une efficacité incroyables dans sa dénonciation de l'hypocrisie du catholicisme et de l'utilsation de la religion par l'Etat pour asseoir son autorité).Demi-Lune a écrit :Ça faisait tellement longtemps que j'entendais les plus grandes louanges au sujet des Diables (1971) que j'étais trop content de tomber sur une copie du film avec sous-titres français traînant sur Youtube (vraisemblablement un enregistrement câblé récent). Ce n'est pas encore la version intégrale mais on est bien obligé de s'en contenter. J'allais écrire : bonjour la désillusion. En effet au sortir du film, le constat était celui d'une grande perplexité voire d'une irritation. Mais l'ironie, c'est qu'alors que j'écris ce commentaire je me rends compte que je suis en train de changer progressivement de fusil d'épaule dans mon appréciation. On remet les choses dans le bon ordre, les images entêtantes se bousculent, le souvenir spontané d'un insupportable ramdam hystérique et bouffi de grandiloquence se nuance dans une vision d'ensemble qui se révèle cohérente et foutrement unique. J'imagine que tout spectateur "subit" forcément Les Diables en raison de son contenu, mais j'avoue que le défilé d'actrices à poil épileptiques et enfarinées comme dans un Fellini en roue libre, le vacarme criard continu qui fait saigner les oreilles (c'est le concours à celui qui sera le plus ouvertement barjo - mention à l'abbé exorciste avec sa tête de hippie camé), la volonté de choquer pour choquer, la mélasse pseudo-historique assez ridicule (qu'est-ce que c'est que ce Louis XIII et ce Richelieu ??), m'ont rendu une bonne partie du visionnage très désagréable.
[Seulement une fois qu'on a dit ça on est bien obligé de se rendre à l'évidence : Russell se contrefout du réalisme comme de l'an 40 et semble se délecter à tordre le cou de l'Histoire de France pour mieux charger la mule. Certes pour ce qu'on peut en lire, les faits sont exposés fidèlement mais le film se bâtit comme une sorte de rêverie baroquement cauchemardesque, peuplée de faces de Carême poudrés et décadents dans leurs dentelles, leurs fraises ou leurs soutanes ; une rêverie bardée de décors immaculés et minimalistes, presque abstraits. A un moment Richelieu, présenté comme infirme et imberbe, est déplacé sur un chariot-diable par deux bonnes sœurs, et discute avec le baron de Laubardemont dans une grande salle ressemblant à Fort Knox et où s'affairent des religieuses à différents étages, comme dans un service administratif. Voilà : c'est ça Les Diables. Ça et toutes les joyeusetés déviantes et impies.
Il sera malaisé de ne pas s'attarder sur le talent visuel de Russell ni sur l'envergure des couilles qu'il met ici sur la table, avec son évocation de l'affaire des démons de Loudun. Ce qui fait à mon sens la valeur du film, c'est que Les Diables, avant d'être ce projectile polémique blindé d'images blasphématoires, propose un questionnement sur l'amour chrétien dont on ne peut que reconnaître l'acuité. Nul besoin d'être croyant pour apprécier l'intelligence du propos. La question du célibat des prêtres et la conception de l'humanisme christique, enjoignant à l'amour, sont ici au centre d'une réflexion théologique et surtout morale : la contradiction entre le message de Jésus et l'abstinence imposée à ses serviteurs est ici génératrice d'une frustration sentimentale et sexuelle capitale, ingérable - pouvant, on le constatera, engendrer de bien méchantes inclinations. L'amour du Seigneur devient entamé par une passion plus forte, celle, inavouable, de la luxure. Face à la nymphomanie des Ursulines et la malfaisance dépravée de leur Mère supérieure, la débauche de Grandier, bouillonnant et avide d'étancher son besoin de générosité affective, est-elle dès lors sacrilège ou progressiste ? La question est complexe mais la peinture surchargée d'une institution ecclésiastique bigote, hypocrite, politicienne, obscurantiste, démente, oriente quand même bien le débat. A priori ça peut être un peu difficile de se faire à l'idée que de tels relents moyenâgeux puissent encore avoir cours au temps de Louis XIII, à l'heure de la construction de l’État moderne, cela dit malgré l'excessivité de Russell c'était effectivement l'époque des dernières chasses aux sorcières et autres flambées de psychoses collectives. En ce sens, Les Diables propose peut-être une représentation pas si exagérée que ça des superstitions rurales, sur fond d'un intéressant terreau politique (la domestication des huguenots, l'indépendance de certaines places-fortes, et souterrainement, la consolidation de l’État royal dans la mesure où la purge du satanisme renforce le consensus des sujets autour de leur obéissance au seul maître possible : le roi, lieutenant de Dieu sur Terre).
Il est à noter enfin les prestations hallucinées d'Oliver Reed et Vanessa Redgrave, bien plus inspirées que l'atroce purge "musicale" composée par Peter Maxwell Davies.
Major Tom a écrit :le film était passé sur Arte, avec des dialogues en allemand dans les scènes récupérées pour former le film en version complète -est-ce la version sur YouTube, Demi-Lune?
dès le début de son post, Demi-Lune a écrit :j'étais trop content de tomber sur une copie du film avec sous-titres français traînant sur Youtube (vraisemblablement un enregistrement câblé récent). Ce n'est pas encore la version intégrale mais on est bien obligé de s'en contenter.
Oui c'est vrai. C'était l'époque où le dirigeant Ted Ashley attirait sous sa bannière les meilleurs espoirs du Nouvel Hollywood et prenait de vrais risques artistiques. Paradoxalement, j'ai d'ailleurs l'impression que, malgré son succès monstre, L'Exorciste a un peu marqué la fin de cette prise d'audace. Comme si le studio était allé trop loin. Il n'y a peut-être que le Barry Lyndon de Kubrick ou Les Hommes du Président qui dénotent encore un sacré culot.O'Malley a écrit :Je suis d'ailleurs toujours aussi abasourdi qu'une telle oeuvre ait pu naître un jour au sein d'un grand studio, la Warner, qui a quand même donné naissance la même année, à des oeuvres aussi sulfureuses ou culottées que ces Diables mais aussi Orange mécanique, Klute, John Mc Cabe, l'Inspecteur Harry, THX 1138, voir l'année suivante, Delivrance... sans oublier L'exorciste deux ans après...
Lisztomania aussi en 1975, la même année que Barry Lyndon.Demi-Lune a écrit :Oui c'est vrai. C'était l'époque où le dirigeant Ted Ashley attirait sous sa bannière les meilleurs espoirs du Nouvel Hollywood et prenait de vrais risques artistiques. Paradoxalement, j'ai d'ailleurs l'impression que, malgré son succès monstre, L'Exorciste a un peu marqué la fin de cette prise d'audace. Comme si le studio était allé trop loin. Il n'y a peut-être que le Barry Lyndon de Kubrick ou Les Hommes du Président qui dénotent encore un sacré culot.O'Malley a écrit :Je suis d'ailleurs toujours aussi abasourdi qu'une telle oeuvre ait pu naître un jour au sein d'un grand studio, la Warner, qui a quand même donné naissance la même année, à des oeuvres aussi sulfureuses ou culottées que ces Diables mais aussi Orange mécanique, Klute, John Mc Cabe, l'Inspecteur Harry, THX 1138, voir l'année suivante, Delivrance... sans oublier L'exorciste deux ans après...
Ah oui en effet, ça a l'air d'en tenir une sacrée couche, aussi.Bugsy Siegel a écrit :Lisztomania aussi en 1975, la même année que Barry Lyndon.
j'ai pas tout lu parce que faut pas déconner mais apparemment tu as bien cerné le truc. c'est sur que ça a mal vieilli le cinéma de Ken Russel.Demi-Lune a écrit : Ça faisait tellement longtemps que j'entendais les plus grandes louanges au sujet des Diables (1971) que j'étais trop content de tomber sur une copie du film avec sous-titres français traînant sur Youtube (vraisemblablement un enregistrement câblé récent). Ce n'est pas encore la version intégrale mais on est bien obligé de s'en contenter. J'allais écrire : bonjour la désillusion. En effet au sortir du film, le constat était celui d'une grande perplexité voire d'une irritation. Mais l'ironie, c'est qu'alors que j'écris ce commentaire je me rends compte que je suis en train de changer progressivement de fusil d'épaule dans mon appréciation. On remet les choses dans le bon ordre, les images entêtantes se bousculent, le souvenir spontané d'un insupportable ramdam hystérique et bouffi de grandiloquence se nuance dans une vision d'ensemble qui se révèle cohérente et foutrement unique. J'imagine que tout spectateur "subit" forcément Les Diables en raison de son contenu, mais j'avoue que le défilé d'actrices à poil épileptiques et enfarinées comme dans un Fellini en roue libre, le vacarme criard continu qui fait saigner les oreilles (c'est le concours à celui qui sera le plus ouvertement barjo - mention à l'abbé exorciste avec sa tête de hippie camé), la volonté de choquer pour choquer, la mélasse pseudo-historique assez ridicule (qu'est-ce que c'est que ce Louis XIII et ce Richelieu ??), m'ont rendu une bonne partie du visionnage très désagréable.
Seulement une fois qu'on a dit ça on est bien obligé de se rendre à l'évidence : Russell se contrefout du réalisme comme de l'an 40 et semble se délecter à tordre le cou de l'Histoire de France pour mieux charger la mule. Certes pour ce qu'on peut en lire, les faits sont exposés fidèlement mais le film se bâtit comme une sorte de rêverie baroquement cauchemardesque, peuplée de faces de Carême poudrés et décadents dans leurs dentelles, leurs fraises ou leurs soutanes ; une rêverie bardée de décors immaculés et minimalistes, presque abstraits. A un moment Richelieu, présenté comme infirme et imberbe, est déplacé sur un chariot-diable par deux bonnes sœurs, et discute avec le baron de Laubardemont dans une grande salle ressemblant à Fort Knox et où s'affairent des religieuses à différents étages, comme dans un service administratif. Voilà : c'est ça Les Diables. Ça et toutes les joyeusetés déviantes et impies.
Il sera malaisé de ne pas s'attarder sur le talent visuel de Russell ni sur l'envergure des couilles qu'il met ici sur la table, avec son évocation de l'affaire des démons de Loudun. Ce qui fait à mon sens la valeur du film, c'est que Les Diables, avant d'être ce projectile polémique blindé d'images blasphématoires, propose un questionnement sur l'amour chrétien dont on ne peut que reconnaître l'acuité. Nul besoin d'être croyant pour apprécier l'intelligence du propos. La question du célibat des prêtres et la conception de l'humanisme christique, enjoignant à l'amour, sont ici au centre d'une réflexion théologique et surtout morale : la contradiction entre le message de Jésus et l'abstinence imposée à ses serviteurs est ici génératrice d'une frustration sentimentale et sexuelle capitale, ingérable - pouvant, on le constatera, engendrer de bien méchantes inclinations. L'amour du Seigneur devient entamé par une passion plus forte, celle, inavouable, de la luxure. Face à la nymphomanie des Ursulines et la malfaisance dépravée de leur Mère supérieure, la débauche de Grandier, bouillonnant et avide d'étancher son besoin de générosité affective, est-elle dès lors sacrilège ou progressiste ? La question est complexe mais la peinture surchargée d'une institution ecclésiastique bigote, hypocrite, politicienne, obscurantiste, démente, oriente quand même bien le débat. A priori ça peut être un peu difficile de se faire à l'idée que de tels relents moyenâgeux puissent encore avoir cours au temps de Louis XIII, à l'heure de la construction de l’État moderne, cela dit malgré l'excessivité de Russell c'était effectivement l'époque des dernières chasses aux sorcières et autres flambées de psychoses collectives. En ce sens, Les Diables propose peut-être une représentation pas si exagérée que ça des superstitions rurales, sur fond d'un intéressant terreau politique (la domestication des huguenots, l'indépendance de certaines places-fortes, et souterrainement, la consolidation de l’État royal dans la mesure où la purge du satanisme renforce le consensus des sujets autour de leur obéissance au seul maître possible : le roi, lieutenant de Dieu sur Terre).
Il est à noter enfin les prestations hallucinées d'Oliver Reed et Vanessa Redgrave, bien plus inspirées que l'atroce purge "musicale" composée par Peter Maxwell Davies.