The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Watkinssien
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The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Watkinssien »

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Avis (un peu) à chaud qui contient quelques SPOILERS:

Michel Hazanavicius aime le cinéma. Il aime la pellicule, l'artisanat, le pastiche, le délire, l'évasion... La Classe Américaine ou encore ses deux formidables OSS 117 sont la preuve d'une entreprise de récupération qui laisse exploser en réalité tout un talent d'observation cinéphile et d'acquisition d'une narration populaire...

Si les exemples cités sont de purs moments de rigolade, ils ne sont pas moins des réussites cinématographiques (surtout les aventures du Bonisseur de la Bath)...

Avec The Artist, Hazanavicius tente tous les paris, comme la publicité ne cesse d'évoquer.
L'ambition du cinéaste est finalement de "régresser" le plus possible ses possibilités de faire du cinéma. Film muet, en noir et blanc, tourné dans le format 1.33, respectant scrupuleusement (ou le plus possible) les éléments d'un film de cette période muette.

La beauté du film, à mes yeux, demeure que le film dépasse plus d'une fois son rôle de pastiche.

Pourtant, l'oeuvre est respectueuse. Le rythme de l'ensemble semble rigoureusement influencé par les produits des années 20... La reconstitution est somptueuse, tout en restant sans esbroufe.

L'histoire de cette déchéance est simple, mais prend, par les idées foisonnantes de la mise en scène, une dimension riche, captivante et même passionnante... Le mélodrame qui se joue devant nos yeux, est aussi vieux que l'époque mise en place... Les références pullulent, on pense, scénaristiquement, à Chantons sous la pluie, A Star is Born...

Le cinéaste arrive à jouer avec beaucoup de talent sur une mise en abîme. Et surtout sur un portrait de Hazanavicius lui-même...
Tous les films dans le film que l'on voit sont des produits typiques de l'époque, des oeuvres formatées, sans grand relief mais qui gagnaient en popularité, grâce à un public avide d'évasion, mais également faites avec un artisanat certain, un professionnalisme indiscutable. Et lorsque le personnage de George Valentin décide de réaliser lui-même un film, suite à la venue menaçante du parlant, on comprend la raison du titre original. Car si le film de Valentin, Tears of Love, ressemble à n'importe quel produit de son époque, ce n'est qu'une apparence. Valentin anticipe inconsciemment ou pas la descente aux enfers qu'il va subir (son personnage dans son film meurt à la fin, il est sans cesse menacé par des lances). Notre héros livre une oeuvre à la fois populaire mais extrêmement intimiste qui préfigure une volonté de dépeindre tous ses atermoiements intérieurs, toutes ses obsessions.The Artist est un film aussi qui montre une lutte pertinente contre l'orgueil...

Le climax dramatique du film est formidable, et de plus avec une jolie utilisation du Love Theme de Vertigo de Bernard Herrmann...

Et Hazanavicius n'hésitant pas nous laisser entendre du silence, total, pour qu'on entende nos émotions de spectateurs habiller ce que l'on voit...

Le personnage de George Valentin est un personnage de cinéma complexe, qui revit devant nous yeux, une fois qu'il aura accepté d'avancer (ici de respirer)...

Un mot sur les acteurs : outre le plaisir de voir un casting étonnant (Penelope Ann Miller, James Cromwell, John Goodman et même Malcolm McDowell), il serait absolument honteux de ne pas être élogieux envers Jean Dujardin (exceptionnel) et Bérénice Béjo (sublime dans le jeu et dans son visage)...

Pardonnez-moi pour cet avis pas forcément bien écrit, confus, mais j'attends les vôtres avec impatience...
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Rick Blaine
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Rick Blaine »

Tu augmentes encore mon impatience Watkinssien. Je l'attend vraiment énormément ce film, verdict dimanche, j'ai hâte!
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Nestor Almendros »

J'admire le pari, l'audace d'avoir tenté quelque chose d'inhabituel. Je trouve la reconstitution assez belle (photo, décors), le casting itou, il y a quelques bonnes idées (j'en aurais bien repris beaucoup plus) mais je regrette un peu que ce bref retour au cinéma muet (car j'ai bien peur que cela reste un - joli - coup, un effet de mode) se contente d'aggriper le spectateur avec ce qu'il connaît le mieux, le pendant Chaplinesque. J'avoue que je suis moyennement branché muet et que Chaplin ne m'enthousiasme guère d'habitude (tout en reconnaissant son énorme talent), ce qui explique sans doute une modeste pondération vis à vis de THE ARTIST.
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Watkinssien
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Watkinssien »

Alors là, c'est drôle, c'est que, mis à part, le retranchement du sonore dans le film muet comme dans Modern Times, je ne trouve pas que le film ait un penchant "chaplinesque", au contraire. Le film n'est pas très burlesque, il lorgne plus vers le mélodrame (musical, un peu)...
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Nestor Almendros »

Watkinssien a écrit :Alors là, c'est drôle, c'est que, mis à part, le retranchement du sonore dans le film muet comme dans Modern Times, je ne trouve pas que le film ait un penchant "chaplinesque", au contraire. Le film n'est pas très burlesque, il lorgne plus vers le mélodrame (musical, un peu)...
Je connais certainement moins bien Chaplin que beaucoup ici mais il me semble que justement ce côté mélodrame n'est pas absent de ses films et qu'il n'y a pas que le côté burlesque chez Chaplin (LIMELIGHT par exemple). Dans THE ARTIST il y a évidemment le chien et tout un humour assez réjouissant (je m'attendais à ce qu'il y ait plus d'humour, d'autant plus que c'est parfois assez bien fait - le "bang!" final par exemple). Mais dans l'idée que je me fais de ce côté Chaplin, il y a aussi une histoire très simple, des bons sentiments, une trame assez linéaire et (pour moi) peu audacieuse. Les spécialistes connaissent beaucoup de films muets moins "attendus", plus noirs, plus complexes. J'espérais quelque chose dans cette veine. Mais la vocation "populaire" du film (qui ne me surprend pas, vu le passif de l'équipe) réduit pas mal de choses à mon goût.

J'ai bien aimé le film, qu'on s'entende bien, mais je ne peux m'empêcher d'y être en même temps un peu réfractaire, n'étant pas très attiré par le genre. Qui a dit que j'étais compliqué? Demain je prends rendez-vous avec un psy :fiou: :uhuh:
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Watkinssien
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Watkinssien »

Évite d'aller chez le psy, car je peux comprendre tes réserves... :wink:
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par NotBillyTheKid »

question bêtement simple : J'avais envie d'y aller "en famille". Il y a t il des scènes non adaptées de jeunes enfants ? (mes filles de 4,7, 9ans adorent "Chantons sous la pluie" et les classiques)
Merci
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Kevin95 »

NotBillyTheKid a écrit :question bêtement simple : J'avais envie d'y aller "en famille". Il y a t il des scènes non adaptées de jeunes enfants ? (mes filles de 4,7, 9ans adorent "Chantons sous la pluie" et les classiques)
Merci
Heu non aucunes.
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par NotBillyTheKid »

merci.
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Karras »

Report du topic classement :
2501 a écrit :The Artist : 7,5/10

Pas aussi enthousiasmant que prévu (j'en attendais beaucoup, le film est très simple et son scénario est résumé dans sa bande-annonce).
Mais Hazanavicius m'impressionne toujours, à donner une fois de plus dans l'hommage, ou plutôt la reconstitution décalée, sans tomber dans le passéisme vain.
Il réussit niveau performances d'acteurs et production value, ce que notre cinéma de genre n'arrive pas à atteindre, et ce que notre cinéma populaire ne tente même pas.
Chapeau.
Harkento a écrit : the Artist : 4 / 10
Alors je ne comprends absolument pas quel est l'intérêt d'un tel film ; tout n'est que clin d'oeil, référence et nostalgie. Je trouve le noir et blanc assez artificiel et aucune réelle créativité sur l'utilisation du son ; il aurait été beaucoup plus intéressant, pour l'évolution du personnage et de l'histoire - du cinéma / du film, d'ailleurs dès le début le réal propose une mise en abîme ambitieuse - d'intégrer d'avantage l'élément "sonore" dans le scénario et de faire quelque chose de beaucoup plus artistique et osé. On a tout juste le droit à un "pourquoi ne veux tu pas me parler" de la femme du héros qui ne sert aucunement la thématique névralgique du film et une scène de rêve surprenante et prometteuse. Au lieu de ça, on affiche ça et là des seconds rôles plutôt sympas certes - Dujardin et Béjo sont eux aussi excellents - mais ce film est d'avantage une romance bien ficelée avec un récit très efficace qu'une oeuvre vraiment originale : Hazanavicious n'utilise jamais le potentiel, le matériau de son scénario de départ et c'est bien dommage car à mes yeux, le réel intérêt du film se trouvait justement dans ces enjeux rarement exploités.
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par johell »

J'ai beaucoup aimé le film. Cependant...
Watkinssien a écrit :Le climax dramatique du film est formidable, et de plus avec une jolie utilisation du Love Theme de Vertigo de Bernard Herrmann...
Je trouve que l'usage de cette musique est déplacée. En plus de ne pas convenir pour l'époque, utiliser l'intégralité de ce morceau me renvoie directement au film d'Hitchcock et me fait totalement sortir de celui d'Hazanavicius. Du coup, impossible pour moi d'être touché par tous les éléments dramatiques qui se jouent entre les deux comédiens du film muet. Je trouve qu'il s'agit là d'une faute de goût assez conséquente qui plombe toute la dernière partie du long-métrage. Ce qui est bien dommage... L'utilisation de cette musique était bien plus pertinente dans L'ARMEE DES DOUZE SINGES où Gilliam s'en servait avec justesse pour illustrer sa séquence au cinéma où Bruce Willis retrouve Madeleine Stowe portant une perruque blonde lui rappelant un de ses rêves prémonitoires.
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Watkinssien
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Watkinssien »

Ah, je peux comprendre cet aspect... :)

Pour ma part, je trouve que cette utilisation renvoie à quelque chose de profondément romanesque, où l'amour et la mort se combinent, où la présence du pire appelle le meilleur, où l'instinct de vie et la pulsion de "l'impensable" s'allient dans un montage parallèle où chaque plan se met en place comme l'inéluctable voie de la rédemption...

D'ailleurs, cette musique de Vertigo et ce qu'elle peut évoquer (une partition majestueusement écrite où le son de chaque note distille une émotion) se télescope avec fracas contre l'absence totale de son, de bruit, une fois la rencontre enfin arrivée...
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par julien »

Pour avoir entendu une critique récemment sur France Musique, il parait en plus que la bande originale n'est pas terrible ce qui est quand même un peu embêtant pour un film muet où la musique occupe généralement une large place.
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"Toutes les raisons évoquées qui t'ont paru peu convaincantes sont, pour ma part, les parties d'une remarquable richesse." Watki.
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par Watkinssien »

Je trouve que le travail sur la musique est quand même assez soigné... Elle correspond bien à ce que l'on voit sur l'écran, même si on peut largement admettre qu'elle n'est pas forcément originale... Elle s'inspire efficacement des airs enregistrés pour les films de l'époque...
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Re: The Artist (Michel Hazanavicius - 2011)

Message par riqueuniee »

Une belle réussite. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, le film n'est pas tout à fait un exercice de style "à la manière de" des films muets . L'image (somptueuse), et même la mise en scène (par moments, y compris dans le film "Russian affair" qu'on aperçoit au début) rappellerait d'ailleurs plutôt les films des annees 30 et 40 (surtout ces dernières pour la photo noir et blanc).
Parmi les interprètes , mention à Penelope Ann Miller (l'épouse de George Valentin). C'est elle qui m'évoque le plus (par son jeu et son look) les actrices de l'époque (plutôt d'ailleurs des tout débuts du parlant que du muet )
Un pari gonflé (faire un muet pour évoquer les débuts du parlant) et réussi.
Pour répondre à un avis posté plus haut, pas de ton "chaplinesque" dans ce film.
Dernière modification par riqueuniee le 16 oct. 11, 22:12, modifié 1 fois.
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