Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Père Jules
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Père Jules »

Si mon emballement pour le film s'est tempéré avec le temps (le choc de la scène finale s'estompe peu à peu), toutes les remarques de Sturm, je les partage, mais je trouve au contraire que ça fait la force du film. Entre son discours et la manière dont il film, Lars Von Trier est cohérent. Que n'aurait-on dit s'il s'était complut dans l'esthétisation à outrance de cette scène du mariage ? Si, intrinsèquement, son Dogme peut paraître stupide, il m'apparait moi comme coulant de source.
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Eusebio Cafarelli
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Eusebio Cafarelli »

Une intéressante analyse géographique du film
http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=2241
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AlexRow
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par AlexRow »

Intéressant en effet.
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Strum »

J'ai finalement pu voir la dernière heure du film en me glissant dans une salle en cours de séance.

Je remanie donc ma critique pour la donner en entier (je lui ai rajouté un début et une fin, du coup c'est peut-être un peu brinquebalant) ... je n'ai pas tout détesté dans le film et je poste un peu ma critique sous le coup de l'énervement et du haut le coeur.

_____________

Voilà donc ce film dont Les Cahiers du Cinéma disent qu'il produit "la sidération" et que Positif encense également. Mais ce n'est pas la sidération du sublime que j'ai ressenti devant Melancholia, plutôt la prostration du mal de mer, voire la sidération de la laideur. Si Melancholia est un film souvent laid, ce n'est pas par ses idées, car ce ne sont pas d'abord les idées qui déterminent la beauté d'un film, mais par ses images ou plutôt par leur absence. Car d'images, dans Melancholia, il n'y en a presque pas. Je ne dis pas cela par provocation ou par esprit de contradiction, mais parce que selon ma conception du cinéma, quand une caméra bouge autant, et aussi souvent, que celle de Lars Von Trier, elle ne réalise pas seulement le programme un peu sadique de faire vomir les spectateurs dont l'estomac est fragile, elle annihile aussi 90% des images que l'on peut voir à l'écran, soit que le plan se perde dans le flou d'un instant (dans certains plans du film, le caméraman est tenu de refaire le point pas moins de quatre ou cinq fois ; cela fait dans le même plan quatre ou cinq images floues), soit que le cadrage qui dicte la physique et la portée du plan se dissolve dans les simagrées ou les contorsions du cameraman. "Je ne veux plus aller d'un point A à un point B", dit Von Trier dans son interview à Positif pour s'excuser de sa caméra tremblante. Alors il fait défiler à toute vitesse toutes les lettres de l'alphabet à l'endroit puis à l'envers tel un apprenti pianiste faisant ses gammes ? Quel progrès ! Si "la forme est le fond", quel est le fond de Melancholia ?

Et pourquoi donc ne plus croire à la vertu du plan fixe, qui puise sa force aux dimensions du cadrage ? Même dans les plus beaux plans du film qui appelaient de toute évidence une caméra fixe, ceux de la séquence envoûtante où Justine sort dans la nuit aux deux lunes pour se baigner nue dans la lumière de Melancholia, telle une prêtresse appelant l'apocalypse et recevant son dû, la caméra est portée, et les cadrages bougent donc un peu. Jamais, au grand jamais, la caméra n'est posée, et le plan totalement fixe. A ce stade de respect des règles d'une caméra toujours portée et mouvante que Von Trier s'est imposé il y a quelques années, on pourrait presque parler de superstition. Cette séquence de baignade nocturne est en tout cas très belle (à côté de la laideur émergent dans ce film des saillies visuelles de toute beauté ; certains diront que c'est l'essentiel) et crée enfin ces « images » fortes que Von Trier se refuse à donner le reste du temps, notamment dans la première partie frénétique du film (« Justine »). Avec la séquence de fin qui procure une grande émotion, elles forment les deux plus beaux instants de Melancholia, les seuls moments où il s’approche du sublime romantique.

Cette approche antinaturelle du cinéma (une caméra épileptique n’a rien de naturelle, et est à mon sens le syndrome d’une approche esthétique précieuse tout autant qu'une approche trop figée, qui borne en tout cas le monde et cache son caractère vaste aux spectateurs ; même avec un petit budget et une caméra numérique portée, on peut filmer sans bouger la caméra autant que Von Trier) se retrouve hélas aussi dans les seuls plans fixes du film, ceux du prélude, qui sont victimes d’une esthétique faisant la part trop belle à l’artificialité numérique de certaines images de mode. Au début s'égrène en effet un chapelet de plans figés, forgés aux couleurs laides du numérique et bercés par le Tristan et Isolde de Wagner. Ces plans tirent certains motifs de leur composition (arbres, gazon vert, toiles d'araignée, eau d'un étang) de la nature, mais jamais ils ne rendent justice à sa beauté naturelle, jamais ils ne la cadrent harmonieusement et naturellement (comme savait le faire un Tarkovski), ni ne lui servent d'écrin. On les croirait sortis du magazine américain Vanity Fair. Le recours à l'opéra de Wagner met d'ailleurs en lumière cette différence entre Tristan et Isolde et Melancholia : du point de vue de l'histoire de l'art, la muse mélancolique n'est pas née sous l'égide du romantisme tardif, qui s'intéressait davantage à la nature que Lars Von Trier. Cependant, il est question d'un amour impossible dans l'opéra comme dans le film de Von Trier (l'amour impossible de Justine pour le monde).

Ces plans introductifs sont peut-être des visions ou des rêves de Justine, une dépressive (c'est-à-dire une mélancolique, pour user d'un langage plus littéraire et conformément à la la tradition picturale qu'invoque le film par instants), qui, sachant les êtres et les situations mortelles, anticipe la fin du monde. Les dépressifs vivent ainsi : tout ce qui est tangible est pour eux voué à la disparition ; tout ce qui est beau aussi, et la beauté est mortelle illusion tandis que les mains tendues des proches sont trompeuses. Les dépressifs vivent dans la hantise du désastre à venir ; ils croient entendre avant les autres les échos de l'astre chutant, les roulements de tambour et les trompettes de l'apocalypse. Dans son film, Lars Von Trier donne à sa dépression la rondeur d'une gigantesque planète qui pèse comme un poids sur la Terre et Justine, et semble prête à les engloutir. Ainsi Justine (et Lars Von Trier) voit le monde laid ; la camera est l'écho de leur regard. C'est une juste métaphore de la dépression, qui est une forme exacerbée d'égocentrisme ; le dépressif se croit et se voit le centre du monde vers lequel tout converge, hommes, femmes, étoiles et planètes. La planète du film s'appelle d'ailleurs (tant de littéralité ne s'invente pas) Melancholia.

Après ce prologue tout en laideur, commence l'épreuve d'un roulis permanent. Pendant 1h20, les images tanguent. Comme d'habitude avec les films de Lars Von Trier ayant parti lié avec le Dogme idiot selon lequel il faut bouger sans cesse sa caméra et faire le point après le début d'un plan pour faire naturel (alors que c'est un artifice de mise en scène on ne peut plus lourd et aveuglant), le chef opérateur et le cameraman se prennent pour des convives ivres. Et que je bouge la caméra de haut en bas, et que je tremblote comme si j'avais un coup de vodka dans le nez. Le mal de mer, insidieux et irrépressible, vient. Les séquences s’enchainent, sans contrechamps, et avec un découpage réduit à la portion congrue, du fait de cette caméra portée qui, vorace, aimante l’action. Au centre de cette arche ivre, Justine détruit ce qui lui reste à détruire (patron, mari, tous deux d'une bétise à pleurer parce qu'ils ne sont pas mélancoliques sans doute), tandis que la planète que le prologue nous a annoncé poursuit sa trajectoire d'astre pondéreux venu briser toutes les aspirations humaines. Mais la planète n'aura plus rien à détruire. La caméra tremblante de Lars Von Trier est déjà passée par là, et a déjà détruit, désagrégé, éparpillé aux quatre coins de l'univers, les morceaux chiffonnés de l'espace filmique, elle a consciencieusement pulvérisé les efforts du chef décorateur qui resteront invisibles - dans cette première partie du moins.

Dans la deuxième partie du film (Claire), la caméra est toujours mobile, mais son roulis est plus supportable. Peu à peu un suspense nait de l’approche de la planète. Le pressentiment de Justine (en tant que mélancolique, nous dit-on, « she knows things » ; au-delà de l’origine artistique et historique de cette affirmation, les psychanalystes diront que c’est une croyance habituelle chez certains asociaux) s’est avéré exact, la planète est l’instrument de la future destruction du monde humain. Justine, a priori porte-parole de Von Trier, ne s’en offusque guère. « Earth is evil » dit-elle. La terre (entendre l’humanité) est mauvaise. Sa destruction sera un bon débarras. On peut y voir une morale commode et auto-justificatrice du moindre effort : puisque le monde est mauvais, pourquoi Justine ferait-elle l’effort de se plier aux conventions sociales et d’être bonne ? Ivan Karamazov disait déjà, en d’autres temps, « puisque dieu n’existe pas, tout est permis », ce qui produisit la catastrophe que les lecteurs de Dostoïevski savent. Jusqu’au bout, Justine reste comme étrangère à cette apocalypse qui vient. Peut-être trop même, et son personnage de devenir assez antipathique. Il est d'ailleurs dommage que Von Trier, plutôt que de mettre en mots le don de divination de Justine, n'ait pas creusé davantage la veine des liens souterrains et mystérieux unissant Justine et Melancholia. Après la superbe séquence nocturne de la baignade lumineuse, j'en attendais davantage sur ce chapitre, je m'attendais à voir Justine refleurir, se mirer et puiser ses forces dans le bleu de la planète, espérer son arrivée même avec la joie maléfique que ressentent devant la catastrophe certaines grandes figures gothique du romantisme anglais. Mais non, Von Trier ne choisit pas cette voie plus romantique. Il refait tomber Justine dans une forme de neurasthénie, malgré ses initiatives finales. Elle reste enfermée dans le monde de conventions sociales qui l'entoure (la métaphore du pont qu'elle ne peut franchir figure son enfermement). Or, Von Trier in fine ne se réjouit pas de la disparition du monde, si l'on considére que sa mise en scène parle pour lui - sur le fond, sans doute cela est-il à mettre à son crédit. Justine vers la fin du film n’est ainsi plus à l’unisson de la mise en scène, laquelle refuse la mise à distance par Justine du monde -comme si Von Trier refusait que Justine soit son porte-parole jusqu'au bout. Lui se sent tout à fait impliqué par cette catastrophe, il veut nous la faire voir, nous la faire sentir et convoque pour cela dans la dernière scène du film la panoplie romantique : le pathétique de Wagner, une scénographie de fin du monde où la planète fond sur nous, une lumière bleutée dont semble sortir un grondement, et même le visage d’un enfant avec les pleurs d’une mère. Difficile donc de tenir la proposition glacée du « bon débarras », et d’ailleurs, comme le réalisateur l’espère, durant cette scène puissante, les larmes montent aux yeux. Au moment de la disparition du monde, vient le regret du nihilisme, qui n'était peut-être que posture bravache de Von Trier.

Le romantisme, historiquement, opposa la puissance subjective d’un « je », d’une pensée (« une force qui va », dit Hugo dans Hernani), aux règles classiques que l’on croyait alors immuables. Ce n’était plus une raison éternelle, la même pour tous les créateurs, qui créait l’art, c’était un artiste qui ajustait le monde à ses désirs. Ce monde, il avait le droit de l’anéantir dans les méandres de la passion ou le feu de l’apocalypse. Von Trier cède ici à l’appel le plus radical et arbitraire du romantisme, et détruit, comme Justine son monde social, son monde filmique. Ce faisant, il donne forme à ce fantasme récurrent des mélancoliques, qui consiste à imaginer leur propre enterrement. S’attristant de leur propre sort, ils veulent voir d’autres visages pleurer sur eux. Il en est un peu de même avec cette dernière scène. Von Trier met en scène la mort de son monde, et donc son enterrement, et nous demande d’y assister, puisque nous, spectateurs, sommes le contrechamp de ce film sans contrechamps. A ses côtés, les actrices et acteurs sont tous remarquables, en particulier Kirsten Dunst et Charlotte Gainsbourg, qui jouent Justine et Claire, dont Von Trier dit qu'il a été les chercher dans Les Bonnes de Genêt. Von Trier est décidément un grand directeur d'actrices.

Melancholia, un film romantique donc, comme on le claironne partout ? Par son propos et sa narration, certes. Mais pas par son esthétique si laide, à quelques exceptions près (je conserve dans ma mémoire les plans de la baignade nocturne). Les romantiques se sont certes affranchis des règles, ils ont certes combattu la « vieille littérature crénelée et verrouillée » (Hugo, encore), mais ils avaient aussi le goût du beau et de l’image, et l’ont toujours fait en beauté.
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Mama Grande!
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Mama Grande! »

Bien qu'ayant énormément apprécié Melancholia, je suis d'accord pour dire que Lars Von Trier devrait se payer un cadreur. Cette caméra qui bouge tout le temps, rate son objectif pour se rattraper après est souvent pathétique. Néanmoins, je trouve que les plans fixes ultra léchés du prologue, la photo soignée, la beauté aigre-douce de Kirsten Dunst bien mise en valeur, et certains plans comme la baignade nocturne que tu as cités, suffisent à rattraper la caméra. Dans Les Idiots, Lars Von Trier voulait faire un film laid et mal éclairé. Là, il s'est préoccupé de l'esthétique, de la lumière, et pour ces raisons j'ai du mal à voir Melancholia comme un film laid. Et pour être même complètement honnête, j'y vois une préoccupation esthétique proche de certains Lynch ou Kubrick (pas taper). Peut-être pas sur tous les plans, mais pour le film dans son ensemble...reste plus qu'à corriger la caméra :mrgreen:
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Watkinssien
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Watkinssien »

Lars von Trier choisit ce style visuel pour déséquilibrer les émotions, les tenants et aboutissants de ce qui se passent à l'écran.

En tout cas, il a déjà démontré plusieurs fois sa puissance visuelle (dans le sens, maîtrise du cadre plus "traditionnelle") dans d'autres films, dont celui-ci !
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Chrislynch
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Chrislynch »

Strum a écrit :J'ai finalement pu voir la dernière heure du film en me glissant dans une salle en cours de séance.

Je remanie donc ma critique pour la donner en entier (je lui ai rajouté un début et une fin, du coup c'est peut-être un peu brinquebalant) ... je n'ai pas tout détesté dans le film et je poste un peu ma critique sous le coup de l'énervement et du haut le coeur.

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Voilà donc ce film dont Les Cahiers du Cinéma disent qu'il produit "la sidération" et que Positif encense également. Mais ce n'est pas la sidération du sublime que j'ai ressenti devant Melancholia, plutôt la prostration du mal de mer, voire la sidération de la laideur. Si Melancholia est un film souvent laid, ce n'est pas par ses idées, car ce ne sont pas d'abord les idées qui déterminent la beauté d'un film, mais par ses images ou plutôt par leur absence. Car d'images, dans Melancholia, il n'y en a presque pas. Je ne dis pas cela par provocation ou par esprit de contradiction, mais parce que selon ma conception du cinéma, quand une caméra bouge autant, et aussi souvent, que celle de Lars Von Trier, elle ne réalise pas seulement le programme un peu sadique de faire vomir les spectateurs dont l'estomac est fragile, elle annihile aussi 90% des images que l'on peut voir à l'écran, soit que le plan se perde dans le flou d'un instant (dans certains plans du film, le caméraman est tenu de refaire le point pas moins de quatre ou cinq fois ; cela fait dans le même plan quatre ou cinq images floues), soit que le cadrage qui dicte la physique et la portée du plan se dissolve dans les simagrées ou les contorsions du cameraman. "Je ne veux plus aller d'un point A à un point B", dit Von Trier dans son interview à Positif pour s'excuser de sa caméra tremblante. Alors il fait défiler à toute vitesse toutes les lettres de l'alphabet à l'endroit puis à l'envers tel un apprenti pianiste faisant ses gammes ? Quel progrès ! Si "la forme est le fond", quel est le fond de Melancholia ?

Et pourquoi donc ne plus croire à la vertu du plan fixe, qui puise sa force aux dimensions du cadrage ? Même dans les plus beaux plans du film qui appelaient de toute évidence une caméra fixe, ceux de la séquence envoûtante où Justine sort dans la nuit aux deux lunes pour se baigner nue dans la lumière de Melancholia, telle une prêtresse appelant l'apocalypse et recevant son dû, la caméra est portée, et les cadrages bougent donc un peu. Jamais, au grand jamais, la caméra n'est posée, et le plan totalement fixe. A ce stade de respect des règles d'une caméra toujours portée et mouvante que Von Trier s'est imposé il y a quelques années, on pourrait presque parler de superstition. Cette séquence de baignade nocturne est en tout cas très belle (à côté de la laideur émergent dans ce film des saillies visuelles de toute beauté ; certains diront que c'est l'essentiel) et crée enfin ces « images » fortes que Von Trier se refuse à donner le reste du temps, notamment dans la première partie frénétique du film (« Justine »). Avec la séquence de fin qui procure une grande émotion, elles forment les deux plus beaux instants de Melancholia, les seuls moments où il s’approche du sublime romantique.

Cette approche antinaturelle du cinéma (une caméra épileptique n’a rien de naturelle, et est à mon sens le syndrome d’une approche esthétique précieuse tout autant qu'une approche trop figée, qui borne en tout cas le monde et cache son caractère vaste aux spectateurs ; même avec un petit budget et une caméra numérique portée, on peut filmer sans bouger la caméra autant que Von Trier) se retrouve hélas aussi dans les seuls plans fixes du film, ceux du prélude, qui sont victimes d’une esthétique faisant la part trop belle à l’artificialité numérique de certaines images de mode. Au début s'égrène en effet un chapelet de plans figés, forgés aux couleurs laides du numérique et bercés par le Tristan et Isolde de Wagner. Ces plans tirent certains motifs de leur composition (arbres, gazon vert, toiles d'araignée, eau d'un étang) de la nature, mais jamais ils ne rendent justice à sa beauté naturelle, jamais ils ne la cadrent harmonieusement et naturellement (comme savait le faire un Tarkovski), ni ne lui servent d'écrin. On les croirait sortis du magazine américain Vanity Fair. Le recours à l'opéra de Wagner met d'ailleurs en lumière cette différence entre Tristan et Isolde et Melancholia : du point de vue de l'histoire de l'art, la muse mélancolique n'est pas née sous l'égide du romantisme tardif, qui s'intéressait davantage à la nature que Lars Von Trier. Cependant, il est question d'un amour impossible dans l'opéra comme dans le film de Von Trier (l'amour impossible de Justine pour le monde).

Ces plans introductifs sont peut-être des visions ou des rêves de Justine, une dépressive (c'est-à-dire une mélancolique, pour user d'un langage plus littéraire et conformément à la la tradition picturale qu'invoque le film par instants), qui, sachant les êtres et les situations mortelles, anticipe la fin du monde. Les dépressifs vivent ainsi : tout ce qui est tangible est pour eux voué à la disparition ; tout ce qui est beau aussi, et la beauté est mortelle illusion tandis que les mains tendues des proches sont trompeuses. Les dépressifs vivent dans la hantise du désastre à venir ; ils croient entendre avant les autres les échos de l'astre chutant, les roulements de tambour et les trompettes de l'apocalypse. Dans son film, Lars Von Trier donne à sa dépression la rondeur d'une gigantesque planète qui pèse comme un poids sur la Terre et Justine, et semble prête à les engloutir. Ainsi Justine (et Lars Von Trier) voit le monde laid ; la camera est l'écho de leur regard. C'est une juste métaphore de la dépression, qui est une forme exacerbée d'égocentrisme ; le dépressif se croit et se voit le centre du monde vers lequel tout converge, hommes, femmes, étoiles et planètes. La planète du film s'appelle d'ailleurs (tant de littéralité ne s'invente pas) Melancholia.

Après ce prologue tout en laideur, commence l'épreuve d'un roulis permanent. Pendant 1h20, les images tanguent. Comme d'habitude avec les films de Lars Von Trier ayant parti lié avec le Dogme idiot selon lequel il faut bouger sans cesse sa caméra et faire le point après le début d'un plan pour faire naturel (alors que c'est un artifice de mise en scène on ne peut plus lourd et aveuglant), le chef opérateur et le cameraman se prennent pour des convives ivres. Et que je bouge la caméra de haut en bas, et que je tremblote comme si j'avais un coup de vodka dans le nez. Le mal de mer, insidieux et irrépressible, vient. Les séquences s’enchainent, sans contrechamps, et avec un découpage réduit à la portion congrue, du fait de cette caméra portée qui, vorace, aimante l’action. Au centre de cette arche ivre, Justine détruit ce qui lui reste à détruire (patron, mari, tous deux d'une bétise à pleurer parce qu'ils ne sont pas mélancoliques sans doute), tandis que la planète que le prologue nous a annoncé poursuit sa trajectoire d'astre pondéreux venu briser toutes les aspirations humaines. Mais la planète n'aura plus rien à détruire. La caméra tremblante de Lars Von Trier est déjà passée par là, et a déjà détruit, désagrégé, éparpillé aux quatre coins de l'univers, les morceaux chiffonnés de l'espace filmique, elle a consciencieusement pulvérisé les efforts du chef décorateur qui resteront invisibles - dans cette première partie du moins.

Dans la deuxième partie du film (Claire), la caméra est toujours mobile, mais son roulis est plus supportable. Peu à peu un suspense nait de l’approche de la planète. Le pressentiment de Justine (en tant que mélancolique, nous dit-on, « she knows things » ; au-delà de l’origine artistique et historique de cette affirmation, les psychanalystes diront que c’est une croyance habituelle chez certains asociaux) s’est avéré exact, la planète est l’instrument de la future destruction du monde humain. Justine, a priori porte-voix de Von Trier, ne s’en offusque guère. « Earth is evil » dit-elle. La terre (entendre l’humanité) est mauvaise. Sa destruction sera un bon débarras. On peut y voir une morale commode et auto-justificatrice du moindre effort : puisque le monde est mauvais, pourquoi Justine ferait-elle l’effort de se plier aux conventions sociales et d’être bonne ? Ivan Karamazov disait déjà, en d’autres temps, « puisque dieu n’existe pas, tout est permis », ce qui produisit la catastrophe que les lecteurs de Dostoïevski savent. Jusqu’au bout, Justine reste comme étrangère à cette apocalypse qui vient. Peut-être trop même, et son personnage de devenir assez antipathique. Il est d'ailleurs dommage que Von Trier, plutôt que mettre en mots le don de divination de Justine, n'ait pas creuser davantage la veine des liens souterrains et mystérieux unissant Justine et Melancholia. Après la superbe séquence nocturne de la baignade lumineuse, j'en attendais davantage sur ce chapitre, je m'attendais à voir Justine refleurir, se mirer et puiser ses forces dans le bleu de la planète, attendre son arrivée avec la joie maléfique que ressentent devant la catastrophe certaines grandes figures gothique du romantisme anglais. Mais non, Von Trier ne choisit pas cette voie plus romantique. Il refait tomber Justine dans une forme de neurasthénie, malgré ses initiatives finales. Elle reste enfermée dans le monde de conventions sociales qui l'entoure (la métaphore du pont qu'elle ne peut franchir figure son enfermement). Or, Von Trier in fine ne se réjouit pas de la disparition du monde, si l'on considére que sa mise en scène parle pour lui - sur le fond, sans doute cela est-il à mettre à son crédit. Justine vers la fin du film n’est ainsi plus à l’unisson de la mise en scène qui semble refuser la mise à distance par Justine du monde -comme si Von Trier refusait qu'elle soit son porte-voix jusqu'au bout. Lui se sent tout à fait impliqué par cette catastrophe, il veut nous la faire voir, nous la faire sentir et convoque pour cela la panoplie romantique dans la dernière scène : le pathétique de Wagner, une scénographie de fin du monde où la planète fond sur nous, une lumière bleutée dont semble sortir un grondement, et même le visage d’un enfant avec les pleurs d’une mère. Difficile donc de tenir la proposition glacée du « bon débarras », et d’ailleurs, comme le réalisateur l’espère, durant cette scène puissante, les larmes montent aux yeux. Ainsi, étrangement, les dernières images du film, mélancoliques, démentent le propos nihiliste de Justine. Au moment de la disparition du monde, vient le regret du nihilisme, qui n'était peut-être que posture bravache de Von Trier.

Le romantisme, historiquement, opposa la puissance subjective d’un « je », d’une pensée (« une force qui va », dit Hugo dans Hernani), aux règles classiques que l’on croyait alors immuables. Ce n’était plus une raison éternelle, la même pour tous les créateurs, qui créait l’art, c’était un artiste qui ajustait le monde à ses désirs. Ce monde, il avait le droit de l’anéantir dans les méandres de la passion ou le feu de l’apocalypse. Von Trier cède ici à l’appel le plus radical et arbitraire du romantisme, et détruit, comme Justine son monde social, son monde filmique. Ce faisant, il donne forme à ce fantasme récurrent des mélancoliques, qui consiste à imaginer leur propre enterrement. S’attristant de leur propre sort, ils veulent voir d’autres visages pleurer sur eux. Il en est un peu de même avec cette dernière scène. Von Trier met en scène la mort de son monde, et donc son enterrement, et nous demande d’y assister, puisque nous, spectateurs, sommes le contrechamp de ce film sans contrechamps. A ses côtés, les actrices et acteurs sont tous remarquables, en particulier Kirsten Dunst et Charlotte Gainsbourg, qui jouent Justine et Claire, dont Von Trier dit qu'il a été les chercher dans Les Bonnes de Genêt. Von Trier est décidément un grand directeur d'actrices.

Melancholia, un film romantique donc, comme on le claironne partout ? Par son propos et sa narration, certes. Mais pas par son esthétique si laide, à quelques exceptions près (je conserve dans ma mémoire les plans de la baignade nocturne). Les romantiques se sont certes affranchis des règles, ils ont certes combattu la « vieille littérature crénelée et verrouillée » (Hugo, encore), mais ils avaient aussi le goût du beau et de l’image, et l’ont toujours fait en beauté.
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cinephage
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par cinephage »

Strum a écrit : Melancholia, un film romantique donc, comme on le claironne partout ? Par son propos et sa narration, certes. Mais pas par son esthétique si laide, à quelques exceptions près (je conserve dans ma mémoire les plans de la baignade nocturne). Les romantiques se sont certes affranchis des règles, ils ont certes combattu la « vieille littérature crénelée et verrouillée » (Hugo, encore), mais ils avaient aussi le goût du beau et de l’image, et l’ont toujours fait en beauté.
Paradoxalement, ton intervention ne fait que souligner l'aspect romantique du film : c'est justement parce que les classiques condamnaient leur façon de ne pas respecter les codes du beau et du bienséant qu'ils condamnaient les romantiques. C'est d'ailleurs précisément en défendant la présence du laid dans l'art que Victor Hugo a répondu au Manifeste contre le romantisme de l'académicien Auger. LVT casse les codes du classicisme, en cela aussi sa démarche pourrait se rattacher au romantisme (sauf qu'il ne cherche aucunement à s'y rattacher, ayant manifestement renoncé pour un temps à théoriser son travail).
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Strum »

cinephage a écrit :Paradoxalement, ton intervention ne fait que souligner l'aspect romantique du film : c'est justement parce que les classiques condamnaient leur façon de ne pas respecter les codes du beau et du bienséant qu'ils condamnaient les romantiques. C'est d'ailleurs précisément en défendant la présence du laid dans l'art que Victor Hugo a répondu au Manifeste contre le romantisme de l'académicien Auger. LVT casse les codes du classicisme, en cela aussi sa démarche pourrait se rattacher au romantisme (sauf qu'il ne cherche aucunement à s'y rattacher, ayant manifestement renoncé pour un temps à théoriser son travail).
J'ai un point de vue un peu différent. Le style d'une oeuvre et la bienséance sont deux choses différentes. Si l'on regarde ce qui s'est passé durant la bataille d'Hernani, on constate que les classiques attaquaient en réalité le fond et les idées des romantiques, leur absence de soumission à la morale classique, à la bienséance, y compris dans la résolution de l'intrigue. Lorsqu'Hugo défend indirectement la laideur dans l'art, il ne parle pas de la laideur de la forme (la forme, c'est le style), il parle des excès de l'intrigue, des excès de la passion, des crimes commis par les personnages, de la laideur de certains mots argotiques ou de la laideur de visage d'un personnage, de la laideur morale de l'ensemble (qui s'attaque à la bienséance), à la limite du déséquilibre structurel du récit, mais jamais de la laideur du style. Les romantiques sont dans l'excès, mais ils écrivent merveilleusement bien ; ce sont des dandys et ils ont le goût du style, un style qui n'est pas le style classique certes, mais un style qui est lyrique et beau, un style qui est primordial pour les romantiques puisque par lui passe le "je" subjectif de l'auteur. Hugo, c'est beau, c'est le style qui déborde de partout dans l'intrigue.

Ce que je reproche à Von Trier, comme je l'ai dit dans ma critique, ce n'est pas la laideur de ses idées, c'est la laideur de son style tremblotant, bref la laideur de la forme qu'il utilise pour raconter ses histoires. Globalement, je trouve donc Melancholia laid d'un point de vue visuel (voir ma critique pour les exceptions), et cela pour moi le sépare du romantisme qu'il cherche peut-être à retrouver sur le plan des idées. Comment veux-tu que je trouve beau ou lyrique d'un point de vue formel un film qui me donne physiquement envie de vomir, comme d'un livre qui ferait tanguer la terre autour du lecteur quand on le prend dans les mains ? La caméra de Von Trier me rend si malade que je ne peux même pas regarder une séquence en entier sans ciller ou fermer les yeux à un moment.

Sinon, merci ChrisLynch. :)
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Watkinssien »

Strum a écrit : Comment veux-tu que je trouve beau ou lyrique d'un point de vue forumel un film qui me donne physiquement envie de vomir ?

Ah, et si c'était un peu le but... :mrgreen:
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Strum »

Watkinssien a écrit :Ah, et si c'était un peu le but... :mrgreen:
Mais je pense que c'est un peu le but, hélas. Je pense que Von Trier se dit notamment, "je vais essayer de les mettre dans un état tel qu'ils pourront ainsi mieux sentir le chaos du monde tel que le ressent mon héroïne". Seulement, un film qui me force à quitter la salle au bout d'une demi-heure ou une heure pour ne pas vomir sur mon voisin, je trouve cela embêtant. :mrgreen: La recette marche peut-être sur d'autres, mais pas sur moi. Exceptionnellement, j'ai pu voir Melancholia en entier, parce que je l'ai vu en deux séances, mais je ne le ferai pas pour les autres films de Von Trier. Et au bout du sixième ou septième film que Von Trier filme comme cela, je trouve la recette vraiment usée et lassante.
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Chrislynch »

Watkinssien a écrit :
Strum a écrit : Comment veux-tu que je trouve beau ou lyrique d'un point de vue forumel un film qui me donne physiquement envie de vomir ?

Ah, et si c'était un peu le but... :mrgreen:
Pour avoir un but, faudrait-il encore qu'il soit (LVT) totalement lucide. Or l'était-il vraiment ? Il dit lui-même qu'il était sous influence dépressive. Quel est le but d'un art à la fois créatif et dépressif ? Peut-on associer "lucidité" et "dépression" ? Et si la laideur formelle n'était que l'expression inconsciente de son auteur ? Des images laides issues d'une pensée laide. Pour ma part, je ne crois pas un seul instant à une lucidité cher LVT, et donc certainement pas à un but. La seule chose que je crois, c'est l'expression authentique de son inconscient. Et même si je déteste le résultat, je peux lui reconnaître ça. Et ce n'est pas rien.
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par phylute »

Strum a écrit :Et au bout du sixième ou septième film que Von Trier filme comme cela, je trouve la recette vraiment usée et lassante.
Je veux bien que tu le places au niveau du cadrage dans la lignée de Breaking the Waves et Les idiots, mais trouver six ou sept films qu'il a fait de cette manière, je ne vois pas...
Je ne sais plus pour Dancer in the Dark (j'ai effacé ce film de ma mémoire), mais Melancholia n'a rien à voir avec Dogville, le Direktor et encore moins avec les films du cinéaste d'avant le dogme.

Étonnamment, alors que la caméra à l'épaule, les décadrages, les flous ont tendance à m'épuiser physiquement (pour rester poli) je n'ai rien, mais absolument rien ressenti de tel devant Melancholia. Pas une seconde je n'ai remarqué que la caméra se tordait dans tous les sens et donnait le vertige :shock:
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Strum »

phylute a écrit :Je veux bien que tu le places au niveau du cadrage dans la lignée de Breaking the Waves et Les idiots, mais trouver six ou sept films qu'il a fait de cette manière, je ne vois pas...
Le chiffre est certainement un peu exagéré en effet, je pensais englober ainsi Breaking the Waves et les films qu'il a fait ensuite, mais n'ayant que peu de goût pour ce cinéaste je n'ai vu qu'une petite partie de ces films.
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Re: Melancholia (Lars von Trier - 2011)

Message par Demi-Lune »

Ce film m'a totalement sonné... il y a quelques petites choses que j'ai moyennement aimées (p**ain je hais cette caméra qui tremblotte tout le temps), mais elles ne font pas le poids face à la puissance formelle et dramatique de l'ensemble, qui atteint souvent des sommets inoubliables. Pour le moment, je me contenterai de remarquer (je ne crois pas que ça l'ait été dans le topic), dans le registre des influences signifiantes, ce qui m'a paru être une filiation avec L'Année dernière à Marienbad. Le château, le parc, les perspectives d'arbustes taillés, tout le monde en tenue de soirée, ce sont des éléments qui entretiennent des échos visuels avec l’œuvre de Resnais à un point dont je ne peux croire que ce soit involontaire ; les deux films partagent en effet l'idée d'un certain emprisonnement et impuissance des protagonistes face au temps, qui se déstructure dans le Resnais, et qui égrène les dernières billes de son sablier dans Melancholia. Un plan, en particulier, me paraît éloquent :
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