Bon, bon, enfin vu le
Melancholia de Von Trier.
Avant toute chose, ayons l'honnêteté de préciser que je n'ai pas vu l'intégralité de la filmographie du Monsieur.
De ceux que j'ai vu, c'est-à-dire les films de la dernière période,
Breaking the Waves,
Dancer in the Dark,
les Idiots,
Antichrist,
Dogville, je crois n'en aimer aucun. Néanmoins, je lui reconnais quelques qualités comme sa versatilité, sa direction d'acteurs, et, et......c'est à peu près tout.
Ce que je n'aime pas : son manichéisme, du type gentils/pas gentils, sa soif de déclin, sa propension à utiliser la grosse artillerie pour faire pleurer Janine auquel participe la mise en scène constituée de gros plan, zooms, de tremblements intempestifs ( qui a parlé d'un renouvellement esthétique, hein ? ) et d'éclairage dépréciatif, façon chiotte turc, monochrome ( jaunâtre ou marronnasse), ses actrices hystéro et suicidaires, le tout au service d'histoire au tracé prévisible et déterministe.
A présent, que dire de
Melancholia ? Qu'est-ce que je retiens de ce nouvel opus ?
Je ne peux pas dire que j'ai beaucoup aimé. Le postulat était excitant : les histoires de fin du monde donnent souvent lieu à des films intéressants, dramatiquement fort et permettent aux réalisateurs attachés de donner libre cours à des visions sombres et spectaculaires. Bref, du tout bon pour le cinoche. Partant de cet a priori favorable pour ce type de sujet, j'y suis allé.
Le premier mot qui me vient, c'est celui de lourdeur.
Melancholia est un film d'une pesanteur incroyable. Tout y est en acier inoxydable. Le déterminisme de Von Trier et sa misanthropie légendaire s'y épanouissent pleinement. Une planète surnommé
Melancholia, vague relecture du thème antique de l'influence de Saturne sur le tempérament, est sur le point d'entrer en collision avec la Terre. Quelque part sur cette dernière, Justine ( Kristen Dunst) se marie. C'est la première partie indique le film.
Et déjà très vite, on saisit que tout cela, le cérémonial du mariage, fait un peu chier l'ami Lars. En effet, on comprend, très rapidement, que le bonheur file la nausée au célèbre agoraphobe. Oui, nous chuchote t-il, le bonheur est une maladie que les hommes cherchent à contracter désespérément mais il n'existe pas. Il n y ' a que
la mort !!!! ( prenez une grosse voix de ténor). Pire, nous hurle t-il, cette chose inconcevable et détestable qu'est le bonheur, la société, nos proches, nous l'impose. Oui, le bonheur est devenue aux yeux de ce moraliste, une nécessité contemporaine, un simulacre, un objet de consommation courante qui rassure nos proches et, pire des engeances, nous rend insouciants, légers, gai et amnésiques. Le bonheur est une curée car il nous fait oublier
la mort. La critique n'est pas très subtile ni très nouvelle, voire un peu inquiétante, mais qu'importe, puisque l'ophtalmologiste Lars va nous corriger tout ça avec ces binocles de l'apocalypse. A ce moment et à d'autres, on imagine sans mal la tête du cinéaste, grimaçant de dégoût, tel un curé fanatique échappé du
Nom de la Rose, face au spectacle de l'insolence et désinvolture humaine. Ecrire des personnages et des situations pour les mettre en charpie : voilà ce qui amuse cet obsédé de Dreyer. Un mariage pour voir roucouler un couple uni, même illusoirement, non, non, que nenni. Brisons le, pointons les travers, la petitesse, la vilénie, le mensonge, l'hypocrisie et blabla. Allez, Justine courage : ta mère est une grosse conne mais qui a des raisons de l'être, ton papa est un gigolo pathétique, ton mec, un gentil neneu rêveur, ton boss, une crevure intégrale, ton beau-frère, un obsédé du fric et ta soeur, une angoissée qui donne le change. Bienvenue dans le monde de
Von Trier-land !
A ce stade, on ne désespère pas tout de suite. On patiente, en se disant qu'il nous fatigue avec sa rengaine de vieux con et sa photo dégueu, que la 2ème partie va enfin prendre de la hauteur sur ce minable règlement de compte. Mais, non, ce château où se déroule l'action du film, se transforme de manière aussi réduite et déterministe que les cases représentant la ville de
Dogville. La fin du monde approche, moment de stase : inertie des 2 soeurs, le suicide est palpable, la planète photoshopée se rapproche un peu plus, comme Justine les chevaux sont calmes , Wagner qui, pour la 20ème fois rejoue son ouverture de Tristan et Isolde, creusant davantage l'écart avec l'esthétique grand huit du film, lequel tente, dans un dernier effort, de nous faire croire que nous assistons à du grand cinéma. Alors,
Melancholia, du grand cinéma ? Reste à voir. Petit théâtre filmé ? Y a des chances.