Belle de jour (Luis Bunuel - 1967)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Johnny Doe
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Message par Johnny Doe »

Presque rien à voir, mais j'adore les titres des films de Bunuel, surtout : Cet obscur objet de désir

voilà
- Errm. Do you want to put another meeting in?
- Any point?
- May as well. Errm. And then when nothing comes in, just phone you up and cancel it.
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John Anderton
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Re: BELLE DE JOUR: fascination?

Message par John Anderton »

John Constantine a écrit :Belle de Jour: Bunuel, Deneuve, Piccoli, J-C Carrière... un film que j'ai souvent raté à la tv, vu quelques bouts... mais j'ai fait mes devoirs, et je suis resté scotché devant le dvd. Un film où les fantasmes et la réalité sont mis sur le même plan, avec une photo lumineuse mettant en valeur une Deneuve nue dont on ne voit que la cambrure et le dos, mais le plus beau dos, le plus érotique de l'histoire du cinoche français. Exploration des fantasmes féminins - bon par des hommes quand même, mais apparemment bien documentés - des frustrations bourgeoises - le film aurait pu s'appeler "le charme discret de la bourgeoisie"- film surréaliste, fétichiste [bcp de plans de jambes] mais aussi comédie très particulière [le fantasme du médecin maso, la chaussette trouée de Marcel], en bref un film dans lequel vous pouvez tout projeter, comme cette fin complètement irréelle mais en même temps étrangement logique...

PS: interview de JC Carrière dans le dvd, qui donne des pistes au film et explique sa construction avec l'intelligence et la simplicité qui lui est propre

8/10

Un film avec un pouvoir de fascination indéniable, intoxicant. Etes-vous tombé aussi sous le charme?
Non... :lol:
Le film m'a profondément ennuyé... :?
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Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Vu hier et franchement déçu :?

J'ai trouvé ça froid(dans le sens vide d'émotion), ni fascinant, ni dérangeant :(
Enfin, ça se regarde sans trop de déplaisir (quoique à partir de l'apparition de la petite frappe, ça traine en longueur), mais à aucun moment je n'ai vraiment été captivé.
Quelques belles images dues à l'expression du visage de Deneuve, mais à part ça vraiment pas emballé.

Bien sur on verra comment le film vieillira dans mon esprit mais pour le moment, vraiment moyen.

4-5/10
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Alors Philip, tu es dans ta période "je dégomme les grands classiques" ? :wink:
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Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Roy Neary a écrit :Alors Philip, tu es dans ta période "je dégomme les grands classiques" ? :wink:
:?:
J'ai quand même le droit de ne pas aimer Belle de Jour non? :wink:
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Mais bien sûr Philip ! :lol:
Cela ne m'étonne pas que tu trouves ce film froid, c'est voulu ainsi. Ainsi que le jeu presque monolythique des comédiens. Bunuel explore le feu des fantasmes tapi derrière le vernis froid et calculateur des comportement sociaux.
Cela m'étonne un peu que, en bon amateur de David Lynch, tu n'aies pas aimé un film comme Belle de jour
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Bartlebooth
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Message par Bartlebooth »

Ronan a écrit : Puis, Deneuve me fascine peu, ceci expliquant peut-être...
(...)
Puis bon, mes indifférences absolues ont de quoi choquer plus d'un cinéphile
Meuh non. Ces préférences relèvent du jardin secret de chacun et sont par principe indiscutables.

Personnellemment, Deneuve ("ce Sphynx sans mystère" suivant la formule de Gérard Legrand) m'a toujours laissé de marbre... sauf chez Buñuel précisément (ne pas oublier non plus Tristana) et dans la Sirène du Mississipi, film assez raté à mes yeux (quoiqu'intrigant dans son ratage) où elle est cependant touchante.
Ronan a écrit :Et que penser du discours "bonistique" de Carrière, insistant lourdement sur le réalisme de l'"étude de cas", sur l'inovation que pouvait constituer ce film, quand en le voyant j'avais en tête l'antérieur "La Barrière de Chair", de Suzuki (...)
Peut-être est ce ceci, qui m'aura déçu, un film trop sobre par rapport à ce que j'en attendais, auquel cas une revision pourrais me faire changer d'avis.
1. Il est fort probable que Carrière ignore jusqu'au nom de Suzuki. Qui, en Europe, avait pu voir les films de Suzuki à l'époque? Personne, je pense.
2. Comme Constantine, je crois qu'il est un peu vain non pas de rapprocher les deux films mais de les faire jouer l'un contre l'autre. Ce sont deux regards très différents, mais également fascinants, sur la "perversion" féminine. La sobriété du Buñuel, cette espèce d'objectivité clinique qui est la marque de sa dernière période, est quant à moi ce qui garantit sa pérennité, quand tant de films à l'audace autoproclamée de la même époque nous paraissent ridicules aujourd'hui.
Peut-être en effet mordras-tu davantage aux Buñuel de la période mexicaine (je suppose que c'est ce que tu as commandé chez CDiscount), en particulier El et la Vie criminelle d'Archibald de la Cruz, en raison de leur crudité et de leur jeu sardonique avec les codes du cinéma de genre mexicain.
Je ne saurais trop te recommander aussi la vision de l'Âge d'or, bien supérieur à mes yeux au Chien andalou ; si déjà tu as aimé ce dernier, il ne peut que te plaire.

Ronan a écrit : Peut être aussi faut il chercher du coté du coscénariste, décidemment trop satisfait de son boulot...Ca m'a fait penser un peu au dernier Chabrol, brillant stylistiquement mais au scénario vraiment trop démonstratif (et, dans les deux cas, le sous texte psychanalitique du genre qui m'épuise : immanquable)
Entièrement d'accord sur le Chabrol : mise en scène magistrale sur un scénario beaucoup trop immédiatement lisible dont les intentions se voient comme le nez au milieu de la figure, loin des grandes réussites chabroliennes. Mais c'est pour moi tout le contraire dans Belle de jour, qui ne démontre rien, et dont l'énigme se dérobe jusqu'au bout. Que s'est-il passé réellement au juste ? Nous n'en saurons rien ; et le happy end paradoxal (le mari miraculeusement guéri) ne fait qu'ajouter au mystère.
Peu importe du coup l'autosatisfaction du scénariste, peu importe le discours autour du film (cette plaie, souvent, des bonus, qui finit par enterrer l'oeuvre sous la glose, aussi pertinente soit-elle). Ce qui compte, c'est le film lui-même. Et l'on peut, comme pour Mulholland Drive, multiplier les hypothèses ingénieuses. Aucune n'épuise (à mes yeux) l'énigme sans fond du film.
Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Roy Neary a écrit : Cela m'étonne un peu que, en bon amateur de David Lynch, tu n'aies pas aimé un film comme Belle de jour
A part le mélange fantasmes-réalité et fantasmes déviants tapis sous une apparence banale, je ne vois pas beaucoup de points communs avec Lynch :wink:
Je n'aime pas Belle de Jour parce que je le trouve clinique, vide d'émotion, ce que les films de Lynch, même quand ils dégagent une certaine froideur(Lost Highway), ne sont pas.

Et dans le genre portrait de femme à double vie, je trouve Twin Peaks Fire Walk With Me beaucoup plus marquant, poignant et intéressant que Belle de Jour(dont il ne me restera pas grand chose à part le visage de Sévrine quand elle prend du plaisir) :oops: :?
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Philip Marlowe a écrit :A part le mélange fantasmes-réalité et fantasmes déviants tapis sous une apparence banale, je ne vois pas beaucoup de points communs avec Lynch :wink:
Et bien c'est déjà ça et ça fait quand même pas mal, non ?!! :lol:
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Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Roy Neary a écrit :
Philip Marlowe a écrit :A part le mélange fantasmes-réalité et fantasmes déviants tapis sous une apparence banale, je ne vois pas beaucoup de points communs avec Lynch :wink:
Et bien c'est déjà ça et ça fait quand même pas mal, non ?!! :lol:
:oops: :lol:
Bon réponse simple:
Films de Lynch: :D
Belle de Jour: :? :(

Et puis j'explique dans la suite du message :P
Philip Marlowe
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Message par Philip Marlowe »

Roy Neary a écrit : Bunuel explore le feu des fantasmes tapi derrière le vernis froid et calculateur des comportement sociaux.
D'ailleurs ces fantasmes sont aussi froids que le vernis qui les recouvre j'ai trouvé :?
Tuck pendleton
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Message par Tuck pendleton »

Découvert aujourd'hui...Pour moi le film est un "Romance" réussi fixant, également, une certaine distanciation mais parvenant à instaurer un trouble par le biais d'un scénario truffé de chausse trappe. Comme dans l'âge d'or, on ressent une certaine jubilation dans ce voyage au coeur d'un univers subversif et cela offre un contrepoids au ton sec utilisé par Bunuel...Il y a peu de chaleur dans ce film mais je ne l'ai pas ressenti comme un manifeste...ça coulait de source
Jordan White
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Re: Belle de jour (Luis Bunuel, 1967)

Message par Jordan White »

Découvert en DVD.
Un film très impressionnant pour son époque avec une ouverture onirique magistrale qui nous plonge tout de suite dans l'ambiance parfois irréelle du film, avec des situations fantasmagoriques audacieuses. Voir ainsi le personnage de Sévèrine nous livrer son fantasme en prologue alors même que l'oeuvre nous parle de sa frustration est un choix original. Il faut se dire que nous sommes en 1967 et que Catherine Deneuve se fait fouetter avec une cravache en gros plan. Incroyable.
Luis Bunuel avoir nous avoir pris comme ça à froid nous montre le quotidien d'une femme bien sous tous rapports en apparence qui laisse sa curiosité et son envie de vivre au delà de son home sweet home prendre le dessus sur une certaine morosité. De quoi souffre-t-elle ? Quelle est cette autre vie qu'elle va chercher au deuxième étage alors que tout semble lui sourire ? Le fard de l'actrice, ses lunettes noires, le front baissé ne répondent pas tout de suite à ces questions et c'est tant mieux. La façon dont le cinéaste utilise de courts mouvements de caméra nous permet de nous accrocher à un personnage ultra sensible, à fleur de peau, fragile comme de la porcelaine. La forme épouse le fond, et les thématiques soulevées par le film sont passionnantes : le désir inabouti, les fantasmes qui se révèlent les uns après les autres, la prostitution en maison close avec sa tenancière affable (autre époque, autres moeurs), le petit banditisme, la psychologie de couple, la psychanalyse. Bunuel ne nous regarde pas comme un Freud glacial. L'humour est là, le sadomasochisme soft aussi. La tension érotique est palpable tout du long, que ce soit par le biais de l'iruption dans la vie du personnage de Mr Husson, gentleman discret et amateur de call-girls, comme celle de l'homme s'allongeant dans le lit des ébats et ayant déjà ses habitudes, le fameux vendeur de bonbons. Plus drôle encore, car plus mordant, le portrait de l'homme se faisait fouetter et grimper dessus par la "Marquise" (exquise Françoise Fabian), dans un rôle qui demande de l'autodérision pour ne pas sombrer dans le ridicule et de la subtilité dans le dialogue pour ne pas être un simple vaudeville.

Catherine Deneuve, gracile, à l'époque post Les Parapluies de Cherbourg et de Les Demoiselles de Rochefort est sidérante. D'une beauté et d'une audace de tous les instants, elle se met à nue dans tous les sens du terme devant une caméra qui évite le voyeurisme facile tout en projetant ses désirs et son envie, jamais tout à fait repue de désir (amoureux et amical). Madame Anaïs est pour elle plus qu'une boss. C'est une femme qui s'épenche sur ses problèmes tout en ne lui demandant jamais de s'expliquer. Morale mais pas moralisatrice. Comme le film en lui-même qui s'amuse de ces petits plaisirs saphiques rapidement échangés, tout en discrétion, afin d'éviter un point de vue trop hétérocentriste ou le fantasme masculin classique de la lesbienne (Mme Anaïs embrasse fugitivement, du bout des lèvres, la nouvelle venue). Le titre du film, comme ses dialogues a une classe imperturbable. D'une part par la facture plastique époustouflante du film qui fait vivre devant nos yeux toute une époque (la fin des 60's pétillantes et pop), d'autre part grâce au génie d'un créateur hors du commun, habillant ici une de ses plus fidèles égéries : l'immense Yves Saint Laurent. La classe de l'actrice est celle du créateur qui lui offre une garde robe d'un classicisme intemporel. Les autres comédiens, dans leur interprétation sont tous au diapason. Y compris la petite frappe qui s'enamourache de notre Belle de jour avec la fin tragique qui est la sienne. Le film avec ses séquences oniriques, parenthèses surréalistes qui rappellent l'univers de Bunuel, sa rencontre et ses affinités avec le mouvement depuis sa rencontre avec Garcia Lorqua, est un petit bijou de sensualité, d'érotisme diffus (je ne vois guère que Radley Metzger pour faire aussi bien) et de mystère. Cette fin quelque peu abrupte logique et irrationnelle, dépassant le cadre de la narration classique nous permet de retrouver dans un ultime plan le visage nouvellement radieux de Sévèrine, personnage complexe, voire insondable qui ne dévoile que peu de ses secrets (Mr Husson s'en charge) tout en donnant de la substance à un rôle extrêmement périlleux. Le film jongle aussi entre le réel et le fantasmé de façon à nous perdre parfois un peu en route avant de nous harponner une bonne fois pour toutes. Il me manque cependant un petit quelque chose, un je ne sais quoi de plus définitif encore pour en faire un grand film. Mais j'ai beaucoup aimé ses moments de fantaisie et l'interprétation de Deneuve. Je comprends désormais d'autant plus la logique de Belle toujours de Manoel de Oliveira, son atmosphère et ses dialogues finaux en écho à ceux très poétiques de Belle de jour. Merci à toi Phnom&Penh pour le DVD.
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Re: Belle de jour (Luis Bunuel - 1967)

Message par Phnom&Penh »

Jordan White a écrit :Mais j'ai beaucoup aimé ses moments de fantaisie et l'interprétation de Deneuve. Je comprends désormais d'autant plus la logique de Belle toujours de Manoel de Oliveira, son atmosphère et ses dialogues finaux en écho à ceux très poétiques de Belle de jour. Merci à toi Phnom&Penh pour le DVD.
Et merci à toi d'avoir retranscrit avec autant d'enthousiasme ton plaisir à découvrir les deux films :)
J'avais dans l'idée qu'ils te plairaient mais j'aurai évidemment pu me tromper. C'est toujours gênant d'avoir fait vivre un pensum à un ami, c'est très plaisant que ce soit le contraire :D

Je ne sais pas quels Buñuel tu connais ou pas mais je pense que la plupart de ses films ont tout pour te plaire. Les Oliveira, ça dépend des films, il épouse des sujets et formes de mise en scène souvent très différents, c'est un formaliste et un littéraire compliqué, on peut beaucoup aimer certains films et en rejeter d'autres.
En tout cas, je suis bien content que tu ais aimé ces deux là. :wink:
"pour cet enfant devenu grand, le cinéma et la femme sont restés deux notions absolument inséparables", Chris Marker

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Jordan White
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Re: Belle de jour (Luis Bunuel - 1967)

Message par Jordan White »

Phnom&Penh a écrit : Je ne sais pas quels Buñuel tu connais ou pas mais je pense que la plupart de ses films ont tout pour te plaire. Les Oliveira, ça dépend des films, il épouse des sujets et formes de mise en scène souvent très différents, c'est un formaliste et un littéraire compliqué, on peut beaucoup aimer certains films et en rejeter d'autres.

De Buñuel je n'ai vu qu' Un chien andalou. C'était donc ma deuxième immersion dans son univers.
Je découvrais De Oliveira avec Belle toujours.
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