Clarence Brown (1890-1987)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Tancrède
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Tancrède »

putain le mec il est mort à 97 ans!
il a vécu encore plus longtemps que Henry King et Allan Dwan.
c'est OUF perso je trouve.
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Ann Harding
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Ann Harding »

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Smouldering Fires (La Femme de quarante ans, 1924) de Clarence Brown avec Pauline Frederick, Laura La Plante, Malcolm McGregor et Tully Marshall

Jane Vale (P. Frederick) dirige une entreprise de confection d'une main de fer. Tous ses employés sont terrorisés et n'osent pas critiquer sa gestion. Mais, Robert Elliott (M. McGregor) ose proposer des changements. Jane tombe amoureuse de lui...

Ce film de Clarence Brown, réalisé pour la Universal, a pour personnage principal une femme d'affaires. Brown montre déjà sa capacité remarquable à la direction d'actrices, et ce bien avant de diriger Garbo. Pauline Frederick est absolument splendide dans le rôle principal. En 1924, elle était aussi à l'affiche d'un Lubitsch remarquable, Three Women (1924). Elle nous apparaît d'abord assez masculine: costume, fine cravate et cheveux plaqués. Lors d'une réunion au sein de l'entreprise, on voit la terreur qu'elle y fait règner. Seul, Scotty (Tully Marshall) est de taille à lui répondre car il est là depuis longtemps. Il est une sorte d'éminence grise, devinant les désirs de sa patronne avant qu'elle les formule. Cela donne lieu d'ailleurs à un petit jeu fort amusant : elle empoche systématiquement tous les crayons que lui tend Scotty pour signer. En quelques plans, nous avons fait connaissance avec les personnages. La très froide Jane Vale va s'adoucir soudain face à son jeune employé, Robert Elliott (Malcolm McGregor). Elle redevient féminine et souhaite lui plaire. Celui-ci n'a même pas remarqué l'attraction que sa patronne ressent pour lui. Il pense que sa soudaine promotion est due à son talent. Et c'est là que la mise en scène de Brown est en tous points remarquables. Les différentes aspirations des personnages se reflètent dans leurs regards sans que ceux-ci se croisent. Ils regardent tous dans une direction opposée, absorbés par leur propre désir. Jane rêve d'épouser ce jeune homme qui lui a fait retrouver sa part de féminité ; Robert, heureux de sa promotion, ne réalise d'abord pas l'amour de Jane. Et un troisième personnage va compliquer la situation. La jeune soeur de Jane, Dorothy (L. La Plante) va être d'abord choquée par ce mariage étrange entre cet homme d'une vingtaine d'année avec sa soeur de quarante ans. Mais, rapidement, elle est attirée par lui. Contrairement à ce qu'ont pourrait attendre dans un mélodrame classique, aucun des personnages ne souhaite faire du mal aux autres. Ils vont donc dissimuler cette attraction pour ne pas nuire à Jane. Et, à nouveau, c'est pas un regard que Jane va découvrir la vérité. Elle surprend le visage de sa soeur dans le reflet d'une fenêtre. Elle comprend alors combien elle s'est méprise. Le film se termine en douceur avec Jane qui fait preuve d'une abnégation superbe en redonnant sa liberté à son mari par un mensonge. Clarence Brown réalise là un petit bijou qui réussit à combiner l'aspect social (la vie au sein de l'entreprise), les désirs d'une femme qui a perdu sa jeunesse et l'humour. La structure du film est absolument parfaite sans une once de 'gras'. Le jeu des teintages nous rend les différentes émotions qui étreignent Jane, passant du bonheur à la désillusion. C'est sans conteste un des plus portraits de femme du cinéma des années 20. Le film est disponible chez Sunrise Silents.
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par bruce randylan »

Hallechant toutes ces oeuvres muettes :)


Emma (1932)
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Je me lasserai décidément jamais des films du début des années 30 (pré-code).
Non pas pour la crudité de l'histoire, celle-ci étant au contraire assez morale, mais pour la rapidité d'exécution et de narration.
Environ 70 minutes et le film pourrait être deux fois plus long vu ce qu'il raconte.
Le tour de force de Clarence Brown est de ne jamais précipiter son histoire ou de sacrifier ses personnages. Avec au contraire une mise en scène fluide et très précise, il parvient à synthétiser avec brièveté l'essentiel de chaque scène et la psychologie de chaque personnage (même si plusieurs sont très sommaires). L'inventivité comme la virtuosité de la mise en scène sont ainsi très modernes. Certains travellings sont vraiment très longs (ceux dans la gare), les mouvements de grue assez complexe (dans le tribunal) et le film évite un découpage académique avec un jeu étonnant sur la profondeur de champ (quand 3 des enfants s'en prennent à Emma).

Tout aussi détonnant le mélange des genres : comédie, drame, film romantique, film à procès... La partie comédie est la moins réussie avec une séquence bien lourde qui s'éternise autour d'un simulateur de vol et le jeu appuyé de Marie Dressler
Mais le style se fait beaucoup plus réussis passé le premier quart d'heure quand l'histoire se fait plus chaleureuse et humaine. Brown fait même preuve d'une jolie sensibilité, très pudique et discrète : quand l'employeur de Emma la demande en marriage ; quand Emma découvre la mort de deux de ses proches (deux séquences à la réalisation très différentes).
Le traitement de Brown parvient à émouvoir en contournant les rebondissements digne d'un mauvais roman de gare. On est d'ailleurs surpris par la noirceur d'un scénario qui fait preuve par ailleurs de beaucoup d'ouverture d'esprit en prônant le mélange des classes sociales.

Vraiment une très belle surprise qui me donne vraiment envie de découvrir d'avantage la première période du réalisateur
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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Ann Harding
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Ann Harding »

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Letty Lynton (Captive, 1932) de Clarence Brown avec Joan Crawford, Robert Montgomery, Nils Asther, Lewis Stone et May Robson

Letty (J. Crawford), une riche héritière, mène une vie débridée en Amérique du Sud depuis plusieurs mois. Elle voudrait échapper à son amant Emile Renaul (N. Asther) dont elle a peur. Elle réussit à prendre le bateau pour rentrer en Amérique. A bord, elle rencontre Jerry Darrow (R. Montgomery) dont elle tombe amoureuse...

Ce film de Clarence Brown est célèbre à cause de son contenu - hautement immoral - ainsi qu'à cause du procès pour plagiat du scénario. Ce procès a malheureusement eu pour effet de rendre le film quasiment invisible jusqu'à ce jour. Il n'a jamais été diffusé en VHS, ni en DVD, et il ne passe plus à la télévision. Heureusement, il reste quelques copies (de qualité très médiocre) qui circulent et permettent de voir ce film 'maudit'. Le scénario est basé sur un roman de Marie Belloc Lowndes, l'auteur de The Lodger, inspiré par un cas d'empoisenement célèbre, 'The Edinburgh Case' dont David Lean fera plus tard également un film, intitulé Madeleine (1950). Malheureusement, à cause d'une autre pièce de théâtre intitulée Dishonored Lady d'Edward Sheldon, qui racontait la même histoire, on attaqua le studio MGM pour plagiat. Après de longs développements judiciaires, la MGM craignit que tous les profits du film ($600.000) ne passent entre les mains des plaignants. Mais, en appel, seule une porportion des profits (égale à la portion du texte plagié) devait être payée. Néanmoins, depuis ce temps, la MGM ne sort plus le film. Ce procès assez rocambolesque serait suffisant pour rendre le film célèbre. Mais, en fait, le contenu même du scénario est de la dynamite. Joan Crawford y est une riche héritière à la vie sexuelle débridée en compagnie d'un individu louche (le suédois Nils Asther) qu'elle n'aime pas. L'ayant quitté subrepticement, elle tombe dans les bras du gendre parfait, en la personne de Robert Montgomery. Hélas, son ex-amant est déjà arrivé à New York et menace d'exposer son passé. Joan pense au suicide et emporte du poison pour une dernière confrontation avec Nils. Il la frappe et la bat. Mais, c'est lui qui boit le champagne empoisonné. Elle l'insulte en le traitant de 'Mongrel' (bâtard) alors qu'il meurt. Joan devient une meutrière au sang froid parfait qui efface les traces de son passage. Et elle observe même le serveur qui entre dans la pièce et boit du champagne dans le verre empoisonné sans même lever un sourcil. C'est le final du film qui est totalement détonnant. Letty est convoquée chez le juge d'instruction (L. Stone) à la suite du meurtre. Mais, elle en sort libre et sans procès aprés avoir reçu le soutien de son fiancé (Montgomery), de sa mère et de sa bonne ! C'est probablement un des seuls films jamais produit à Hollywood où une meurtrière échappe à toutes sanctions grâce à ses mensonges et à ceux des siens. Elle vivra donc heureuse après avoir éliminé un amant gênant. Rien que pour cela, l'exploitation d'un tel film devenait impossible après l'adoption du Production Code au milieu de 1934. Le film fut en tous cas un gros succès (sauf en Grande-Bretagne où il fut interdit). La robe en organdi blanc, signée Adrian, que porte Joan Crawford (voir ci-dessus) fut copiée et vendue par le grand magasin Macy's de New York à plus de 50.000 exemplaires. D'ailleurs, Joan porte dans le film des vêtements parfaitement en phase avec son héroïne comme un manteau au large col de fourrure qui la fait presque disparaitre. Il m'est difficile de parler de la cinématographie du film (signée du talentueux Oliver T. Marsh) car la copie que j'ai vue est trop mauvaise. Mais, il ne fait aucun doute que ce mélo est très bien dirigé par Clarence Brown. Il trouve toujours l'angle qu'il faut pour suggérer les rapports entre les personnages. Quand Joan rentre à la maison et arrive en haut d'un immense escalier, nous découvrons sa mère - qui la déteste - par une porte ouverte, une belle utilisation de la profondeur de champ. Espérons que ce film de Clarence Brown redeviendra visible, comme le sera bientôt Night Flight (1933).
feb
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par feb »

Possessed - Clarence Brown (1931)
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3ème film du couple Crawford-Gable, Possessed raconte l'histoire de Marian (Crawford), ouvrière dans une usine d'emballage en carton, qui décide de quitter sa ville de province (et Al, l'homme qui souhaite l'épouser) pour tenter sa chance à New York. Elle va rencontrer Mark Whitney (Gable), riche avocat divorcé, va devenir sa maîtresse et évoluer petit à petit en femme de la ville. 3 ans se sont écoulés quand Whitney décide de se présenter aux élections pour être élu gouverneur. Pour éviter que cette liaison ne soit un handicap pour lui, Marian se fait passer pour une femme divorcée et apprend que, malgré le risque, Whitney veut l'épouser. Au même moment elle voit revenir Al, qui a fait fortune dans l'industrie cimentière, qui souhaite travailler avec Whitney et surtout la demander en mariage....

On retrouve Crawford dans le rôle de cette fille de la campagne qui décide de tout plaquer pour réussir sa vie dans la grande ville et que l'on retrouvera dans Sadie McKee réalisé également par Clarence Brown. Si l'histoire peut paraître simpliste (le film ne dure que 76 min et aurait pu être un poil plus étoffé), le film se laisse regarder avec plaisir surtout que le couple Crawford/Gable fonctionne à merveille, Clarence Brown sait parfaitement filmer les actrices (Joan Crawford est de toute beauté dans ce film :oops: et Brown a toujours le chic pour proposer des plans qui me font vraiment plaisir :fiou: ) et la mise en scène du réalisateur est d'une grande sobriété et offre des plans très intéressants (Crawford regardant passer le train au ralenti dans lequel on découvre dans chaque cabine une tranche de vie des gens fortunés, Gable décrochant le téléphone avec une caméra qui semble posée à même la table, etc). Le film est dans son ensemble très agréable, le duo d'acteurs est toujours aussi parfait, la réalisation est plus que correcte et enfin, 1931 oblige, on retrouve 2-3 détails qui font le charme des films pré-code et que j'apprécie particulièrement. 7/10

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Idiot's Delight - Clarence Brown (1939)
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Harry Van (Clark Gable), vétéren de la 1ère guerre, tente de se faire une place dans le showbiz mais ne trouve pas mieux qu'un poste d'assistant dans un show de télépathie avec une partenaire alcoolique. Un soir, il rencontre Irène (Norma Shearer), une acrobate qui prétend être Russe et souhaite devenir son assistante. Après avoir passé la nuit ensemble, il se séparent sur le quai de la gare.
Environ 10-15 ans plus tard (1939), Van s'occupe d'une troupe de 6 jeunes danseuses, "Les Blondes", dans une tournée à travers l'Europe. Alors qu'ils souhaitent rejoindre Genève, ils se retrouvent bloqués à la frontière d'un pays imaginaire (sans doute l'Italie mais avec des gens parlant l'Esperanto) à cause de tensions militaires importantes dans la région. Obligés d'attendre que la frontière rouvre, ils se retrouvent coincés dans un hotel, proche d'une base aérienne militaire, où de nombreuses nationalités se côtoient. Van retrouve Irène, superbe femme blonde à l'accent russe, maitresse d'un riche industriel dans l'armement, Achille Weber (Edward Arnold) et qui semble ne pas se souvenir de lui. Lorsque la guerre éclate, la frontière est ouverte pour permettre aux gens d'éviter les représailles mais Irène doit rester à l'hotel car son passeport n'est pas valide et avoue à Val être celle qu'il a connue....


Ce film de 1939 (dernier film du couple Gable/Shearer) peut s'apparenter à un film de propagande si on se penche sur plusieurs détails : la situation géographique de l'hotel, le personnage de Achille Weber qui s'enrichit grace à la vente de bombes aux pays en guerre, le personnage du Dr. Waldersee (James Coburn) qui veut proposer ses services aux plus offrants, le personnage de Quillary (Burgess Meredith) dénonçant le massacre de civils et qui se retrouve arrêté et fusillé par les militaires locaux. Mais je n'arrive pas à croire que ce film ait pu être réalisé avec cet objectif premier car le scénario fait l'impasse sur beaucoup trop d'éléments importants (montée du nazisme, du fascisme, militarisation de l'Allemagne, pays envahis, etc). Ici l'histoire se concentre uniquement sur l'histoire d'amour et la rencontre de Harry Van et de Irène avec l'entrée en guerre des pays européens comme (petit) prétexte.

La première partie nous montre la rencontre de ces 2 personnes alors qu'ils ne sont que de simples artistes : Il essaye d'avoir son nom en haut de l'affiche et elle veut travailler avec lui en usant de son imagination fertile. Les 2 se séparent en se saluant à travers les vitres de leurs trains respectifs (et Clarence Brown en profite pour faire traverser tous les wagons jusqu'au dernier à Norma Shearer afin qu'elle puisse continuer de saluer Clark Gable :wink: ).

La seconde partie prend part dans l'hotel où se retrouvent bloqués tous les protagonistes et on découvre un Harry Van plus vieux et enfin responsable d'une petite troupe et surtout une Irene totalement métamorphosée, au fort accent russe (Garbo sort de ce corps :mrgreen: ) et qui raconte sa vie à chaque fois d'une façon différente. Si on peut trouver le jeu de Norma Shearer "over the top", j'ai personnellement trouvé que son interprétation de cette ancienne comtesse collait bien à son rôle, celui d'une femme prisonnière de ses mensonges et qui doit en faire plus (étant assez fan de l'actrice cela doit aider un peu :fiou: ). Son accent, son attitude, son jeu font penser à la Garbo de Mata Hari en moins de 10 secondes (ce qui n'est pas pour me déranger :mrgreen: ) mais je trouve qu'elle colle parfaitement au personnage. Clark Gable de son coté est impeccable dans ce personnage qui se soucie plus de savoir si la personne qui lui fait face est bien celle qu'il a rencontrée il y a bien longtemps que de la guerre qui se prépare en Europe. L'acteur nous propose un petit passage dansé et chanté (l'unique fois dans sa carrière) accompagnée de ses 6 danseuses qui semblent, elles, plus intéressées par les militaires locaux que par les problèmes politiques :uhuh:

Dans l'ensemble le film se laisse suivre pour l'histoire entre les 2 personnages, le jeu de Norma Shearer qui feinte de ne pas reconnaitre Harry Van (à cette petite coquetterie dans son regard :oops: ), la réalisation sans fioriture de Clarence Brown (même si je l'ai vu plus inspiré avec Garbo et Crawford devant la caméra) et les seconds roles assez convaincants (Edward Arnold, Charles Coburn et Burgess Meredith) et ce malgré des défauts présents (mise en scène qui semble bloquée par le cadre de l'hotel, intérêt du contexte de la guerre, jeu de l'actrice, seconds rôles qui auraient mérités plus de matière). Suivant comment on aborde ce film, on peut en ressortir avec une appréciation bien différente : 1) Si on cherche à y voir un film qui dénonce la guerre, on risque d'être déçu / 2) Si on oublie le contexte et que l'on se focalise sur la relation entre Gable et Shearer, alors le film se laisse regarder (et si on apprécie les 2 acteurs ça va mieux :wink: ). 7/10
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Cathy
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Cathy »

La ronde des pantins, Idiot's delight (1939)

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Clarence Brown réalise ici un film curieux, on se dit que cela va être un musical, mais Clark Gable en chorus boy c'est déjà risible, alors en leader de musical, cela ne le fait pas, mais nous sommes plus dans une espèce de vaudeville où la guerre rythme les vies. Le film s'ouvre sur la fin de la première guerre mondiale et le défilé des glorieux soldats dans New York, le film se termine lors de l'entrée en guerre de la seconde guerre mondiale. Il y a aussi en quelque sorte deux films dans le film, la première partie qui évoque les tribulations de Harry Van dans le monde du music hall, sa rencontre avec Irene, une acrobate qui rêve de devenir sa collaboratrice dans son numéro bidon de voyance, et une deuxième partie qui se passe à une frontière, qu'on ne situe pas trop, dans un hotel où les passagers d'un train sont bloqués. Et là nous sommes dans un numéro d'actrice, si Clark Gable remplit bien son rôle de séducteur, hableur capable de danser le fameux "Puttin on the ritz" avec six girls blondes, le numéro est tout autre pour Norma Shearer qui fait un numéro énorme. Le problème est que quand elle paraît naturelle, elle semble en faire des kilos déjà dans le larmoyant et le pathos, alors que quand elle devient cette espèce d'immigrée russe, elle devient tout bonnement irresistible avec ces roulements de "r", sa coiffure blonde platine, elle est méconnaissable. Pourtant à la toute fin lors du bombardement de l'hotel, elle redevient de nouveau assez insupportable dans le surjeu. Alors il est vrai que son personnage est outrancier, mais elle en fait quand même des tonnes. Nous sommes dans une production MGM de studio, avec la reconstitution de ces montagnes enneigées qui servent de panorama à l'hôtel, et bien que l'on sente le travail de studio, Clarence Brown n'hésite pas à les montrer régulièrement en arrière plan, là où d'autres réalisateurs accentueraient leur mise en scène sur l'intérieur de l'hotel. Il y a aussi ce message à la fois de paix et de guerre, avec ce pacifiste qui sera passé par les armes, ces bombardements, ce savant interprété par Charles Coburn qui finira par préférer rentrer chez lui quitte à manger ses rats que de soigner les gens qui finiront toujours par s'entretuer ou cet industriel joué par Edward Arnold qui abandonnera sa maîtresse. Bref c'est un film curieux qui surfe sur plusieurs registres, typique de ces productions de studio hollywoodiennes !
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Rick Blaine »

Night Flight (1933)

Film racontant les débuts de l’aéropostale nocturne en Amérique du sud, et centrant ce récit sur une journée au QG de l’aéropostale de Buenos Aires, Night Flight n'est pas vraiment un "Grand Hotel en avion" comme la MGM semble l'avoir vendu à l'époque. Certes le casting est prestigieux, mais ce n'est pas un film chorale. Les frères Barrymore sont au QG, Gable et Montgomery sont dans les airs, Helena Hayes et Myrna Loy des femmes qui attendent leur mari ou assistent à leur départ. Et puis surtout le personnage central, c'est l'avion, et l'humanité luttant par la technologie face à la nature.
Il faut passer rapidement sur le fil rouge prétexte du film, un hôpital brésilien qui doit se faire livrer de toute urgence du sérum depuis le Chili, ce qui donne lieu à deux scènes d'une extrême lourdeur mais heureusement très courte en début et fin de film. Heureusement, pendant tout le reste du film, on oublie cet argument et on se concentre sur le défi humain, la conquête du ciel, la lutte contre les éléments, remarquablement filmé par Clarence Brown. Les séquences aériennes sont franchement spectaculaires et très prenantes, et s'il n'y a pas réellement d'intrigue qui nous implique émotionnellement dans le film du début à la fin, beaucoup de séquences sont prenantes, et Night Flight reste passionnant.

Par une dramaturgie un peu mince, Night Flight n'est pas un grand film. Mais c'est un film spectaculaire, fort bien interprété et souvent passionnant. Un très bon moment.
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Ann Harding
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Ann Harding »

Finalement, le film a l'air plus intéressant que je ne le croyais après avoir lu les différentes critiques d'américains qui avaient vu le film au Festival TCM. Merci, Rick, pour ta critique. :wink:
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Rick Blaine »

Ann Harding a écrit :Finalement, le film a l'air plus intéressant que je ne le croyais après avoir lu les différentes critiques d'américains qui avaient vu le film au Festival TCM. Merci, Rick, pour ta critique. :wink:
Il y a peut-être eu une incompréhension de leur côté sur la nature du film. On est pas dans le grand film MGM élégant et clinquant auquel aurait pu faire penser le casting, mais plutôt quelque chose qui se rapprocherait un peu de Brumes (H. Hawks), en étant peut être un peu moins réussit du point de vue dramaturgie.
Dans mon ressenti, il y a aussi un aspect conquête du ciel qui joue - les avions, j'adore ça :D - mais le film ne se résume pas à ça, je trouve que l'aspect humain, notamment sur le personnage du directeur de la compagnie (John Barrymore), est très réussi.
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par feb »

Sa femme et sa secrétaire (Wife versus Secretary) - Clarence Brown (1936)
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L'éditeur Van Stanhope (Clark Gable) est mariée depuis 3 ans à Linda (Myrna Loy) et ils sont toujours aussi amoureux l'un de l'autre. Malgré les remarques de la mère de Van sur la beauté de sa secrétaire, Helen 'Whitey' Wilson (Jean Harlow), Linda fait confiance à son mari et sait que la relation reste strictement professionnelle. Mais la secretaire devient de plus en plus indispensable à Van quand il entreprend le rachat d'un concurrent et l'éditeur se fait de moins en moins présent auprès de sa femme. Lors d'une soirée, le couple se fache à propos de ce 3ème élément : Van refuse que sa secrétaire parte sur un autre poste prétextant le fait qu'elle lui est indispensable alors que sa femme aimerait le contraire. Pour s'excuser et lui montrer qu'elle se trompe, Van profite d'un déplacement professionnel à La Havane pour proposer un voyage à sa femme mais doit annuler au dernier moment car il doit absolument boucler l'affaire en cours. Il se rend donc seul à La Havane et demande à sa secrétaire de le rejoindre sur place. Lorsque Linda apprend cela et qu'elle n'arrive plus à joindre son mari, la jalousie prend le dessus....

5ème film du couple Gable/Harlow, 4ème film du couple Gable/Loy et réalisé par Clarence Brown, Wife versus Secretary avait tout pour être une comédie bien agréable mais malheureusement le film s'avère être un simple triangle amoureux sans prétention, au rythme très classique, à l'interprétation plus que correcte mais sans coup d'éclat et qui manque de passages réellement drôles pour que le film soit qualifié de pure comédie. Les 3 acteurs sont bons avec une mention spéciale à Jean Harlow qui interprète le role d'une secrétaire qui tombe amoureuse de son patron mais qui ne le montre pas et qui saura s'effacer devant sa femme. L'actrice présente une image bien différente de celle qu'elle peut avoir dans Red-Headed Woman ou China Seas et elle est ici élégante, discrète et sobre dans ses tenues et son allure. Clark Gable nous gratifie de quelques grimaces dont il a le secret mais ne semble pas forcer son talent tout le long du film et fait correctement son travail. Il saura parfaitement retranscrire sur la fin du film la déception qui est sienne de voir sa femme se méprendre sur sa relation avec Whitey. Myrna Loy est impeccable dans le rôle de la femme de Van qui va peu à peu croire que son mari le trompe. A noter la présence de James Stewart dans le rôle du prétendant de Whitey et qui fait presque office de figuration dans le film...étonnant de trouver l'acteur dans un rôle film où n'importe quel jeune premier de la MGM aurait fait l'affaire et où l'acteur semble être tout sauf à l'aise.
La réalisation de Clarence Brown est des plus classiques mais il nous gratifie de quelques plans bien emmenés surtout lorsqu'il profite de la taille de la résidence des Stanhope (grande comme 10 fois mon appart, la MGM savait faire des décors simples :mrgreen:) ou qu'il propose des plans simplement basés sur les regards échangés pour faire "passer" le texte : dans la chambre d'hotel, Harlow assise sur le lit où Gable est allongé comprend qu'il vaut mieux qu'elle aille dans sa chambre / lors de la dernière scène, Harlow et Loy se croisent à l'entrée du bureau et l'échange de regard suffit à comprendre le sentiment de chacune d'elle.
6,5/10
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

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Passion Immortelle (1947)

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Song of Love est un biopic très romancé des destins des compositeurs Robert Schumann, son épouse Clara et Johannes Brahms. Un panneau nous prévient d'emblée de la vision romancée des évènements auxquels nous allons assister, il est donc inutile pour le connaisseur de pointer les nombreuses inexactitudes et raccourcis dont use volontairement le scénario inspiré d'une pièce de Bernard Schubert et Mario Silva. Clarence Brown cherche à donne le récit le plus romanesque possible et s'attache aux évènements de la vie de ses personnages penchant le plus dans cette direction. L'intrigue tournera donc autour de la passion entre Clara et Robert Schumann, les errements de ce dernier en quête de reconnaissance artistique et les tourments que lui causeront la maladie ainsi que de l'amour de moins en moins secret que vouera le disciple Brahms à la l'épouse de son mentor.

Dès lors, Clarence Brown propose une tonalité intimiste et grandiose à la fois, la musique étant notre guide de l'une à l'autre. La fabuleuse séquence d'ouverture exprime parfaitement cette idée. Le générique défile avec une salle de concert vue depuis le fond, puis un majestueux mouvement de caméra nous ramène vers la scène où nous assistons à la prestation de Clara (Katharine Hepburn), tout en dextérité virtuose mais sans âme puisqu'elle suit les directive autoritaire de son père. L'instant suivant elle brave les directives de ce dernier après un regard à l'homme qu'elle aime au premier rang et entame donc le Träumerei de Robert Schumann, vrai morceau leitmotiv du film. Soudain mise en scène de Brown s'imprègne de cette grâce pour saisir la grâce de Clara dans son jeu, l'amour de Robert face au cadeau qui lui est fait et les réactions du public subjugué (le court plan où le jeune monarque s'abandonne avant d'être repris).

Le lien unique entre Robert et Clara Schumann est magnifiquement dépeint d'emblée et (presque) aucun obstacle ne saura le briser. Katharine Hepburn est comme souvent parfaite en épouse dévouée et Paul Henreid excellent en artiste torturé tandis que Robert Walker les seconde tout en sobriété dans le rôle de Brahms condamné à aimer en silence. Les trois acteurs confèrent une dimension humaine qui nous rend proche ces figures légendaires de la musique et loin de ne donner que dans la gravité, Clarence Brown offre quelques savoureux moment de comédie surtout au début avec la marmaille nombreuse et bruyante du couple Schumann. Comme on pouvait s'y attendre avec le réalisateur, la reconstitution est somptueuse notamment durant les séquences de concert où les salles gigantesques et luxueuse éblouissent constamment.

C'est encore et toujours la musique qui rythmera les drames de la dernière partie avec une nouvelle fois Träumerei qui illustre pathétiquement leur séparation (et une superbe idée de Brown qui isole à l'image en l'éclairant dans le noir le visage d'Hepburn pour symboliser le fossé entre elle et un Robert perdu) et leur union au delà de tout dans la magnifique conclusion où elle l'interprète une ultime fois vieillissante pour former une boucle avec l'ouverture. 5/6
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Ann Harding
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

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Intruder in the Dust (L'Intrus, 1949) de Clarence Brown avec Juano Hernandez, Claude Jarman Jr., David Brian et Elizabeth Patterson

Dans une petite ville du Mississippi, Lucas Beauchamp (J. Hernandez), un fermier noir, a été arrêté pour le meurtre d'un blanc. Toute la population se rassemble autour de la prison pour organiser son lynchage. Mais, le jeune Chick Mallison (C. Jarman Jr.) va trouver Lucas avec son oncle avocat John Stevens (D. Brian). Il part la nuit pour déterrer le cadavre du mort et récupérer la balle qui l'a tué...

Avec cet Intruder in the Dust, Clarence Brown rappelle à ceux qui l'aurait oublié qu'il est bien plus qu'un simple 'studio director'. Embauché à la MGM en 1926, il est le réalisateur des stars maisons telles que Garbo et Crawford. Mais, en 1949, avec l'arrivée de Dory Schary comme producteur, les films MGM deviennent progressivement plus sensibles aux problèmes raciaux et sociaux de l'Amérique. Clarence Brown produit et réalise un plaidoyer anti-raciste sur un scénario de William Faulkner qui tranche avec ses films de pure divertissement. Le film est entièrement tourné à Oxford (Mississippi) la ville où habite William Faulkner. Il y a un désir d'authenticité et de sobriété remarquable à tous les niveaux dans ce film. Tout d'abord, il y a le personnage central Lucas Beauchamp, interprété avec dignité et charisme par le portoricain Juano Hernandez. Le cinéma américain de l'époque ne nous a pas habitué à voir un homme noir qui montre une telle fierté dans l'adversité. Alors qu'il est amené menottes aux poignets jusqu'à la prison devant une immense foule d'hommes blancs, il conserve sa dignité et toise du regard cette foule hostile. Il secoue même la poussière de son chapeau tombé à terre avant de la remettre. Vêtu comme un gentleman farmer, Il s'avance ignorant les regards haineux. Il possède une propriété et cultive sa propre terre et n'a pas l'intention de se laisser humilier. Cependant, il sait que ses chances de prouver son innocence sont faible. Aux yeux de la population, il est noir et forcément coupable. C'est sans compter le jeune Mallison (un Claude Jarman Jr. à l'air de petit oiseau effrayé) qui va tout faire pour l'aider. Les rapports en Mallison et Beauchamp sont d'ailleurs teintés d'une ambiguité étonnante. Il a rencontré Lucas après être tombé dans un trou d'eau gelé et celui-ci lui a offert l'hospitalité. Il a refusé toute aumône après ce beau geste. On sent un mélange de crainte et de gratitude chez cet adolescent blanc, élevé dans une famille du cru. Il va partir dans une expédition dangereuse la nuit tombée en compagnie du fils noir d'une domestique et d'une vieille dame excentrique Miss Habersham, jouée par la vétérante Elizabeth Patterson. Partis pour déterrer le cadavre de la victime, ils trouvent une tombe vide. A partir de ce moment-là, son oncle avocat commence à croire à l'innocence de Lucas. Ce bled perdu du Mississippi est rempli de personnages illettrés et racistes qui tueraient père et mère pour de l'argent. Le vieux Ned Gowrie (Porter Hall) est manchot, mais il a un pistolet caché dans sa chemise qu'il reboutonne systématiquement après l'avoir rangé. Il est le père du mort, lui aussi à la recherche du meurtrier. Tout ce petit monde nous replonge dans cette Amérique du sud profond qui vit encore comme au siècle dernier. Clarence Brown choisit une sobriété totale dans ce récit, sans jamais chercher d'effets de manche. Mais, les images en disent plus qu'un long discours. Il suffit de voir la cohue des voitures qui convergent vers la ville dans l'attente du lynchage qui apportera un 'divertissement' bienvenu, comme une sorte de fête foraine. La vieille Miss Habersham réussira à empêcher le lynchage de Lucas en se plantant devant la prison avec son tricot. Les forcenés reculent face à sa détermination. Brown évite toute sensiblerie ou sermon. Il montre simplement la couardise de ces 'justiciers'. Lucas sera finalement innocenté. Et il tiendra encore à payer son avocat, même une somme symbolique, pour conserver sa dignité d'homme. Il faut ajouter un mot sur la très belle photo noir et blanc de Robert Surtees, que l'on associe pas forcément au cinéma de Brown, mais qui se révèle un excellent collaborateur. Voilà un très grand film de Brown qui prédate de plus de treize années To Kill a Mockingbird et qui est, à mon avis, bien supérieur au film de Mulligan, par son propos et sa mise en scène.
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Le film est maintenant disponible dans une copie restaurée de toute beauté chez Warner Archive. Attention, l'accent traînant du sud n'est pas toujours facile à comprendre. Mais, le film mérite qu'on fasse un effort.
feb
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par feb »

La Passagère (Chained) - Clarence Brown (1934)
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Diane Lovering (Joan Crawford) est la maîtresse de Richard I. Field (Otto Kruger), magnat des transports maritimes. Ce dernier n'arrive pas à obtenir le divorce de sa femme qui souhaite conserver tous les privilèges que lui offre son nom. Field propose alors à sa maitresse de partir en croisière jusqu'à Buenos Aires pour réfléchir à cette liaison et donner sa réponse lors de son retour à New York. Sur le bateau elle fait la connaissance de Michael Bradley (Clark Gable), propriétaire d'un ranch en Argentine qui va la séduire et se heurter au refus de la jeune femme. Arrivée en Argentine, elle retrouve Bradley qui l'invite dans son ranch pour profiter de ses quelques jours à Buenos Aires. Les 2 jeunes gens tombent amoureux, Diane repart pour annoncer à Field qu'elle est tombée amoureuse d'un autre homme et promet à Bradley de revenir pour vivre avec lui. Mais elle se retrouve coincée entre un homme qu'elle aime en Argentine et un homme, divorcé de sa femme, et qui a sacrifié sa vie familiale pour vivre avec elle....

Clarence Brown fait tourner pour la 5ème fois le couple vedette de la MGM dans ce drame sentimental où l'actrice est le point central entre 2 hommes aux statuts sociaux opposés : d'un coté un homme riche qui lui apporte tout ce qu'elle peut souhaiter, de l'autre un homme plus simple qui lui apporte du bonheur et un cadre de vie bien différent. Le réalisateur nous propose donc un triangle amoureux qui sert de véhicule aux 2 acteurs : Clark Gable, fort de la réussite de New York-Miami (It Happened One Night), enchaîne les films MGM avec succès et Chained en fait partie et, ce, au même titre que Possessed, Love on the Run ou Dancing Lady. L'acteur est une nouvelle fois très à l'aise dans son rôle, fort de son charme habituel, d'un jeu parfaitement rodé et d'une "facilité" dans les scènes où il fait face à ses partenaires féminins.


Et sa partenaire féminine n'est autre que la très belle Joan Crawford qui reprend un rôle proche de ceux qu'elle a pu incarner dans ses précédents films (et qu'elle incarnera encore après) : une femme enchainée, coincée entre 2 hommes qui lui apportent chacun un amour bien différent et qui va devoir renoncer à l'un d'eux. L'actrice est parfaitement dirigée par Clarence Brown qui la retrouve juste après Sadie McKee (il est d'ailleurs intéressant de noter que l'histoire de Chained et de Sadie McKee présentent des points commun : triangle amoureux où c'est la femme qui est le centre de cette histoire, à un homme à la situation financière plus que confortable (Franchot Tone), homme plus modeste et amour de jeunesse (Gene Raymond). Mais à la différence de Chained, Crawford se détache du second pour tomber dans les bras du premier). De la même manière que dans Sadie McKee (et de nombreux films tournés par Clarence Brown durant cette période), le réalisateur ne lésine pas sur les plans dédiés uniquement à l'actrice et plus spécialement sur son visage : Brown applique les mêmes recettes que celles utilisées avec Greta Garbo et, dans Chained, certains plans de Crawford fond penser à sa rivale suédoise.

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Festival Adrian :mrgreen:
Brown focalise son point de vue sur Crawford et fait en sorte que toutes les émotions de l'actrice soient retranscrites à l'écran : que ce soit la joie, la tristesse ou la déception dans les bras de Clark Gable ou d'Otto Kruger, chaque changement d'état est capté par la caméra. Les 2 hommes ne sont là que pour faire évoluer l'histoire, pour faire basculer Diane entre eux deux, les 2 hommes apportant à chaque scène une raison de plus pour Clarence Brown de capturer ce que peut ressentir la jeune femme au travers de sa réaction (larmes, sourires, regard) et de son visage. C'est une fois de plus un film avec 2 stars mais où l'une d'elle brille plus fortement que l'autre, Brown utilisant Crawford comme le point de référence du film.

Chained ne brille pas spécialement par son histoire, très convenue, et qui semble être une nouvelle variation du triangle amoureux cher aux drames de cette époque. Mais Clarence Brown peut s'appuyer sans problème sur Clark Gable et plus encore sur Joan Crawford toujours aussi "impeccables" dans ce type de rôle. Certes ils seront bien meilleurs dans Possessed ou Strange Cargo mais les nombreuses scènes qu'ils partagent dans le film sont toujours parfaitement maîtrisées et mises en scène par le réalisateur. L'alchimie qui se dégage des 2 interprètes ne se retrouve pas avec d'autres duo phares de la Major (sauf peut être avec Myrna Loy/William Powell)...
Et puis ce film répond bien aux codes de la MGM : 2 stars à l'alchimie déjà éprouvée, de très beaux décors, des tenues superbes (Adrian offre une tenue différente pour chaque scène à Crawford), une photo qui met parfaitement en valeur la star féminine, une mise en scène très sobre mais qui arrive toujours à surprendre par de petites idées, de petits détails (les 3 qui défont leur ceinture et le premier bouton du pantalon après un repas copieux, la scène de marche rapide sur le pont du bateau de croisière)...tous ces détails font le charme de ces films, gomment les défauts, font oublier la légèreté du scénario et sont représentatifs de l'age d'or Hollywoodien tel qu'on peut le concevoir avec la MGM.
Julien Léonard
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par Julien Léonard »

Mince, les captures sont superbes... :oops: Malgré ces défauts que tu soulignes, ça fait envie. Sacrée MGM quand même...
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feb
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Re: Clarence Brown (1890-1987)

Message par feb »

Julien Léonard a écrit :Mince, les captures sont superbes... :oops: Malgré ces défauts que tu soulignes, ça fait envie. Sacrée MGM quand même...
Quand je parle de défaut(s), je parle avant tout d'une histoire assez basique dans son traitement et dans sa conclusion
Spoiler (cliquez pour afficher)
Field comprend que sa femme est amoureuse de Bradley car cette dernière a changé de comportement depuis son retour d'Argentine : il le comprend tout à fait et la laisse retrouver l'homme qu'elle aime.
Mais tout ce qui tourne autour du film fait qu'on met de coté cette facilité (de toute façon ce genre de films s'apprécie avant tout pour son casting) et finalement on prend "plaisir" à regarder le film avant tout parce qu'il y a le couple Gable/Crawford (et c'est bien le cas ici).

Quant aux captures, j'étais sur à 100% qu'elles allaient te plaire....:wink:
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