Raoul Walsh (1887-1980)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Rick Blaine
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Rick Blaine »

Intrigues en Orient (Background To Danger - 1943)
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Pendant la Seconde Guerre Mondiale, la Turquie se déclare pays neutre. Les Allemands montent alors un plan pour faire changer d'avis les dirigeants turcs et les ranger à leur côté. Un américain, Joe Barton (George Raft), se retrouve pris dans la lutte d'intérêts entre Allemands et Russes.

Après avoir réussi, l'année précédente, un film de propagande très riche (Sabotage à Berlin) et surtout un de ses films majeurs avec Gentleman Jim, Raoul Walsh se retrouve aux commandes d'un nouveau scénario de propagande, cette fois bien moins intéressant. Turquie, nid d'espions pourrait être le leitmotiv d'Intrigues en Orient où allemands d'un côté, russes et américains de l'autre, luttent pour influencer la Turquie... Si l'intrigue en elle même est solide sans faire preuve de grande originalité, on regrette surtout de le manque d'en jeux réels du film. Les péripéties sont là, pas la profondeur ni les enjeux, W.R. Burnett, co-scénariste du film, aura bien mieux réussi certains titres dans lesquels il était impliqué (La Grande Evasion, Tueurs à Gages, La Ville abandonnée, ...). A sa décharge, il semble que le scénario ait du être remodelé, en mal, à la demande de George Raft:
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D'après Tavernier-Coursodon, il a demandé à transformer son personnage d'un simple citoyen en agent secret, ce qui fait certainement perdre beaucoup de profondeur à ce personnage.
Raoul Walsh semble bien conscient de la pauvreté de son matériau. Ici, encore plus qu'ailleurs, il utilise son sens du rythme, oubliant presque son intrigue, pour nous livrer un de ses films les plus trépidants. A chaque plan il se passe quelque chose. Révélations, bagarres, fusillades, poursuites, Walsh ne fait aucune pause, et c'est une réussite, le film est un divertissement de chaque instant, on ne s'y ennuie jamais.
Pour remplir les personnages, aux côtés de George Raft, plus monolithique qu'ailleurs (Une Femme Dangereuse), mais au jeu toujours aussi intense, on retrouve avec un grand plaisir Sydney Greenstreet, incarnant un agent allemand parfaitement détestable, et Peter Lorre, absolument remarquable, qui donne par de petits gestes et quelques attitudes, une belle profondeur a un personnage qui, sur le papier, ne devait pas être bien riche.
Formellement, le savoir faire Warner fait du film une belle réussite, la photographie de Tony Gaudio est notamment magnifique, et le message patriotique, comme souvent pour ce studio, n'est pas trop pesant, et vieillit plutôt bien, d'autant plus que l'on joue sur le registre un peu plus subtile qu'à l'habitude de la coopération entre USA et URSS, comme on le voyait déjà dans Convoi vers la Russie.
Malheureusement plombé par un scénario parfait anodin et creux, Intrigues en Orient n'en demeure pas moins un divertissement parfait. Walsh livrant un film d'action quasi parfait, mineur mais fort agréable.
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Profondo Rosso
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Profondo Rosso »

Northern Pursuit (1943)

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Seconde Guerre mondiale, 1941, au Canada : Un groupe nazi de saboteurs débarque d'un sous-marin, mais est bientôt décimé par une avalanche. Le colonel Keller, chef du groupe, est le seul survivant. Blessé, il est pris en charge par deux agents de la police montée, Steve Wagner et Jim Austen qui décident de le remettre aux autorités...

Après la propagande sur fond d'action survoltée de Sabotage à Berlin et le drame exaltant les élans guerriers de L'Ange des Ténèbres cette troisième aventure de Errol Flynn en temps de guerre s'attaque au thriller à suspense. Ce Northern Poursuit propose donc un spectacle mené tambour battant sur un pitch excitant en diable qui au départ rappelle le 49e Parallèle de Powell/Pressburger (avec plus de profondeur pour ce dernier).

On assiste donc à l'arrivée des nazis sur les côtes canadienne dans de sombres dessein qui se révèleront au fil de l'intrigue. Face à eux se pose Errol Flynn policier qui va s'infiltrer parmi eux afin de les stopper. Souvent abonné aux nationalités les plus "exotiques" dans ses films de guerre (australien dans Sabotage à Berlin, norvégien dans L'Ange des ténèbres) Errol Flynn fait ici de sa plu culture un des moteurs de l'intrigue. Canadien d'origine allemande, il peut simuler une accointance patriotique avec les nazis afin de démanteler leur plan, tout en maintenant l'ambiguïté face à ses collègues canadiens (ambiguïté qui n'a pas lieu d'être pour le spectateur c'est Errol Flynn !). Le chef du commando nazi est incarné par Helmut Dantine déjà remarquable méchant dans L'Ange des ténèbres et qui ici excelle en stratège infaillible, impitoyable et fanatique. L'alchimie avec Flynn est toujours aussi forte et chaque échange entre eux est chargé d'électricité, aucun n'étant dupe de l'autre.

Une nouvelle fois les grands moyens ont été déployés, ce qui s'affirme dès l'impressionnante ouverture où un sous-marin allemand surgi des glaces pour accoster la côte canadienne. Au programme également une séquence d'avalanche dantesque ou encore une poursuite à ski palpitante qui anticipe celles de Au service Secret de sa majesté. D'ailleurs l'analogie à Bond n'est pas fortuite tant le mélange de tension et de décontraction animant le ton du film s'en rapproche, notamment par la personnalité de Flynn qui contrairement aux films précédents plus collectifs (comme le futur Aventures en Birmanie) il se charge ici de venir à bout seul de l'ensemble de l'ennemi nazi. Mais contrairement à Sabotage à Berlin, cette décontraction sied bien au film plus voué au divertissement pur qu'au message.

Walsh plutôt exécutant ici délivre un produit à la facture visuelle remarquable. Le cadre partagé entre vraie contrées enneigées (paysages superbes) et studio s'alterne avec fluidité et on pardonnera quelques facilités comme la manière balourde d'insérer le personnage de Julie Bishop (qui si elle n'est pas Olivia De Havilland fait preuve d'une belle fraîcheur) à l'aventure car bien évidemment il faut une figure féminine dans ce film de durs. La teneur finale du plan s'avère assez abracadabrantesque dans sa mise en place mais donne l'occasion d'un morceau de bravoure époustouflant en conclusion où Flynn affronte seul un commando nazi en plein air dans un bombardier en déroute (et une nouvelle fois on saluera le soin apporté aux maquettes par la Warner). Sans prétention et fort prenant donc, une réussite.4/6
feb
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par feb »

Julien Léonard a écrit :L'enfer est à lui (White heat) - 1949 :
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Au-delà d'un récit classique de "film de gangsters", c'est également tout un rapport avec le film noir contemporain de l'époque qui s'exprime, avec la sécheresse et la concision d'un regard acerbe et destructeur. Quelle différence entre l'œuvre léchée et tournée en studios qu'est The big sleep de Hawks, et ce véritable film d'action contrarié (souvent filmé en décors naturels) littéralement transcendé par Walsh ! Deux chefs-d'oeuvre, deux visions d'un genre, deux films mythiques, deux recettes esthétiques largement différentes... White heat (bénéficiant pour l'occasion d'un titre français magnifique : L'enfer est à lui) est un film de rythme, de précision remarquable, au timing rigoureux et au sujet démultiplié. Un parcours psychologique intense et dangereux mélangeant, pêle-mêle, une mère venue des enfers, une fiancée qui "survit" dans un univers impitoyable, une camaraderie constituée de faux semblants, et une police que rien n'arrête, au milieux desquels n'existe qu'une seule vérité, celle de Cody Jarett. Incarné par James Cagney, ce personnage de fiction devient sans l'ombre d'un doute l'un des plus passionnants de sa décennie. Cagney est habité par son rôle, il le vit jusqu'au bout, l'anime d'expressions tantôt barbares, tantôt profondément humaines, et se laisse emporter par des crises de folie totalement terrifiantes. Je retiendrais pour ma part deux séquences exemplifiant ce dernier propos... La scène du réfectoire en prison où Cagney, en totale improvisation, parvient à exploser furieusement, sombrant définitivement dans la folie la plus pure et dans une justesse qui interpelle sur la véritable expérience de vie de l'acteur (bon sang, mais d'où-tire-t'il une interprétation aussi énorme et aussi vraie ?!). Puis ensuite, la scène où, sous un arbre, en pleine nuit, il narre ses conversations nocturnes avec sa mère à son compagnon de crime (qui n'est autre que le flic infiltré dans la bande) : ahurissant de vraisemblance et de vérité, encore une fois. Je me fiche bien de savoir qui a eu l'Oscar du meilleur acteur cette année là, car il me semble que Cagney méritait cette récompense plus qu'aucun autre à ce moment précis. Aujourd'hui encore, sa prestation demeure marquée et sincère, naturelle et énergique, bref, tout à fait moderne.

Reste alors l'ensemble du film que l'on pourrait louer à n'en plus finir, mais que l'on pourrait résumer assez grossièrement par ces quelques qualificatifs : une musique tonitruante (encore Max Steiner et ses partitions absolument géniales), un scénario complexe et très riche (que ce soit thématiquement ou simplement diégétiquement), une enquête policière parallèle détaillée et convaincante (c'est incroyable de voir tout ce dont on était capable déjà à l'époque), une distribution exemplaire (comme dans tout film de Walsh qui se respecte... Ici, Virginia Mayo impeccable, Edmond O'Brien dans l'une de ses performances les plus convaincantes, Margaret Wycherly en mère littéralement unique au monde...), une photographie sublime et contrastée mettant largement en vedette des décors tous plus étonnants les uns que les autres (la maison en rase campagne, l'intérieur du camion-citerne, l'usine presque science-fictionnaire à la fin...) et un montage cut et "coup de poing" donnant une pèche d'enfer au déroulement de l'intrigue.
Un film noir âpre et violent, qui démarre au quart de tour et passe les vitesses avec un sens de l'action franchement grisant. Key Largo de Huston, l'année précédente, mettait déjà brillamment en scène la figure du gangster perdu dans une époque qui ne lui offre plus de place, mais Walsh réalise une œuvre très largement supérieure. Un condensé de plaisir et d'ambiguïté, culminant dans un dénouement aussi somptueux que violent, et qui n'a rien perdu de son sel depuis plus de 60 ans. Un immense classique.
Made it, Ma ! Top of the world !
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Difficile de passer à la suite d'un texte si bien écrit de la part d'un amoureux de Walsh et de Cagney...que dire de plus si ce n'est que le film de Walsh ne s'essouffle pas une seconde car il repose sur un scénario riche et très bien foutu : la police est sans arrêt aux trousses de Jarett et regorge d'ingéniosité pour le trouver, l'obligeant à toujours être en mouvement, à s'évader au plus vite, à tuer ceux qui lui barrent la route et à faire plaisir à sa Ma' coute que coute...Ensuite le film de Walsh est magnifiquement mis en scène : pas de gras, pas de chichis, la caméra colle à l'action, prend du recul quand le besoin d'espace se fait sentir, nous montre l'intérieur de la citerne, filme James Cagney au plus près comme pour tenter de lire dans sa tête, profite au maximum des scènes en extérieur, se joue de l'environnement industriel dans la scène finale de l'usine, filme une excellente scène d'évasion de prison et propose un montage aux petits oignons. Bref Walsh propose un film de très haut niveau en ce qui concerne le montage, la mise en scène et la gestion de l'action.
Enfin et surtout, il y a James Cagney qui offre une première scène hallucinante lors du repas dans la cantine carcérale :shock: comme j'en avais rarement vu (put*** des scènes de colère aussi rapide j'en demande dans tous les films), discute avec sa mère sous les arbres, semble prêt à tuer n'importe qui à partir du moment où il a été trahi et offre une seconde scène hallucinante lorsqu'il tente d'échapper à la police, qui flingue ses collègues un à un, et finit en haut d'un réservoir d'hydrocarbure...là on découvre un Jarett à la limite de la folie, qui nous gratifie de son rire narquois tout en se faisant tirer dessus et semble être entouré de flammes issues de l'Enfer tout en nous proposant un dernier Made it, Ma! Top of the world!. 9/10 et un dilemme qui s'offre à moi : qui mettre en film du mois ? White Heat ou The Night of the Hunter...la folie de Cagney ou la beauté des images du film de Laughton :D
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Rick Blaine
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Rick Blaine »

feb a écrit : Enfin et surtout, il y a James Cagney qui offre une première scène hallucinante lors du repas dans la cantine carcérale :shock: comme j'en avais rarement vu (put*** des scènes de colère aussi rapide j'en demande dans tous les films), ...
Comme le dit Julien, Cagney aurait bien mérité l'oscar tant sa performance est épatante. Et cette scène de cantine est grandiose. Quand on voit les conditions de tournage, en une prise - avec une seule consigne de Walsh à Cagney, lui demandant de tout faire pour atteindre la porte, mais ne lui disant pas ce que feraient les autres acteurs, et l'inverse étant également vrai - la performance d'acteur est vraiment énorme.
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Julien Léonard »

Je n'avais pas encore rebondis dessus, mais je suis ravi que tu ais aimé le film autant que ça. :wink:

Il y aura encore bien des surprises avec Cagney, dont certains films un peu oubliés aujourd’hui (tels que Each dawn I die ou le sublime City for conquest).
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par feb »

Julien Léonard a écrit :Il y aura encore bien des surprises avec Cagney, dont certains films un peu oubliés aujourd’hui (tels que Each dawn I die ou le sublime City for conquest).
Merci Julien pour ces infos, je viens de voir qu'ils sont disponibles sur amazon.com en DVD warner zone 1234 avec STF....ça sent l'achat :fiou:
EDIT : je viens surtout de tomber là dessus
http://www.amazon.com/TCM-Greatest-Clas ... 380&sr=8-2
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Julien Léonard
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Julien Léonard »

Les quatre titres de cette compilation sont passionnants. Le moins bon reste G-men qui est pour moi tout de même l'un des meilleurs films d'action urbains des années 30 à la Warner... C'est dire !

Mais si tu veux vraiment t'éclater, je te conseillerais davantage de prendre les coffrets Warner Gangsters vol. 1, 2, 3 et 4. Tu auras pléthore de films intéressants, importants et moins importants, avec Cagney, Robinson, Bogart... A la limite, l'intégrale des coffrets films noirs Warner (5 coffrets) et Gangsters (4 coffrets), j'allais dire "c'est incontournable".

Maintenant, si tu préfère économiser un peu (ce que je comprendrais parfaitement, on a chacun nos priorités) et juste faire un petit tour du genre avec quelques titres imparables, alors fonce sur cette compilation de quatre films vraiment bien sélectionnés. Du grand Cagney, rigoureux, dans d'excellents ou grands films ! L'enfer est à lui est le meilleur, en tout cas c'est ce que je pense, mais les autres valent largement le détour (City for conquest m'a beaucoup touché, en plus il est tombé à un moment où le discours du film était pile ce qu'il me fallait entendre). :wink:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par feb »

Julien Léonard a écrit :Maintenant, si tu préfère économiser un peu (ce que je comprendrais parfaitement, on a chacun nos priorités) et juste faire un petit tour du genre avec quelques titres imparables, alors fonce sur cette compilation de quatre films vraiment bien sélectionnés. Du grand Cagney, rigoureux, dans d'excellents ou grands films ! L'enfer est à lui est le meilleur, en tout cas c'est ce que je pense, mais les autres valent largement le détour (City for conquest m'a beaucoup touché, en plus il est tombé à un moment où le discours du film était pile ce qu'il me fallait entendre). :wink:
C'est parfaitement ça Julien, tu as tapé dans le mille : je veux découvrir les films au fur et à mesure sans passer par la case gros achats de coffrets en différents volumes ($30/40 contre à peine $11 pour celui-là) donc ma priorité c'est la découverte par le biais de coffrets plus "simples", plus "accessibles" par leurs prix et les films proposés (souvent les plus connus). Merci encore pour ton conseil :wink:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Julien Léonard »

Pour le prix, c'est pas faux. Perso, j'avais pris les gros coffrets durant une période de promo (à genre 20$ le coffret...), donc je ne me suis pas forcément rendu compte.

Bref, achat conseillé pour la compilation. Du coup, j'ai hâte d'avoir ton avis... :mrgreen:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par feb »

Julien Léonard a écrit :Pour le prix, c'est pas faux. Perso, j'avais pris les gros coffrets durant une période de promo (à genre 20$ le coffret...), donc je ne me suis pas forcément rendu compte.
Oui j'attends désespérément que les prix baissent sur amazon US (coffret Forbidden Hollywood 1&2 en attente + coffret Crawford Vol.2 + coffret Errol Flynn, etc) donc je suis patient :wink:
Julien Léonard a écrit :Bref, achat conseillé pour la compilation. Du coup, j'ai hâte d'avoir ton avis... :mrgreen:
:mrgreen: Quand je pense que tu attends toujours mon avis sur les films du coffret Crawford Vol.2, j'espère que tu es patient :fiou: Mais ça sera avec plaisir que je te donnerai mon avis en retour sur les films du coffret Gangster :wink:
Fin du HS, pardon de la pollution :oops:
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Ann Harding »

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Manpower (L'Entraîneuse Fatale, 1941) de Raoul Walsh avec Edward G. Robinson, George Raft et Marlene Dietrich

Hank McHenry (E.G. Robinson) et Johnny Marshall (G. Raft) travaillent pour une compagnie d'électricité en tant que réparateurs de lignes à haute tension. Un de leur collègues, Pop Duval meurt dans un accident. Hank, qui est contremaître, va annoncer la nouvelle à sa fille Fay (M. Dietrich)...

En lisant le générique de ce film, on pourrait penser qu'il s'agit d'un film de gangsters. Mais, en fait, si on se situe bien dans un univers masculin et dangereux, les héros du film travaillent à grande hauteur sur des pylônes entourés de lignes à haute-tension. Le titre en français semble suggérer un mélo avec une femme fatale. Ce n'est en fait qu'une facette de ce film électrique de Raoul Walsh. J'avais découvert ce film en salle, il y a bien 25 ans et j'en avais gardé une impression indélibile. En le redécouvrant, je n'ai pas du tout été déçue, bien au contraire. Le scénario (au langage fleuri particulièrement réjouissant !) offre aux trois acteurs principaux des personnages qui leur permettent de sortir de leur rôles habituels. Edward G. Robinson est un brave type sentimental et sympathique. Son ami George Raft est plus sarcastique, mais, il a l'amitié chevillée au corps. Marlene Dietrich sort totalement de son univers Sternbergien avec succès. Elle apparaît d'abord presque sans maquillage, sortant de prison. Puis, Walsh la plonge dans un univers viril qui ne lui permet aucune de ses minauderies lorsqu'elle est mal dirigée (comme dans Martin Roumagnac). On embrasse donc sans problème son personnage de Fay, la pauvre fille qui ne peut gagner sa vie qu'en étant entraîneuse. Lorsqu'elle accepte d'épouser E.G. Robinson, elle devient une parfaite ménagère, heureuse d'échapper à son sort. Certes, leur vie conjugale paraît bien terne, avec un Robinson qui ronfle à qui-mieux-mieux après une soirée bien arrosée. Mais, aucun des personnages n'est ridicule. Ils ont une humanité qui les rend crédibles. Bien loin d'être seulement mélodramatique, le film comporte de nombreuses scènes de comédies avec un humour irlandais typique de Walsh (comme dans Gentleman Jim). Il réunit un certain nombres de ses seconds rôles favoris comme Alan Hale et Frank McHugh qui s'en donnent à coeur joie en bout-en-train alcooliques et potaches. Les ruptures de ton sont constantes dans le film. On passe sans transition d'une soirée virile entre amis à une scène dramatique en haut des pylônes. Il est évident que ces hommes savent qu'ils risquent leur vie tous les jours en intervenant sur les lignes sous des pluies diluviennes, la foudre ou la glace. Ils ont besoin de ce défouloir où ils se comportent comme des gamins. Cette tension dans leur métier se retrouve dans les rapports entre les trois personnages principaux. Marlene aime Raft alors qu'elle est mariée à Robinson. Ce triangle ne peut mener qu'à une confrontation violente. Le film conserve son impact grâce à un montage serré, sans aucune fioriture. (On a presque l'impression d'un premier montage rapide avant une 'preview' !) Cette rapidité élimine toute trace de sentimentalisme. Le film fonctionne impeccablement. C'est certainement un de mes Walsh préférés.
Il est maintenant disponible en Warner Archive. L'image -non restaurée- est correcte sans plus, et la bande-son a quelques craquements. Mais, c'est vraiment un Walsh à voir. (Pas de ST. Attention: le dialogue n'est pas facile à suivre à cause de l'argot employé.)
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Dernière modification par Ann Harding le 30 avr. 11, 16:56, modifié 1 fois.
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Rick Blaine
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Rick Blaine »

Ann Harding a écrit : Manpower (L'Entraîneuse Fatale, 1941) de Raoul Walsh avec Edward G. Robinson, George Raft et Marlene Dietrich
Ce casting quand même... Rien que ça laisse augurer du meilleur.

Merci pour ton texte, il ne fait qu'augmenter l'attente que je place dans le film. Celui là je l'ai je vais le regarder sous peu.
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Ann Harding
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par Ann Harding »

Rick Blaine a écrit :
Ann Harding a écrit : Manpower (L'Entraîneuse Fatale, 1941) de Raoul Walsh avec Edward G. Robinson, George Raft et Marlene Dietrich
Ce casting quand même... Rien que ça laisse augurer du meilleur.

Merci pour ton texte, il ne fait qu'augmenter l'attente que je place dans le film. Celui là je l'ai je vais le regarder sous peu.
Je crois que tu ne seras pas déçu. :wink:
feb
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par feb »

Excellente chronique Ann :wink: On découvre une Marlene complètement en dehors des personnages créés par Sternberg et toujours aussi belle :oops: Le film, comme tu le dis, propose un montage très nerveux, sans gras où l'action se déroule vite, de manière intelligible et sans fioriture (cela semble être caractéristique du bonhomme Raoul). Je ne suis pas un grand fan de Robinson et encore moins de Raft mais ils incarnent dans ce film des roles qui leur vont bien et le "ménage à 3" fonctionne parfaitement (même si le film se finit sur une note tragique presque "obligatoire"...).
Bien content d'avoir pu l'enregistrer lors de l'intégrale Dietrich sur TCM l'an dernier vu que les films présents dans la collection Warner Archive semblent voués à y rester j'ai l'impression :(
bruce randylan
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Re: Raoul Walsh (1887-1980)

Message par bruce randylan »

J'avais été assez déçu par Manpower... sans doute à cause de la trop grande ressemblance du Harpon rouge de Howard Hawks. Non seulement c'est exactement la même histoire, la même structure et les mêmes personnages mais on retrouve même l'acteur principal : Robinson.
Heureusement, on retrouve l'univers bon enfant et rigolard (via Alan Hale) et la transposition du milieu de la pêche au ligne haute tension offre deux séquences sensationnelles. Mais pour les 60% du film restant, ca ne tient pas la comparaison.
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