Otto Preminger (1905-1986)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Profondo Rosso
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Profondo Rosso »

Bon il serait temps que les éditeurs me versent quelques royalties pour l'écoulement de leur catalogue naphtas :mrgreen:
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Major Dundee
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Major Dundee »

Cathy a écrit :
Profondo Rosso a écrit :Bunny Lake a disparu (1965)
Je déteste tes critiques qui me font acheter des films :uhuh: :fiou: :lol: , surtout qu'en plus on n'est pas forcément d'accord sur les films, mais qu'est-ce que tu peux donner envie de les voir !
A mon avis Cathy, celui-ci tu aurais tort de t'en passer. D'ailleurs çà fait un moment que je ne l'ai pas vu et je vais me le revisionner sans tarder. Donc moi, l'ami Profondo Rosso ne me fait pas acheter de films mais me donne de furieuses envies de les voir (ou revoir) 8)
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Cathy
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Cathy »

Major Dundee a écrit :
Cathy a écrit : Je déteste tes critiques qui me font acheter des films :uhuh: :fiou: :lol: , surtout qu'en plus on n'est pas forcément d'accord sur les films, mais qu'est-ce que tu peux donner envie de les voir !
A mon avis Cathy, celui-ci tu aurais tort de t'en passer. D'ailleurs çà fait un moment que je ne l'ai pas vu et je vais me le revisionner sans tarder. Donc moi, l'ami Profondo Rosso ne me fait pas acheter de films mais me donne de furieuses envies de les voir (ou revoir) 8)
Surtout qu'en plus dans l'ensemble j'aime plutôt bien les films de Preminger hormis 'Marge d'erreur", qui m'avait fortement mise mal à l'aise par le portrait de ce nazi odieux interprété d'ailleurs par Otto Preminger lui-même !
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par riqueuniee »

Moi,j'ai aimé ce Marge d'erreur.Même si le thème du film est sérieux,il y a une bonne dose de dérision dans cette histoire,certaines scènes tenant même plus de la comédie que du drame .Voir le personnage de l'auto-proclamé "Führer américain",et l'interprétation de Preminger lui-même (qui tient de la caricature).C'est peut-être ce mélange des genres (le film n'est pas une comédie,comme To be or not to be),qui peut mettre mal à l'aise.
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Rick Blaine
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Rick Blaine »

Marc Dixon, Detective (Where the Sidewalk Ends - 1950)

C'est la seconde fois que je vois ce film et ma première impression est confirmée, c'est l'un de mes films favoris. 6 ans après Laura, dont il reconstitue le casting, et dans la foulée de ses formidables film noir tournés pour la Fox (Crime Passionnel, Femme ou Maitresse, Le Mystérieux Docteur Korvo), Preminger réalise un Film Noir exceptionnel et se permet d'ouvrir une piste vers le film policier moderne.

Dans sa forme, Mark Dixon se raccroche aux films noirs documentaires que produit la Fox dans la seconde partie des années 40. Grâce au travail de Joseph LaShelle (Laura, la Femme aux cigarettes), on retrouve l'esthétique habituelle du studio, et Preminger s'attache à décrire sans far la réalité sociale du moment. Un petit restaurant sans prétention, le petit appartement d'un héros de la guerre, la précarité du commissariat local, mais aussi la situation familial de chacun: Mark Dixon semble être orphelin, Morgan Taylor dort dans le petit appartement de son père, et sa mère a visiblement disparu.

Dans ce contexte, c'est le destin qui broie les protagonistes du film. Un accident, le coup de poing de Mark Dixon sur un homme fragile va faire basculer la vie de ces personnages marginaux. On retrouve en un sens également le personnage de la femme fatale, Gene Tierney, si elle n'est pas responsable des malheurs de Dana Andrews, va le forcer, par sa beauté, et par son amour, à révéler la vérité.

Et pourtant, malgré ces éléments de film noir classique, c'est le versent policier qui marque le plus. C'est la première fois, à ma connaissance, que l'on voit un tel policier au cinéma, si trouble et posant tant de question sur la justice, et sur la manière de l'appliquer. Sous nos yeux, Preminger fait naitre l'aïeul du Johnson de The Offence, ou de l'Inspecteur Harry. On pense d'ailleurs très souvent aux problématiques que soulèvera Sidney Lumet tout au long de sa carrière, il est certain que ce film doit faire parti des influences de l'auteur de Serpico. Nous sommes également plongés dans le quotidien des flics, passant leur nuits à frapper au portes et à arpenter le pavé, dormant quelques heures dans un dortoir inconfortables, Preminger annonce ici également les policiers des années 70 (Les Flics ne dorment pas la nuit). Sous la pression de cet environnement, et de son passé, entre complexe d'œdipe héritage génétique incontrôlable - on pense aussi à La Bête Humaine, Mark Dixon ne veut pas simplement faire appliquer la loi, il voue une haie extraordinaire aux gangsters, au milieu qu'a fréquenté son père, et ne voit pas d'autre moyens que de franchir les limites de la légalité pour mettre un terme à leurs agissements. Ces moyens sont-ils indispensables? Peut-être, d'ailleurs son chef ne demande-t-il pas au Lt. Thomas (Karl Malden), d'utiliser des méthodes à la Dixon lorsqu'il s'agit de faire parler un suspect?

Marc Dixon est un formidable film charnière, vers un nouveau genre. Porté par un casting éblouissant, Dana Andrews créant à lui seul une empathie formidable pour son personnage finalement peu sympathique, Gene Tierney plus belle que jamais, voilà un joyaux du film noir, une œuvre majeur du film policier, et un diamant du cinéma.
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Père Jules
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Père Jules »

Tout pareil. Un film qui avec Laura, Saint Joan et Anatomy of a Murder fait partie de mes préférés du bonhomme. Avec trois visionnages, l'impression est toujours la même. Dana Andrews a cette faculté (qu'il partage avec un Paul Newman) de savoir comme tu dis générer de l'ampathie de la part du spectateur quand bien même il interprète des types violents et/ou peu recommandables.
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Tellement formidable que lorsqu'il confesse - dans un élan d'honnêteté - avoir tué le témoin, on se prend à se dire "mais quel con !"
Très intéressante la parenté que tu fais porter à son personnage à ceux interprétés par Connery (dans un film poisseux comme c'est pas permis) et Eastwood. Ça me semble tellement évident que je me demande comment je n'y avais pas pensé plus tôt.
Non y'a rien à jeter. Et pourtant, il me semble que c'est un film assez méconnu de Preminger (pour un public néophyte j'entends).
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Rick Blaine
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Rick Blaine »

Père Jules a écrit : Non y'a rien à jeter. Et pourtant, il me semble que c'est un film assez méconnu de Preminger (pour un public néophyte j'entends).
Oui j'ai la même impression. Pourtant il n'a rien à envier à Laura par exemple, film beaucoup plus célèbre et que je trouve un peu inférieur, même si je l'aime beaucoup.
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par someone1600 »

Profondo Rosso a écrit :Bunny Lake a disparu (1965)

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Ca donne envie de regarder le film ton commentaire... je vais devoir ressortir mon enregistrement TCM de ce film. lol. :wink:
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Cathy
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Cathy »

Bunny Lake a disparu, Bunny lake is missing (1965)

Image

Otto Preminger réalise un film tout à fait dans l'air du temps avec ces personnages qui semblent bien sous tout rapport, mais le sont-ils réellement. Evidemment si dans le film, le doute plane sur le fait que Bunny existe vraiment, il n'en est pas de même pour le spectateur qui croit en la sincérité de sa mère et ne peut imaginer un seul instant qu'elle mente. On découvrira donc cette vieille directrice de l'Ecole qui devient la confidente du frère et l'élément sans doute détonateur dans l'existence réelle de Bunny, il y a aussi ce voisin inquiétant, il y a naturellement cette scène du magasin de poupée qui va être le déclencheur de la scène finale avec cette atmosphère mi-féerique du monde de l'enfance et mi-angoissante avec ce côté clinique des poupées qu'on retrouvera avec la clinique pour humain où est enfermée la mère.
On pourra finalement reprocher au film de sombrer dans un côté folie grandiloquent un peu étrange et qui jure avec le reste du film à la fin. Contrairement à Profondo, je n'y ai pas vu d'appel à la pédophilie mais uniquement à l'inceste, car les relations entre cette soeur et son frère sont quand même bien étranges. Et la scène finale sombre par moment dans une certaine forme groteque. Le film n'en demeure pas moins un très bon suspense mené de main de maître par le réalisateur, et où l'opposition entre Carol Linley et Laurence Olivier, la première qui pourrait sombrer dans la folie et le second qui a les pieds sur terre, est magistrale.
Si Bunny Lake peut susciter quelques réserves, ce n'est pas le cas d'Autopsie d'un meurtre qui est un chef d'oeuvre absolu.

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Autopsie d'un meurtre, Anatomy of a murder (1959)

Image

Suite au viol de sa femme par le tenancier d'un hôtel, un lieutenant de l'armée abat celui-ci. Un ancien procureur qui se consacre désormais à la pêche et à son amitié avec un vieil alcoolique accepte de défendre le "meurtrier".

Tourné deux ans après douze hommes en colère, Autopsie d'un meurtre est aussi la critique du système judiciaire américain mais si le film de Lumet mettait la lumière sur les enquêtes mal menées et sur la confrontation d'un jury devant un coupable, Preminger critique le système du procès lui-même, d'ailleurs nous n'aurons que le résultat du jury et aucune scène de délibération. Il y a naturellement ce lieutenant trouble qui est coupable du meurtre mais grâce à son avocat peut plaider la folie passagère pour excuser son geste. Il y a aussi sa femme, espèce de bimbo aguicheuse dont finalement on ne saura pas si elle est aussi innocente qu'elle le prétend. Et puis il y a naturellement l'opposition entre l'avocat et le procureur à coup de petites phrases qui ne sont pas sensées être retenues par le jury mais qui forcément entendues pourront peser dans les jugements.

Il y a aussi tous ces non dits et ces questionnements, pourquoi l'avocat est-il devenu procureur, qui est cet assistant juriste qui a sombré dans l'alcoolisme, il y aussi cette sensation de malaise devant cet accusé qui n'est pas innocent et dont la personnalité trouble va apparaître au fur et à mesure, également devant sa femme qui finalement semble aguicheuse et dont là aussi on ignore s'il y a eu vraiment viol ou pas. Ce qui est déroutant, c'est cette critique de la justice qui sans l'acharnement de l'avocat nierait le viol comme déclencheur de l'assassinat et ne s'intéresse qu'à celui-ci, a-t'il été commis ou non de sang froid. Il y a aussi cette jeune femme qui contrairement à la femme de Manion semble être d'après tout le monde une fille facile et qui s'avère être tout autre ! On comprend que le film ait pu choquer à l'époque vu le côté osé des faits, de l'évocation très détaillée du viol, avec les rapports cliniques ou la fameuse culotte !

Preminger filme admirablement ces débats et notamment les interventions de James Stewart avec ces gros plans savants, avocat ou procureur mis en avant mais qui permette de voir l'audience. Il y a tous ces débats magistralement mis en scène, comme le procureur et le "ballet" de l'avocat qui veut voir son témoin. Autopsie d'un meurtre est un film brillant que ce soit dans sa thèse ou dans son interprétation, il y a la modernité du jazz utilisé, et ce clin d'oeil où l'on voit James Stewart jouer au piano aux côtés de Duke Ellington. Les interprètes sont tous brillants, James Stewart naturellement une nouvelle fois excellent dans son rôle d'ancien procureur devenu avocat qui connait les rouages pour faire basculer le jury et mettre hors de lui le procureur, Lee Remick en femme fatale avec ces lunettes de soleil et ses pantalons moulants ou en épouse modèle sage lors du procès, Ben Gazzara qui joue admirablement la duplicité de l'accusé, Arthur O Connel attachant en vieil alcoolique assistant de l'avocat, ou Georges C Scott fielleux à souhait en Procureur.

Un film absolument brillant que ce soit au niveau de l'histoire ou de la mise en scène et de ces images au cadrage si subtil ! Chef d'oeuvre qui mérite amplement tous les Oscars qu'il a remporté.
Dernière modification par Cathy le 20 févr. 11, 10:12, modifié 1 fois.
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Profondo Rosso »

Cathy a écrit : Contrairement à Profondo, je n'y ai pas vu d'appel à la pédophilie mais uniquement à l'inceste, car les relations entre cette soeur et son frère sont quand même bien étranges. Et la scène finale sombre par moment dans une certaine forme grotesque.
Pour la pédophilie j'y pensais pas tant dans les thèmes du film que dans les situations, la mise en image où on est forcément obligé d'y penser un peu
Spoiler (cliquez pour afficher)
quand Le frère va sortir la fillette du coffre et la porte jusque la maison
mais c'est plus la question de l'inceste qui est au coeur de l'histoire c'est vrai. Sinon c'est justement ce côté à la limite du grotesque voire en plein de dedans qui rend le malaise si fort dans la dernière demi heure c'est sur la corde raide mais le suspense est tellement fort que ça passe et donne son cachet unique au film.
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Père Jules »

Vsionné jeudi soir ce Bunny Lake.
J'ai à peu près les mêmes réserves que Cathy. La fin me paraît excessivement bâclée. Le côté psychologisant et infantilisant n'apporte rien, au contraire. Le reste est pourtant pas loin d'être formidable avec une Carol Lynley au bord de la folie.
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Cathy »

Profondo Rosso a écrit :
Cathy a écrit : Contrairement à Profondo, je n'y ai pas vu d'appel à la pédophilie mais uniquement à l'inceste, car les relations entre cette soeur et son frère sont quand même bien étranges. Et la scène finale sombre par moment dans une certaine forme grotesque.
Pour la pédophilie j'y pensais pas tant dans les thèmes du film que dans les situations, la mise en image où on est forcément obligé d'y penser un peu
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quand Le frère va sortir la fillette du coffre et la porte jusque la maison
mais c'est plus la question de l'inceste qui est au coeur de l'histoire c'est vrai. Sinon c'est justement ce côté à la limite du grotesque voire en plein de dedans qui rend le malaise si fort dans la dernière demi heure c'est sur la corde raide mais le suspense est tellement fort que ça passe et donne son cachet unique au film.
Justement, je trouve que la fin sort de l'atmosphère du film, pas une minute on est angoissé. Là où la fin de Psycho, qui quelque part se rapproche de ce film est profondément dérangeante et te fait sortir du film mal à l'aise, nous n'avons rien de semblable dans Bunny Lake, au contraire ici cela fait tomber quelque peu l'ambiance du film. Toutefois j'ai beaucoup aimé, et compte vraiment Otto Preminger parmi mes réalisateurs préférés, car une fois encore hormis Marge d'erreur dont le côté "caricatural" du nazi m'a mise mal à l'aise, j'aime tous les films que j'ai vus du réalisateur ! En tout cas, je ne regrette absolument pas d'avoir acheté et visionné ce film suite à ta chronique :) !
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Cathy »

L'homme au bras d'or, The man with golden Arm (1955)

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Frankie machine sort de prison, mais aussi de cure de désintoxication. Il veut repartir du bon pied, et devenir batteur professionnel, mais son passé resurgit que ce soit à travers sa femme, paralysée suite à une accident de voiture, ses anciens complices de jeu qui le reprennent sous sa coupe. Il ne met pas longtemps à retomber dans le cercle de la drogue.

Il fallait oser à l'époque sortir un tel film, et Preminger l'a fait. En effet mettre en vedette un héros qui est drogué et se shoote ouvertement devant la caméra, voila des images fortes que l'on ne peut pas oublier, comme ce gros plan de Frankie Machine en prison qui voit la crise de manque que fait un co-détenu et se met à pleurer derrière les barreaux ou naturellement ce film où on assiste à la piqure d'héroïne dont on ne verra pas vraiment les effets sur le héros. Il y a aussi cette scène de manque terrible même si elle est très cinématographique (un peu comme dans le Poison - on a l'impression que finalement c'est simple de sortir de ses addictions) Mais bon l'évocation de ces addictions à cette époque est quand même assez incroyable et forte pour mettre de côté l'à peu-près de cette scène.
Le film est d'une force incroyable avec cette musique qui rythme chaque shoot que se fait le héros. On retrouve la modernité du jazz dans le thème qu'Elmer Bernstein a signé pour le film. Et comme dans Autopsie d'un crime ou Bunny Lake on trouve cette recherche visuelle dès le générique avec ces bandes noires déchirées petit à petit et qui finissent par évoquer la silhouette d'un bras, d'un corps, ou d'une enfant.

On comprend à travers la vie du personnage comment il est devenu addict, partagé entre sa femme Zosh qu'il croit paralysée suite à un acccident de voiture et qu'il a épousée par pitié, et Molly une employée de night club qu'il aime visiblement et qui l'aime en retour, mais aussi sa faiblesse devant ce milieu du jeu qui le tient par l'argent et la drogue et lui impose d'être le "dealer" de cartes. Il y a l'opposition entre Zosh qui fait tout pour le retenir et la maintenir dans cette vie basée sur le jeu et la drogue et Molly qui bien que travaillant dans le même milieu cherche au contraire à le faire évoluer et à le faire rebondir et sortir de cette vie épouvantable. On comprend aisément en voyant ce film pourquoi il a créé le scandale, il faut dire en plus que la prestation de Frank Sinatra est époustouflante dans le rôle de ce pauvre type qui n'a pour ami qu'un escroc de bas étage et surtout Molly qui est incarné par Kim Novak magnifique dans ce rôle, sans doute sa plus belle prestation avec Vertigo. Il y a aussi Eleonor Parker qui en fait des tonnes en jeune femme "paralysée" mais cela passe admirablement. Et puis il y a cette manière de filmer unique avec cette profondeur de champ derrière des gros plans magistraux des héros, comme dans Autopsie d'un meurtre cinq ans plus tard, on voit tous les regards que lance Molly à Frankie dans son dos dans la scène du bar.

Otto Preminger signe ici un chef d'oeuvre de réalisme, et de cinéma aussi avec cette manière unique de filmer d'enrichir chaque scène de mille détails. Bref une autre énorme découverte après celle d'Autopsie d'un crime, et bien plus forte, car la critique de la justice était un exercice plus courant que cette évocation de la drogue. La force du film est aussi sans doute de rendre le héros drogué sympathique et de compatir à sa descente aux enfers comme dans Lost Weekend avec Ray Milland et contrairement au Day of Wine and Rose où le héros ne suscite aucune empathie.
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Sybille »

Cathy a écrit :La force du film est aussi sans doute de rendre le héros drogué sympathique et de compatir à sa descente aux enfers comme dans Lost Weekend avec Ray Milland et contrairement au Day of Wine and Rose où le héros ne suscite aucune empathie.
J'avais trouvé que le héros suscitait de l'empathie dans "Days of wine and roses". Certes, je n'avais pas forcément été touchée plus que ça, mais en tout cas ni plus ni moins que dans les deux autres films dont tu parles.
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Cathy
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Re: Otto Preminger (1906-1986)

Message par Cathy »

Voila ce que j'écrivais sur le jour du vin et des roses
Autant j'ai apprécié le Poison de Billy Wilder, autant je n'ai pas aimé ce film, je n'ai pas eu la moindre empathie pour les personnages, cet alcoolique "mondain" qui devient totalement alcoolique et convertit sa femme à'l'alcoolisme ne m'a pas convaincue. Certes Jack Lemmon et Lee Remick font un numéro d'acteurs, mais justement c'est sans doute ce qui m'a gênée dans ce film, cette succession de numéros d'acteurs sans aucune concession. Je bois, je ne bois plus, je casse tout, j'hurle, bref un film qui sans doute n'a pas le côté "didactique" et encore du Poison, mais qui ne me touche pas.
Si Jack Lemmon est le centre du film, c'est surtout que son alcoolisme est déjà installé depuis longtemps quand on fait sa rencontre et puis sans doute ne veut-on pas montrer réellement la déchéance d'une femme autrement que par un côté "propre" d'un alcool qui la rend euphorique ou dormante. Evidemment ce film surprend dans la filmo de Blake Edwards, mais il est évident qu'il est plus à l'aise dans la comédie que dans le mélodrame. La vision de l'alcoolisme montrée dans ce film ne m'a pas touchée, contrairement à celle évoquée dans le Poison, qui me semble plus proche de la réalité. J'ai une impression de film propre sur lui avec ce film. On n'entre jamais dans la psychologie profonde des personnages, on a une succession de scènes, de morceaux de bravoure, mais sans doute manque-t'il une explication, une cohésion entre tout cela.
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