


Play-boy et filou, hors-la-loi au coeur tendre, Harry Madox (Don Johnson) débarque au Texas. Il se fait engager par le riche vendeur de voitures George Harshaw. La femme de ce dernier, une blonde explosive (Virginia Madsen), fait vite les yeux doux à Harry, qui lui préfère, d'une part, la jolie secrétaire du garage, Gloria (Jennifer Connelly), de l'autre, la petite banque de la ville, qu'il projette bientôt de cambrioler.
Pas de topic pour ce petit film attachant qu'est Hot Spot ? Ni même (plus curieux) consacré à Dennis Hopper ? Eh bien, j'en ouvre donc un.
Appâté par l'enthousiasme de Major Tom, puis par ricochet par les avis plutôt positifs des autres forumeurs, j'ai donc visionné hier soir ce Hot Spot qui me faisait de l'œil depuis déjà belle lurette, en bon fan du noir que je suis. Canevas respectueux des figures incontournables du genre, convoquant femmes fatales, ambiance délétère et pauvre type perdu dans la fatalité de son destin, le scénario est l'œuvre de Charles Williams, qui adaptait ici son propre roman. Son travail de réécriture remontait déjà au début des années 1960, lorsqu'il était question d'un film avec Robert Mitchum. Finalement, le projet ne se concrétisera qu'à la fin des années 1980, avec l'enfant terrible du Nouvel Hollywood Dennis Hopper aux commandes. Après la déchéance des 70's, les années 1980 marquent un retour en grâce progressif du trublion, qui entre seconds rôles chez Coppola, Peckinpah ou Lynch, et cures de désintoxication, revient progressivement sur les écrans au point de repasser derrière la caméra en 1980 pour Out of blue et en 1988 pour Colors. The Hot Spot, que le cinéaste voit comme un "Dernier Tango [à Paris] au Texas", cherche à renouer avec le meilleur du film noir dans une démarche en forme d'hommage - et avec un enrobage évidemment bien plus torride que celui des œuvres classiques envers lesquelles il paie son tribut - qui n'est pas sans évoquer La fièvre au corps (1981) de Lawrence Kasdan ou Le facteur sonne toujours deux fois (1981) de Bob Rafelson. Comme Kasdan, Hopper ressuscite les fascinants codes et stéréotypes du genre (le mec un peu dur à cuire qui se fait joyeusement embobiner dès qu'on lui agite une paire de seins sous les yeux ; la petite ville campagnarde où l'on s'ennuie ; le mari encombrant...) et les retravaille à sa sauce. L'essence du noir est continuellement préservée via un savoureux look rétro qui enveloppe la ville et les protagonistes dans une bulle 50's (voir les réclames Coca-Cola peintes sur les murs, les voitures rutilantes, la garde-robe de Maddox) alors que l'action est pourtant bien contemporaine. On nage entre deux époques au point que la temporalité devient diffuse, abstraite, aussi trouble que l'ambiance caniculaire qui pèse sur le film. Les fantômes du noir ressurgissent avec bonheur sous nos yeux tandis que Hopper prend soin, toujours dans cette logique d'hommage retravaillé, de moderniser, de "contemporaniser" la tension sexuelle qui lie les amants maudits des films noirs. Il s'entoure pour cela de deux bombes incendiaires qui se montreront peu avares de leurs charmes : Jennifer Connelly (smiley du mec qui a la bave aux lèvres) et Virginia Madsen. L'ingénue et la perverse, la douce et la nympho, tandem antinomique de choc qui va faire perdre la boule à un Don Johnson hébété face à tant de cuisses ouvertes et qui troquait ici la moiteur de Miami pour celle d'un bled paumé au fin fond du Texas. Avec son trio et les embrouilles qui montrent vite le bout de leur nez, Hopper retrouve un peu de la magie des grands classiques du noir qu'il contamine par un érotisme frontal, bien loin des sous-entendus salaces d'un Bogart ou d'une Bacall. En résulte un néo-noir très plaisant, délivrant son quota de scènes chaudes, mais dont la limite est sans doute l'absence d'originalité dans la démarche érotisante, plusieurs années après les hommages pervers de Kasdan, De Palma ou Rafelson. A l'image de la chaleur qui écrase les protagonistes, la lenteur du film peut aussi éventuellement écraser l'intérêt du spectateur qui regrettera un film plus concis. Reste que l'exercice de style demeure réussi, pas forcément mémorable (et que j'ai d'ailleurs tendance à légèrement sur-noter pour la seule présence de la miss Connelly), mais proposant une atmosphère agréablement anxiogène et quelques plans dénudés qui accompagneront avec bonheur le spectateur célibataire dans son sommeil.
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