Parce que bon, les 3 pages avant, c'est du gros n'importe quoi, je trouve.
Le 13e guerrier (McTiernan - 1999).
921 après J.C. Ahmed Ibn Fahdlan (Antonio Banderas) est exilé après avoir approché de trop près l'une des femmes du Calife. Loin en dehors de l'empire et après avoir échappé à une attaque de barbares tartares, Ahmed et son vieil ami Melchisidek (Omar Sharif) aperçoivent les tentes de Vikings sur la côte. Il s'avère que ceux-ci font les funérailles de leur chef qui vient tout juste de mourir et, suite à une prédiction faite par une voyante à cause de l'arrivée d'un jeune messager porteur d'inquiétantes nouvelles, doivent repartir chez eux au plus vite : le pays subi les attaques inquiétantes des Wendölls, sorte de démons qui mangeraient les morts. Pour leur voyage, la vieille voyante leur prédit qu'il leur faudra autant de guerrier que de lune mais que le 13e guerrier sera un étranger.
C'est le début d'un long et dangereux périple pour Ahmed...
Une créature au delà de l'humanité (à gauche le 13e guerrier; à droite, Predator)
Le 13e guerrier faisait près de 2h30 à l'origine mais, au grand dépit de McTiernan, il fut largement amputé de 40 minutes, les producteurs (avec la pression de Crichton jamais content, dont le film adapte son "Eater of the dead" ?) jugeant que cela leur faisait perdre une séance. Et pourtant, même charcuté, le 13e guerrier se tient méchamment droit sur ses deux jambes et envoie encore balader pas mal de productions actuelles (et l'on se plaît à rêver à un director's cut qui ne verra jamais le jour, snif). Car non seulement le film est techniquement irréprochable sur de nombreux points (maquillages impeccables, décors bien foutus, scènes entièrement tournées qu'a la lumière des torches, magique; scénario intelligent) mais c'est aussi un pur film de McTiernan qui prolonge et se place en parallèle du chef d'oeuvre Predator. Comme dans ce dernier, on y retrouve un ennemi qui n'est pas humain ou échappe à toute humanité (capture ci-dessus. Le predator échappe physiquement et moralement à tout standard humain puisqu'il vient d'ailleurs et fixe lui-même les règles de la chasse. Le Wendoll (et surtout leur chef) se grime en un hybride d'ours à base d'humain et échappe à toute morale --ils collectent les crânes et mangent les morts comme le predator collectait les crânes et colonnes vertébrales comme autant de macabres trophées). Comme dans ce dernier on y retrouve des notions d'honneur et de sacrifice (captures ci-dessous).
("ce fut une belle journée". Le 13e guerrier à gauche. "Billy, NON !" Predator à droite)
Surtout, Le 13e guerrier se révèle le portrait subtil d'un être qui va s'élever au delà de son statut et, confronté au danger, grandir. Ahmed était un prince, il va redevenir un enfant en exil, ou plutôt un chien comme le traitent les vikings en se moquant de lui. Pourtant, il va rapidement leur montrer son intelligence (superbe séquence au début où McTiernan répète les plans des visages et de la bouche, joue sur le son --alternance langue viking, langue anglaise (ou VF)--, la durée (les fondus mais aussi le détail --Ahmed qui apprend tantôt le visage normal, tantôt mouillé par une fine pluie, témoignent que plusieurs nuits passent --et non une seule-- pour qu'Ahmed comprenne la langue nordique. Il y a beau avoir de la coupe, ça reste grandiose) et devenir "un petit frère". Puis à la fin du voyage, un Homme, tout simplement.
Moi je trouve ça magnifique.
Face à cet arabe pas né de la dernière pluie (excellente séquence où Ahmed va chez le forgeron et fabrique un sabre en taillant une épée, réalisée en quelques jump-cut godardiens (je pense à ceux d' A bout de souffle qui montraient clairement le passage du temps, ce qui est le cas ici aussi), les vikings sont eux-aussi magnifiés et chacun en impose en peu de temps. McTiernan, très respectueux, leur taille un écrin qui démontre que ces derniers ne sont pas des brutes sans cervelle mais qu'ils ont leur propre logique (le moment où Ahmed croit qu'un duel à mort va mal tourner alors que c'est une ruse servant à appuyer une réflexion sur les apparences et la crainte de l'inconnu), leur force, leur courage et leur détermination. Tous sont reconnaissables de par une identité graphique (je pense à celui qui a les tatouages sur le visage par exemple), leur habillement, leur visage, leur caractère fier, de Buliwyf (leur chef) à Herger. Chez les Wendolls, néandertaliens venus du fin fond des temps (avec une Vénus en forme comme déesse), c'est aussi très bien fait et le clash de ceux-ci avec les vikings ne peut que mener à d'hallucinantes gerbes de sang et un film monstrueusement barbare. Pour moi, c'est une forme de divertissement parfait : musclé mais qui en a là-dedans, et pas que dans les couilles.
6/6.