Les captures m'avaient intrigué mais je serais beaucoup, beaucoup moins enthousiaste. Finalement, le meilleur du film, il est dans ces captures sauf que le film ne ressemble à ça que le temps de ces quelques plans. D'ailleurs, on a l'impression (confirmé par ce que j'ai lu chez Tavernier) que certaines de ces séquences (notamment quelques unes avec Moorehead) n'ont pas été filmées par le même réalisateur.Ann Harding a écrit :Since You Went Away (Depuis ton départ, 1944) de John Cromwell avec C. Colbert, Jennifer Jones, Shirley Temple, Robert Walker & Joseph Cotten
Anne Hilton (C. Colbert) après le départ de son mari pour le front se retrouve seule avec ses deux filles adolescentes, Jane (J. Jones) et Bridget (S. Temple). Elles prennent un pensionnaire dans leur maison, le vieux Colonel Smolett (Monty Wooley) qui se plaint constamment...
J'ai recherché sur le forum une trace de ce film et je n'en ai trouvé aucune. Je serais donc la première à parler de ce long film de 177 min produit et écrit par David O. Selznick durant les dernières années de la guerre. Ce film a été pour moi une vraie découverte. C 'est une saga du quotidien d'une famille américaine ordinaire durant les années de guerre qui comme le fera Wyler avec The Best Years of Our Lives (1946) pour l'après-guerre, s'attache aux personnages et nous les fait lentement découvrir dans leurs complexités. Le film bénéficie d'un casting prestigieux, mais, réussit à conserver la simplicité de son propos. Claudette Colbert n'a jamais été aussi vraie et émouvante dans le rôle d'Anne Hilton. Ce qui m'a totalement captivée c'est la justesse de l'atmosphère au sein de cette famille. Le dialogue est un ainsi tour à tour badin, tragique ou humoristique suivant les humeurs des personnages qui déroulent le fil de leurs pensées. Quant à l'image, cela a été un choc pour moi de voir le travail incroyable de Stanley Cortez (Lee Garmes est également crédité au générique). Vous n'avez qu'à regarder les quelques captures que je poste. Ces immenses paysages où se perdent Jennifer Jones et Robert Walker pour leur dernière promenade à la campagne avant leur séparation alors qu'ils chantent 'My Darling Clementine'. Et il y a une utilisation de la profondeur de champ absolument superbe combinée parfois avec l'utilisation des ombres. Mais, au-delà de ces effets de lumière, le film réussit à être incroyablement émouvant et humain. Je pense que Selznick a dû travailler avec une batterie de collaborateurs sur ce film (comme il le faisait toujours!), mais, son scénario fonctionne d'une manière remarquable. On a vraiment l'impression de ressentir ce sentiment de solitude intolérable lorsqu'un être cher vous manque. Les personnages secondaires sont également très bien dessinés et cohérents. Agnes Moorehead est une voisine d'une intolérable hypocrisie, Joseph Cotten est parfait en ancien soupirant de Colbert, Monty Wooley est un vieux ronchon colérique, Alla Nazimova, une immigrante récente amie de Colbert. On sent également ce désir d'aller au-delà des races et des origines sociales (comme le fera également The Best Years of Our Lives) qui a uni - brièvement - les américains pendant la guerre. Les blessés noirs ou blancs sont soignés ensemble et Colbert, issue de la bourgeoisie devient l'amie de Nazimova, une immigrante récente, en travaillant dans une usine. Mais, le film évite le prêchi-prêcha en conservant sa simplicité de propos. j'avoue avoir plusieurs fois été au bord des larmes en le regardant. Claudette Colbert a les larmes aux yeux quand Nazimova lui dit qu'elle est pour elle l'image de la femme américaine telle qu'elle avait imaginée en arrivant en Amérique face à la Statue de la Liberté. Quel hommage à Colbert, la petite française immigrée, de devenir le symbole de l'Amérique !
Enfin, je ne peux que vous pousser à découvrir rapidement ce film de John Cromwell, qui porte la patte de son producteur. Il est disponible en Z1 US avec des sous-titres français.
En tout cas, le reste du temps, c'est extrêmement plan-plan avec du sucre à tous les étages (musique sirupeuse au possible et omniprésente de Max Steiner, interprétation adhoc de Jennifer Jones, de la très énervante Shirley Temple en pleine adolescence ou d'un Robert Walker extrêmement fade).
Moorehead et Cotten ont l'air de sortir d'un autre film.
Je n'ai pas trouvé que le Wyler était un grand film mais dans mon souvenir, c'était bien plus émouvant et digne que ce film qui se regarde mais d'un oeil détaché.