Pour te répondre sur ce seul aspect, de nombreux romans, parmi lesquels de très bons (notamment de Faulkner), sont construits sur la forme de monologues intérieurs ou de journaux intimes, quitte à multiplier les fautes d'orthographe ou de syntaxe pour rendre la psychologie confuse du protagoniste que l'on accompagne. Ce n'est pas un procédé neuf en littérature (ni au cinéma, d'ailleurs, on peut au moins citer le docteur Caligari avec son cadrage et ses décors "qui clochent").George Costanza a écrit : Le roman de Lehane serait-il meilleur, la psychologie du personnage plus aboutie, etc., si le livre était volontairement parsemé de fautes d'orthographes, de coquilles et de phrases lourdingues ?
Shutter Island (Martin Scorsese - 2010)
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
J'ai vachement accroché au nouveau Martin Scorsese, tant mieux car ses dernières oeuvres ne m'avait pas tant emballé que ça.
Non pas qu'il avait perdu son cinéma, mais soit il sombrait dans des fresques un peu trop académiques à mon goût (Gangs of New York et Aviator), soit il c'était un peu trop caricaturé dans son remake d'Infernal Affairs.
Le cinéaste revient donc avec Leonardo DiCaprio, son acteur favori du moment, dans un film noir et glauque se passant essentiellement dans un hôpital psychiatrique où sont internés les criminels les plus dangereux du pays.
Grosso modo, on assiste à une enquête policière dans les méandres de la folie.
Alors effectivement on grille rapidement le retournement de situation finale, mais comme le scénario est suffisamment malin (en alignant les faux-semblants et les indices foireux), on se demande surtout comment ils en sont arrivés là et quelles explications ils vont pouvoir nous donner. Sur ce plan là, c'est clair, limpide, bien construit, bref j'ai marché à fond dans le délire !
J'ai même été assez touché par le personnage principal (avec un DiCaprio habité par son rôle), qui lutte constamment contre ses névroses.
En contrepartie, là où le cinéaste m'a déçu, c'est sur sa mise en scène. Ca reste du solide, dans les mouvements et la composition des plans, du très bon boulot en somme. Cependant, comment un réalisateur pareil, peut laisser passer autant de faux raccords... C'est un peu une constante chez lui, mais dans Shutter Island il y en a beaucoup plus qu'à l'accoutumée. Il est évident que quelques effets sont volontaires, mais ils sont trop peu nombreux. Sur ce point là, ça fait un peu bâclé.
Sinon la musique est géniale: le thème principal, qu'on entend dès l'apparition de l'île, est très menaçant, de suite ça annonce la couleur.
Malgré ses quelques défauts techniques (j'ai oublié de mentionner des CGI pas terribles), Shutter Island s'impose pour moi comme le meilleur long métrage de Scorsese depuis A tombeau ouvert !
Non pas qu'il avait perdu son cinéma, mais soit il sombrait dans des fresques un peu trop académiques à mon goût (Gangs of New York et Aviator), soit il c'était un peu trop caricaturé dans son remake d'Infernal Affairs.
Le cinéaste revient donc avec Leonardo DiCaprio, son acteur favori du moment, dans un film noir et glauque se passant essentiellement dans un hôpital psychiatrique où sont internés les criminels les plus dangereux du pays.
Grosso modo, on assiste à une enquête policière dans les méandres de la folie.
Alors effectivement on grille rapidement le retournement de situation finale, mais comme le scénario est suffisamment malin (en alignant les faux-semblants et les indices foireux), on se demande surtout comment ils en sont arrivés là et quelles explications ils vont pouvoir nous donner. Sur ce plan là, c'est clair, limpide, bien construit, bref j'ai marché à fond dans le délire !
J'ai même été assez touché par le personnage principal (avec un DiCaprio habité par son rôle), qui lutte constamment contre ses névroses.
En contrepartie, là où le cinéaste m'a déçu, c'est sur sa mise en scène. Ca reste du solide, dans les mouvements et la composition des plans, du très bon boulot en somme. Cependant, comment un réalisateur pareil, peut laisser passer autant de faux raccords... C'est un peu une constante chez lui, mais dans Shutter Island il y en a beaucoup plus qu'à l'accoutumée. Il est évident que quelques effets sont volontaires, mais ils sont trop peu nombreux. Sur ce point là, ça fait un peu bâclé.
Sinon la musique est géniale: le thème principal, qu'on entend dès l'apparition de l'île, est très menaçant, de suite ça annonce la couleur.
Malgré ses quelques défauts techniques (j'ai oublié de mentionner des CGI pas terribles), Shutter Island s'impose pour moi comme le meilleur long métrage de Scorsese depuis A tombeau ouvert !
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
En ce qui me concerne, ce n'est pas une affaire de principe, mais de ressenti personnel. Peut-être que le statut intouchable de Scorsese ou de Schoonmaker me fait présupposer que ces éléments résultent d'une démarche intentionnelle, et peut-être fais-je complètement erreur : même les plus grands ont le droit de se vautrer. Mais certaines choses me paraissent définitivement trop grosses pour ne pas avoir été pensées à dessein. D'ailleurs, au début des débats, les détracteurs ne voyaient que des faux-raccords ; même s'il y en a, c'est indiscutable, je crois qu'il a été montré ici que tous n'étaient pas à ranger dans le même sac (la scène du verre d'eau). Donc, la question est complexe, et je ne prétends pas détenir une vérité : juste apporter une lecture plus enthousiaste, peut-être trop au goût de certains, et tenter quelques hypothèses d'interprétation (mais les mauvaises langues diront que je suis aveuglé par mon enthousiasme, et que je vois des casse-têtes offerts par Scorsese là où il ne s'agit peut-être que de simples incohérences et de facilités scénaristiques ! ). Quant au fait que cela soit réussi ou non, c'est encore une autre affaire, à mon sens. Par exemple, même si cela a été fait exprès ou non, le ciel en CGI est et restera à mes yeux d'une affreuse laideur. Et l'idée du tableau aux anagrammes sinon stupide, du moins pas fameuse.George Costanza a écrit :En vertu de quel principe une succession de faux-raccords, fautes de goût, d'erreurs factuelles et de gaffes diverses devrait être considérée ipso facto comme un ensemble de "bonnes idées" ou des effets de mise en scène réussis, du simple fait de leur intentionnalité (qui d'ailleurs reste hypothétique) ?
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Ah, c'est sûr que ce n'est pas dans Les Sept Samouraïs que l'on verrait cela.Demi-Lune a écrit :Par exemple, même si cela a été fait exprès ou non, le ciel en CGI est et restera à mes yeux d'une affreuse laideur. Et l'idée du tableau aux anagrammes sinon stupide, du moins pas fameuse.
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Tttt...Strum a écrit :Ah, c'est sûr que ce n'est pas dans Les Sept Samouraïs que l'on verrait cela.Demi-Lune a écrit :Par exemple, même si cela a été fait exprès ou non, le ciel en CGI est et restera à mes yeux d'une affreuse laideur. Et l'idée du tableau aux anagrammes sinon stupide, du moins pas fameuse.
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Ca dépend... Si tu commences à dire que les faux raccords, que l'ont voit dans Casino ou Les affranchis par exemple, sont également tout autant justifiés, il y a des chances pour que tu passes pour un fan aveuglé par le génie de Scorsese.juste apporter une lecture plus enthousiaste, peut-être trop au goût de certains, et tenter quelques hypothèses d'interprétation (mais les mauvaises langues diront que je suis aveuglé par mon enthousiasme, et que je vois des casse-têtes offerts par Scorsese là où il ne s'agit peut-être que de simples incohérences et de facilités scénaristiques !
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Il sont justifiés dans le sens où ils ne relèvent pas d'une faute d'inattention, mais vraisemblablement d'un choix au montage (sans doute pour dynamiser le récit).Jericho a écrit :Ca dépend... Si tu commences à dire que les faux raccords, que l'ont voit dans Casino ou Les affranchis par exemple, sont également tout autant justifiés, il y a des chances pour que tu passes pour un fan aveuglé par le génie de Scorsese.juste apporter une lecture plus enthousiaste, peut-être trop au goût de certains, et tenter quelques hypothèses d'interprétation (mais les mauvaises langues diront que je suis aveuglé par mon enthousiasme, et que je vois des casse-têtes offerts par Scorsese là où il ne s'agit peut-être que de simples incohérences et de facilités scénaristiques !
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Non, il y en a beaucoup qui relèvent de la faute d'inattention.
J'aimerai le croire, mais non, c'est pas légitime sur pas mal de séquences...
J'aimerai le croire, mais non, c'est pas légitime sur pas mal de séquences...
Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Je ne voudrais pas être péremptoire mais penser qu'il y a des faux-raccords dans un film de Scorsese par négligence ou maladresse c'est juste se mettre profondément un doigt dans l'œil:
la culture et l'expérience cinématographique de Scorsese et de ses collaborateurs et les budgets faramineux des films concernés - l'attention des nombreux executives qui ne laisseraient pas passer ces défauts si visibles si ce n'était pas un choix délibéré du metteur en scène - empêchent de croire à cette interprétation.
la culture et l'expérience cinématographique de Scorsese et de ses collaborateurs et les budgets faramineux des films concernés - l'attention des nombreux executives qui ne laisseraient pas passer ces défauts si visibles si ce n'était pas un choix délibéré du metteur en scène - empêchent de croire à cette interprétation.
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Je pense pas, pas mal de grands cinéastes font des erreurs techniques, je vois pas pourquoi Scorsese y échapperai...
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
A mon avis, précisément parce qu'il s'agit de montage et pas de tournage. Je n'ai jamais assisté à un travail de montage autrement que dans des docus sur différents réalisateurs, mais c'est un travail méticuleux et qui se pratique généralement à plusieurs, avec des vérifications. Donc, la faute d'inattention devient quand même peu probable sur un film où le montage est aussi travaillé.Jericho a écrit :Je pense pas, pas mal de grands cinéastes font des erreurs techniques, je vois pas pourquoi Scorsese y échapperai...
J'avoue être un peu surpris par ces réactions sur le montage du film, comme s'il y avait une doxa du montage, ce qui peut se comprendre pour des débutants ou des gens qui doivent monter très vite, mais pas pour quelqu'un qui est en pleine posession de ses moyens. Il me semble évident que tout est volontaire dans ce film
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Et les nombreux faux-raccords dans un film à petit budget comme Gladiator (certains carrément grossiers, tel le le mec en jeans qui apparaît derrière un cheval au début du film), là aussi tu penses qu'ils ont été faits sciemment ?afaparis a écrit :Je ne voudrais pas être péremptoire mais penser qu'il y a des faux-raccords dans un film de Scorsese par négligence ou maladresse c'est juste se mettre profondément un doigt dans l'œil:
la culture et l'expérience cinématographique de Scorsese et de ses collaborateurs et les budgets faramineux des films concernés - l'attention des nombreux executives qui ne laisseraient pas passer ces défauts si visibles si ce n'était pas un choix délibéré du metteur en scène - empêchent de croire à cette interprétation.
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Mais l'exemple de Gladiator (que je ne connaissais pas, tiens ! ) n'est pas un exemple de faux raccord !! Bon sang de bon soir, c'est vous qui confondez tout ou c'est moi ! Pour le Ridley Scott, c'est une erreur de tournage, ce mec n'avait rien à faire dans le champ de la caméra. C'est la faute de l'assistant réa, là, pas une erreur de raccord entre deux plans.Ratatouille a écrit :Et les nombreux faux-raccords dans un film à petit budget comme Gladiator (certains carrément grossiers, tel le le mec en jeans qui apparaît derrière un cheval au début du film), là aussi tu penses qu'ils ont été faits sciemment ?afaparis a écrit :Je ne voudrais pas être péremptoire mais penser qu'il y a des faux-raccords dans un film de Scorsese par négligence ou maladresse c'est juste se mettre profondément un doigt dans l'œil:
la culture et l'expérience cinématographique de Scorsese et de ses collaborateurs et les budgets faramineux des films concernés - l'attention des nombreux executives qui ne laisseraient pas passer ces défauts si visibles si ce n'était pas un choix délibéré du metteur en scène - empêchent de croire à cette interprétation.
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
L'exemple de Gladiator que tu cites n'est pas un faux raccord, dans le sens où ce n'est pas une erreur apparue au montage à proprement parler. C'est en partie la dissociation entre montage et tournage que fait Phnom&Penh.
Je trouve pour ma part le post d'afaparis un peu trop définitif puisqu'il y a des faux raccords qui "n'apportent rien" dans des films de cinéastes réputés extrêmement pointilleux (les scènes de restaurant dans certains Mann, par exemple). Mais pour le film de Scorsese, ici, je vois ce qu'il veut dire ; sans être aussi péremptoire, il me semble en effet que dans Shutter island, certains d'entre eux font office d'indices disséminés dans le film, que le spectateur va ramasser ou pas selon l'acuité de son regard ; le film peut-être plaisant sans les remarquer, mais ils appuient le propos du film.
ed-it : ah tiens, quelqu'un d'autre a répondu...
Je trouve pour ma part le post d'afaparis un peu trop définitif puisqu'il y a des faux raccords qui "n'apportent rien" dans des films de cinéastes réputés extrêmement pointilleux (les scènes de restaurant dans certains Mann, par exemple). Mais pour le film de Scorsese, ici, je vois ce qu'il veut dire ; sans être aussi péremptoire, il me semble en effet que dans Shutter island, certains d'entre eux font office d'indices disséminés dans le film, que le spectateur va ramasser ou pas selon l'acuité de son regard ; le film peut-être plaisant sans les remarquer, mais ils appuient le propos du film.
ed-it : ah tiens, quelqu'un d'autre a répondu...
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Re: Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
Effectivement, dans Gladiator, il ne s'agit pas d'un faux-raccord. Mais ça reste une erreur tellement grossière, qu'elle aurait pu facilement être vue par un bon nombre de personnes ayant bossé sur le film (réal, monteur, producteurs et j'en passe).
Pourtant, cette erreur est restée sur la copie finale. Donc je m'interroge : simple erreur, ou volonté de la part du réalisateur de nous dire quelque chose à propos de ce mystérieux homme en jeans ?
Pourtant, cette erreur est restée sur la copie finale. Donc je m'interroge : simple erreur, ou volonté de la part du réalisateur de nous dire quelque chose à propos de ce mystérieux homme en jeans ?