La Loi du silence (Alfred Hitchcock, 1953)
Étrange Hitchcock que celui-là. L'histoire policière, très originale, est pleine de promesses dès la superbe introduction (peut-être une des meilleures que le gros Alfred ait tournée), mais Hitchcock déjoue, d'une certaine manière, les attentes des spectateurs qui s'imaginent déjà de mémorables séquences de suspense comme le Maître sait si bien les faire, en privilégiant un rythme délicat et contemplatif qui fait la part belle aux émotions et aux dilemmes des personnages principaux (et de ce côté, c'est une indéniable réussite). Ce qu'on perd en suspense hitchcockien pur, on le gagne en profondeur émotionnelle, en romantisme. Techniquement,
I Confess est une nouvelle démonstration de la virtuosité d'Hitchcock, qui soigne sa réalisation dans un noir et blanc somptueux mettant en valeur architectures et interprètes (magnifiques Montgomery Clift et Anne Baxter). Pas de séquence d'anthologie à la
Psychose ou
La Mort aux trousses, mais un sentiment général qui trotte durablement dans l'esprit, un sentiment de plénitude, de force tranquille - c'est assez dur à exprimer, en fait. Deux reproches, cependant. Le premier tient dans le flash-back raconté par Anne Baxter, relativement lourd et longuet. Le second tient dans la conclusion, très abrupte quoique logique. Malgré ces deux reproches, cet opus hitchcockien demeure un très grand cru qui démontre l'aisance d'Hitchcock à varier le traitement de ses histoires policières, un opus trop souvent oublié dans sa filmographie et qui ne doit être en rien éclipsé par les deux immenses films l'encadrant que sont
L'Inconnu du Nord-Express et
Le Crime était presque parfait.